ad 10.054 Les autorités sous la pression de la crise financière et de la transmission de données clients d'UBS aux Etats-Unis Rapport du 30 mai 2010 des Commissions de gestion des Chambres fédérales Avis du Conseil fédéral du 13 octobre 2010

Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Conformément à l'art. 158 de la loi sur le Parlement (LParl; RS 171.10), nous prenons ci-dessous position sur le rapport du 30 mai 2010 des Commissions de gestion des Chambres fédérales concernant «Les autorités sous la pression de la crise financière et de la transmission de données clients d'UBS aux Etats-Unis».

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

13 octobre 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-2618

3263

Condensé En soumettant leur rapport du 30 mai 2010 concernant «Les autorités sous la pression de la crise financière et de la transmission de données clients d'UBS aux EtatsUnis», les Commissions de gestion des Chambres fédérales (CdG-E et CdG-N) ont transmis 19 recommandation au Conseil fédéral et déposé deux postulats et cinq motions.

Le présent avis revient sur le rapport précité et sur les recommandations, postulats et motions qu'il contient.

Le Conseil fédéral tient tout d'abord à remercier les CdG de leur solide analyse et reconnaît l'importance de la contribution qu'elles ont ainsi fournie à la clarification des événements. Il souligne que les membres du Conseil fédéral entretiennent des rapports de confiance réciproque et que la collaboration collégiale fonctionne. En donnant son avis, il entend compléter sur certains points l'analyse approfondie à laquelle les CdG ont procédé. Il partage dans une large mesure les objectifs formulés par celles-ci et se déclare prêt à reprendre la plupart de leurs recommandations.

Pour certaines d'entre elles, bien qu'il en partage les grandes orientations, le Conseil fédéral préconise d'autres mesures d'exécution.

Sur la base des recommandations des CdG, le Conseil fédéral va prendre ou a déjà pris des mesures, dont notamment celles qui suivent: ­

Il a chargé le DFF d'élaborer d'ici à la fin de 2010 un protocole d'accord tripartite (Memorandum of Understanding, MoU) avec la BNS et la FINMA (cf. commentaire des recommandations 1, 5 et 12). L'accord devra porter sur la formalisation et la documentation de l'organisation de crise, l'intégration du Conseil fédéral à l'organisation de crise, l'échange d'informations, la collaboration dans les domaines de la stabilité financière et de la régulation des marchés financiers, ainsi que sur la coordination des contacts internationaux (entre autres en ce qui concerne l'exercice par la Suisse de sa qualité de membre des organes financiers internationaux).

­

Le Conseil fédéral a chargé le DFF de lui soumettre d'ici à la fin de 2010 un plan directeur qui précisera quand et comment le chef du DFF devra associer le Conseil fédéral à la gestion d'une crise financière durant sa «phase rouge» (cf. commentaire de la recommandation 1).

­

Il a chargé la ChF d'élaborer et de lui soumettre d'ici à la fin de 2010, en y associant les départements concernés (notamment le DDPS et le DFF), un plan directeur pour une gestion politique globale des crises par la Confédération (cf. commentaire de la recommandation 1).

­

Le Conseil fédéral est d'avis que des adaptations de la législation sont nécessaires pour renforcer la capacité de résistance du système financier face à des crises; la régulation matérielle des marchés financiers, notamment en ce qui concerne la régulation des moyens propres et des liquidités, les prescriptions concernant les rémunérations et la solution du problème des entreprises trop grandes pour être mises en faillite («too big to fail»),

3264

occupe ici le premier rang. Le Conseil fédéral soumettra des projets à cet effet au Parlement (cf. commentaire de la recommandation 2).

­

Comme le demandent les CdG, il a chargé le DFF de faire entreprendre par des experts indépendants l'évaluation des mesures prises par la FINMA en vue d'améliorer ses instruments de surveillance et ses pratiques (cf. commentaire de la recommandation 3).

­

A l'avenir, il veillera plus strictement encore à ne nommer au conseil d'administration de la FINMA et au Conseil de banque de la BNS que des personnalités indépendantes et dotées d'esprit critique (cf. commentaire de la recommandation 4).

­

Il a invité la FINMA à lui remettre d'ici à la fin du mois d'avril 2011 un rapport sur ses processus de travail et son organisation (cf. commentaire de la recommandation 6).

­

Il a institué un groupe d'experts dédié au problème des banques trop grandes pour être mises en faillite (cf. commentaire de la recommandation 7).

­

Il a chargé la ChF d'élaborer un plan directeur pour l'optimisation du pilotage politique par le Conseil fédéral (notamment par la détection précoce en tant que processus continu) et de lui soumettre ce plan d'ici fin 2010 (cf. commentaire de la recommandation 8).

­

Au cours du premier trimestre 2011, le DFF soumettra au Conseil fédéral une proposition qui contiendra une présentation comparative des diverses options permettant de renforcer la gestion axée sur les résultats au sein de l'administration fédérale (cf. commentaire de la recommandation 8).

Suivant l'option retenue, le pilotage politique devra être adapté en conséquence.

­

Une évaluation globale de la situation, élaborée par le Service de renseignement de la Confédération (SRC), entré en activité le 1er janvier 2010, fournit au Conseil fédéral un instrument permettant la détection précoce des risques potentiels qui pourraient directement ou indirectement affecter la Suisse.

­

Pour améliorer le pilotage politique stratégique, le Conseil fédéral a décidé le 18 septembre 2009 déjà de réorganiser l'Etat-major de prospective de l'administration fédérale (cf. commentaire de la recommandation 8).

­

Il se propose de procéder à un échange de vues avec le conseil d'administration de la FINMA plus d'une fois par an si nécessaire et estime judicieux que des entretiens soient également organisés en dehors des rencontres institutionnalisées régulières entre la délégation du Conseil fédéral à la politique économique générale et le président du conseil d'administration de la FINMA, sur demande de ce dernier (cf. commentaire de la motion 1).

­

Le rôle des sociétés d'audit («entreprises de révision», dans le rapport des CdG) chargées de la surveillance des grandes banques doit être réexaminé (cf. commentaire du postulat 1).

3265

­

A l'occasion de leur prochaine révision, les ordonnances sur l'organisation des départements seront complétées par une nouvelle disposition dont la teneur sera par exemple la suivante: «Il [le secrétariat général] se saisit des affaires du département, les planifie, les coordonne et les contrôle; il assure le suivi, en particulier, des affaires interdépartementales importantes.» (cf.

commentaire de la recommandation 13).

­

Le Conseil fédéral étudie comment garantir que les organes chargés du contrôle préventif de la conformité au droit soient consultés à temps à propos des affaires qui soulèvent des questions juridiques importantes et litigieuses (cf. commentaire de la recommandation 14).

­

Il a chargé la ChF d'étudier comment les dispositifs de décision et les relevés des délibérations du Conseil fédéral peuvent être développés et étoffés en tant qu'instruments de direction. D'ici à la fin de 2010 au plus tard, il entend prendre une décision au sujet d'un plan directeur correspondant présenté par la ChF (cf. commentaire de la motion 2 et de la recommandation 15).

­

Dans le cadre du message additionnel sur la réforme du gouvernement, il soumettra des propositions visant à consolider le système des suppléances au sein du Conseil fédéral dans la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA) (cf. commentaire de la recommandation 16).

­

Dans ce même message, il soumettra des propositions visant à préciser dans la LOGA les dispositions applicables aux délégations du Conseil fédéral et à l'exercice de la responsabilité collective du Conseil fédéral (cf. commentaire des motions 3 et 4).

­

Le Conseil fédéral a chargé la ChF d'élaborer un plan directeur relatif à l'optimisation des contrôles de gestion en vigueur. Dans ce domaine également, il entend prendre avant la fin de 2010 une décision concernant une proposition correspondante de la ChF (cf. commentaire de la recommandation 18).

­

L'Office fédéral de la justice se penchera sur les questions soulevées dans le rapport des CdG au sujet de l'art. 271 CP et le Secrétariat d'Etat aux questions financière internationales sur la problématique du Qualified Intermediary Agreement (QIA) (cf. commentaire du postulat 2).

­

Le Conseil fédéral étudiera si ­ et dans l'affirmative, dans quelle mesure ­ de nouvelles prescriptions légales doivent être introduites pour satisfaire à la demande publique d'une transparence accrue en matière de processus et de responsabilités internes à la banque (cf. commentaire de la recommandation 19).

Les recommandations 10, 11 et 17 ne relèvent pas du domaine de compétences du Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral ne rejette que deux interventions parlementaires, à savoir les motions 2 et 5.

3266

En ce qui concerne la motion 2 (obligation intégrale de la forme écrite pour les délibérations du Conseil fédéral), le Conseil fédéral est prêt à poursuivre le développement et la consolidation du système actuel qui régit les dispositifs de décision et le relevé des discussions du Conseil fédéral, pour combler d'éventuelles lacunes.

Il rejette par contre l'établissement de procès-verbaux exhaustifs, et ce pour garantir le respect du principe de la collégialité. La liberté des débats collégiaux facilite l'obtention d'un consensus. La transcription littérale des débats entraverait au contraire le libre échange des opinions au sein du Conseil fédéral.

En ce qui concerne la motion 5, le Conseil fédéral estime que la révision demandée des art. 164 et 165 CP (étendre leur champ d'application aux grandes entreprises qui, en raison de leur importance systémique pour l'économie du pays et la stabilité financière, doivent être préservées de la faillite par des interventions de l'Etat) ne conduirait pas au but recherché: ­

la modification demandée par la motion abolirait la restriction de la punissabilité que le législateur a voulu imposer par le biais de conditions objectives de punissabilité;

­

elle ne permettrait plus de protéger les mêmes biens juridiques que le droit en vigueur;

­

s'agissant des grandes entreprises ayant une importance systémique, on ne saurait pas avec certitude quels biens juridiques doivent en définitive être protégés;

­

la modification demandée aurait pour effet de créer deux poids, deux mesures: les collaborateurs de grandes entreprises n'ayant pas une importance systémique seraient soumis à des conditions de punissabilité plus sévères que ceux des grandes entreprises ayant une importance systémique;

­

il faudrait définir précisément ce qui caractérise ces dernières.

Le présent avis du Conseil fédéral se subdivise en deux parties: un premier chapitre (ch. 2.1 à 2.3) commente les deux enquêtes des CdG à titre d'introduction générale.

Cette introduction est suivie d'un second chapitre qui expose l'avis du Conseil fédéral concernant les recommandations, postulats et motions individuels, dans le même ordre que celui dans lequel ils sont abordés dans le rapport des CdG (ch. 2.4 à 2.27).

3267

Table des matières Condensé

3264

Liste des abréviations

3269

1 Contexte

3270

2 Avis du Conseil fédéral 2.1 Considérations générales 2.2 Considérations concernant les recommandations, les postulats et les motions

3270 3270

3268

3274

Liste des sigles AFC AFF ATF BNS CCF CdG CdG-N CdG-E CER-N CFB ChF CO CP Cst.

DDPS DFAE DFF DFJP DOJ FINMA IRS LBN LFINMA OCDE OFJ QI QIA RS SEC SFI SRC

Administration fédérale des contributions Administration fédérale des finances Recueil officiel des arrêts du Tribunal fédéral Banque nationale suisse Contrôle administratif du Conseil fédéral Commissions de gestion du Conseil national et du Conseil des Etats Commission de gestion du Conseil national Commission de gestion du Conseil des Etats Commission de l'économie et des redevances du Conseil national Commission fédérale des banques Chancellerie fédérale Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse (Livre cinquième: Droit des obligations) (RS 220) Code pénal (RS 311.0) Constitution (RS 101) Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports Département fédéral des affaires étrangères Département fédéral des finances Département fédéral de justice et police Department of Justice Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers Internal Revenue Service Loi fédérale du 3 octobre 2003 sur la Banque nationale suisse (Loi sur la Banque nationale, RS 951.11) Loi du 22 juin 2007 sur l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Loi sur la surveillance des marchés financiers, RS 956.1) Organisation de coopération et de développement économiques Office fédéral de la justice Qualified Intermediary Qualified Intermediary Agreement Recueil systématique U.S. Securities and Exchange Commission Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales Service de renseignement de la Confédération

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Avis 1

Contexte

Les investigations menées de mars 2009 à fin mai 2010 par les CdG des Chambres fédérales se rapportent à deux mesures prises par la Confédération suisse au cours du dernier trimestre 2008 et du premier trimestre 2009: 1.

Le 15 octobre 2008, le Conseil fédéral et la Banque nationale suisse (BNS) ont pris des mesures concertées afin d'écarter des dangers qui menaçaient l'existence même d'UBS et de prévenir un désastre pour les collaborateurs et les clients de la banque, l'économie suisse et la stabilité financière du pays.

Ce jour-là, le Conseil fédéral a décidé de venir en aide à UBS en souscrivant un emprunt à conversion obligatoire d'un montant de 6 milliards de francs.

Simultanément, la BNS s'est engagée à reprendre à UBS ses actifs «toxiques» pour une valeur maximale de 60 milliards de dollars.

2.

Le 18 février 2009, l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) a décidé la transmission de données clients aux autorités américaines par UBS. Avant d'en arriver là, plusieurs autorités suisses (la Commission fédérale des banques/FINMA et le Département fédéral des finances, en particulier) avaient multiplié leurs efforts pour trouver une autre solution au problème, notamment par le déroulement régulier des procédures d'entraide administrative pendantes.

Les CdG ne se sont penchées ni sur l'évaluation du comportement des responsables d'UBS à l'occasion des deux événements placés sous investigation, ni sur les procédures mises en oeuvre par les autorités américaines dans le cadre de l'entraide administrative, du fait que ces deux points ne relèvent pas des compétences de la haute surveillance parlementaire. Les CdG ont néanmoins demandé des éclaircissements portant sur le rôle joué par UBS et sur les processus internes de celle-ci (recommandation 19).

Par lettre du 30 mai 2010, les CdG des Chambres fédérales ont transmis leur rapport au Conseil fédéral, en l'invitant à donner son avis sur ce rapport avant la fin de 2010.

2

Avis du Conseil fédéral

2.1

Considérations générales

Le Conseil fédéral remercie les CdG des Chambres fédérales de leur solide analyse des deux événements liés à UBS. A ses yeux, les 19 recommandations, les deux postulats et les cinq motions qui ont résulté des deux enquêtes menées par les CdG fournissent des points de repère utiles pour renforcer la collaboration au sein du Conseil fédéral, mais aussi entre les unités de l'administration fédérale et les institutions du secteur financier. Vu l'importance qu'il accorde aux thèmes abordés par les investigations des CdG, le Conseil fédéral s'est employé à traiter aussi rapidement que possible les demandes qui y sont présentées et à prendre sans délai des mesures concrètes.

3270

Les rapports de confiance entre les membres du Conseil fédéral Le Conseil fédéral tient tout particulièrement à rectifier l'impression qui émane du rapport des CdG en ce qui concerne le climat qui règnerait en son sein. Il rejette les conclusions des CdG, d'après lesquelles la collaboration entre les membres du Conseil fédéral serait affaiblie par un manque de confiance réciproque.

En outre, et contrairement aux assertions qui figurent dans le rapport des CdG, il n'est pas vrai que la procédure écrite de co-rapport ne soit utilisée qu'avec réticence, sous prétexte qu'elle pourrait être comprise comme une attaque personnelle contre un autre membre du Conseil fédéral. Les co-rapports sont l'instrument usuel pour présenter des propositions écrites relatives aux affaires relevant d'un autre département. Un grand nombre en est rédigé avant chaque séance du Conseil fédéral et ils servent exclusivement à préparer matériellement les décisions. La supposition des CdG d'après lesquelles ils seraient compris par les membres du Conseil fédéral comme l'expression d'un mouvement d'humeur personnel ne correspond pas à la réalité. Les délibérations lors des séances hebdomadaires du Conseil fédéral se déroulent par ailleurs dans une ambiance de travail constructive, fondée sur l'objectivité. Le même constat s'applique aux discussions au sein des délégations du Conseil fédéral.

Les séances du Conseil fédéral sont organisées avec efficacité, fortement structurées et conduites avec rigueur. Tous les membres du Conseil fédéral interviennent de manière ciblée dans les nombreuses affaires dont ils ont la charge, notamment par le biais de la procédure préliminaire, essentiellement sous la forme écrite (procédure de co-rapport), et garantissent ainsi que les décisions du collège gouvernemental se prennent de manière aussi consensuelle que possible.

Les instruments à disposition, notamment celui du co-rapport et l'instrument de conduite que représentent les décisions du Conseil fédéral, sont mis en oeuvre constamment et à bon escient. Le nombre de co-rapports durant la période qui va du 1er janvier 2008 au 25 août 2010 en atteste: sur un total de 3239 affaires, 1718 procédures de co-rapports ont été engagées. Il faut relever de plus que le nombre de co-rapports relatifs à des affaires confidentielles ­ majoritaires dans
le contexte des deux mesures soumises à investigation ­ a été proportionnellement plus élevé (219 co-rapports pour 339 affaires) que celui des co-rapports relatifs aux affaires non confidentielles (1499 pour 2900 affaires).

Il faut reconnaître toutefois que les instruments de gestion permettant aujourd'hui de garantir le reclassement en temps utile d'une affaire départementale en affaire du Conseil fédéral sont peu nombreux. Le Conseil fédéral fait ici siens les objectifs des CdG, pour lesquelles la détection précoce par le Conseil fédéral doit être améliorée, ce qui bien évidemment ne libère pas les départements de la nécessité de maintenir leur propre dispositif de gestion des crises.

Une importance particulière s'attache aux répercussions externes que la divulgation d'une information pourrait provoquer: son impact sur les marchés financiers, par exemple. Pour chaque cas d'espèce, les réactions doivent être évaluées pour déterminer si une divulgation est bénéfique ou non. Dans le domaine couvert par les investigations menées par les CdG, à savoir le comportement des autorités suisses face à la crise financière, cette pesée des intérêts a exercé une influence déterminante sur les actions du chef du département compétent et sur celles du Conseil fédéral.

3271

Comportement des autorités suisses face à la crise financière (enquête I des CdG) ­ Potentiel d'optimisation L'élucidation des événements qui ont entouré la crise financière et notamment le comportement du Conseil fédéral, de certains chefs de département, de la Commission fédérale des banques (CFB) puis de la FINMA, ainsi que de la BNS, a mis en évidence plusieurs faits positifs: le sauvetage direct de la grande banque UBS a été un succès, largement reconnu à l'échelon national et international. Les CdG partagent cette opinion avec des organisations internationales comme le FMI et l'OCDE, de même qu'avec le Conseil fédéral et des experts mandatés par les CdG ellesmêmes. Les mesures de sauvetage ont été jugées efficaces, adaptées à la situation et financièrement supportables, et le calendrier de leur mise en oeuvre approprié: un jugement auquel les CdG souscrivent elles aussi. Vu l'influence positive que ces mesures ont exercé sur la stabilité financière et économique du pays, elles ont été trouvées proportionnées. Comme les CdG l'ont constaté à juste titre, au moment où la crise financière a éclaté, les autorités suisses disposaient d'une organisation de crise structurée et de plans directeurs relatifs à des scénarios de crise impliquant des grandes banques. Il convient de retenir en outre que la Confédération a réussi à récupérer intégralement son investissement primitif dans l'emprunt à conversion obligatoire, et même à réaliser au passage un gain net d'environ 1,2 milliard de francs, ce qui correspond à un rendement annuel de plus de 30 % pour une durée d'investissement d'environ huit mois.

Aux yeux du Conseil fédéral, l'enquête I des CdG n'est pas complète. Elle laisse par exemple de côté le fait qu'en août/septembre 2008, après une première recapitalisation d'UBS par des investisseurs privés en avril 2008, une deuxième recapitalisation, toujours par des investisseurs privés, était encore prévue. La perspective de cette injection de capitaux par des investisseurs institutionnels étrangers a constitué un paramètre clé de l'évaluation de la situation faite par la BNS et les autorités fédérales, vu que les intentions d'achat manifestées par les investisseurs en question figuraient comme facteur de réduction des risques dans l'évaluation en cours d'UBS.

A posteriori, un potentiel d'optimisation
n'en est pas moins décelable et le Conseil fédéral est reconnaissant aux CdG des propositions qu'elles émettent dans leur rapport. Ces propositions concernent notamment l'association du Conseil fédéral à la détection et à l'alarme précoces ainsi qu'à la gestion des crises, dans une perspective conceptuelle aussi bien qu'opérationnelle. En d'autres termes: le système de gestion des crises a certes fonctionné, mais des lacunes ­ qu'il s'agit maintenant de combler ­ sont apparues au niveau de la participation conjointe des membres du Conseil fédéral.

Comportement des autorités en relation avec la transmission des données de clients d'UBS aux Etats-Unis (enquête II des CdG) Bien que, pour des raisons compréhensibles, la deuxième enquête des CdG soit présentée indépendamment de la première, le Conseil fédéral voit un lien entre les deux. Le comportement des autorités en relation avec la transmission aux Etats-Unis de données clients d'UBS doit être placé dans le contexte de la décision prise par le Conseil fédéral le 15 octobre 2008 de soutenir UBS au moyen d'une participation de 6 milliards de francs, à convertir obligatoirement en actions.

3272

Aux yeux du Conseil fédéral, la deuxième enquête des CdG est elle aussi incomplète. Aucune mention n'y est faite, par exemple, d'une procédure engagée par les autorités judiciaires américaines, qui sont parvenues à la conclusion qu'UBS ne pouvait pas être poursuivie en justice pour son comportement aux Etats-Unis.

L'enquête II est par ailleurs entachée de quelques contradictions. Bien que les CdG constatent à plusieurs reprises dans leur rapport que le Conseil fédéral a abordé la thématique de la transmission de données clients, elles parviennent à la conclusion que le Conseil fédéral ne s'est penché sur la question pour la première fois qu'en octobre/novembre 2008. Elles passent ainsi sous silence leur propre constat selon lequel le chef du DFF a informé par oral le collège gouvernemental à l'occasion de plusieurs séances du Conseil fédéral, du printemps à l'automne 2008. Est également omis le fait que le Conseil fédéral a précisé, dans son avis du 26 mai 2010 sur le projet de rapport des CdG, que le collège gouvernemental, suite aux informations reçues de la part du chef du DFF, avait émis des conseils portant sur la suite à donner aux opérations et notamment sur l'accélération des procédures d'entraide administrative. Dans leurs conclusions, les CdG ne font en outre pas suffisamment cas de leur propre exposé de la situation, d'où il ressort que le département compétent (en l'occurrence le DFF) a immédiatement réagi à la divulgation des procédures engagées par les autorités américaines en désignant un groupe de travail interdépartemental, veillant ainsi à inclure rapidement les services fédéraux compétents.

Les CdG critiquent la passivité du DFF et du Conseil fédéral dans son ensemble.

Elles font toutefois l'impasse sur les discussions qui, sur la base des informations dont disposait le DFAE, ont eu lieu, tant au sein de la délégation du Conseil fédéral pour les affaires fiscales internationales (DFF, DFAE, DFJP) qu'au sein du Conseil fédéral, en vue d'établir rapidement et de manière coordonnée une approche stratégique. De même, les CdG se contentent de faire allusion aux options qui étaient à la disposition du Conseil fédéral à l'automne 2008 comme solutions de rechange à l'entraide administrative. Ainsi, le rapport n'aborde pas la question de savoir si les alternatives envisageables étaient
réalistes et faisables (par ex. intervention précoce au niveau politique avec offre d'alignement de la Convention de double imposition sur le standard de l'OCDE). De l'avis du Conseil fédéral, une telle analyse est incomplète.

Par ailleurs, le Conseil fédéral ne partage que sous réserve les conclusions des CdG, pour lesquelles la planification et la mise en oeuvre des mesures visant à traiter les demandes d'entraide administrative ont été trop lentes. Les autorités américaines ont commencé par déposer auprès de l'Office fédéral de la justice (OFJ), le 10 juin 2008, une demande d'entraide judiciaire. Une délégation suisse, conduite par l'OFJ, s'est rendue à Washington le 20 juin 2008 et a recommandé aux autorités américaines de déposer une demande d'entraide administrative, en arguant du fait que la procédure d'entraide judiciaire est plus lente et que les renseignements obtenus ne peuvent pas être exploités par les Etats-Unis pour déterminer l'impôt dû, en vertu du principe de la spécialité. Ce n'est que le 16 juillet 2008 que la demande d'entraide administrative formulée par l'Internal Revenue Service (IRS) est parvenue à l'Administration fédérale des contributions (AFC). Le 29 juillet 2008, l'AFC a sommé UBS de lui présenter avant la fin de 2008 les documents clients relatifs aux cas pour lesquels l'état de fait exposé dans la demande d'entraide administrative est vérifié. A la demande de la banque, l'AFC a confirmé ses exigences à l'égard d'UBS le 7 août 2008, sous forme d'une demande de production de pièces. Une organisation de projet a ensuite été mise sur pied et les spécialistes correspondants 3273

recrutés pour traiter la demande d'entraide administrative. Le traitement de cette demande s'est révélé bien plus laborieux et complexe que celui de toutes les demandes d'entraide administrative traitées précédemment. A posteriori, il apparaît que l'organisation de projet aurait dû être mise sur pied plus rapidement. Toutefois, il n'est pas certain que cette accélération aurait permis d'éviter la détérioration de la situation au cours de l'hiver 2008/2009. La procédure suisse d'entraide administrative prévoit en effet une protection juridique très développée pour les personnes concernées.

2.2

Considérations concernant les recommandations, les postulats et les motions

Ad recommandation 1 Recommandation 1 Les CdG invitent le Conseil fédéral à définir son rôle et son implication dans toute organisation de crise. Pour ce faire, le Conseil fédéral définit à partir de quand et comment il doit être informé et impliqué activement dans la gestion et le suivi d'une crise.

Dans leur rapport, les CdG parviennent à la conclusion que les autorités suisses disposaient d'une organisation de crise structurée, de connaissances approfondies dans le domaine des scénarios de crise pour les grandes banques et d'une certaine expérience en matière de collaboration, lorsque la crise financière s'est manifestée et que la question d'un soutien étatique à UBS s'est posée.

Les autorités étaient conscientes des risques croissants liés à la taille des deux plus grands établissements bancaires suisses, à la complexité de leurs activités et à l'importance de la place financière pour l'économie nationale. Les CdG relèvent que les autorités helvétiques ont décelé les risques et pris des mesures préliminaires.

Bien qu'aucun plan opérationnel concret ne fût prévu, les structures mises sur pied ont constitué un cadre permettant une collaboration efficace et l'élaboration du train de mesures destiné à renforcer le système financier. Alors que l'organisation de crise précisait le moment où, lors d'une implication probable de la Confédération, le DFF prendrait la direction des opérations, les CdG constatent qu'elle ne contenait aucune précision sur le rôle du Conseil fédéral et sur la manière de l'associer à la gestion de la crise. Pour autant que les CdG aient pu le constater, le Conseil fédéral n'a, à aucun moment, mené une réflexion sur son rôle ni sur la nécessité ou l'opportunité d'être associé plus tôt aux décisions relatives à d'éventuelles mesures. Pour les CdG, il est cependant primordial que le Conseil fédéral soit impliqué dans une telle structure. Elles ne comprennent pas que le Conseil fédéral n'ait pas été intégré dans le dispositif d'organisation de crise et que, finalement, il se soit simplement borné à décider de mesures élaborées par d'autres.

Le Conseil fédéral souhaite mettre en oeuvre la recommandation 1 sur deux plans: celui de la gestion des crises financières d'une part et celui de la gestion politique globale des crises d'autre part.

3274

Gestion des crises financières Le Conseil fédéral partage l'avis des CdG: si la Suisse a réussi à maîtriser la crise financière de manière satisfaisante en comparaison internationale, c'est parce qu'elle disposait notamment d'une organisation de crise structurée et que des réflexions approfondies avaient déjà été menées dans le domaine (élaboration de scénarios de crise). Le Conseil fédéral estime néanmoins qu'il faudra régler de manière plus précise la collaboration entre le DFF, la BNS et la FINMA, de même que l'association du Conseil fédéral aux travaux de l'organisation de crise. En vue de la mise en oeuvre des recommandations 1 et 5, qui sont étroitement liées, le Conseil fédéral a chargé le DFF d'élaborer un protocole d'accord tripartite (Memorandum of Understanding, MoU) avec la BNS et la FINMA d'ici à la fin de 2010. Celui-ci devra porter sur la formalisation et la documentation de l'organisation de crise, l'intégration du Conseil fédéral à l'organisation de crise, l'échange d'informations et la collaboration dans les domaines de la stabilité financière et de la régulation des marchés financiers, ainsi que sur la coordination des contacts que la Suisse entretient à l'échelle internationale (notamment en ce qui concerne l'influence qu'elle peut exercer au sein des organes financiers internationaux dont elle est membre). Par ailleurs, il a chargé le DFF de lui soumettre d'ici à la fin de 2010 une stratégie concernant la forme sous laquelle le Conseil fédéral doit être associé à temps par le chef du DFF à la gestion d'une crise financière durant sa phase aiguë.

Gestion politique globale des crises Il est important que le Conseil fédéral soit associé à la gestion de tout type de crise, et non seulement à la gestion des crises financières. Depuis le 1er janvier 2010, le Conseil fédéral dispose d'un nouvel organe, le Service de renseignement de la Confédération (SRC), qui a en particulier pour tâche de détecter de façon précoce les menaces qui pourraient porter atteinte directement ou indirectement aux intérêts de la Suisse, notamment sur les plans de sa sécurité et de sa capacité d'action. Le Conseil fédéral a par ailleurs chargé la ChF d'élaborer une stratégie fédérale de gestion des crises d'ici à la fin de 2010, en y associant les départements concernés (notamment le DDPS et le DFF). Le Conseil fédéral décidera alors de la répartition des tâches et des ressources.

Cette stratégie englobera les points suivants en particulier: ­

collaboration interdépartementale lorsqu'une crise touche plus d'un département,

­

soutien des départements par la ChF au niveau organisationnel en cas de crise (soutien par une cellule d'intervention créée à cet effet ou par un groupe de travail interdépartemental),

­

mise en place d'un système global d'alerte précoce et analyse de la situation,

­

mise en place d'une plateforme d'information.

La stratégie se basera sur les mesures sectorielles d'alerte précoce prises dans les départements et sur les travaux suivants notamment: ­

travaux de l'Etat-major de prospective visant à déterminer à intervalles réguliers les défis qui se posent à long terme (cf. commentaire de la recommandation 8),

3275

­

le projet «Risques Suisse» élaboré par l'Office fédéral de la protection de la population,

­

la stratégie fédérale de gestion des risques élaborée par le DFF.

Ad recommandation 2 Recommandation 2 Les CdG invitent le Conseil fédéral à évaluer et à proposer ­ d'entente avec la FINMA et la BNS ­ les changements législatifs adéquats permettant d'une part de fixer des objectifs pertinents et précis aux autorités chargées de la surveillance des marchés financiers ou de la stabilité financière de la Suisse et d'autre part, de leur confier les compétences nécessaires à l'atteinte des objectifs.

Les CdG parviennent à la conclusion que les autorités suisses n'ont pas réussi à reconnaître de manière précoce la crise qui s'annonçait. Selon elles, cette situation s'explique par le fait que la CFB et la FINMA étaient tributaires des informations qui leur étaient fournies par des tiers, qu'elles n'ont pas accordé suffisamment d'importance à leurs propres critiques et observations et que l'ensemble des autorités concernées a manqué d'esprit critique. Etant donné que les travaux de la FINMA se fondent sur les informations qui lui sont fournies par les grandes banques en particulier, il faut étudier comment donner à cette autorité les moyens de mener en toute indépendance, auprès des grandes banques et des autres instituts majeurs, des enquêtes qui lui permettent notamment de procéder aux vérifications nécessaires lorsque des informations lui paraissent lacunaires et de déceler les éventuels autres problèmes. Les CdG regrettent que la CFB et la FINMA n'aient pas pris de mesures de manière conséquente après avoir décelé les premiers signes de la crise. Elles souhaiteraient en outre que la FINMA fasse preuve d'un esprit plus critique lorsqu'elle traite les informations qui lui sont fournies, et qu'elle s'assure à temps de leur bienfondé. Les CdG estiment, d'une part, que les objectifs assignés aux autorités doivent être clarifiés et précisés, afin qu'il soit possible de définir de manière réaliste les exigences auxquelles les autorités devront satisfaire (rôle, responsabilités) et, d'autre part, qu'il est nécessaire de revoir leur organisation, de même que les instruments et les moyens dont elles disposent, afin qu'elles soient sur un pied d'égalité avec les grandes banques et les autres instituts soumis à leur surveillance et puissent relever les défis auxquels elles sont confrontées dans cette tâche.

Le Conseil fédéral a invité la BNS et la FINMA à se prononcer sur la
recommandation 2. De manière générale, la BNS est d'avis que ses objectifs, ses responsabilités et ses compétences sont réglées de manière claire, exhaustive et judicieuse dans la Constitution et la législation, et que cette réglementation a fait ses preuves lors de la crise des marchés financiers. Elle estime néanmoins qu'elle pourrait avoir, à l'avenir, à assumer certaines tâches supplémentaires de nature macroprudentielle1, 1

Par surveillance macroprudentielle, on entend les tâches qui sont exercées par les autorités de surveillance des marchés financiers pour garantir la stabilité du système financier dans son ensemble. Lorsque lesdites autorités se bornent à surveiller les banques (et leurs stratégies en matière de risques) isolément, il peut arriver que des effets de contagion ou des réactions en chaîne leur échappent. La surveillance macroprudentielle permet d'éviter ce risque.

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notamment dans le domaine des banques d'importance systémique, mais cela dépendra des leçons qui seront tirées de la crise financière et des résultats des travaux de la Commission d'experts «Too big to fail». La surveillance macroprudentielle par les banques centrales est une question actuellement très discutée à l'échelle internationale. Toutefois, il est encore trop tôt pour se prononcer sur la question. La FINMA est, quant à elle, d'avis qu'il faudra surtout légiférer dans le domaine de la régulation matérielle des marchés financiers. Pour ce qui est de la surveillance des marchés, elle suggère simplement de modifier la loi du 22 juin 2007 sur la surveillance des marchés financiers (LFINMA) de sorte que la FINMA puisse désormais aussi récolter des données auprès des organismes qui ne sont pas soumis à sa surveillance.

Le Conseil fédéral est d'avis que des adaptations législatives sont nécessaires pour renforcer la capacité de résistance du système financier face à des crises; la régulation des marchés financiers est ici concernée au premier chef, notamment en ce qui concerne la régulation des fonds propres et des liquidités, les prescriptions concernant les rémunérations et la solution du problème des entreprises trop grandes pour être mises en faillite. Le Conseil fédéral soumettra à cet égard des projets au Parlement. Il estime en revanche, d'entente avec les autorités concernées, que les objectifs assignés à la BNS et à la FINMA sont suffisamment clairs dans la loi et que ces autorités disposent de compétences et de ressources suffisantes pour atteindre ces objectifs. Il était déjà parvenu à cette conclusion dans le rapport «Rôle joué par l'Autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière ­ Enseignements pour l'avenir», qu'il a approuvé le 12 mai 2010 en réponse au postulat David (08.4039) et à la motion CER-N (09.3010)2 et dans lequel il a analysé de manière approfondie la manière dont la FINMA surveille les marchés financiers. Le Conseil fédéral estime par ailleurs qu'il faudra étudier davantage les rapports entre la situation sur le plan macroéconomique et les profils de risques établis pour les différents instituts. Il s'agira en particulier de développer des instruments de surveillance macroprudentielle, comme le préconise également la BNS dans son avis. Mais il
est encore trop tôt pour déterminer quelle forme auront ces instruments et qui, de la FINMA ou de la BNS, sera chargé de les utiliser. La réponse à ces questions dépendra largement de l'évolution de la situation à l'échelle internationale.

Ad recommandation 3 Recommandation 3 Les CdG invitent le Conseil fédéral à évaluer les mesures prises par la FINMA pour améliorer ses instruments de surveillance et sa pratique et à présenter un rapport d'ici mi-2012.

En analysant les expériences faites à l'étranger et les pratiques qui y ont fait leurs preuves (telles que l'envoi de collaborateurs de l'autorité de surveillance dans les banques), les CdG sont parvenues à la conclusion que les méthodes de surveillance appliquées en Suisse devaient être revues. La FINMA en particulier devra rapidement faire suivre de mesures concrètes les objectifs stratégiques qu'elle s'est fixés en septembre 2009; les CdG relèvent en particulier les objectifs visant la réduction

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des risques systémiques, l'amélioration de l'efficacité de la surveillance ou encore le renforcement de la FINMA en tant qu'autorité.

Dans son rapport annuel 2009, qui a été approuvé par le Conseil fédéral, la FINMA indique qu'elle a mené cinq projets dans le cadre desquels elle a analysé les points ci-après, qui sont à ses yeux des éléments-clés de la surveillance: 1) récolte et évaluation des données et des informations nécessaires à la surveillance, 2) possibilités et restrictions dans les échanges avec les organes soumis à la surveillance, 3) efficacité de cette dernière, 4) utilisation des instruments d'évaluation de la gestion quantitative et qualitative des risques, et 5) améliorations possibles du cadre général dans lequel la surveillance s'exerce. Sur cette base, la FINMA a pris des mesures en vue d'approfondir et de mettre en oeuvre de manière plus conséquente, dans tous les domaines, l'approche (basée sur les risques) retenue en matière de surveillance. La FINMA a en outre constitué un groupe d'économistes qui aura notamment pour tâche d'élaborer les instruments permettant une meilleure analyse des risques. Un accroissement des compétences et des capacités dans le domaine de l'analyse des risques permettra d'examiner non seulement les risques encourus par les instituts isolément, mais aussi les risques liés à leurs interactions. La FINMA a en outre élaboré un projet qui répartit les organismes soumis à la surveillance en six catégories, selon les risques qu'ils représentent pour les créanciers et les assurés ainsi que pour l'ensemble du système. L'ampleur de la surveillance différera en fonction des catégories. Ainsi, la FINMA pourra désormais utiliser de manière plus ciblée et plus efficace les ressources dont elle dispose pour ses tâches de surveillance.

La FINMA s'est en outre fixé les objectifs stratégiques suivants: réduction des risques systémiques et de la complexité, amélioration de la protection des clients, rationalisation et optimisation de la régulation, accroissement de l'efficacité de la surveillance, mise en place d'une surveillance des marchés adéquate et d'une exécution efficace des procédures, positionnement en faveur de la stabilité internationale et de l'interdépendance étroite des marchés, et renforcement de la FINMA en tant qu'autorité.

Le Conseil fédéral convient
que les mesures prises par la FINMA pour améliorer ses instruments de surveillance et sa pratique doivent faire l'objet d'une évaluation.

Aussi a-t-il chargé le DFF de confier l'évaluation visée par les CdG à des experts externes. Il est prévu que la FINMA remette dans un premier temps un rapport sur les mesures prises, puis que les experts examinent ces mesures et fassent à leur tour un rapport sur la question.

Ad recommandation 4 Recommandation 4 Les CdG invitent le Conseil fédéral à prendre ­ d'entente avec la FINMA et la BNS ­ les mesures nécessaires pour réduire au maximum les risques liés au cloisonnement (groupthink).

Les CdG sont d'avis que la BNS et la FINMA doivent diversifier davantage leurs sources d'information, sans quoi elles risquent de ne pas accorder assez de poids aux avis critiques, alors que ceux-ci constituent des sources essentielles de réflexion et permettent souvent de détecter une crise de manière précoce. A l'avenir, la BNS et 3278

la FINMA devront disposer d'un réseau de contacts institutionnalisés avec des experts indépendants.

Le Conseil fédéral a invité la BNS et la FINMA à se prononcer sur la recommandation 4. La BNS convient qu'il faut éviter d'ignorer les avis critiques et divergents, raison pour laquelle elle privilégie depuis toujours une culture d'entreprise qui encourage une attitude critique face aux dogmes. La manière dont le directoire est organisé favorise aussi, dans une certaine mesure, la pluralité des opinions. La BNS a par ailleurs précisé qu'elle étudierait cette recommandation de manière plus approfondie et qu'elle ferait connaître son avis aux CdG. Quant à la FINMA, elle ne s'est pas prononcée sur cette recommandation.

La «pensée de groupe» («groupthink») est un terme qui a été forgé par le psychologue Irving Janis. Il décrit un mode de pensée auquel recourent les membres d'un groupe très soudé lorsque le besoin d'unanimité devient tel que le groupe ne parvient plus à appréhender de manière réaliste les autres solutions possibles. Aucune entreprise et aucun organe de direction n'est totalement à l'abri de ce mode de pensée.

Toutefois, ils peuvent prévenir ce risque de manière efficace en adoptant une culture d'entreprise qui favorise la pensée critique et indépendante. Il est de la responsabilité de la FINMA comme de la BNS d'entretenir une telle culture d'entreprise. Le Conseil fédéral peut, quant à lui, réduire ce risque en nommant au conseil d'administration de la FINMA et au Conseil de banque de la BNS des personnes se caractérisant par leur indépendance d'esprit. Une certaine importance devrait aussi être accordée à la diversité des sources d'information, au recours à des experts indépendants, de même qu'à l'examen et à l'analyse critiques des informations. Un échange systématique d'informations entre le DFF, la FINMA et la BNS (cf. commentaire de la recommandation 5, collaboration tripartite) permettra aussi d'atteindre cet objectif.

Le Conseil fédéral estime que cette recommandation concerne principalement la BNS et la FINMA et qu'il revient donc à ces dernières de se prononcer de manière plus approfondie sur la question. A l'avenir, le Conseil fédéral veillera encore davantage à nommer au conseil d'administration de la FINMA et au Conseil de banque de la BNS des personnes qui se caractérisent
par un esprit critique et indépendant.

Ad recommandation 5 Recommandation 5 Les CdG invitent le Conseil fédéral à prendre les mesures nécessaires à la clarification du rôle et des compétences des différentes autorités, ainsi qu'à la transparence et à l'optimisation des processus de décision. Pour ce faire, la BNS et la FINMA sont étroitement impliquées dans l'élaboration de propositions et de mesures. Ces améliorations doivent permettre une collaboration optimale entre la BNS, la FINMA et le DFF.

Les CdG sont d'avis que la détection précoce des risques exige de la part des autorités une coordination optimale en ce qui concerne l'échange d'informations. Pour garantir la stabilité du système financier et l'efficacité de la surveillance bancaire, il est indispensable que la BNS et la FINMA collaborent de manière soutenue, étroite et régulière. Les CdG ont pris connaissance avec satisfaction de la révision du proto3279

cole d'accord passé entre la FINMA et la BNS, révision qui vise à renforcer leur collaboration dans le domaine de la stabilité financière. Elles précisent en outre que les tâches du Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales (SFI) dans ce domaine devront être réexaminées au plus tard dans une année, mais que l'indépendance de la BNS et de la FINMA ne devra pas être remise en cause.

Invitées par le Conseil fédéral à se prononcer sur la recommandation 5, la BNS et la FINMA ont toutes deux évoqué le protocole d'accord bilatéral qui les lie. Cet instrument a fait l'objet d'une révision au début de 2010: les responsabilités y ont été précisées et la collaboration entre les deux institutions a été mieux réglée. Les deux parties estiment donc qu'il constitue une base solide en vue de leur collaboration dans le domaine de la stabilité du système financier. Pour la BNS, il serait utile d'examiner l'opportunité d'institutionnaliser davantage l'échange d'informations en dehors des périodes de crise. Une collaboration plus étroite avec la Confédération serait en revanche problématique à ses yeux, en raison des dispositions prévues par l'art. 6 de la loi du 3 octobre 2003 sur la Banque nationale (LBN, RS 951.11). La FINMA est ouverte à l'idée d'un protocole d'accord tripartite qui réglerait les questions de collaboration en périodes de crise. Pour améliorer les processus de décision impliquant le DFF, la FINMA et la BNS, la FINMA estime tout au plus que des mesures pourraient être prises en lien avec les contacts entretenus à l'échelle internationale. Elle juge à cet égard qu'il serait utile d'améliorer l'échange d'informations avant et après les rencontres internationales et de collaborer de manière systématique lors de l'élaboration des stratégies.

Le Conseil fédéral est d'avis que la collaboration entre la BNS, la FINMA et le DFF a, dans l'ensemble, bien fonctionné au cours des dernières années, mais il convient que les améliorations proposées dans la recommandation 5 sont nécessaires, notamment dans le contexte de la mise en place du SFI. La collaboration entre la BNS, la FINMA et le DFF, qui est capitale pour les CdG comme pour le Conseil fédéral, devra être institutionnalisée dans le cadre du protocole d'accord tripartite. Le Conseil fédéral estime que les compétences assignées par la
loi à la BNS, à la FINMA et au DFF ne sont pas remises en cause par la conclusion d'un tel accord et que l'indépendance de la BNS et de la FINMA ne constitue pas un obstacle à sa conclusion.

Le Conseil fédéral a donc chargé le DFF d'élaborer un protocole d'accord tripartite avec la BNS et la FINMA d'ici à la fin de 2010 (cf. commentaire de la recommandation 1). Celui-ci devra porter sur la formalisation et la documentation de l'organisation de crise, l'intégration du Conseil fédéral à l'organisation de crise, l'échange d'informations et la collaboration dans les domaines de la stabilité financière et de la régulation des marchés financiers, ainsi que sur la coordination des contacts que la Suisse entretient à l'échelle internationale (notamment en ce qui concerne l'influence qu'elle peut exercer au sein des organes financiers internationaux dont elle est membre).

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Ad recommandation 6 Recommandation 6 Les CdG invitent le Conseil fédéral à vérifier d'ici 1 an l'adéquation des processus et de la nouvelle organisation de la FINMA de manière à ce qu'ils permettent une communication de qualité entre ses services et un échange d'informations.

Les CdG constatent qu'au sein même de la CFB, les échanges d'informations entre les personnes s'occupant de la surveillance d'UBS et celles s'occupant de la surveillance de Credit Suisse ont été clairement insuffisants.

Matériellement, le Conseil fédéral n'a rien à objecter à la recommandation 6 des CdG. Il la juge toutefois problématique en ce sens que, en raison de l'indépendance de la FINMA, qui est inscrite dans la loi, il ne peut pas garantir («vérifier» dans le rapport des CdG) que les processus de travail de la FINMA seront modifiés conformément à ses attentes. En outre il convient de relever qu'il y a un lien matériel étroit entre les recommandations 3 et 6. L'amélioration des instruments de surveillance et des pratiques de la FINMA, conformément à la recommandation 3, ne manquera pas d'avoir des répercussions sur les processus de travail et l'organisation de la FINMA.

C'est pourquoi le Conseil fédéral a demandé à cette dernière de lui présenter, d'ici fin avril 2011, un rapport sur ses processus de travail et son organisation.

Ad recommandation 7 Recommandation 7 Les CdG invitent le Conseil fédéral à étudier de manière exhaustive l'ensemble des recommandations émises par les experts Geiger et Green qu'il a lui-même mandatés et qu'il rapporte d'ici fin 2010 sur le traitement qu'il leur réserve.

Selon les CdG, les nombreuses interventions parlementaires en Suisse et à l'étranger témoignent de la volonté et de la nécessité de tirer les enseignements nécessaires de la crise. Les CdG soulignent cependant que «la fenêtre d'opportunité pour mener les réformes adéquates se referme» et qu'il convient donc de concrétiser rapidement les mesures susceptibles de résoudre les problèmes identifiés. Par le biais de la recommandation 7, elles invitent le Conseil fédéral à étudier soigneusement toutes les recommandations formulées par les experts Geiger et Green que celui-ci a lui-même mandatés et à élaborer un rapport, d'ici fin 2010, sur le traitement réservé à ces recommandations.

Le postulat David (08.4039) et la motion CER-N
(09.3010) chargeaient le Conseil fédéral d'examiner le comportement des autorités de surveillance des marchés financiers durant la crise financière ainsi que la surveillance et le contrôle des marchés financiers exercés par la FINMA et d'élaborer un rapport à ce sujet. En rapport avec la mise en oeuvre de ces interventions parlementaires, le Conseil fédéral a chargé les experts indépendants Hans Geiger et David Green d'élaborer une étude.

Le Conseil fédéral a minutieusement analysé les conclusions et propositions de ces experts et en a tenu compte dans son rapport du 12 mai 2010 intitulé « Rôle joué par 3281

l'Autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière ­ Enseignements pour l'avenir»3.

En mettant sur pied ce groupe d'experts, le Conseil fédéral a choisi une solution qui devrait permettre de résoudre les problèmes posés par les banques trop grandes pour être mises en faillite («too big to fail»). Avec les mesures qu'il a prises, il a donc déjà donné suite à la recommandation 7.

Ad recommandation 8 Recommandation 8 Les CdG invitent le Conseil fédéral à mettre sur pied un système de pilotage en se fondant sur les recommandations des CdG faites lors de précédentes inspections en matière de pilotage (pilotage politique stratégique par le Conseil fédéral, affaire Tinner, nomination de Roland Nef, etc).

Les CdG indiquent dans leur rapport que, jusqu'en septembre 2008, le Conseil fédéral n'était que peu ou pas du tout informé de la situation d'UBS. Elles précisent que, dès le 21 septembre 2008, il a été davantage associé, car la situation d'UBS et l'absence du chef du DFF l'exigeaient. Le président de la Confédération a dès ce moment dirigé l'intervention de la Confédération avec notamment le soutien de la chef du DFJP, qui a ainsi pleinement assumé sa fonction de suppléante du chef du DFF. Les CdG parviennent en outre à la conclusion que le Conseil fédéral «n'a pas mené de réflexions pour dégager des solutions en cas d'aggravation de la crise».

Cette constatation n'est pas exacte. Comme l'a indiqué le Conseil fédéral dans son avis du 26 mai 2010 relatif au projet de rapport, des membres du collège gouvernemental ont fait des propositions concrètes en vue de l'accélération de la procédure d'entraide administrative avec les Etats-Unis dans l'affaire UBS et ont chargé le chef du DFF d'élaborer des scénarios pour le cas où il faudrait réagir avec célérité.

Le Conseil fédéral est par contre lui aussi d'avis que le collège aurait dû être informé plus tôt de la situation d'UBS afin de pouvoir prendre à temps les mesures nécessaires. De ce fait, la recommandation 8 se recoupe en partie avec des décisions ou des mesures que le Conseil fédéral a prises ou déjà mises en oeuvre pour optimiser le pilotage du collège. Le Conseil fédéral souligne cependant aussi que l'amélioration du pilotage par le collège gouvernemental ne doit pas inciter les départements à mettre un terme à leurs efforts
en matière de gestion de crise et que leur obligation de l'informer est donc maintenue.

En mettant sur pied le Service de renseignement de la Confédération (SRC), le Conseil fédéral a créé un instrument permettant une appréciation globale de la situation comprenant non seulement l'exploration, la description et l'appréciation de la situation du moment, mais aussi la détection précoce de menaces potentielles telles que, principalement, des développements susceptibles d'affecter directement ou indirectement les intérêts de la Suisse, notamment sa sécurité et sa capacité d'action. La détection précoce permet à la direction politique et militaire et à d'autres services de l'administration fédérale et des administrations cantonales de prendre des décisions adéquates.

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Pour améliorer le pilotage politique stratégique, le Conseil fédéral a décidé de réorienter l'état-major de prospective le 18 septembre 2009. Le mandat principal du nouvel état-major consiste à élaborer des scénarios à moyen et à long termes (horizon: 2025) devant servir d'orientation pour le programme de la législature. Le rapport périodique de l'état-major de prospective doit permettre au Conseil fédéral d'identifier à un stade précoce les défis majeurs et futurs que devra relever notre pays, d'évaluer différentes actions possibles et de faire en sorte que les décisions stratégiques qui s'imposent soient prises à temps. L'état-major de prospective veille à ce que l'échange d'informations permanent avec les principaux organes de coordination au plan fédéral soit garanti et à ce que les travaux interdépartementaux et sectoriels en matière de stratégie et de prospective soient pris en compte. Grâce au recours à divers experts des domaines scientifique et culturel, mais aussi des administrations cantonales, les considérations, les besoins et les problèmes de la société civile seront aussi été pris en considération.

En outre, lors de sa séance du 18 août 2010, le Conseil fédéral a chargé la Chancellerie fédérale d'élaborer un plan directeur pour l'optimisation du pilotage politique (comprenant notamment la détection précoce en tant que processus continu) et de le lui soumettre d'ici à fin 2010. Grâce à la détection précoce, le Conseil fédéral doit être informé le plus tôt possible, régulièrement et de façon détaillée des risques potentiels, des opportunités et des nouvelles évolutions et tendances dans le contexte national et international. A l'avenir, l'état-major de prospective répertoriera, dans le cadre d'un processus continu et sur la base des nombreuses sources d'information disponibles, les thèmes et les questions susceptibles de revêtir une importance majeure pour notre pays.

Enfin, le Conseil fédéral est en train d'examiner un nouveau modèle de gestion pour l'administration fédérale (modèle de convergence). Le DFF soumettra au Conseil fédéral, durant le 1er trimestre 2011, une proposition présentant et comparant les différentes options envisageables.

Ad recommandation 9 Recommandation 9 Les CdG invitent le Conseil fédéral à mettre sur pied, à son niveau, un système de veille et de détection
précoce efficace concernant les crises.

Les CdG exigent dans leur rapport que le Conseil fédéral mette sur pied, à son niveau, un «système de veille et de détection précoce» efficace en cas de crise. Le Conseil fédéral examine les mesures qui pourraient être prises.

Pour ce qui est du «système de veille», il s'agit notamment de surveiller les défis identifiés par l'état-major de prospective (cf. avis concernant la recommandation 8) et les risques mis en évidence dans le cadre de la politique de gestion des risques à la Confédération et du projet «Risques Suisse» ou par différents organes.

Dans le domaine de la détection précoce, il s'agit de détecter les situations extraordinaires dès leur genèse et d'anticiper les crises qui pourraient en résulter. Des propositions concrètes devront être élaborées par la Chancellerie fédérale en collaboration avec le DDPS et le DFF et d'autres départements intéressés, dans le cadre d'un plan directeur pour la gestion globale des crises par la Confédération, et soumi3283

ses au Conseil fédéral pour décision (cf. avis relatif à la recommandation 1). Tous les systèmes de détection précoce départementaux et sectoriels déjà existants devront être pris en compte à cet égard.

Ad recommandation 10 Recommandation 10 Les CdG invitent la FINMA, en raison de la portée de cette affaire, à éclaircir en profondeur la question de savoir dans quelle mesure les plus hauts dirigeants d'UBS avaient connaissance des infractions au QIA commises par la banque et ses collaborateurs.

Les CdG indiquent que la CFB avait lancé une enquête au printemps 2008 sur les activités transfrontalières d'UBS. Elles ne sont pas convaincues par cette enquête étant donné qu'aucun interrogatoire formel des employés d'UBS n'a été organisé.

Etant donné l'ampleur de cette affaire, les CdG sont convaincues que la question de savoir dans quelle mesure les plus hauts dirigeants d'UBS connaissaient les infractions au QIA commises par leur banque devrait être éclaircie en profondeur par la FINMA, même en l'absence d'un intérêt actuel digne de protection. Si de tels cas devaient se reproduire à l'avenir, la question de la responsabilité devrait être éclaircie d'office et de manière systématique, de l'avis des CdG.

Le Conseil fédéral estime que la recommandation 10 concerne la FINMA indépendante et non le collège gouvernemental et que c'est donc à elle de prendre position sur la recommandation 10.

Ad motion 1 Motion 1 Le Conseil fédéral est chargé d'inviter régulièrement le président du conseil d'administration de la FINMA à un entretien. Sur la demande du conseil d'administration de la FINMA, d'autres entretiens peuvent aussi avoir lieu entre le président du conseil d'administration de la FINMA et la délégation du Conseil fédéral aux affaires économiques.

Les CdG sont d'avis qu'il a fallu beaucoup de temps au Conseil fédéral et au DFF pour prendre l'affaire au sérieux et pour prendre conscience de l'urgence des mesures nécessaires au cours de l'automne et de l'hiver 2008. Selon elles, le président de la BNS avait profité de son entretien de fin 2008 avec le Conseil fédéral pour informer ce dernier de la gravité de la situation et de l'urgence des mesures à prendre. La CFB/FINMA aurait tenté de faire de même, sur une plus longue période, à des niveaux hiérarchiques inférieurs, mais avec un succès moindre. Les
CdG sont d'avis que le président du conseil d'administration de la FINMA devrait informer régulièrement le Conseil fédéral de la situation et des principaux développements regardant le domaine d'activité de la FINMA, par analogie avec le président de la BNS. Toujours selon les CdG, pour tenir compte de l'évolution rapide des marchés financiers, notamment, de telles rencontres devraient pouvoir avoir lieu également à la demande 3284

du conseil d'administration de la FINMA, du moins avec la délégation de politique économique générale du Conseil fédéral.

Par décision du 18 août 2010, le Conseil fédéral a proposé l'adoption de la motion 1.

La LFINMA (RS 956.1) prévoit à l'art. 21, al, 2, que la FINMA examine au moins une fois par an avec le Conseil fédéral sa stratégie en matière de surveillance et les questions d'actualité relevant de la politique applicable à la place financière. Le Conseil fédéral apprécie beaucoup cet échange de vues, car il lui permet de considérer, dans leur ensemble, les conditions générales de la politique des marchés financiers, de repérer à un stade précoce d'éventuelles lacunes ou insuffisances dans la législation sur les marchés financiers et d'agir au plan politique dans les limites de ses compétences constitutionnelles. Il entend par conséquent, en cas de besoin, faire usage de la possibilité qui lui est accordée de s'entretenir plus d'une fois par an avec le conseil d'administration de la FINMA. Par ailleurs, il juge opportun, au cas où le conseil d'administration de la FINMA le demanderait, que sa délégation de politique économique générale et le président du conseil d'administration de la FINMA puissent aussi avoir des entretiens en dehors des rencontres institutionnelles régulières qui ont été prévues.

Ad recommandation 11 Recommandation 11 Les CdG invitent les commissions législatives compétentes à analyser les dispositions légales régissant la décharge donnée par une assemblée générale dans le secteur bancaire.

Le Conseil fédéral ne se prononce pas sur cette recommandation, estimant qu'elle s'adresse aux commissions parlementaires.

Ad postulat 1 Postulat 1 Le Conseil fédéral est mandaté d'analyser le rôle des entreprises de révision tel qu'il est défini par la législation lorsqu'elles contrôlent les grandes banques et de rendre compte des mesures légales ou autres qu'il serait possible de prendre afin de renforcer leur rôle en faveur de la surveillance des banques.

Selon les CdG, la CFB s'était penchée, dans le cadre de son enquête, sur l'activité de surveillance de «l'entreprise de révision» (société d'audit) concernée. Elle était parvenue à la conclusion que, «dans aucun des contrôles réalisés en vue de l'introduction et la mise en oeuvre du QIA, la révision interne de la société
chargée de l'audit n'avait révélé les problèmes concrets qui étaient alors l'objet de l'enquête de la CFB et de la procédure du DOJ, de la SEC et de l'IRS». C'est pourquoi les CdG considèrent qu'il est important que les attributions des sociétés d'audit opérant pour les grandes banques soient analysées et que leur mission de contrôle soit renforcée.

Elles estiment par ailleurs que les sociétés d'audit devront désormais apporter une plus-value accrue à la surveillance des banques.

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Par décision du 18 août 2010, le Conseil fédéral a proposé l'adoption du postulat 1.

Une société d'audit selon la législation sur les banques a pour tâche majeure d'évaluer l'adéquation et l'efficacité du système de contrôle interne et de la gestion des risques en procédant aux audits nécessaires. Comme l'a indiqué le Conseil fédéral dans son rapport du 12 mai 2010 intitulé «Rôle joué par l'Autorité de surveillance des marchés financiers dans la crise financière ­ Enseignements pour l'avenir»4, UBS présentait incontestablement de graves déficits dans ces domaines.

La société d'audit au sens de la législation bancaire (anciennement «société de révision») a néanmoins confirmé qu'entre 2005 et 2007, les modalités de contrôle d'UBS étaient adéquates. C'est pourquoi le Conseil fédéral estime aussi que le rôle des sociétés d'audit en matière de surveillance des grandes banques doit être revu.

Ad recommandation 12 Recommandation 12 Le Conseil fédéral rencontre régulièrement la Direction de la BNS et prend les mesures nécessaires pour que la BNS ait un accès privilégié au Collège quand elle le juge nécessaire.

Selon le rapport des CdG, la BNS a reconnu à temps, en raison d'avertissements de la Banque centrale américaine, la portée de la crise UBS/USA, en a informé la CFB/FINMA et le DFF et est aussi intervenue auprès des autorités américaines pour préserver les intérêts de la Suisse. Le 12 décembre 2008, lors de leur rencontre annuelle, la BNS a informé le Conseil fédéral du risque systémique qu'encourait toute l'économie suisse à cause des menaces de poursuite («Indictment») de la justice américaine contre UBS. Toujours selon les CdG, c'est grâce aux explications du président de la BNS que le Conseil fédéral a enfin saisi la gravité de la situation et compris que, dans ce dossier des activités transfrontalières aux Etats-Unis, l'existence d'UBS était en cause. En raison du rôle positif que la BNS a joué dans la gestion de la crise, les CdG parviennent à la conclusion que la BNS doit continuer à jouer ce rôle de gardienne de la stabilité financière suisse auprès des autorités administratives et politiques et que, dans ce but et en raison de son rôle absolument indispensable pour le maintien et la survie de la place financière suisse, elle doit avoir des contacts réguliers avec le Conseil fédéral.
Le Conseil fédéral est d'avis que la BNS dispose déjà d'un accès privilégié au collège gouvernemental. En vertu de l'art. 7, al. 1, de la loi du 3 octobre 2003 sur la Banque nationale (LBN, RS 951.11), le Conseil fédéral et le président de la Direction générale de la BNS se rencontrent une fois par année pour des entretiens. En outre, la délégation de politique économique générale du Conseil fédéral se réunit régulièrement avec la Direction générale de la BNS pour être informée de la politique monétaire de cette dernière et pour discuter de questions d'actualité ayant trait à la politique économique. Rien ne laisse donc apparaître que la BNS est limitée dans ses possibilités d'accès au gouvernement. Bien que les compétences des trois autorités soient décrites avec suffisamment de précision dans la loi ­ de sorte qu'aucune modification légale ne s'impose ­ et bien que la BNS dispose déjà d'un accès privilégié au Conseil fédéral, ce dernier est d'avis, en raison des expériences faites durant 4

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la crise des marchés financiers, que la collaboration et l'échange d'informations entre le DFF, la BNS et la FINMA dans des domaines déterminés doivent être institutionnalisés sous la forme d'un protocole d'accord tripartite (protocole d'entente) (cf. commentaire des recommandations 1 et 5).

Ad recommandation 13 Recommandation 13 Les CdG invitent le Conseil fédéral à faire en sorte que, pour le suivi de dossiers importants ­ en particulier s'ils touchent différents départements ­, le secrétariat général du département concerné participe de manière appropriée aux flux d'informations afin de pouvoir assumer sa fonction d'état-major du département et du chef de département.

Dans leur rapport, les CdG arrivent à la conclusion que, dans le cas de la crise financière et bancaire, le Conseil fédéral disposait d'informations insuffisantes et qu'il a été associé très tard au processus de décision. Dans le cas de la crise d'UBS, les CdG considèrent apparemment que certains services, dans les départements principalement concernés, étaient très bien informés et avaient aussi analysé la crise qui se dessinait. Elles ont eu toutefois l'impression que d'importantes informations ou connaissances ne sont pas parvenues jusqu'au secrétaire général et que, dans le cas du DFAE, le secrétaire d'Etat a aussi été insuffisamment associé.

Le Conseil fédéral partage l'avis des CdG exprimé dans la recommandation 13. Les secrétariats généraux doivent être associés de façon adéquate aux flux d'informations. Par décision du 23 juin 2010, le Conseil fédéral a: 1.

chargé la Chancellerie fédérale et les départements d'examiner si ­ et dans l'affirmative comment ­ leurs ordonnances d'organisation devaient être adaptées;

2.

chargé la Chancellerie fédérale et les départements d'examiner quelles autres mesures devaient être prises pour renforcer la position des secrétariats généraux, conformément à la recommandation 13;

3.

chargé en outre la Chancellerie fédérale de mener, dans le cadre de la Conférence des secrétaires généraux, une discussion avec ces derniers pour promouvoir l'échange réciproque d'informations.

Sur ces entrefaites, la Chancellerie fédérale a analysé les ordonnances sur l'organisation des départements et a fait une proposition à ces derniers en vue de compléter ces ordonnances. Lors de la discussion qui a eu lieu à la Conférence des secrétaires généraux, les représentants des départements se sont mis d'accord pour compléter leurs ordonnances d'organisation respectives de la manière suivante: «il [le secrétariat général] se saisit des affaires du département, les planifie, les coordonne et les contrôle; il assure le suivi, en particulier, des affaires interdépartementales importantes».

Lors de la prochaine révision des ordonnances d'organisation, la disposition précitée sera ajoutée au texte.

3287

Selon le Conseil fédéral, il n'est pas nécessaire de prendre des mesures supplémentaires pour renforcer les secrétariats généraux. Là où cela semblait opportun suite aux expériences faites lors de la crise, les enseignements nécessaires au vu des manquements constatés ont été tirés, et les mesures organisationnelles requises ont été mises en oeuvre.

Le DFF a procédé à une réorganisation dans le domaine des affaires internationales et de son service juridique. Ces domaines dépendaient à la fois du département et du directeur de l'Administration fédérale des finances (AFF). Avec effet au 1er mars 2010, le SFI a été mis sur pied, et le service juridique du DFF a été séparé de l'AFF.

Cette réorganisation était motivée par les expériences réalisées durant la crise financière et la pression persistante en matière de coopération internationale dans le domaine financier, et plus précisément les questions fiscales. La création d'un secrétariat d'Etat ad hoc doit permettre de relever ces défis de façon optimale. La révision totale de l'ordonnance sur l'organisation du DFF, qui est entrée en vigueur le 1er mars 2010, a permis de créer les bases légales du SFI, de définir plus clairement les tâches du secrétariat général du DFF et de renforcer son rôle d'état-major du département.

Ad recommandation 14 Recommandation 14 Les CdG invitent le Conseil fédéral à demander systématiquement, lorsqu'il est appelé à se pencher sur d'importantes questions juridiques, une analyse approfondie et une appréciation à l'OFJ.

Les CdG ont relevé dans leur rapport que la conformité de la transmission de données bancaires à la Constitution et à la loi sur les banques n'avait pas été étudiée de manière approfondie et exhaustive par l'OFJ. Elles estiment que ce dernier doit toujours être consulté sur les questions juridiques fondamentales auxquelles le collège gouvernemental est confronté. Aussi ont-elles invité le Conseil fédéral à demander systématiquement une analyse approfondie et une appréciation à l'OFJ pour les questions juridiques importantes (recommandation 14).

Le Conseil fédéral est disposé à accepter cette recommandation. Comme il l'a indiqué dans le rapport «Renforcement du contrôle préventif de la conformité au droit» (FF 2010 1989), établi en exécution du postulat 07.3360 déposé le 20 juin 2007 par le conseiller
aux Etats Thomas Pfisterer («Renforcement du contrôle préventif de la constitutionnalité»), il arrive que les unités chargées du contrôle préventif de la conformité au droit (OFJ, ChF, Direction du droit international public et AFF, selon leur domaine de compétences) ne puissent procéder à un examen aussi approfondi que nécessaire de questions juridiques fondamentales liées à des affaires du Conseil fédéral, notamment faute de temps. Cela se produit en particulier lorsque la procédure ne prévoit aucune consultation des offices, par ex. pour les notes de discussion.

Le Conseil fédéral examine la manière de garantir que les unités chargées du contrôle préventif de la conformité au droit, notamment l'OFJ, soient toujours consultées à temps pour les affaires soulevant des questions juridiques importantes et controversées. Il entend ainsi obliger les départements à procéder à une consultation des offices impliquant au moins ces unités, qui exercent des fonctions transversales, non 3288

seulement pour les propositions adressées au Conseil fédéral (situation actuelle), mais aussi pour les notes de discussion qui soulèvent des questions juridiques importantes et controversées. Les départements seront en outre tenus d'indiquer systématiquement sur leur proposition au Conseil fédéral si les unités chargées du contrôle préventif de la conformité au droit ont été consultées et, dans l'affirmative, dans quelle mesure ils ont tenu compte de leur avis.

Ad motion 2 (10.3392 et 10.3631) Motion 2 Le Conseil fédéral est chargé de présenter une révision de la LOGA, pour y inscrire l'obligation intégrale de la forme écrite pour toutes ses délibérations et décisions. La forme écrite doit être appliquée également pour les affaires secrètes et pour les simples informations orales. Les procès-verbaux du Conseil fédéral doivent pouvoir être utilisés comme instruments de conduite et garantir l'intelligibilité subséquente des délibérations et des décisions du Conseil fédéral.

En déposant les motions 10.3392 et 10.3631, les CdG ont chargé le Conseil fédéral de présenter une révision de la LOGA qui prévoie l'obligation de consigner par écrit et dans leur intégralité toutes les délibérations et décisions du gouvernement. Elles demandent au surplus que le Conseil fédéral se donne les ressources et les moyens nécessaires pour établir un «procès-verbal vert» qui réponde à ses besoins et qui puisse être utilisé en tant qu'instrument de conduite et de travail.

Le Conseil fédéral a discuté de cette motion (10.3392 et 10.3631) lors de sa séance du 18 août 2010. Il est parvenu à la conclusion qu'il fallait procéder à des éclaircissements. Confiés à la ChF, ces travaux prendront un certain temps, mais les grandes lignes du projet seront soumises au Conseil fédéral avant la fin de 2010. On peut toutefois déjà relever que le Conseil fédéral proposera au Parlement dans le message additionnel sur la réforme du gouvernement d'inscrire dans la loi que la ChF est responsable de l'établissement des procès-verbaux et de la mise au net des décisions.

La préparation et le déroulement des séances du Conseil fédéral permettent déjà de satisfaire une grande partie des demandes des CdG en matière de consignation écrite des délibérations et des décisions du Conseil fédéral (cf. considérations sur la recommandation 15). Le
Conseil fédéral est disposé à développer le système en place pour combler les éventuelles lacunes dont souffrent les procès-verbaux des décisions. Il a toutefois également décidé lors de sa séance du 18 août 2010 de ne pas établir un compte rendu intégral de ses séances, afin de protéger les membres du Conseil fédéral et d'assurer la liberté des discussions. Il estime par ailleurs qu'un compte rendu intégral ne pourrait pas servir d'instrument de conduite. Il a toutefois chargé la ChF de remplacer d'ici à la fin de l'année 2010 les «procès-verbaux verts» par des procès-verbaux de décision, qui contiendront pour chaque affaire les décisions du Conseil fédéral et un bref résumé des discussions. Les procès-verbaux de décision seront soumis à l'approbation du collège lors de la séance suivante.

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Ad recommandation 15 Recommandation 15 Le Conseil fédéral se dote des ressources et des moyens nécessaires pour disposer rapidement de procès-verbaux appropriés ainsi que d'un contrôle suffisant des affaires.

Les CdG ont déploré que les délibérations du Conseil fédéral ne soient pas toujours consignées par écrit. Il n'existe ainsi pas de «procès-verbal vert» des séances relatives à l'affaire UBS de septembre 2008 à janvier 2009. En outre, les «procèsverbaux verts» contiennent souvent peu d'indications, voire aucune, sur les informations orales données par les départements et ils ne sont remis aux membres du Conseil fédéral que plusieurs semaines après la séance concernée.

Les CdG estiment que les délibérations du Conseil fédéral doivent être consignées par écrit dans toutes les situations, même lorsque les affaires sont délicates. Les dispositions sur la classification des affaires permettent tout à fait de protéger les informations classées «secrètes» ou «à tenir secrètes» sans sacrifier la forme écrite.

La nécessité de consigner par écrit et de manière suffisante les délibérations et les décisions du Conseil fédéral découle également du mandat que confie la Constitution à la haute surveillance parlementaire: si les documents écrits sont insuffisants, la haute surveillance parlementaire ne peut s'exercer de manière satisfaisante.

Le rapport des CdG analyse en profondeur les méthodes de travail du Conseil fédéral, et plus particulièrement ses instruments de gestion et de travail. A cet égard, les informations fournies aux CdG méritent d'être complétées. On trouvera donc ci-après une présentation de la manière dont le Conseil fédéral travaille, et notamment dans quelle mesure ses délibérations sont consignées par écrit.

Pour revenir à l'affirmation selon laquelle aucun «procès-verbal vert» n'aurait été établi sur l'affaire UBS de septembre 2008 à janvier 2009, rappelons que la ChF a pris des notes en toute discrétion, contrairement aux instructions données par le président de la Confédération, et que, après les avoir réunies dans un document chronologique de douze pages («Notes en mots-clés des discussions du Conseil fédéral au sujet d'UBS»), elle les a remises aux membres du Conseil fédéral.

Actuellement, la ChF établit les procès-verbaux suivants pour chaque séance du Conseil fédéral: ­

procès-verbal des décisions: ce document donne une vue d'ensemble des résultats des délibérations du Conseil fédéral sur chaque objet inscrit à l'ordre du jour. Il paraît le jour même de la séance, sous la forme d'un ordre du jour complété d'une brève indication pour chaque objet (par ex. «selon proposition», «selon co-rapport» ou «reporté»).

­

dispositif de décision (formant la «décision du Conseil fédéral» et l'«extrait du procès-verbal»): toutes les décisions prises par le Conseil fédéral sur un objet sont consignées sous la forme d'un dispositif de décision, dont la longueur est comparable à celle du dispositif d'un jugement dans les procédures judiciaires. Le dispositif de décision ne contient pas de considérants, mais il est aisément compréhensible et comporte tous les éléments de la décision (par ex. aspects touchant à l'exécution, à la suite des travaux ou à la com-

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munication), y compris les mandats assignés et les délais. En général, les dispositifs sont signés le jour même de la séance par le vice-chancelier qui dirige le secteur Conseil fédéral de la ChF. La préparation du dispositif de décision incombe au département qui dépose la proposition au Conseil fédéral: il doit à cet effet remettre un projet de dispositif à la ChF avec la proposition. La ChF lance alors la procédure de co-rapport et adapter le cas échéant le projet de dispositif au cours de cette procédure. Après la séance du Conseil fédéral, la mise au net du dispositif incombe à la ChF.

­

notes de la ChF sur les délibérations du Conseil fédéral («procès-verbal vert»): ces notes contiennent les éléments centraux des délibérations du Conseil fédéral (résumé des principales déclarations faites par les membres du Conseil fédéral aux moments clé des discussions). En général, ces notes sont établies par le porte-parole du Conseil fédéral (vice-chancelier qui dirige le secteur Information et communication de la ChF), en parallèle à ses tâches principales (préparation de la communication et conseils au Conseil fédéral en matière de communication). Celui-ci transcrit tout d'abord sous la forme de mots clé les propos tenus durant la séance, puis établit le document final dans les jours qui suivent. Estampillé confidentiel, ce document est alors remis aux membres du Conseil fédéral, au chancelier de la Confédération et aux vice-chanceliers pour leur propre usage avant d'être archivé dans leur coffre-fort personnel. En général, les notes sur les délibérations ne sont pas abordées lors de la séance suivante du Conseil fédéral. Leur adoption ne figure en tout état de cause jamais à l'ordre du jour. Les membres du Conseil fédéral ont l'obligation de les tenir sous clef pendant toute la durée de leur mandat et, à son terme, de les rendre à la ChF. Celle-ci remet toujours une copie des notes qu'elle établit aux Archives fédérales, qui les conserve 50 ans sous clef.

Le Conseil fédéral poursuit les mêmes objectifs que les CdG: il entend améliorer la possibilité de reconstituer ses décisions. Le principe de la collégialité, dont les CdG appellent par ailleurs au renforcement, s'oppose toutefois à l'établissement de comptes rendus intégraux des délibérations du Conseil fédéral. En effet, pour que le collège puisse délibérer librement et aboutir à un vrai consensus, il importe que les séances ne soient pas publiques et que le secret des propos qui y sont tenus soit garanti. Tenir des comptes rendus intégraux gênerait ainsi le libre échange des opinions. Le Conseil fédéral estime par ailleurs que des comptes rendus intégraux ne sont pas des instruments de conduite appropriés: on y trouve en effet la manière dont on a abouti à une décision, tandis que la décision en soi est déjà consignée de manière exhaustive dans le dispositif de décision. Les dispositifs de décision servent déjà d'instruments de conduite et ils doivent continuer de jouer ce rôle.

Pour le Conseil fédéral, ce sont ses décisions qu'il importe de consigner par écrit dans leur intégralité. L'art. 1, al. 5, de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA, RS 172.010.1) prévoit d'ailleurs que «[l]es décisions sont consignées par écrit séparément pour chaque affaire». Les dispositifs de décision jouant parfaitement leur rôle d'instrument de conduite depuis des dizaines d'années, il n'y a pas de raison qu'ils cessent d'être l'instrument de travail privilégié du Conseil fédéral. Soucieux de tenir compte de la recommandation des CdG, le Conseil fédéral examine cependant comment compléter et développer les dispositifs et les procès-verbaux des décisions (notamment pour assurer la reconstitution des mandats assignés oralement). La ChF a déjà 3291

été chargée de préparer un projet, qui devra notamment estimer les ressources et les moyens dont elle aurait besoin pour remplacer les «procès-verbaux verts» par un nouveau procès-verbal des décisions. Celui-ci devra non seulement contenir pour chaque objet les décisions proprement dites, mais aussi un bref résumé des discussions; il sera soumis à l'approbation du collège à la séance suivante. Le Conseil fédéral entend se prononcer sur les grandes lignes du projet avant la fin de l'année.

Dans leur rapport, les CdG estiment par ailleurs que le Conseil fédéral doit absolument se doter d'un système de contrôle des affaires (y compris des affaires en suspens) uniforme et accessible à tous les membres du collège et que ce système doit comprendre tant les mandats écrits que les mandats oraux assignés par le gouvernement. Elles rappellent notamment que le Conseil fédéral est, aux termes de la Constitution, l'autorité directoriale et exécutive suprême de la Confédération: le collège porte donc la responsabilité générale des activités déployées par chaque département. Aussi ont-elles appelé le Conseil fédéral à se doter rapidement des ressources et des moyens nécessaires pour exercer un contrôle suffisant des affaires.

Les CdG arrivent aussi à la conclusion que le rôle de la ChF et sa fonction d'étatmajor du Conseil fédéral devraient être renforcés. Promettant de revenir sur ce point dans le cadre des travaux sur la réforme du gouvernement, les CdG n'en invitent pas moins le Conseil fédéral dans leur recommandation 18 à d'ores et déjà optimiser le contrôle des mandats confiés par le collège.

Avant de répondre aux recommandations des CdG, il faut présenter brièvement les instruments de contrôle des affaires du Conseil fédéral. Les premières ébauches de contrôle des mandats confiés par le Conseil fédéral aux départements remontent aux années 1990, avec la création du Service de contrôle administratif. Le 20 décembre 2000, le Conseil fédéral a décidé de dissoudre ce service et de charger la ChF d'assumer elle-même le contrôle de l'exécution des décisions du Conseil fédéral. La ChF a élaboré à cet effet un instrument donnant une vue d'ensemble des mandats assignés aux départements par le Conseil fédéral. En 2005, cet instrument a été développé après que le Conseil fédéral a constaté que la mise en oeuvre
dans les délais par les départements de ses décisions consignées par écrit pouvait être optimisée et qu'aucun instrument ne lui donnait une vue d'ensemble de l'avancement des affaires en suspens. Depuis, la ChF procède à un contrôle des affaires par écrit et le met à jour chaque semaine sur la base des nouvelles décisions écrites prises par le Conseil fédéral. Ces dernières années, la ChF a remis deux fois l'an aux conseillers fédéraux et aux secrétaires généraux une liste des affaires en suspens relevant de leur département. Cette liste permet à la ChF de s'assurer que chaque département contrôle sa gestion interne (suivi de toutes les affaires et respect des délais). Parallèlement, la ChF a remis deux fois l'an au président de la Confédération une liste de contrôle des affaires en suspens. L'objectif était de donner une vue d'ensemble au président du collège et de fixer des priorités pour la mise en oeuvre des décisions du Conseil fédéral dans chaque département. Lors de sa séance du 24 mars 2010, le Conseil fédéral a décidé sur proposition de la ChF d'optimiser son système de contrôle des affaires. A cet effet, un suivi de l'exécution des affaires confidentielles a été introduit, de même que la remise de la liste des affaires en suspens à l'ensemble du collège (auparavant, les conseillers fédéraux prenaient simplement acte de la liste des affaires en suspens dans leur département). La ChF procède depuis lors deux fois l'an à un contrôle complet de tous les mandats écrits confiés par le Conseil fédéral aux départements qui sont liés à des affaires internes ou confidentielles. Les mandats confiés oralement échappent à ce contrôle: ces mandats sont 3292

uniquement consignés dans les notes de la ChF («procès-verbaux verts») et ces notes, tout comme les mandats écrits liés à des affaires secrètes, sont uniquement remises aux membres du Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral estime que le contrôle des affaires peut être affiné. Si le système est uniforme et accessible à tous les membres du Conseil fédéral, son exhaustivité n'est pas encore totalement assurée. Par exemple, les mandats que le Conseil fédéral confie oralement aux départements n'y sont pas recensés. L'inscription systématique des mandats oraux répondrait à la demande des CdG de consigner par écrit et dans leur intégralité tous les types d'objet et de décision. Prenant dûment compte des recommandations de la CdG et de leur rappel que le collège est responsable collectivement des activités des départements, le Conseil fédéral juge par ailleurs que l'établissement et la remise de la liste de contrôle des affaires pourraient être plus rapides et plus réguliers. La ChF pourrait ainsi mettre à jour et distribuer plus fréquemment la liste qu'elle soumet actuellement tous les six mois au Conseil fédéral.

Parallèlement à sa volonté de compléter et de développer les dispositifs et les procès-verbaux des décisions, le Conseil fédéral a donc chargé la ChF d'élaborer une stratégie d'optimisation du contrôle des affaires en réponse à la recommandation 15.

Il entend se prononcer sur le projet avant la fin de l'année.

Ad recommandation 16 Recommandation 16 Le Conseil fédéral adapte son système de suppléance aux exigences des tâches gouvernementales modernes. Il examine à cet égard la nécessité et l'opportunité d'impliquer régulièrement le suppléant dans les activités ordinaires de chaque département.

Les CdG estiment que l'échange d'informations entre les chefs de département et leur suppléant n'est pas toujours garanti. Par ailleurs, la transmission des dossiers au début et à la fin des suppléances n'est pas réglée, ce qui peut conduire à ce que le même travail soit fait deux fois. Les CdG arrivent à la conclusion que le système des suppléances au sein du Conseil fédéral doit être adapté sur de nombreux plans pour répondre aux besoins d'un gouvernement moderne. Elles demandent dès lors, d'une part, de trouver des solutions appropriées pour le cas où un membre du Conseil fédéral est dans l'incapacité
d'exercer sa fonction et, d'autre part, de prendre les mesures nécessaires en étudiant notamment la possibilité d'impliquer régulièrement le suppléant dans les activités du département.

La question des suppléances au Conseil fédéral n'est réglée que de manière sommaire dans la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA, RS 172.010). Celle-ci prévoit uniquement que le Conseil fédéral désigne en son sein le suppléant de chaque chef de département (art. 22 LOGA). Chaque conseiller fédéral a donc un suppléant au sein du collège. Les suppléants sont désignés sur décision du Conseil fédéral lors de la répartition des départements, qui a lieu au début de la nouvelle législature ou après l'élection de nouveaux conseillers fédéraux.

Le Conseil fédéral est disposé à accepter la recommandation 16 des CdG et à préciser les dispositions réglant les suppléances. Il proposera à cet effet dans le message 3293

additionnel sur la réforme du gouvernement d'adapter l'art. 22 LOGA. Chaque membre du Conseil fédéral sera tenu par la loi d'organiser son département de manière à ce que, en cas d'imprévu, son suppléant puisse le reprendre immédiatement en étant informé des affaires importantes et des décisions à prendre. La nouvelle disposition prévoira également d'assurer autant que possible une transmission formelle des dossiers tant au début qu'à la fin d'une suppléance, comme cela se pratique lorsqu'un nouveau président entre en fonction ou qu'un conseiller fédéral change de département, l'objectif étant d'éviter que le même travail soit fait deux fois. Les délégations du Conseil fédéral seront par ailleurs utilisées de manière plus conséquente pour assurer un échange d'informations ciblé. Ces délégations sont déjà utilisées pour discuter de sujets qui relèvent de la compétence de plusieurs conseillers fédéraux. Le Conseil fédéral n'entend en revanche pas régler dans la loi la question de l'implication régulière du suppléant dans les activités du département.

Outre les problèmes de délai et de capacités qui risqueraient de se poser, il ne semble pas nécessaire d'informer systématiquement le suppléant en plus des informations qui doivent être données au collège. Le Conseil fédéral estime qu'une information ponctuelle visant à s'assurer que le suppléant est prêt à reprendre en tout temps la direction du département est suffisante.

Ad motion 3 (10.3393 et 10.3632) Motion 3 Le Conseil fédéral est chargé de réglementer dans la LOGA l'instrument des délégations à trois personnes, afin que dans toutes les affaires importantes et supra-départementales ces délégations promeuvent un équilibre entre le principe de la collégialité et le principe départemental et améliorent ainsi les bases de décision du Conseil fédéral.

Les CdG estiment que le travail du Conseil fédéral est fortement marqué par la division en départements (art. 177, al. 2, Cst.) et que ce cloisonnement risque de vider de sa substance le principe de la collégialité (art. 177, al. 1, Cst). Les membres du Conseil fédéral se retiendraient ainsi de demander des renseignements, de peur que ces demandes soient considérées comme une atteinte au principe de la collégialité. Les co-rapports feraient l'objet de la même retenue. Les CdG jugent donc qu'il est
indispensable que le collège gouvernemental assure un équilibre entre la division en départements et le principe de la collégialité et relèvent qu'il est le seul à pouvoir réaliser cette tâche. Elles arrivent à la conclusion que les délégations à trois personnes du Conseil fédéral, qu'elles soient permanentes ou créées spécialement, constituent des instruments appropriés pour trouver un meilleur équilibre. Le travail en petit comité permet en effet de discuter en amont et de manière approfondie de sujets difficiles, en élargissant la réflexion et en impliquant au plus haut niveau les départements concernés. Les solutions qui y sont élaborées sont par ailleurs plus largement soutenues par le collège.

Le Conseil fédéral tient tout d'abord à réfuter l'idée que ses membres feraient preuve de retenue dans les affaires relevant d'un de leurs collègues par respect du principe de la collégialité. Les co-rapports écrits sont l'instrument permettant aux différents départements de participer aux décisions du Conseil fédéral: ils sont fréquemment utilisés pour faire des propositions ou des commentaires sur les affai3294

res relevant d'autres départements. Les statistiques montrent que, depuis 2008, environ 1700 co-rapports ont été déposés sur un total de quelque 3200 affaires (objets récurrents et interventions parlementaires exceptés). Lorsque les objets sont controversés, les départements déposent même plusieurs co-rapports.

Dès que trois co-rapports sont déposés sur une même affaire, le département dont elle relève établit un tableau synoptique des divergences et prend immédiatement position sur les propositions des autres départements. Si le département qui a déposé un co-rapport n'est pas d'accord avec cette réponse, il peut déposer une réplique à l'avis du département.

Les membres du Conseil fédéral utilisent par ailleurs largement la possibilité de s'exprimer sur les affaires de leurs collègues au cours des séances.

Lorsque les affaires sont controversées, le collège procède fréquemment à une discussion préliminaire avant de prendre la décision définitive lors de la séance suivante ou deux séances plus tard. Le Conseil fédéral a par ailleurs recours à l'instrument de l'échange de vues au début du processus de décision pour confronter différentes options sur la manière générale de traiter une question.

Cela étant, le Conseil fédéral convient que les délégations pourraient renforcer la conduite collégiale. Une collaboration étroite de trois conseillers fédéraux et de trois départements permet plus facilement de dépasser une approche purement départementale et de faire d'un objet l'affaire du collège tout entier. Les délégations aident à sortir d'un cadre de réflexion sectoriel. Toutefois, pour qu'elles contribuent à renforcer la collégialité, il faut que le Conseil fédéral soit informé en permanence et de manière suffisante des travaux qui s'y déroulent.

Il existe aujourd'hui 17 délégations: certaines ont été créées dans les années 1970, tandis que d'autres remontent à ces dernières années. Une partie d'entre elles ne sont plus utilisées. Le Conseil fédéral convient qu'il est possible de mieux utiliser les délégations, raison pour laquelle il a proposé le 18 août 2010 d'adopter la motion 3 (10.3393 et 10.3632).

Le Conseil fédéral entend dissoudre toutes les délégations existantes pour la fin de l'année et ne créer, pour le début de l'année 2011, que celles qui sont vraiment nécessaires. Leur rôle doit
par ailleurs être renforcé de manière ciblée. Aussi le Conseil fédéral entend-il adapter la disposition régissant la constitution de délégations du Conseil fédéral (art. 23 LOGA), en réponse aux motions précitées. Il soumettra son projet dans le message additionnel sur la réforme du gouvernement. Le message prévoira ainsi d'inscrire dans la loi que les délégations du Conseil fédéral informent régulièrement le collège de leurs délibérations, afin que celui-ci puisse discuter des questions politiques importantes et prendre les décisions avec une grande efficacité. L'art. 23 LOGA prévoira par ailleurs que chaque délégation dispose d'un secrétariat. Rattaché à un des départements dont relèveront les affaires de la délégation, le secrétariat assurera le travail administratif de la délégation (organisation des séances, établissement du procès-verbal et gestion de la documentation). La loi précisera par ailleurs que les délégations jouent le rôle d'organe de préparation des décisions du Conseil fédéral.

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Ad motion 4 Motion 4 Le Conseil fédéral est chargé, dans le cadre de la réforme du gouvernement en cours, de décider respectivement de proposer des mesures concrètes afin qu'il puisse assumer une conduite effective des affaires importantes, qui soit en accord avec sa responsabilité globale en tant qu'autorité collégiale et exécutive suprême.

Les CdG estiment que le Conseil fédéral «n'a pas assumé sa responsabilité globale en tant que collège et autorité exécutive suprême du pays dans le dossier des activités transfrontalières d'UBS». Elles l'expliquent par sa conception de l'autorité collégiale et par la primauté de la division en départements. Aussi considèrent-elles qu'il est urgent de faire en sorte que le Conseil fédéral agisse véritablement en collège assumant une responsabilité collective lorsqu'il conduit des affaires importantes au lieu d'en donner simplement l'apparence.

Aux termes de l'art. 174 Cst., le Conseil fédéral est l'autorité directoriale et exécutive suprême de la Confédération. Le principe de l'autorité collégiale et la division en départements figurent pour leur part à l'art. 177 Cst. L'al. 1 prévoit que le Conseil fédéral prend ses décisions en autorité collégiale, tandis que l'al. 2 dispose que, pour la préparation et l'exécution des décisions, les affaires du Conseil fédéral sont réparties entre ses membres par département. A l'échelon de la loi, l'art. 4 LOGA précise que le Conseil fédéral assume collégialement ses responsabilités gouvernementales. La responsabilité de conduite du Conseil fédéral découle notamment de l'art. 6 LOGA: aux termes de l'al. 2, le Conseil fédéral doit accorder la priorité aux obligations gouvernementales. Notons que cette disposition s'applique également aux membres du Conseil fédéral. Ceux-ci ne doivent pas uniquement s'occuper de leurs propres dossiers, mais aussi de ceux des autres départements. En vertu de l'art. 6, al. 3, LOGA, le Conseil fédéral est tenu par ailleurs de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer l'activité gouvernementale. Enfin, aux termes de l'art. 25, al. 2, let. d, LOGA, le président de la Confédération peut demander en tout temps des éclaircissements sur des affaires déterminées et proposer au Conseil fédéral les mesures qui lui paraissent opportunes.

Les dispositions régissant l'autorité collégiale du
Conseil fédéral mériteraient effectivement d'être complétées pour assurer une conduite collégiale de l'ensemble des affaires. Le Conseil fédéral convient donc que la collégialité du gouvernement doit être renforcée, raison pour laquelle il a décidé le 18 août 2010 de proposer l'adoption de la motion 4 (10.3394 et 10.3633).

L'objectif doit être d'assurer une responsabilité globale du gouvernement dans la conduite des affaires. Pour que le Conseil fédéral puisse assumer efficacement son rôle de conduite, les informations doivent lui être remises à temps et de manière continue. Les membres du Conseil fédéral et le chancelier de la Confédération doivent donc être expressément tenus d'informer régulièrement le collège sur les affaires qui relèvent de leur compétence. Chaque conseiller fédéral aura à cet égard la responsabilité d'évaluer si telle ou telle affaire est importante pour le collège et à quel moment l'en informer. Le Conseil fédéral doit par ailleurs avoir le droit d'exiger d'un de ses membres qu'il donne des informations sur une affaire importante.

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C'est pourquoi il proposera dans le message additionnel sur la réforme de la conduite de l'Etat de régler dans une nouvelle disposition le devoir d'information des conseillers fédéraux et du chancelier de la Confédération et le droit du Conseil fédéral d'obtenir des renseignements d'un de ses membres (nouvel art. 12a).

Pour renforcer sa conduite, le Conseil fédéral entend également mieux régler dans la loi les tâches du porte-parole du Conseil fédéral, en y inscrivant plus précisément la pratique actuelle. L'art. 10a OLOGA prévoira ainsi que le porte-parole du Conseil fédéral conseille le gouvernement et ses membres pour toutes les affaires liées à l'information du public, ce qui permettra de garantir l'uniformité de la politique d'information et de communication du Conseil fédéral. Cette modification sera proposée dans le message additionnel sur la réforme du gouvernement.

Enfin, le Conseil fédéral examine les moyens de renforcer sa conduite lorsque le président de la Confédération est le chef du département dont relève une affaire qui entraîne une situation extraordinaire. Dans un tel cas de figure, la conduite du Conseil fédéral doit être séparée de la conduite de l'affaire. Il faudra alors décider si le président de la Confédération confie l'affaire à son suppléant ou s'il confie au vice-président du Conseil fédéral la conduite des séances du gouvernement consacrées à cette affaire. Le Conseil fédéral entend inscrire dans l'OLOGA l'obligation de faire ce choix.

Ad recommandation 17 Recommandation 17 Les CdG invitent les commissions législatives compétentes, dans le cadre de leurs délibérations relatives au projet de réforme du gouvernement, à accorder une importance particulière aux mesures visant à une conduite par le collège du Conseil fédéral des dossiers importants, qui soit effective et en accord avec sa responsabilité globale en tant qu'autorité collégiale et exécutive suprême.

Le Conseil fédéral ne se prononce pas sur cette recommandation, car elle s'adresse aux commissions parlementaires.

Ad recommandation 18 Recommandation 18 Les CdG invitent le Conseil fédéral à faire recenser par la Chancellerie fédérale tous les mandats confiés à ses membres et à implémenter un controlling à l'intention du collège gouvernemental.

Dans son avis relatif à la recommandation 15, le Conseil fédéral
s'est déjà exprimé en détail sur la question d'un contrôle suffisant des affaires. A titre de complément, il prend position comme suit sur la recommandation concernant un controlling à l'intention du Conseil fédéral:

3297

L'instauration d'un controlling global à l'intention du Conseil fédéral permettra de mettre en place un instrument de pilotage et de coordination qui contribuera notamment à la réalisation à long terme des objectifs fixés. A cet égard, les responsables du contrôle des affaires devront en permanence fournir des informations au Conseil fédéral et aux départements. Les tâches relevant du controlling dépasseraient la simple comparaison qui se fait déjà par le biais du contrôle des affaires dans sa forme actuelle, à savoir vérifier les tâches à effectuer et celles qui l'ont déjà été. Le controlling global doit avant tout être un instrument d'information qui contribue à optimiser le pilotage et la coordination des affaires par le Conseil fédéral. Tant le collège gouvernemental que les départements en sortiront gagnants. Le controlling permettra d'identifier non seulement les éventuelles divergences par rapport à la planification, mais aussi leurs causes et leurs conséquences, et de prendre les mesures correctrices qui s'imposent. Il permettra avant tout de contrôler l'état d'avancement (notamment les décisions préliminaires, l'ouverture des consultations, la prise de connaissance des résultats des consultations, les messages/rapports, les délibérations parlementaires, les votations populaires et les mesures d'exécution) de toutes les affaires du Conseil fédéral et de tous les mandats émanant du Parlement et du Conseil fédéral (mandats figurant dans des motions, des postulats et des actes normatifs), mais aussi de fournir des informations sur l'évolution des dossiers. Le controlling devra porter notamment sur les affaires inscrites dans le programme de la législature et sur les objectifs annuels. Mais il devra aussi tenir compte des affaires non planifiées, des affaires non prioritaires, des initiatives parlementaires, des interventions, etc. En cas de nécessité, il faudra aussi combiner les informations entre elles (p. ex. si une motion charge le Conseil fédéral de présenter un projet d'acte normatif). Par ailleurs, le controlling devrait inclure des informations sur les travaux des délégations du Conseil fédéral et les combiner avec les affaires du Conseil fédéral. Le controlling est donc un complément au simple contrôle de l'état d'avancement des affaires. Enfin, l'instrument global devra aussi fournir
des informations de nature matérielle par le biais d'un contrôle de l'orientation du contenu des affaires par rapport aux lignes directrices et aux objectifs du Conseil fédéral.

Le Conseil fédéral arrive à la même conclusion que les CdG: le contrôle des affaires dans sa forme actuelle peut être optimisé, voire transformé en un controlling plus complet. Fort de ce constat, il faut décider de l'attribution des tâches et des ressources nécessaires. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral a chargé la Chancellerie fédérale, lors de sa séance du 18 août 2010, de lui présenter d'ici à la fin de l'année 2010 un projet destiné à optimiser les tâches qu'elles effectue actuellement, à savoir le recensement des mandats et le contrôle des affaires du Conseil fédéral.

Ad postulat 2 Postulat 2 Le Conseil fédéral est chargé d'examiner de manière approfondie, dans un rapport détaillé, les questions soulevées par le rapport des CdG à propos de l'application de l'art. 271 CP et de la compatibilité du Qualified Intermediary Agreement avec le secret bancaire suisse.

3298

Les CdG indiquent qu'elles n'ont pas examiné, dans le cadre de l'enquête qu'elles ont menée, jusqu'à quel point le QIA conclu en l'an 2000 entre l'Etat américain et l'Association suisse des banquiers était effectivement compatible avec le secret bancaire ni, dans l'affirmative, s'il l'était encore après son durcissement unilatéral par l'IRS. Elles signalent qu'elles n'ont pas non plus examiné le rôle joué par le DFF ou l'AFC dans le cadre des négociations menées à l'époque entre l'Association suisse des banquiers et l'IRS, ajoutant, d'une part, qu'elles ont seulement pu constater que la CFB admettait que le QIA était compatible avec le secret bancaire, mais que, manifestement, elle ne s'était jamais penchée attentivement sur cette question, pas plus que le DFF. Les CdG estiment par conséquent qu'il serait souhaitable que les autorités suisses fassent toute la lumière sur cette question et, notamment, qu'elles déterminent clairement le rôle joué par les autorités suisses dans le cadre de la négociation de contrats privés entre les banques suisses et l'Etat américain ­ ou celui qu'elles doivent y jouer. Elles ajoutent qu'il conviendrait en outre d'examiner si des autorisations telles que celle susmentionnée ne devraient pas faire l'objet d'un réexamen périodique.

Le Conseil fédéral a décidé le 18 août 2010 de proposer l'acceptation du postulat 2.

Il reconnaît le bien-fondé de la demande figurant dans le postulat. L'OFJ étudiera les questions relatives à l'art. 271 CP qui ont été soulevées dans le rapport des CdG, alors que le SFI examinera l'ensemble des questions relatives au QIA.

Ad motion 5 Motion 5 Le Conseil fédéral est chargé de réviser les art. 164 et 165 CP, afin d'étendre le champ de leur application aux grandes entreprises qui, en raison de leur importance systémique pour l'économie du pays et la stabilité financière, doivent être préservées de la faillite par des interventions de l'Etat.

Les CdG sont d'avis que les éléments constitutifs énumérés à l'art. 164 CP (diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers) et à l'art. 165 CP (gestion fautive) devraient être applicables également aux entreprises d'importance systémique que l'Etat doit soutenir financièrement, ou a dû soutenir financièrement, pour éviter leur faillite, comme c'était le cas pour UBS. Pour que ces deux
dispositions s'appliquent, il faut toutefois que la faillite ait été déclarée ou qu'un acte de défaut de bien ait été dressé. La motion vise à compléter ces conditions objectives de punissabilité.

Le Conseil a décidé, le 18 août 2010, de proposer le rejet de la motion pour les raisons suivantes: Sous l'angle de la systématique, les art. 164 et 165 CP font partie des dispositions réprimant les crimes et les délits en matière de poursuites pour dettes et de faillite, la punissabilité objective de ces infractions étant subordonnée à la condition que le débiteur ait été déclaré en faillite ou qu'un acte de défaut de biens ait été dressé contre lui. Cette condition supplémentaire, si elle traduit le risque qui pèse jusqu'à un certain point sur les intérêts des créanciers, met aussi en péril leurs droits d'agir en recouvrement de leur créance. Ce n'est toutefois qu'à cette condition qu'il peut y avoir matière à sanction pénale. En outre, elle permet d'exclure toute sanction lors3299

qu'il apparaît d'emblée difficile d'établir que le débiteur a porté atteinte aux intérêts du créancier. La modification demandée par la motion abolirait la restriction de la punissabilité que le législateur a voulu imposer en subordonnant celle-ci à la condition objective susmentionnée.

Tout d'abord, les art. 164 et 165 CP protègent le patrimoine des créanciers en obligeant le débiteur tombé en faillite ou menacé de faillite à conserver intact les valeurs patrimoniales des créanciers dont il dispose encore. Par voie de conséquence, pour que le débiteur soit punissable, il faut qu'il ait causé à ses créanciers un dommage (art. 164 CP) ou, du moins, un préjudice temporaire (art. 165 CP). Toutefois, aussi longtemps que la faillite du débiteur n'a pas été déclarée ou qu'un acte de défaut de biens n'a pas été dressé contre lui, il sera très difficile voire impossible d'établir ce dommage ou ce préjudice. Cela vaut en particulier pour les grandes entreprises qui, en raison de leur importance systémique pour l'économie du pays et la stabilité financière, doivent être préservées de la faillite; ceci étant, les créanciers ne subissent en règle générale pas de dommages. De même, les dispositions en cause visent à sauvegarder les intérêts de l'exécution forcée en tant que partie intégrante de l'administration de la justice. Il s'agit de garantir le déroulement régulier de la procédure d'exécution forcée. Or cet objectif est éludé si l'Etat intervient lors de faillites de grandes entreprises d'importance systémique. La modification demandée ne permettrait plus de protéger les mêmes biens juridiques que le droit en vigueur.

Du reste, s'agissant des grandes entreprises ayant une importance systémique, on ne sait pas avec certitude quels biens juridiques devraient en définitive être protégés.

Par voie de conséquence, la modification en question sort du cadre tracé pour les dispositions sanctionnant les infractions en matière de poursuites et de faillite.

Partant, elle est incompatible avec la nature même de ces dispositions (cf. ATF 103 IV 234).

De surcroît, la modification demandée aurait pour effet de créer deux poids, deux mesures: les collaborateurs de grandes entreprises n'ayant pas une importance systémique seraient soumis à des conditions de punissabilité plus sévères que ceux des grandes entreprises
ayant une importance systémique. Encore faudrait-il définir précisément ce qui caractérise ces dernières entreprises. Une telle inégalité devant la loi ne se justifie pas objectivement. De même, pour une grande entreprise d'importance systémique, le fait que la punissabilité soit soumise à une condition préalable est de nature à transformer toute innovation ­ représentant très souvent un risque ­ en un exercice «sur la corde raide», ce qui, en définitive, n'est pas fait pour dynamiser l'économie. Enfin, l'ouverture précoce d'une procédure pénale est de nature à mettre notablement en péril, voire à réduire à néant, les intérêts des créanciers et les interventions de l'Etat.

3300

Ad recommandation 19 Recommandation 19 Les CdG demandent au Conseil fédéral ainsi qu'à UBS de veiller, respectivement de créer les conditions nécessaires à ce que: 1.

la manière dont UBS ­ notamment le conseil d'administration, la direction du groupe et la société de révision ­ a géré à l'interne la crise des subprimes et les affaires transfrontalières de la banque aux Etats-Unis soit revue en profondeur (opportunité du dépôt par UBS d'une plainte pénale et d'une action en responsabilité, mise à l'ordre du jour de la décharge pour les années 2007 à 2009 lors de l'assemblée générale d'UBS le 15 avril 2010, conventions de départ des cadres moyens et supérieurs, etc.);

2.

toute la transparence soit faite sur la décision du Conseil d'administration d'UBS de ne pas entamer de procédures pénales et civiles contre les anciens cadres d'UBS;

3.

la Confédération, respectivement ses organes ayant une personnalité juridique propre, soient en mesure ­ en tant qu'actionnaires d'UBS ou en tant que groupes d'actionnaires ­ d'entreprendre des procédures pénales et/ou civiles (actions en responsabilité) contre les membres responsables du Conseil d'administration, les membres responsables de la direction générale et le cas échéant contre la société de révision. A cette fin, la Confédération porte les risques liés au procès et garantit la prise en charge des frais de procédure (frais du tribunal et des avocats);

4.

les résultats et conclusions essentiels de ces travaux soient rendus publics.

Pour les CdG, il est absolument crucial que ces examens soient menés de manière complètement indépendante, par exemple par un groupe d'experts neutre.

Les CdG indiquent qu'elles se sont limitées à leurs propres compétences dans le cadre de cette inspection, raison pour laquelle leur rapport du 30 mai 2010 ne tient compte que de façon limitée de l'exigence de transparence concernant les activités internes de la banque et les responsabilités. A cet égard, elles adressent donc les recommandations suivantes au Conseil fédéral et à UBS: Etablissement de la transparence sur les événements survenus Le Conseil fédéral comprend que les CdG et le public réclament la transparence sur les activités internes de la banque et les responsabilités. Cette exigence est justifiée après l'intervention financière en faveur d'UBS et après les efforts déployés par la Confédération pour soutenir UBS dans diverses procédures menées aux Etats-Unis contre cette banque. Le Conseil fédéral se félicite donc que, en réaction au rapport des CdG, UBS publiera prochainement un rapport sur la transparence et deux avis indépendants qui présenteront les faits et les événements en rapport avec les pertes qui ont menacé l'existence de la banque pendant la crise financière et avec les activités de gestion de fortune transfrontalière menées aux Etats-Unis. Le Conseil fédéral n'a pas pour mandat de porter un jugement complet sur ces documents et sur les résultats auxquels ils aboutissent. Il estime cependant qu'ils tiennent suffisamment 3301

compte du besoin de transparence et d'information concernant les activités internes de la banque, tout du moins pour l'instant. On se rend compte qu'il existe, outre un rapport interne de l'UBS de 400 pages, daté du 4 avril 2008, des rapports de la CFB du 30 septembre et du 17 décembre 2008, un rapport de la FINMA du 18 février 2009 ainsi que plusieurs avis rédigés par des organes de surveillance et des cabinets d'avocats internationaux. Les deux experts indépendants ont aussi pu consulter tous les dossiers et ont exposé en détail leur vision des événements. Ils considèrent que s'il y a une question qui nécessite qu'on agisse, c'est bien celle de l'orientation future de la place financière suisse et des réglementations qui la régiront. Il se peut que les procédures en cours aux Etats-Unis, voire des actions en responsabilité qu'UBS ou certains actionnaires pourraient intenter en Suisse, apportent du nouveau. Le Conseil fédéral estime donc que les points 1, 2 et 4 de la recommandation 19 sont réglés.

Endossement de la responsabilité par les membres de certains organes d'UBS Le Conseil fédéral comprend que les CdG demandent, au point 3 de la recommandation 19, que la responsabilité soit endossée par les membres de certains organes d'UBS. Il estime toutefois que les mesures envisagées ne sont pas licites en vertu du droit en vigueur et que, considérées dans leur ensemble, elles ne servent pas les intérêts du pays: il considère qu'on n'atteindra pas l'objectif visé en faisant assumer à la Confédération les risques liés à un procès et les frais de procédure. Il pense par ailleurs qu'il serait contestable de créer spécialement pour ce cas d'espèce les conditions permettant à la Confédération ou à des organes de cette dernière ayant une personnalité juridique propre, en qualité d'actionnaire(s) d'UBS, voire à d'autres groupes d'actionnaires, d'ouvrir des procédures pénales ou civiles. Les chapitres suivants présentent les raisons qui ont amené le Conseil fédéral à adopter cette position.

a. Responsabilité sur le plan civil La loi confère aux actionnaires une série de droits (droit de demander des renseignements [art. 697 CO]; droit à l'institution d'un contrôle spécial [art. 697a ss CO]; droit de requérir l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée générale d'une proposition visant à ouvrir une action
en responsabilité contre les anciens organes de la société [art. 699, al. 3, CO]) qui peuvent être exercés dans la perspective de l'ouverture d'une action en responsabilité. Pour qu'une personne soit responsable sur le plan civil, il faut qu'elle ait causé un dommage à la société en manquant intentionnellement ou par négligence à ses devoirs (art. 754 et 755 CO), étant entendu que la société ou les actionnaires ne peuvent agir qu'en paiement de dommagesintérêts à la société et non pas aux personnes ayant intenté l'action (art. 756, al. 1, CO). Il est difficile d'apporter la preuve visant à déterminer si tel ou tel comportement des organes de la société est fautif ou contraire aux règles établies. Une décision prise par un organe de la société, qui peut sembler être une erreur dans le contexte actuel, ne peut pas servir de motif pour justifier une responsabilité au sens de la loi si le conseil d'administration, les responsables de la gestion et l'organe de révision ont agi de bonne foi dans le contexte de l'époque. Les actions en responsabilité sur le plan civil sont en général des procédures longues et complexes dont l'issue est incertaine et qui génèrent régulièrement des frais élevés. Même dans le cas d'une action partielle portant sur une valeur litigieuse faible, une action contre les responsables d'UBS pourrait engendrer des frais de plusieurs millions de francs en raison des préparatifs et des recherches préliminaires qui seraient nécessaires.

3302

Le 14 avril 2010, l'assemblée générale d'UBS a donné décharge à l'ancien conseil d'administration pour les exercices 2008 et 2009, mais pas pour l'exercice 2007.

Pour les exercices 2008/2009, les actionnaires qui ne sont pas d'accord avec la décision prise ont six mois pour intenter une action (art. 758, al. 2, CO), donc jusqu'au 14 octobre 2010. Pour l'exercice 2007, il reste loisible à la société et aux actionnaires d'intenter des actions en dommages-intérêts étant donné que la décharge a été refusée. Le délai de prescription pour d'éventuelles actions est de cinq ans (art. 760, al. 1, CO). Au cas où des faits pertinents pour déterminer la responsabilité des organes se seraient produits avant 2007, la possibilité demeure d'intenter une action pour les exercices antérieurs malgré l'octroi de la décharge si l'assemblée générale a pris des décisions sans connaître des faits susceptibles de donner lieu à une action en responsabilité, ce qui pourrait être fort probable dans le cas présent.

b. Prise en charge des risques liés à un procès et des frais de procédure Compte tenu des frais de procédure élevés auxquels il faudrait s'attendre et de l'incertitude quant à l'issue d'un procès en raison des obstacles légaux élevés à franchir pour établir une responsabilité sur le plan civil, il est peu probable, dans le cas présent, qu'un actionnaire intente seul une action en responsabilité contre les responsables d'UBS. Contrairement au droit américain, où les actions collectives sont courantes, le droit suisse n'offre pas la possibilité d'intenter des actions de ce type. Proposée pour cette raison, la prise en charge des risques liés à un procès et des frais de procédure par la Confédération doit néanmoins être rejetée pour les raisons suivantes: Dans la mesure où il faudrait créer de nouvelles bases légales pour pouvoir mettre en oeuvre les mesures exigées par les CdG, le Conseil fédéral considère qu'il faut rejeter pour les raisons fondamentales suivantes, relevant des principes régissant l'Etat de droit, une telle législation à effet rétroactif, qui serait édictée pour un cas d'espèce.

La Confédération devrait être elle-même actionnaire d'UBS pour qu'elle puisse faire valoir les droits mentionnés plus haut vis-à-vis des organes de la société, ce qui n'est pas le cas actuellement. A contrario, l'acquisition
d'une action UBS dans le seul but de pouvoir intenter une action devrait être considérée comme un abus en vertu du droit en vigueur, et devrait donc être écartée. De surcroît, l'art. 62, al. 2, de la loi du 7 octobre 2005 sur les finances de la Confédération (LFC; RS 611.0) interdit à cette dernière d'acquérir, à des fins de placement, des immeubles ou des parts du capital d'entreprises à but lucratif.

En leur qualité d'actionnaires d'UBS, les organes de la Confédération ayant une personnalité juridique propre pourraient intenter une action civile contre les organes d'UBS s'ils n'ont pas voté pour la décharge ou si la déchargé a été refusée par l'assemblée générale. Les organes entrant en ligne de compte sont la Caisse fédérale de pensions (PUBLICA) et le fonds de compensation de l'AVS, car ils détiennent des actions UBS. Ces deux organes sont des établissements fédéraux de droit public qui ont une personnalité juridique propre et qui doivent remplir chacun les tâches que la loi leur impartit (garantir respectivement la prévoyance professionnelle des employés de la Confédération et le versement des rentes AVS). Pour ce faire, ils disposent d'une autonomie et d'une indépendance étendues. C'est la raison pour laquelle ni le Conseil fédéral ni le Parlement ne peuvent les contraindre, en vertu du droit en vigueur, à intenter une action en justice contre les responsables d'UBS. Par ailleurs, on peut se demander si les organes de PUBLICA ou du fonds de compensa3303

tion de l'AVS agiraient véritablement dans l'intérêt des assurés au cas où ils viendraient à déposer une action en responsabilité relevant du droit des sociétés anonymes, sachant que cette procédure aurait sans aucun doute des répercussions négatives sur l'évolution du cours de l'action UBS, ce qui ferait baisser sensiblement sa valeur, au détriment des assurés.

Demandée par les CdG, la prise en charge des risques liés à un procès et des frais de procédure par la Confédération n'est pas non plus compatible avec la législation actuelle sur les finances de la Confédération. Etant donné que les frais inhérents à un procès pourraient se monter à plusieurs dizaines voire centaines de millions de francs, mais aussi qu'UBS ­ et non pas les actionnaires ayant intenté une action ou la Confédération ­ pourrait se voir allouer des dommages-intérêts, la garantie, fournie par la Confédération, de prendre en charge des frais de procès et de procédure serait contraire aux dispositions pertinentes de la LFC, en vertu desquelles la Confédération doit veiller à un emploi économe et efficace de ses fonds (voir à ce propos les art. 12, al. 4, et 59, al. 2, LFC). De surcroît, une telle garantie constituerait une aide financière au sens de l'art. 3, al. 1, de la loi du 5 octobre 1990 sur les subventions (RS 616.1), aide qui ne doit être versée que si une disposition légale le prévoit expressément et si un crédit d'engagement correspondant a été approuvé (cf. art. 21, al. 4, let. e, LFC). La base légale requise pour l'octroi d'une aide financière n'existe toutefois pas, sans parler du fait qu'il ne faudrait pas créer une telle base légale spécialement pour un cas d'espèce, pour des raisons inhérentes aux principes régissant l'Etat de droit, comme cela a déjà été mentionné.

c. Responsabilité sur le plan pénal Si seules certaines personnes sont habilitées à intenter des actions en responsabilité de nature civile, chacun a le droit de dénoncer des infractions à une autorité de poursuite pénale. Qui plus est, la procédure pénale est gratuite pour le dénonciateur, sauf dans les cas où il provoque l'ouverture injustifiée de la procédure, que ce soit intentionnellement ou par négligence grave. Suite à plusieurs dénonciations contre les responsables d'UBS, le ministère public III du canton de Zurich a procédé à de longues
investigations préliminaires, qui n'ont pas permis d'établir que des organes ou des collaborateurs d'UBS avaient commis des actes répréhensibles en vertu du droit pénal. Comme aucun soupçon de gestion déloyale n'a pu être établi, aucune procédure pénale n'a été ouverte contre les anciens membres du conseil d'administration et de la direction d'UBS.

Recommandation adressée à UBS Il ressort du rapport sur la transparence rédigé par UBS et de la prise de position juridique indépendante qui l'accompagne ­ lesquels seront publiés prochainement ­ que les membres de certains organes d'UBS ont effectivement commis des actes contraires aux dispositions sur la responsabilité figurant dans la législation sur les sociétés anonymes, en particulier dans le domaine de la gestion de fortune transfrontalière. Il ressort également de ces documents qu'UBS et ses actionnaires ne sont pas juridiquement tenus d'intenter une action en responsabilité contre les responsables, mais aussi que, dans l'optique de la défense des intérêts de la société et après examen de tous les faits, il est non seulement opportun, mais aussi recommandé, de renoncer à une action en responsabilité.

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Dans ces conditions, le Conseil fédéral recommande à l'actuel conseil d'administration d'UBS d'examiner encore une fois la situation avec soin pour déterminer s'il évalue les faits pertinents de la même manière qu'auparavant et s'il entend renoncer définitivement à intenter une action en responsabilité. Comme il a été mentionné plus haut, la société et les actionnaires ont toujours la possibilité d'intenter des actions en dommages-intérêts pour l'exercice 2007 étant donné que, le 14 avril 2010, l'assemblée générale d'UBS n'a pas donné décharge à l'ancien conseil d'administration pour l'exercice 2007. Il en va de même pour les exercices antérieurs, malgré l'octroi de la décharge, dans la mesure où l'assemblée générale a donné décharge sans connaître des faits susceptibles de donner lieu à une action en responsabilité, ce qui est fort probable en l'occurrence.

Examen de la nécessité de légiférer Pour le Conseil fédéral, il est insatisfaisant de constater qu'il arrive souvent, dans des cas comme le cas présent, que des procès en responsabilité n'ont pas lieu ­ certes pas uniquement mais notamment ­ parce que des actionnaires ne sont pas en mesure d'assumer les risques liés à un procès. Il convient d'indiquer à cet égard qu'on a renoncé unanimement à doter le code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC; RO 2010 1739, RS 272; entrée en vigueur le 1er janvier 2011) d'instruments généraux qui auraient permis de faire valoir à titre collectif des prétentions réparatoires (actions collectives). Qui plus est, l'instrument constitué par l'action des organisations, qui figure à l'art. 89 du nouveau CPC, ne peut pas être utilisé pour intenter une action en dommages-intérêts.

C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral va examiner avec attention s'il ne faudrait pas prévoir malgré tout des instruments permettant d'intenter des actions en justice pour pouvoir défendre des intérêts collectifs dans le domaine de la responsabilité en droit des sociétés anonymes, instruments qui permettraient de faire valoir des prétentions en responsabilité concernant précisément des sociétés ouvertes au public dont le capital-actions est atomisé entre les actionnaires. Il va également falloir mener des réflexions sur la possibilité de désintéresser en priorité les actionnaires qui ont intenté une action contre la société,
d'une manière analogue à ce qui est prévu dans la législation sur la poursuite pour dettes et la faillite dans le cadre de la cession de droits pour les créanciers qui ont intenté une action (art. 260, al. 2, de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite [LP, RS 281.1]).

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