08.522 Initiative parlementaire Exercice actif des droits politiques facilité pour les Suisses de l'étranger Rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 18 novembre 2010

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent rapport, nous vous soumettons le projet de modification de la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger, que nous transmettons simultanément au Conseil fédéral pour avis.

La commission propose d'adopter le projet d'acte ci-joint.

18 novembre 2010

Pour la commission: Le président, Yvan Perrin

2010-3006

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Condensé Aux termes du droit en vigueur, les Suisses de l'étranger qui entendent exercer leurs droits politiques doivent renouveler leur inscription au registre des électeurs tous les quatre ans. Ils peuvent le faire soit en se présentant personnellement auprès de la commune de vote, soit par écrit, éventuellement au moyen d'une carte préimprimée envoyée par la commune de vote. S'ils ne renouvellent pas leur inscription, ils sont biffés du registre des électeurs.

Le présent projet envisage une nouvelle possibilité pour le renouvellement des inscriptions: tout électeur domicilié à l'étranger qui participe à une votation ou à une élection prolonge automatiquement de quatre ans son inscription au registre des électeurs. Pour les communes de vote, la participation de l'électeur équivaudrait par conséquent au renouvellement de son inscription.

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Rapport 1

Genèse du projet

1.1

Initiative parlementaire 08.522 «Exercice actif des droits politiques facilité pour les Suisses de l'étranger»

Le 19 décembre 2008, la conseillère nationale Thérèse Meyer (PDC, FR) a déposé une initiative parlementaire sous la forme d'un texte rédigé. Elle demande que la procédure de renouvellement de l'inscription auprès de la commune de vote soit simplifiée pour les électeurs domiciliés à l'étranger. Elle propose concrètement de compléter l'art. 5a, al. 2, de la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger de sorte que la participation à une votation ou à une élection ait valeur de renouvellement de l'inscription.

L'auteur de l'initiative relève que les Suisses de l'étranger qui exercent activement leurs droits politiques démontrent ainsi qu'ils veulent continuer à participer à la vie politique suisse. C'est pourquoi elle estime que cette participation active doit prolonger de quatre ans l'inscription au registre des électeurs.

1.2

Examen préalable de l'intiative parlementaire

Réunie le 7 mai 2009, la Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national a donné suite à l'initiative parlementaire par 22 voix contre 0, et 1 abstention. Les membres de la commission ont argué qu'il fallait simplifier au maximum l'exercice des droits politiques pour les électeurs de l'étranger. À leurs yeux, tout citoyen qui fait montre de son intérêt pour la politique de son pays en y participant activement ne devrait pas avoir à faire de démarches administratives; en prenant part à une votation ou à une élection, il indiquerait par conséquent à sa commune de vote qu'il entend continuer à participer à la vie politique de son pays et qu'il habite toujours à la même adresse.

Le 27 août 2009, la CIP du Conseil des Etats s'est ralliée à l'unanimité à la décision de son homologue du Conseil national, donnant ainsi son feu vert à l'élaboration du projet.

1.3

Décision préliminaire concernant la mise en oeuvre

L'ordonnance sur les droits politiques des Suisses de l'étranger prévoit déjà une procédure simple pour le renouvellement de l'inscription; c'est pourquoi il était judicieux de se demander s'il était vraiment nécessaire de modifier la loi ou si la pratique actuelle, prévue par l'ordonnance, ne remplissait pas déjà l'objectif visé par l'initiative. Une précision de l'ordonnance, allant dans le sens de l'initiative parlementaire, aurait aussi été envisageable. Réunie le 15 octobre 2009, la CIP du Conseil national s'est penchée sur cette question fondamentale. Par 13 voix contre 9, elle est arrivée à la conclusion que la mise en oeuvre du contenu de l'initiative représenterait un progrès par rapport à la pratique de la carte d'inscription, actuellement en vigueur. La loi devrait donc être modifiée en conséquence.

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1.4

Adoption du projet

Le 18 novembre 2010, la commission a apporouvé à l'unanimité le présent projet d'acte à l'intention du Conseil national, qu'elle a transmis simultanément au Conseil fédéral pour avis.

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Rappel des faits

2.1

Droit en vigueur

L'art. 5a de la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (RS 161.5) prévoit que les électeurs domiciliés à l'étranger, s'ils entendent exercer leurs droits politiques, doivent en faire la demande à leur commune de vote par l'entremise d'une représentation suisse. En vertu de l'al. 2 du même article, ils sont biffés du registre des électeurs après quatre ans s'ils ne renouvellent pas leur inscription. Quant aux différentes possibilités de renouveler cette inscription, elles sont énoncées à l'art. 3 de l'ordonnance sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (RS 161.51). Les intéressés peuvent notamment renouveler leur inscription soit par écrit, soit en se présentant personnellement auprès de leur commune de vote. En 2002, un al. 1bis est venu compléter cet article afin de simplifier sensiblement la démarche: l'inscription peut aussi être renouvelée au moyen d'une carte préimprimée, que la commune de vote joint au moins une fois par an au matériel de vote.

Ainsi, les Suisses de l'étranger qui souhaitent renouveler leur inscription auprès de leur commune de vote en participant activement à une votation ou à une élection peuvent déjà le faire: il leur suffit de renvoyer, au moyen de l'enveloppe de transmission, la carte préimprimée qui leur a été adressée avec le matériel de vote, après l'avoir dûment signée.

Le renouvellement régulier de l'inscription permet de vérifier que les citoyens suisses domiciliés à l'étranger reçoivent le matériel de vote à la bonne adresse. La mobilité est en effet particulièrement élevée pour les Suisses de l'étranger et rien ne garantit que le matériel de vote non distribué soit systématiquement renvoyé à l'expéditeur depuis l'étranger; les registres des communes de vote risqueraient donc de comporter des données obsolètes.

2.2

Garantie du secret du vote

Si le renouvellement de l'inscription est lié à la participation à une votation ou à une élection, il faut éviter qu'il ne porte pas atteinte au secret du vote, droit garanti par la Constitution. Aux termes de l'art. 34, al. 2, de la Constitution, la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté sont protégées (cf. Nadja Braun, Stimmgeheimnis: eine rechtsvergleichende und rechtshistorische Untersuchung unter Einbezug des geltenden Rechts, Berne, 2006, p. 176 ss). L'art. 5, al. 7, de la loi fédérale sur les droits politiques (RS 161.1) garantit quant à lui la sauvegarde du secret du vote.

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La question essentielle est de savoir si la participation et l'abstention peuvent être considérées comme des informations entrant dans le champ d'application de la protection du secret du vote. Selon Cornel Borbély, le contrôle de la qualité d'électeur constitue certes une atteinte minime au secret du vote, mais il n'en demeure pas moins nécessaire (cf. Cornel Borbély, Der Grundsatz der geheimen Abstimmung unter besonderer Berücksichtigung des E-Voting, Berne, 2005, p. 69). Quant à Nadja Braun, elle considère cet éventuel élargissement du champ d'application de la protection du secret du vote comme disproportionné et inapproprié. Au final, il ne serait plus possible de voter en déposant son bulletin dans l'urne, puisque ce procédé permet de savoir d'emblée qui a pris part au scrutin et qui n'y a pas participé. Nadja Braun estime donc que le fait de participer ou non à une votation ou à une élection ne doit pas être une information qui relève directement de la protection du secret du vote, pour autant que le contenu du bulletin ne soit pas dévoilé en même temps. Elle concède toutefois que cette situation pourrait éventuellement se produire dans de très petites circonscriptions: si tous les bulletins de vote contiennent le même résultat et que l'on sait qui a voté, le secret du vote n'est plus garanti (cf. Braun, p. 183).

Cela dit, la problématique de la violation du secret du vote dans les petites communes se pose indépendamment du problème de l'inscription des électeurs domiciliés à l'étranger. Bien que tout le monde puisse observer les personnes qui entrent dans le bureau de vote, Cornel Borbély a sans doute raison de demander aux communes de ne pas publier la liste des citoyens ayant participé à un scrutin (cf. Borbély, p. 55).

Afin de prévenir tout abus, il faut éviter à tout prix que la carte d'électeur d'un citoyen domicilié à l'étranger ne soit conservée pour servir de justificatif pour le renouvellement de l'inscription. La commune n'a de toute façon pas besoin de conserver ces documents; il lui suffit en effet d'indiquer, à un endroit prévu à cet effet, que l'électeur a renouvelé son inscription.

3

Grandes lignes du projet

La présente proposition de modification de la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger vise à éviter aux Suisses de l'étranger qui témoignent leur intérêt pour la politique en prenant régulièrement part aux votations et aux élections de devoir renvoyer périodiquement leur carte d'inscription. La participation à un scrutin renouvellerait automatiquement l'inscription au registre des électeurs de la commune de vote.

Pour garantir le secret du vote dans tous les cas, il est essentiel que la commune de vote ne conserve à long terme ni les bulletins de vote, ni les cartes d'électeur des personnes qui ont participé au scrutin; il lui suffirait d'indiquer la date à laquelle elle a reçu les documents de vote de la personne concernée, date qui serait donc celle du renouvellement de l'inscription. Selon le droit en vigueur, les électeurs doivent joindre à leur bulletin de vote une carte d'inscription que la commune peut conserver. Si, conformément au présent projet, un électeur renouvelle désormais son inscription par la seule participation à un scrutin, sans joindre de carte d'inscription, la commune peut établir, dans son fichier, une carte avec le nom et l'adresse de l'électeur, ainsi que la date du renouvellement. Peu importe que cette carte soit signée ou non: en effet, en participant au vote, l'électeur renvoie également une carte d'électeur dûment signée. Il est de toute façon plus probable que nombre de communes enregistrent sous forme électronique les données relatives à la date 671

d'échéance de l'inscription. Dans ce cas, le fait que l'inscription se fasse au moyen d'une carte ou par le biais des documents de vote ne joue aucun rôle.

Le vote électronique n'en est encore qu'au stade expérimental. Le vote électronique est introduit par les cantons à titre expérimental sur autorisation du Conseil fédéral (art. 8a, al. 1, LDP). Pour obtenir l'autorisation du Conseil fédéral les cantons doivent en particulier garantir le contrôle de la qualité d'électeur, le secret du vote, le dépouillement de la totalité des suffrages et l'exclusion de tout risque d'abus (art. 8a, al. 2, LDP et art. 27a ss ODP). L'ordonnance prévoit que les données servant au contrôle de la qualité d'électeur ne doivent pas permettre d'établir l'identité du votant. Elles doivent être de nature à permettre à l'autorité compétente de contrôler qu'une personne ne vote qu'une seule fois (art. 27f, al. 4). L'ordonnance précise aussi que les applications liées au vote électronique doivent être clairement séparées des autres applications (art. 27g, al. 2). L'introduction de la facilitation proposée, selon laquelle une participation à un scrutin équivaut à un renouvellement de l'inscription, impliquerait notamment la modification de ces deux articles de l'ordonnance. Ainsi, la commission propose que les Suisses de l'étranger qui peuvent déjà voter par voie électronique puissent renouveler leur inscription par ce même biais. Afin que le secret du vote soit garanti, cette procédure devrait toutefois avoir lieu en deux étapes.

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Commentaire par article

4.1

Loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (RS 161.5)

Art. 5a, al. 3 (nouveau) L'art. 5a, al. 2, de la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger prévoit que les citoyens suisses domiciliés à l'étranger doivent renouveler tous les quatre ans leur inscription au registre des électeurs de leur commune de vote. L'al. 3 précise désormais que tout électeur qui participe à une votation ou à une élection renouvelle automatiquement son inscription, pour autant qu'il ne s'agisse pas d'un vote électronique. En vertu de la deuxième phrase de l'al. 3, les communes sont tenues de consigner, dans leurs dossiers papier ou leurs fichiers électroniques, que la personne qui a pris part à un scrutin a renouvelé son inscription. Cette procédure permet d'éviter aux communes de garder les documents de vote.

Naturellement, les citoyens pourront toujours renouveler leur inscription indépendamment de la participation à une votation: pour ce faire, il leur suffit d'écrire à leur commune de vote, conformément à l'art. 3, al. 1, de l'ordonnance sur les droits politiques des Suisses de l'étranger. Les communes peuvent également continuer à envoyer, avec le matériel de vote, des cartes d'inscription préimprimées. Les électeurs domiciliés à l'étranger n'ont alors qu'à compléter et à renvoyer ces cartes pour renouveler leur inscription.

Art. 5a, al. 4 (nouveau) Les Suisses de l'étranger pourront ainsi renouveler l'inscription par voie électronique: cette nouvelle possibilité devra être simple et accessible. Le but est de leur simplifier la tâche et de leur éviter la paperasse. Ils continueront à recevoir la carte 672

de renouvellement qui reste une solution possible parmi d'autres pour renouveler l'inscription. Le renouvellement électronique de l'inscription sera ouvert uniquement aux Suisses de l'étranger autorisés à voter électroniquement. Il ressemblera, autant que faire se peut, au renouvellement classique. Il faudra en particulier veiller à ce que les données destinées au renouvellement de l'inscription soient totalement distinctes et séparées de celles destinées au vote. Il devrait être possible pour un électeur disposant de données d'authentification non anonymes de renouveler son inscription indépendement de la participation à une votation.

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Conséquences

5.1

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

Le présent projet ne modifie guère les procédures actuelles; c'est pourquoi il n'engendre ni conséquences financières, ni effets sur le personnel.

5.2

Mise en oeuvre

Les communes de vote devront tout au plus apporter de légères modifications à un nombre limité de procédures.

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Bases légales

6.1

Constitutionnalité

En vertu de l'art. 40, al. 2, de la Constitution, la Confédération légifère sur les droits et les devoirs des Suisses et des Suissesses de l'étranger, notamment sur l'exercice des droits politiques au niveau fédéral.

6.2

Forme de l'acte

Conformément à l'art. 164, al. 1, let. a, de la Constitution, les dispositions fondamentales relatives à l'exercice des droits politiques doivent être édictées sous la forme d'une loi fédérale. L'art. 5a de la loi fédérale sur les droits politiques des Suisses de l'étranger constitue déjà une base légale pour l'inscription au registre des électeurs. En vertu de l'art. 22, al. 2, de la loi sur le Parlement (RS 171.10), l'Assemblée fédérale peut toutefois édicter sous la forme d'une loi d'autres dispositions qui fixent des règles de droit.

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