11.023 Message relatif à la loi fédérale sur l'imposition des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles du 4 mars 2011

Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons le projet de loi fédérale sur l'imposition des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles en vous proposant de l'adopter.

Par ailleurs, nous vous proposons de classer l'intervention parlementaire suivante: 2009

M 08.3450

Pour une fiscalité équitable des frais de formation et de perfectionnement (CE 30.09.2008, Commission de l'économie et des redevances CE; CN 23.09.2009)

Nous vous prions d'agréer, Messieurs les Présidents, Mesdames, Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

4 mars 2011

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Micheline Calmy-Rey La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-3258

2429

Condensé Le droit en vigueur admet la déduction des frais de perfectionnement en rapport avec la profession exercée, des frais de reconversion professionnelle imposée par des circonstances extérieures et des frais de réinsertion professionnelle. Désormais, seront déductibles en plus les frais d'une reconversion professionnelle volontaire et les frais en vue d'une promotion professionnelle, sans égard à la profession exercée. Les frais de formation engagés jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II ne sont pas déductibles, comme jusqu'à présent. La déduction sera plafonnée.

Se fondant sur la motion de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (08.3450) transmise le 23 septembre 2009, le présent projet prévoit d'étendre la déduction des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles à tous les frais de ce genre après la première formation du degré secondaire II. Si le contribuable ne possède pas de diplôme du degré secondaire II, tous les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles sont déductibles à partir de 20 ans révolus, pour autant qu'il ne s'agisse pas de frais engagés pour l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II.

Pour l'impôt fédéral direct, la déduction est plafonnée à 6000 francs. Pour les impôts cantonaux et communaux, le plafond sera fixé par le droit cantonal.

Ne sont pas déductibles les frais de formation et de perfectionnement qui n'ont pas de fins professionnelles (loisirs, hobby).

Dans ces conditions, cette déduction se traduira par une diminution du produit annuel de l'impôt fédéral direct estimée à plus de 5 millions de francs. Les cantons peuvent déterminer eux-mêmes le plafond. S'ils adoptent le même plafond que la Confédération, la diminution annuelle des recettes des cantons et des communes devrait se monter au total à quelque 30 millions de francs.

Le présent projet simplifie le droit fiscal parce qu'il ne sera plus nécessaire de faire la distinction entre la formation et le perfectionnement, d'une part, ni de faire la distinction entre une reconversion professionnelle imposée par des circonstances extérieures et une reconversion professionnelle volontaire, d'autre part. En revanche, on peut se demander si la nouvelle déduction incitera vraiment un plus grand nombre de personnes à suivre une formation continue en rapport avec leur profession.

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Table des matières Condensé

2430

1 Grandes lignes du projet 1.1 Contexte 1.1.1 Motion de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats 1.1.2 Anciennes interventions parlementaires portant sur les frais de formation et de perfectionnement 1.1.3 Droit en vigueur 1.1.3.1 Frais de formation dans le cadre de l'impôt fédéral direct 1.1.3.2 Ordonnance sur les frais professionnels 1.1.3.3 Frais de formation dans la législation cantonale 1.1.4 Aperçu du système éducatif suisse 1.1.5 Importance de la formation à des fins professionnelles 1.1.6 Politique de la Confédération en matière de formation continue 1.1.7 Politique des cantons en matière de formation continue 1.1.8 Analyse de l'efficacité des mesures étatiques pour encourager la formation et le perfectionnement en Suisse 1.1.9 Analyse de la nécessité de prendre des mesures selon l'avis du professeur Stefan C. Wolter 1.2 Solutions étudiées 1.2.1 Nouvelle déduction générale 1.2.2 Déduction des frais d'acquisition du revenu et déduction générale 1.2.3 Déduction élargie pour les frais d'acquisition du revenu 1.3 Nouvelle déduction pour les frais de formation et de perfectionnement 1.3.1 Frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles 1.3.2 Distinction avec la formation initiale 1.3.3 Distinction avec les loisirs 1.3.4 Plafond 1.3.5 Possibilités de déduction pour les indépendants 1.3.6 Procédure de consultation 1.3.6.1 Déduction générale ou déduction pour les frais d'acquisition du revenu 1.3.6.2 Plafonner la déduction 1.3.6.3 Rapport entre le plafond et le Guide d'établissement du certificat de salaire et de l'attestation de rentes 1.3.6.4 Déductibilité des coûts de la formation initiale 1.4 Application et entrée en vigueur 1.5 Classement d'interventions parlementaires

2433 2433

2 Commentaires des articles 2.1 Loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD) 2.2 Loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)

2433 2433 2435 2435 2437 2437 2438 2440 2440 2442 2442 2444 2444 2445 2445 2445 2446 2446 2447 2450 2451 2452 2452 2452 2453 2453 2454 2454 2455 2455 2455 2456

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3 Conséquences 3.1 Conséquences sur la Confédération, les cantons et les communes 3.1.1 Conséquences financières 3.1.2 Conséquences sur l'état du personnel 3.2 Conséquences économiques

2457 2457 2457 2458 2458

4 Liens avec le programme de la législature

2459

5 Aspects juridiques 5.1 Constitutionnalité et conformité aux lois 5.2 Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse 5.3 Frein aux dépenses

2459 2459 2460 2460

Loi fédérale sur l'imposition des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles (Projet)

2461

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Message 1

Grandes lignes du projet

1.1

Contexte

1.1.1

Motion de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats

La Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) a examiné la déductibilité des frais de formation et de perfectionnement dans le cadre du traitement de plusieurs interventions parlementaires. En se fondant sur l'examen d'une sous-commission créée tout exprès, la Commission a décidé de rédiger sa propre motion au cours de sa séance du 1er septembre 2008 La CER-E a adopté sa motion au cours de sa séance du 1er septembre 2008, et en a recommandé l'adoption par 7 voix contre 5. Au cours de la session d'automne 2008, le Conseil des Etats a adopté cette motion par 25 voix contre 12. Sur proposition de sa commission, le Conseil national a transmis la motion à une nette majorité de 157 voix contre 3.

La motion a la teneur suivante: «Le Conseil fédéral est chargé de soumettre au Parlement un projet visant à modifier la LIFD et la LHID, de sorte que les frais de formation et de perfectionnement professionnels soient traités fiscalement selon le principe de la capacité économique.

Le projet comportera les points suivants: 1. Sont déductibles les frais de formation et de perfectionnement supportés par le contribuable pour autant que la formation concernée soit à caractère professionnel.

Est réputée formation à caractère professionnel une formation qui permet à un salarié de conserver son emploi ou de progresser dans sa carrière (promotion), ou qui débouche sur une qualification permettant de changer de métier ou de reprendre une activité lucrative, salariée ou indépendante (reconversion, réinsertion).

2. Le montant déductible fait l'objet d'un plafonnement chiffré.

3. Ne sont pas déductibles les frais de formation initiale qualifiante. Est réputée formation initiale qualifiante une formation qui permet à la personne concernée d'exercer pour la première fois une activité professionnelle et de subvenir ainsi à ses besoins.»

1.1.2

Anciennes interventions parlementaires portant sur les frais de formation et de perfectionnement

Ces dernières années, les interventions et les initiatives parlementaires les plus diverses portant sur les frais de formation et de perfectionnement ont été déposées, car les différences d'interprétation de la notion de frais de formation entre les cantons, la non-déductibilité de certains frais de formation ainsi que les difficultés de délimitation qui en découlaient ont entretenu et accru la critique. Les interventions suivantes ont été déposées: 2433

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Motion de la conseillère nationale Franziska Teuscher «Droit fiscal. Déduction des frais de formation nécessaires à la reprise d'une activité professionnelle» (96.3460). Cette motion demandait l'insertion d'une disposition permettant aux personnes qui engagent des frais pour une formation complémentaire nécessaire à leur réinsertion professionnelle de déduire ces frais de leur revenu dans leur prochaine déclaration ordinaire d'impôt. La déduction devait être possible pour les frais de formation en rapport avec la profession apprise ou exercée auparavant. Cette motion a été transmise sous forme de postulat le 21 mars 1997.

­

Motion du conseiller aux Etats Eugen David «Renforcement de la place économique suisse: déduction des frais de formation» (97.3084). Cette motion prévoyait l'introduction d'une déduction pour les frais de formation du contribuable et des enfants à sa charge. Elle a été transmise sous forme de postulat le 16 mars 1999.

­

Motion du conseiller aux Etats Eugen David «Frais de formation continue.

Imposition» (03.3565). Cette motion avait pour but d'autoriser la déduction des frais de perfectionnement professionnel en rapport avec l'activité exercée au sens de l'art. 30 de la loi fédérale sur la formation professionnelle.

Elle a été transmise sous forme de postulat le 2 mars 2004.

­

Initiative parlementaire de la conseillère nationale Chiara SimoneschiCortesi «Impôt fédéral direct. Déduction des coûts de formation permanente et de réorientation professionnelle» (04.432). Cette initiative prévoyait la déduction des frais de formation professionnelle et de formation permanente des hommes et des femmes exerçant ou non une activité professionnelle. Il ne lui a pas été donné suite le 23 septembre 2009.

­

Motion de la conseillère nationale Lucrezia Meier-Schatz «LHID. Rétablir l'abattement fiscal accordé au titre de la formation» (04.3632). Cette motion demandait une modification de la LHID prévoyant le rétablissement de la déduction pour la formation (qui était appliquée dans plusieurs cantons avant la mise en oeuvre de cette loi). Le Conseil des Etats a rejeté la motion le 30 septembre 2008.

­

Motion du conseiller national Johannes Randegger «Frais de formation et de perfectionnement professionnels. Harmonisation du traitement fiscal» (05.3129). L'auteur de cette motion demandait une modification de la loi supprimant les différences faites par le fisc dans l'enseignement tertiaire entre la formation professionnelle et le perfectionnement professionnel. Le Conseil des Etats a rejeté la motion le 30 septembre 2008.

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Postulat du conseiller aux Etats Alain Berset «Encouragement de la formation continue» (05.3699). Ce postulat demandait au Conseil fédéral de compléter son rapport sur le postulat 03.3565 par un rapport complémentaire sur les avantages et les inconvénients du remplacement des déductions fiscales pour la formation continue par de nouvelles mesures telles que le crédit pour la formation continue ou la promotion d'institutions de formation continue, en respectant la neutralité des coûts. Il a été retiré le 8 décembre 2005.

2434

­

Initiative du canton de St-Gall «Déductions pour frais de formation. Réintroduction dans la législation fiscale» (05.301). Cette initiative avait pour but d'autoriser la déduction des frais liés à la formation des revenus imposables.

Il ne lui a pas été donné suite le 23 septembre 2009.

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Initiative parlementaire du conseiller aux Etats Eugen David (06.492) «Déductibilité des frais de formation et de perfectionnement». Cette initiative prévoyait un complément de sorte que les frais de formation et de perfectionnement supportés par le contribuable après sa formation professionnelle initiale puissent être déduits de son revenu imposable, à concurrence d'un montant à déterminer. Elle a été retirée le 1er septembre 2008.

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Interpellation du conseiller national Mario Fehr «Frais de formation continue et de perfectionnement professionnel. Allégements fiscaux» (07.3089). Elle a été liquidée au Conseil national le 1er octobre 2007.

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Initiative du canton de Glaris «Réintroduire la déduction fiscale des frais de formation» (07.309). Cette initiative prévoyait de modifier la LHID et la LIFD de façon à permettre de déduire du revenu imposable un montant donné au titre des frais de formation. Les deux Conseils ont décidé de ne pas donner suite à cette initiative.

1.1.3

Droit en vigueur

1.1.3.1

Frais de formation dans le cadre de l'impôt fédéral direct

Frais de formation déductibles Dans la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD)1 et dans la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)2 sont déductibles des revenus imposables à titre de frais d'acquisition du revenu les frais engagés directement pour obtenir un revenu et qui sont dans un rapport de causalité direct avec ce revenu. Les frais d'acquisition du revenu sont nécessaires à l'obtention du revenu. La renonciation à ces frais ne peut être raisonnablement exigée du contribuable. Les frais professionnels notamment font partie des frais d'acquisition du revenu. Aux art. 26, al. 1, let. d, LIFD et 9, al. 1, LHID, la loi prévoit que les frais de perfectionnement et de reconversion professionnels en rapport avec l'activité exercée sont déductibles à titre de frais professionnels.

D'après la doctrine unanime, les frais de perfectionnement professionnels sont les frais nécessaires et causés par l'activité professionnelle. D'après la pratique de l'arrêté du Conseil fédéral du 9 décembre 1940 sur la perception d'un impôt fédéral direct (AIFD, abrogé au 1er janvier 1995), cette notion doit être interprétée généreusement. D'après la pratique toujours en vigueur, le perfectionnement professionnel comprend donc toutes les activités qui sont en rapport direct avec la profession exercée et auxquelles le contribuable ne peut pas renoncer. Il y a notamment un rapport direct lorsque le perfectionnement sert à rester à jour dans sa profession, à 1 2

RS 642.11 RS 642.14

2435

répondre à l'accroissement des exigences par l'acquisition de meilleures connaissances, à rafraîchir et retravailler les connaissances acquises, à maintenir sa compétitivité et à maintenir sa position dans la profession qui a généré le revenu imposable du contribuable pendant la période de calcul de l'impôt. Le perfectionnement comprend également l'acquisition de meilleures connaissances pour exercer la même profession. Ces frais sont considérés comme des frais de promotion professionnelle au sens large et permettent au contribuable de mieux exercer sa profession ou de mieux répondre aux exigences de sa profession (par ex. dépenses pour des cours spécialisés). Ils peuvent parfaitement conduire à une position professionnelle plus élevée, aussi longtemps que la nouvelle fonction n'est pas manifestement différente de l'activité exercée précédemment. Pour tous les frais de perfectionnement, les relations causales doivent exister pendant la même période que le revenu de l'activité lucrative.

Les cours de répétition ou de perfectionnement spécifiques à une branche, les séminaires, les congrès, etc. sont des exemples de perfectionnement. D'après la jurisprudence, il y a aussi perfectionnement lorsqu'un employé de commerce de la division comptable d'une société fiduciaire suit une formation pour devenir comptable diplômé ou expert comptable ou lorsqu'un peintre suit une formation pour acquérir une maîtrise fédérale; sont également déductibles les frais pour les cours d'informatique d'une école spécialisée permettant au chef des finances et de la comptabilité de se familiariser avec les modifications intervenues dans cette branche et les frais de cours pour passer de co-pilote à capitaine.

Les frais de reconversion sont les frais que le contribuable engage en vue d'une réorientation professionnelle complète et pour acquérir une nouvelle formation. Ne sont toutefois déductibles que les frais d'une reconversion imposée par des circonstances extérieures à la volonté du contribuable comme la fermeture de son entreprise, l'absence d'avenir dans sa profession, la maladie ou l'accident.

Les frais de réinsertion sont les frais qu'un contribuable doit engager pour reprendre sa profession après être resté longtemps sans l'exercer. Ils sont en principe déductibles. En règle générale, la déduction de ces frais à
titre de frais d'acquisition du revenu n'est pas accordée si le contribuable ne réalise aucun revenu pendant la même période de calcul, à moins que son conjoint ne dispose d'un revenu pendant cette même période de calcul. Les frais de réinsertion échéant pendant l'année de la reprise du travail peuvent être déduits.

Frais de formation non déductibles Contrairement à la déduction des frais de perfectionnement et de reconversion, la déduction d'autres frais de formation est exclue expressément par l'art. 34, let. b, LIFD, car les frais de formation font partie des frais d'entretien. Les frais d'entretien sont des frais engagés pour couvrir les besoins de la vie privée. Les frais de formation ne sont pas non plus mentionnés dans la série des déductions générales de la LHID (art. 9, al. 2, LHID) et ne sont donc pas déductibles suivant l'art. 9, al. 4, LHID. Sont considérés comme frais de formation les frais de la formation initiale, d'une part, et, d'autre part, les frais d'une reconversion et d'une promotion professionnelle qui ne sont pas en relation avec la profession exercée.

La formation initiale est achevée lorsque le contribuable est théoriquement en mesure, pour la première fois, d'être indépendant financièrement en appliquant les connaissances acquises pendant sa formation.

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Les frais de reconversion qui ne sont pas déductibles sont les frais en vue d'un changement volontaire de profession, qui n'a aucun rapport avec le revenu actuel du travail et qui mène à une nouvelle profession. Cette reconversion volontaire doit être distinguée de la reconversion professionnelle imposée par des circonstances extérieures. Les frais de promotion professionnelle au sens étroit, qui ne sont pas déductibles non plus, sont les frais engagés en vue d'occuper une position professionnelle manifestement plus élevée que celle offerte par la profession actuelle ou dans une autre profession. Les frais d'une telle formation constituent des frais de formation à classer dans les frais d'entretien.

1.1.3.2

Ordonnance sur les frais professionnels

L'ordonnance du Département fédéral des finances du 10 février 1993 sur la déduction des frais professionnels des personnes exerçant une activité lucrative dépendante en matière d'impôt fédéral direct (ordonnance sur les frais professionnels)3 précise les charges qui sont considérées comme des frais professionnels déductibles des salariés. L'art. 8 de cette ordonnance précise que les frais de perfectionnement et de reconversion professionnels qui sont en relation directe avec l'activité du contribuable sont déductibles et que les frais de formation proprement dits (art. 34, let. b, LIFD) ne sont pas déductibles.

1.1.3.3

Frais de formation dans la législation cantonale

Avant l'introduction de la LHID, douze cantons (BE, BL, BS, FR, JU, NE, NW, OW, SH, VD, VS, ZG) n'admettaient que la déduction des frais de formation (perfectionnement et reconversion) à titre de frais d'acquisition du revenu. Seul le canton de Zoug avait plafonné la déduction. Fribourg, Schaffhouse et Vaud avaient fixé des plafonds dans le cadre de forfaits professionnels. Les autres cantons n'avaient pas plafonné la déduction des frais de formation en rapport avec la profession.

Onze cantons (AG, AI, AR, GL, GR, LU, SG, SO, TG, UR, ZH) accordaient des déductions pour la formation à titre de frais d'acquisition du revenu, mais autorisaient aussi la déduction d'autres frais de formation. Tous ces cantons avaient plafonné la déduction des frais de formation. En revanche, pour ce qui est des frais de perfectionnement et de reconversion (frais d'acquisition du revenu) seuls Lucerne, Soleure et Uri avaient fixé des plafonds.

A part la déduction limitée des frais de perfectionnement, le canton du Tessin n'accordait pas de déduction pour les frais de formation au sens étroit, mais une déduction forfaitaire par famille.

Seul le canton de Schwyz ne faisait pas de distinction entre les frais de formation déductibles à titre de frais d'acquisition du revenu et les autres frais de formation. La déduction des frais de formation et de perfectionnement était plafonnée. Avant l'introduction de la LHID, le canton de Genève n'accordait tout simplement pas de déduction pour les frais de formation.

3

RS 642.118.1

2437

Actuellement, les cantons sont tenus d'appliquer dans leur régime fiscal la notion de formation et de perfectionnement dans le sens que lui donne la LHID. Dans la plupart des cas, il faut vérifier si le contribuable a acquis ou pourrait acquérir par sa formation une position différente et nettement plus élevée que dans sa profession actuelle. Cet examen laisse une certaine marge d'appréciation subjective, c'est pourquoi il peut arriver qu'un canton dont la pratique est libérale juge la situation différemment qu'un canton dont la pratique est plus restrictive. Au lieu de la déduction des frais de formation en partie autorisée précédemment, plusieurs législations cantonales prévoient aujourd'hui des déductions différentes pour les enfants, par ex.

pour les «enfants en âge préscolaire», pour les «enfants en formation qui vivent à la maison» ou pour les «enfants en formation qui séjournent à l'extérieur». La déduction échelonnée pour enfants ne peut cependant pas prendre en considération les frais de formation effectifs.

1.1.4

4

Aperçu du système éducatif suisse4

Source: Le Serveur suisse de l'éducation, http://www.educa.ch (état: 20.01.2011)

2438

Le système éducatif suisse reproduit l'organisation politique du pays. Conformément à la structure fédéraliste de la Suisse, les trois niveaux politiques que sont la Confédération, les cantons et les communes se partagent les tâches d'enseignement et garantissent ensemble et dans leur domaine de compétence l'excellente qualité du système éducatif suisse.

Le système éducatif suisse englobe en principe les degrés suivants: ­

Préscolarité

­

Degré primaire: les cantons et leurs communes sont responsables de l'organisation et du financement des écoles primaires, et les communes assurent leur gestion. L'école primaire est obligatoire et gratuite pour tous les enfants.

­

Degré secondaire I: le degré secondaire I suit le degré primaire et dure généralement trois ans (septième à neuvième année de scolarité). Il transmet un enseignement général de base et prépare à la formation professionnelle de base ou à l'entrée dans une école du degré secondaire II dispensant une formation générale approfondie. Les cantons et leurs communes sont responsables de l'organisation et du financement du degré secondaire I, dont la gestion est assurée par les communes, ou parfois par les cantons. La fréquentation du degré secondaire I est obligatoire et gratuite. Les écoliers de ce degré ont en général entre 12 et 15 ans.

­

Degré secondaire II: après l'école obligatoire, les jeunes gens passent au degré secondaire II. Il est structuré en voies de formation générale et de formation professionnelle. Les écoles de formation générale sont les écoles de maturité (gymnases) et les écoles de culture générale (ECG). La formation professionnelle peut être accomplie sous forme d'apprentissage professionnel en entreprise avec un enseignement dans une école professionnelle et des cours interentreprises ou dans une école professionnelle à plein temps telle qu'une école de métiers ou autre école professionnelle dispensant un enseignement à plein temps. Il y a plusieurs filières dans la formation professionnelle de base: formation professionnelle de base de deux ans aboutissant à une attestation fédérale de formation professionnelle, formation professionnelle de base de trois ou quatre ans aboutissant à un certificat fédéral de capacité (CFC), formation en maturité professionnelle qui complète les trois ou quatre années de formation professionnelle de base.

­

Degré tertiaire: le degré tertiaire comprend les formations effectuées dans le cadre de la formation professionnelle supérieure et des hautes écoles. La formation professionnelle supérieure comprend les examens professionnels fédéraux, les examens professionnels fédéraux supérieurs et les écoles supérieures. Les hautes écoles englobent les hautes écoles universitaires (universités cantonales et écoles polytechniques fédérales, EPF) et les hautes écoles spécialisées (HES), y compris les hautes écoles d'art, les hautes écoles de musique et les hautes écoles pédagogiques (HEP).

2439

1.1.5

Importance de la formation à des fins professionnelles

L'étude «Abzugsmöglichkeiten für Weiterbildungskosten»5 du groupe de travail «Formation», publiée en décembre 2004 en réponse au postulat David du 2 mars 2004, a montré l'importance de la formation.

Le perfectionnement a pris de l'importance suite au changement de structure de la société et de l'économie. La maîtrise de l'évolution rapide du savoir et des connaissances passe par la formation continue. Il est en effet de plus en plus difficile de transmettre en temps utile des connaissances qui sont très vite dépassées. Les entreprises attendent de leurs collaborateurs qu'ils soient prêts à s'approprier constamment de nouvelles connaissances.

L'aptitude à assimiler rapidement et constamment des connaissances nouvelles prend de plus en plus d'importance. C'est pourquoi la loi du 13 décembre 2002 sur la formation professionnelle6 repose sur l'idée que la formation à des fins professionnelles, au sens du maintien des qualifications et de l'aptitude des individus à répondre mieux aux besoins du marché du travail à tous les échelons, doit être continue.

Pour suivre le rythme des changements, les travailleurs sont tenus de se perfectionner dans leur activité actuelle ou de s'approprier des connaissances dans un autre champ professionnel. L'aptitude à répondre aux besoins du marché n'est garantie que lorsque les opportunités de formation sont saisies à temps.

L'idée d'apprendre une «profession pour la vie» et de s'y épanouir pendant toute sa vie active ne correspond plus à la réalité économique depuis longtemps.

Aujourd'hui, les biographies «Patchwork» sont très courantes: celui qui ne veut pas risquer d'être exclu du marché du travail doit se perfectionner constamment ­ et pas uniquement dans le champ professionnel qu'il a appris.

Ces dernières années, la globalisation des marchés et les progrès technologiques ont aiguisé la concurrence au niveau mondial. Le raccourcissement du cycle des produits, une adaptation rapide des processus de production aux nouvelles exigences et la pression sur les coûts nécessitent un renouvellement, une adaptation et un élargissement du savoir et du savoir-faire des entreprises. La formation est devenue un facteur capital du maintien de la compétitivité en plus de la finance, de la technique, de l'organisation, de la logistique, de la communication et du marketing.

1.1.6

Politique de la Confédération en matière de formation continue

Le 21 mai 2006, le peuple et les cantons ont approuvé les nouveaux articles constitutionnels sur la formation7. Le nouvel art. 64a de la Constitution charge la Confédération de définir des principes sur la formation continue. En outre, il lui a été attribué la compétence d'encourager la formation continue et de fixer des critères.

La formation continue en Suisse s'est développée au fil du temps de manière prag5 6 7

Publiée sur Internet à l'adresse suivante: www.estv.admin.ch/documentation (état: 20.01.2011) RS 412.10 RS 101

2440

matique. C'est ainsi qu'existent côte à côte des offres publiques et privées, des offres d'utilité publique et à caractère lucratif et des offres proposées par les entreprises et les écoles publiques.

La formation continue en Suisse est organisée essentiellement sous l'angle de l'économie du marché. Les offres de perfectionnement sont nombreuses, qu'elles soient fournies dans le privé ou dans les entreprises, d'utilité publique ou à caractère lucratif. La part organisée selon l'économie du marché représente une proportion de plus de 80 % de l'offre selon L'éducation en Suisse, Rapport 20068. A la différence du système d'enseignement formel, l'Etat n'a qu'une action essentiellement subsidiaire dans le domaine de la formation continue.

Aujourd'hui, la Confédération règle la formation continue dans de nombreuses lois spéciales. Ces réglementations sont axées spécifiquement sur certains thèmes et groupes cibles. Dans l'ensemble, la Confédération dépense actuellement 600 millions de francs par an en faveur de la formation continue sous environ cinquante titres de lois. Les domaines suivants sont concernés: ­

Employeur: en tant qu'employeur, la Confédération encourage ses collaborateurs à suivre une formation continue. Elle leur donne la possibilité de participer à des cours de formation continue ou les organise elle-même. En plus des offres de l'Office fédéral du personnel, d'autres offres spécifiques sont disponibles dans les domaines de la défense nationale, des douanes, etc.

­

Assurances sociales: les dispositions sur la formation continue dans la législation sur les assurances sociales visent à garantir l'accès des personnes concernées au marché du travail, à leur permettre de demeurer sur ce marché ou à y favoriser leur réintégration. Environ 300 millions de francs sont utilisés chaque année par l'assurance-chômage pour des mesures liées à la formation. Les prestations sont financées principalement par les cotisations des travailleurs et des employeurs.

­

Standards minimaux dans le droit du travail: la formation continue dans le monde du travail relève de la responsabilité de l'individu et de l'entreprise.

La Confédération ne fixe que peu de standards minimaux complémentaires.

­

Intégration de certains groupes spécifiques: un soutien à la formation continue est apporté notamment dans le domaine de la migration, de la lutte contre l'illettrisme, de la jeunesse et du sport, de l'égalité des personnes handicapées, etc.

­

Assurance de la qualité: plusieurs actes normatifs font de la formation continue un instrument pour le développement et l'assurance de la qualité et la résolution de problèmes. On peut citer par exemple les prescriptions pour les détenteurs d'animaux, les spécialistes de la toxicomanie ou les organes de contrôle dans le domaine des denrées alimentaires.

Il arrive que des organisations ou des associations d'utilité publique participent à la conception et à la mise à disposition de l'offre de perfectionnement. Généralement, les offres sont financées par des subventions publiques, mais parfois des frais de participation couvrant les coûts à des degrés divers sont demandés.

8

Publié sur Internet à l'adresse suivante: http://www.skbf-csre.ch (état: 20.01.2011)

2441

Les instruments d'encouragement de la Confédération sont multiples: financement d'institutions et de programmes, d'infrastructures, etc. Les bons de formation sont un instrument particulièrement approprié pour augmenter les incitations et encourager la participation aux cours de formation continue. Il n'y a toutefois pas encore de résultats définitifs sur l'efficacité de cet instrument9.

1.1.7

Politique des cantons en matière de formation continue

Cinq cantons (AI, FR, GE, GR, VS) disposent d'une loi ou d'une ordonnance portant exclusivement sur la formation continue. Quant aux autres cantons, les dispositions concernant la formation continue sont inscrites dans la législation sur la formation professionnelle.

Les critères régissant les mesures d'encouragement et l'octroi des subventions varient selon les législations cantonales. Il est de plus en plus fréquent de ne subventionner que les domaines dans lesquels aucune offre ou aucune mesure ne pourrait sinon exister. La moitié des cantons pratique l'encouragement de la formation continue sous forme de financement accordé à une personne ou à un groupe précis (financement des personnes). Dans certains cantons, ce type de financement s'adresse à des personnes peu qualifiées ou désavantagées.

Dans ses recommandations du 20 février 2003 sur la formation continue des adultes, la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l'instruction publique entend coordonner les offres et les structures. Elle prévoit en particulier d'encourager la formation de rattrapage, de permettre à des groupes défavorisés d'accéder à la formation continue et de soutenir le développement de la qualité des prestataires de formation continue. Compte tenu des nouveaux articles constitutionnels sur la formation, de nombreux cantons ont suspendu leurs travaux de mise à jour de leurs réglementations sur la formation continue dans l'attente d'une loi fédérale dans ce domaine10.

1.1.8

Analyse de l'efficacité des mesures étatiques pour encourager la formation et le perfectionnement en Suisse

Des études ont montré que la participation à la formation continue en Suisse est très différente selon les groupes de personnes11. Pour les personnes dont le niveau de formation de base est bas en particulier, on admet qu'un taux plus élevé de participation à la formation continue devrait générer un avantage tant individuel 9

10

11

Ch. 2.4 du rapport du DFE sur la future politique de la Confédération dans le domaine de la formation continue, rédigé en collaboration avec le Département fédéral de l'intérieur (DFI), novembre 2009 Ch. 2.5 du rapport du DFE sur la future politique de la Confédération dans le domaine de la formation continue, rédigé en collaboration avec le Département fédéral de l'intérieur (DFI), novembre 2009 Ch. 1.3 du rapport du DFE sur la future politique de la Confédération dans le domaine de la formation continue, rédigé en collaboration avec le Département fédéral de l'intérieur (DFI), novembre 2009

2442

qu'économique et social. On considère également que ce sont essentiellement des raisons financières (coûts directs et perte de gain en raison de la formation) qui retiennent les personnes peu intéressées par la formation de suivre une formation continue. Différents rapports et études qui se sont concentrés sur l'efficacité des mesures étatiques en général et de certaines mesures en particulier ont permis d'analyser si ces considérations correspondaient à la réalité.

L'une des mesures étatiques examinées prévoit la distribution de bons de formation.

Ceux-ci sont, en Suisse, le modèle le plus connu de financement de la formation continue axé sur la demande. Ces bons peuvent être utilisés pour une formation continue à choix.

Le Centre de recherche sur l'économie de l'éducation de l'Université de Berne a réalisé une expérience de grande envergure sur le terrain en 200612, à la demande de l'Office fédéral de la formation professionnelle et de la technologie. Un groupe de 2400 personnes choisies de manière aléatoire ont eu la possibilité d'utiliser à leur guise des bons de formation continue qui leur avaient été remis. Leur attitude a été comparée à celle de quelque 10 000 personnes qui n'avaient pas reçu de bons.

Les résultats montrent qu'avec un soutien financier, on peut également inciter les groupes en marge de la formation à participer à la formation continue. Par conséquent, les bons de formation constituent certainement le meilleur instrument incitatif pour augmenter le nombre de personnes suivant une formation continue.

On constate toutefois qu'il existe aussi des facteurs qui ne plaident pas pour une utilisation généralisée de ces bons. Il y a tout d'abord, chez les personnes ayant un diplôme postobligatoire, les effets d'aubaine qui n'amènent en moyenne qu'une personne sur trois à utiliser effectivement les bons pour financer une formation continue qu'elle n'aurait pas suivie si elle n'avait pas reçu de bon. Ensuite, on n'enregistre pour les personnes qui ont utilisé le bon pour une formation continue ­ tout au moins à court terme ­ aucun effet positif sur l'employabilité, observation qui n'est pas favorable pour l'instant à un engagement fort des pouvoirs publics en faveur du financement de la formation continue. L'expérience permet donc de conclure que le financement public de la formation
continue, pour autant qu'il soit mis en place, ne se justifierait que pour un groupe cible très précisément défini.

Le canton de Genève distribue des bons de formation depuis 2001, avec de bons résultats. N'ont droit à un bon de formation annuel que les personnes qui disposent d'un revenu inférieur à un montant défini. Ce modèle est évalué et développé constamment. Expérience faite, les bons de formation complétés d'un service de conseil peuvent donc contribuer à augmenter la participation des personnes peu qualifiées à la formation continue13.

12

13

«Formation continue et bons de formation: résultats d'une expérience menée sur le terrain», résumé et mise en perspective de certains aspects des résultats de l'étude de S. C. Wolter et Dolores Messer, Berne, février 2009 Fédération suisse pour la formation continue FSEA: ALICE ­ Les actualités de la formation continue, http://www.alice.ch /fr/themes/finanzierung/bons-de-formation/ (état: 20.01.2011)

2443

1.1.9

Analyse de la nécessité de prendre des mesures selon l'avis du professeur Stefan C. Wolter

Des mesures d'encouragement par l'Etat du financement de la formation seraient justifiées en cas de défaillance du marché en matière de participation au perfectionnement ou si des raisons de répartition et d'équité l'exigeaient. On parle de défaillance du marché lorsqu'une réglementation économique ne mène à aucune situation efficiente si l'Etat ne prend pas des mesures.

Dans son bref avis de droit «Die steuerliche Behandlung der Kosten für die Ausund Weiterbildung»14, le professeur Stefan C. Wolter parvient à la conclusion qu'il n'existe pas de justification suffisante pour que l'Etat encourage la formation continue à large échelle. Un subventionnement étatique de l'offre de perfectionnement n'est justifié que s'il est limité à un groupe de personnes parfaitement déterminé (à savoir les personnes peu qualifiées) et aux mesures de perfectionnement dont le but et l'effet consistent très clairement à les intégrer mieux et durablement au marché du travail.

En tant qu'instrument d'encouragement, l'élargissement de la déduction des frais de perfectionnement est nettement moins bon que d'autres instruments pour ce qui est de la précision sur les groupes cibles, les effets d'aubaine et les effets d'incitation.

L'effet des déductions sur les groupes de la population économiquement faibles et peu instruits est plutôt modeste car, en raison de la progressivité, la charge fiscale, et par conséquent l'effet des déductions, est de toute façon faible pour ces groupes de la population et parce que le dégrèvement fiscal n'allège les coûts qu'a posteriori.

Vu que des déductions supplémentaires ne feront guère augmenter la participation au perfectionnement et que les effets d'aubaine sont prédominants, cet instrument n'est, pour le professeur Wolter, pas adéquat pour encourager le perfectionnement professionnel.

1.2

Solutions étudiées

Trois possibilités de mettre en oeuvre la motion de la CER-E ont été examinées, à savoir un aménagement de la déduction pour les frais de formation et de perfectionnement professionnels comme:

14

­

une déduction générale (ch. 1.2.1),

­

une déduction pour les frais d'acquisition du revenu et une déduction générale (ch. 1.2.2), ou

­

une déduction élargie pour les frais d'acquisition du revenu (ch. 1.2.3).

Stefan C. Wolter: «Die steuerliche Behandlung der Kosten für die Aus- und Weiterbildung» du 27 mars 2008, JAAC 2009.3, p. 14 à 24 (publié sur Internet à l'adresse suivante: www.estv.admin.ch)

2444

1.2.1

Nouvelle déduction générale

L'une des solutions prévoit l'introduction d'une nouvelle déduction générale qui englobe sous le même titre les frais de formation et les frais de perfectionnement. La distinction actuelle entre la formation (reconversion volontaire, promotion professionnelle qui n'est pas en lien avec la profession actuelle) et le perfectionnement (formation continue, reconversion professionnelle imposée par des circonstances extérieures, réinsertion) tomberait. La déduction serait limitée à un certain montant.

Les frais engendrés par la formation initiale demeureraient exclus.

Cette solution supprime les difficultés de délimitation entre frais de formation et frais de perfectionnement à des fins professionnelles et simplifie la taxation. Les frais de perfectionnement qui sont actuellement entièrement déductibles ne seraient déductibles que jusqu'à concurrence du plafond fixé. L'introduction d'un plafond permet de limiter le manque à gagner que cette mesure devrait entraîner. C'est pourquoi le Conseil fédéral donne sa préférence à cette solution.

1.2.2

Déduction des frais d'acquisition du revenu et déduction générale

Une autre solution serait de partager la déduction en une déduction pour les frais professionnels (frais d'acquisition du revenu) et en une nouvelle déduction générale.

La déduction pour les frais d'acquisition du revenu engloberait, comme dans la législation actuelle, les frais liés au perfectionnement, à la reconversion professionnelle imposée par des circonstances extérieures et à la réinsertion professionnelle. La nouvelle déduction générale regrouperait les autres frais de formation pour la reconversion volontaire et pour la promotion professionnelle qui n'est pas en rapport avec la profession exercée.

Cette division de la déduction a été rejetée. Etant donné que les frais d'acquisition du revenu n'ont pas de plafond, les contribuables auraient tendance à tenir tous leurs frais de formation et de perfectionnement pour des frais d'acquisition du revenu avec pour conséquence une augmentation des recours et des frais juridiques élevés.

De plus, cette division compliquerait davantage le droit fiscal car il faudrait distinguer deux déductions. Le problème de délimitation critiqué aujourd'hui subsisterait.

1.2.3

Déduction élargie pour les frais d'acquisition du revenu

La solution d'élargir la déduction pour les frais d'acquisition du revenu (déduction pour les frais professionnels) aux frais qui n'ont pas le caractère de frais d'acquisition du revenu n'a pas été poursuivie non plus: les frais de formation sans aucun rapport avec la profession exercée (par ex. frais de reconversion volontaire) seraient qualifiés de frais d'acquisition du revenu et seraient donc déductibles de façon illimitée.

L'avantage de cette solution serait sans aucun doute d'atténuer le problème de délimitation. Toutefois, elle conduirait à un élargissement de la notion de frais d'acquisition du revenu avec des conséquences non prévisibles. Si les frais d'acquisition du revenu comprenaient des frais de formation sans lien direct avec 2445

l'obtention du revenu du travail, d'autres frais qui ne sont pas non plus directement liés à l'obtention du revenu du travail pourraient aussi être considérés comme des frais d'acquisition du revenu et être déduits pour un montant illimité. La notion de frais d'acquisition du revenu devrait donc continuer d'être interprétée étroitement, afin de ne pas encourager des demandes de déductions supplémentaires.

1.3

Nouvelle déduction pour les frais de formation et de perfectionnement

La réglementation considérée comme étant la meilleure pour mettre en oeuvre la motion de la CER-E consiste en l'introduction d'une nouvelle déduction générale pour tous les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles (= frais de perfectionnement, de reconversion volontaire ou de reconversion imposées par des circonstances extérieures, de réinsertion, de promotion professionnelle au sens large et au sens étroit). Cette nouvelle déduction doit être introduite à l'art. 33, al. 1, let. j, LIFD et à l'art. 9, al. 2, let. n, LHID. Sont déductibles uniquement les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles. Les frais de formation engagés jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II demeurent exclus de cette nouvelle réglementation. A partir de 20 ans révolus, les contribuables qui ne possèdent pas de diplôme du degré secondaire II peuvent aussi déduire les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles qu'ils n'engagent pas en vue d'obtenir un diplôme du degré secondaire II.

La limite a été fixée à 20 ans parce qu'on peut partir de l'idée que la grande majorité des contribuables de cet âge a terminé sa première formation (même compte tenu d'éventuels retards).

La déduction est plafonnée et se monte à 6000 francs dans la LIFD. Dans la LHID, le plafond est déterminé par la législation cantonale.

Les personnes imposées à la source, comme les étudiants étrangers qui ne possèdent pas un permis d'établissement (permis C), qui se trouvent en Suisse et dont les revenus (montant brut) d'une activité dépendante ou les revenus de remplacement (revenu brut) sont soumis à l'imposition à la source, peuvent bénéficier de cette déduction dans le cadre d'une correction ultérieure du barème, car la déduction n'est accordée que sur preuve. Cette demande de correction doit être déposée auprès de l'administration fiscale cantonale compétente jusqu'au 31 mars de l'année suivante (cf. art. 137 LIFD).

1.3.1

Frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles

La nouvelle déduction se limite aux frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles. Ils comprennent aussi les frais de reconversion à des fins professionnelles.

L'apprentissage pour lequel les frais de formation et de perfectionnement sont engagés doit servir à l'exercice (actuel ou futur) d'une activité professionnelle. C'est le cas lorsque la formation suivie est utile pour la profession exercée selon

2446

l'expérience ordinaire de la vie et le cours ordinaire des choses et que les connaissances acquises peuvent être utilisées concrètement dans le travail.

Que la formation ou le perfectionnement à des fins professionnelles conduise à une activité indépendante ou salariée importe peu, tout comme le fait que la formation ou le perfectionnement soit en lien direct ou non avec l'obtention du revenu du travail actuel. Les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles sont aussi déductibles si le contribuable n'exerce pas, après sa formation ou son perfectionnement, une profession liée au domaine dans lequel il a acquis les connaissances.

Le contribuable ne peut déduire que les frais qu'il a payés personnellement pour sa formation et son perfectionnement à des fins professionnelles. Il ne peut pas les déduire de son revenu imposable si son employeur se charge de ces frais et qu'il n'a donc rien à payer. Le contribuable qui doit payer une partie des frais peut demander la déduction des frais qu'il a effectivement payés.

Exemples: un boulanger peut déduire ses frais de formation de maître de plongée car il serait théoriquement en mesure de gagner sa vie en exerçant ce métier. Il peut effectuer cette déduction même s'il n'exerce jamais la profession de maître de plongée. Une juriste peut déduire les frais d'une formation de masseuse sportive même si elle continue de travailler comme juriste.

Déductibilité

Droit en vigueur

Nouvelle réglementation

Perfectionnement (au sens étroit) Formation pour la promotion professionnelle Reconversion volontaire Reconversion imposée par des circonstances extérieures Réinsertion professionnelle Formation initiale Loisirs, hobby

oui non non oui

oui oui oui oui

oui non non

oui non non

1.3.2

Distinction avec la formation initiale

Des réflexions de politique financière ont conduit à exclure les frais de la formation initiale des frais déductibles.

La notion de formation initiale s'appuie non seulement sur la définition fiscale actuelle mais aussi sur l'obligation d'entretien du droit civil. En droit civil, l'obligation d'entretien des parents peut s'étendre au-delà de la majorité de l'enfant en l'absence d'une «formation appropriée», jusqu'à ce que l'enfant ait acquis une telle formation «dans les délais normaux»15. Une formation est appropriée lorsque l'objectif prévu (et réaliste) de la formation est atteint. Savoir quels sont les cours compris dans cette formation dépend des circonstances, notamment des conventions fixées, de l'aspect raisonnable de la formation, de sa progression concrète, mais 15

Art. 277, al. 2, du code civil, RS 210

2447

aussi de la formation et de la vie professionnelle conçue dans le cadre du projet de vie16. Au regard du droit fiscal, il y a donc aussi une formation initiale lorsque la personne concernée est en mesure pour la première fois d'atteindre l'indépendance financière en appliquant dans le cadre d'un emploi à plein temps les connaissances acquises pendant sa formation, en d'autres termes, lorsqu'elle est théoriquement en mesure de gagner sa vie grâce à cette formation. La formation initiale est considérée comme terminée lorsque le contribuable a acquis le diplôme en relation avec cette formation, mais pas lorsqu'il a seulement effectué les cours ou les semestres nécessaires. Cette définition a conduit à déterminer, dans la législation actuelle, l'achèvement de la formation initiale différemment en fonction de l'institution ou de la filière de formation. Ainsi, dans le cadre de la formation professionnelle, la formation initiale s'achève lorsque la formation professionnelle de base est terminée.

La formation initiale d'une haute école spécialisée se termine en principe à l'acquisition du diplôme de bachelor17, une formation universitaire à l'acquisition du diplôme de master. Dans sa motion, la CER-E propose de reprendre cette définition de la formation initiale («Est réputée formation initiale qualifiante une formation qui permet à la personne concernée d'exercer pour la première fois une activité professionnelle et de subvenir ainsi à ses besoins»18).

Ces définitions différentes de l'achèvement de la formation initiale selon les filières de formation entraînent un traitement différencié des contribuables qui suivent la même filière de formation (degré secondaire II ou degré tertiaire) dans la même institution de formation, mais n'ont pas le même cursus. De plus, ces définitions sont trop complexes pour la procédure de taxation, qui est une opération de masse; elles peuvent difficilement être vérifiées au moment de la taxation et ne sont donc pas appropriées. Les trois exemples suivants montrent en quoi les contribuables ne bénéficient pas du même traitement.

16 17 18

­

Exemple 1: Le contribuable A a obtenu un certificat fédéral de capacité avec maturité professionnelle et a donc terminé sa formation initiale au sens du droit actuel. Il poursuit ses études dans une haute école spécialisée. Etant donné qu'il a un diplôme qui justifie de la fin de sa formation initiale, l'entier du coût de ses études à la haute école spécialisée est déductible en tant que frais de formation et de perfectionnement. Le contribuable B a suivi une école de culture générale et a obtenu une maturité spécialisée. Il poursuit également ses études dans une haute école spécialisée. Etant donné que le contribuable B n'a pas un diplôme correspondant à la fin de la formation initiale, il ne peut pas déduire le coût de ses études à la haute école spécialisée jusqu'à l'obtention de son bachelor.

­

Exemple 2: Le contribuable C a obtenu un certificat fédéral de capacité avec maturité professionnelle et a donc terminé sa formation initiale au sens du droit actuel. Il réussit l'examen complémentaire et poursuit ses études dans une haute école universitaire. Etant donné qu'il a un diplôme qui justifie de la fin de sa formation initiale, l'entier du coût de ses études dans cette haute école est déductible en tant que frais de formation et de perfectionnement.

Le contribuable D a obtenu un certificat de maturité gymnasiale et poursuit Voir art. 277 N. 8 ss. in Basler Kommentar Zivilgesetzbuch I (Honsell/Vogt/Geiser, 3e édition, Helbing & Lichtenhahn 2006) Art. 4 de la loi fédérale sur les hautes écoles spécialisées (RS 414.71) 08.3450 ­ motion «Pour une fiscalité équitable des frais de formation et de perfectionnement»

2448

également ses études dans une haute école universitaire. Etant donné que le contribuable D n'a pas un diplôme correspondant à la fin de la formation initiale, il ne peut pas déduire le coût de ses études dans cette haute école jusqu'à l'obtention de son master.

­

Exemple 3: Dans les limites de leurs compétences respectives, la Confédération et les cantons veillent ensemble à la qualité et à la perméabilité de l'espace suisse de formation19. Afin de garantir une meilleure perméabilité entre les différents types de hautes écoles (universités, hautes écoles spécialisées, hautes écoles pédagogiques), les conférences des recteurs des universités suisses, des hautes écoles suisses et des hautes écoles pédagogiques ont conclu une convention en 2007 qui fixe les conditions rendant directement possibles les études de master dans une autre haute école que celle où a été obtenu le bachelor. D'un point de vue fiscal et selon la définition en vigueur, cela signifierait que le contribuable E qui, après l'obtention d'une maturité spécialisée puis d'un diplôme de bachelor dans une haute école spécialisée (fin de la formation initiale), poursuit ses études par un master dans une haute école universitaire peut déduire les coûts en vue de l'obtention du master en tant que frais de formation et de perfectionnement. Par contre, le contribuable F qui, après l'obtention d'une maturité gymnasiale puis d'un diplôme de bachelor dans une haute école universitaire, poursuit ses études en vue d'obtenir le même master que le contribuable E ne peut pas déduire les coûts de ses études dans la même haute école universitaire jusqu'au niveau du master.

Ces exemples montrent qu'avec la définition actuelle de la formation initiale, le droit fiscal mène à des résultats très différents suivant la filière de formation choisie. Ces résultats peuvent même se révéler arbitraires. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose de remplacer la notion de formation initiale de la motion de la CER-E par des critères objectifs, schématiques, plus justes, plus simples et mieux applicables fondés sur le système éducatif suisse (cf. ch. 1.1.4).

La nouvelle délimitation schématique prévoit que les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles, frais de reconversion compris, sont déductibles après l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II ou à partir de 20 ans révolus en l'absence de diplôme du degré secondaire II. En revanche, les frais de formation jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II ne sont pas déductibles même après cet âge. La formation générale ou professionnelle du degré secondaire II suit l'école obligatoire, qui comprend la préscolarité (par ex.

le jardin d'enfants), l'école primaire et les écoles du degré secondaire I. Après l'école obligatoire, les jeunes gens poursuivent leurs études dans une école du degré secondaire II, par exemple dans une école de maturité (gymnase) ou dans une école de culture générale (ECG), ou commencent une formation professionnelle de base du degré secondaire II. La formation professionnelle de base peut être accomplie sous forme d'apprentissage professionnel en entreprise avec un enseignement dans une école professionnelle et des cours interentreprises, ou dans une école professionnelle à plein temps telle qu'une école de métiers ou une autre école professionnelle dispensant un enseignement à plein temps.

19

Art. 61a, al. 1, Cst.

2449

Environ deux tiers des jeunes gens choisissent une formation professionnelle de base après avoir achevé le degré secondaire I. Un tiers choisit de suivre une filière de formation générale20.

Les différentes formations du degré secondaire II durent de deux à quatre ans. Selon le diplôme obtenu, elles permettent ensuite soit d'exercer directement un métier, soit de poursuivre une formation de degré tertiaire dans une haute école (universitaire, spécialisée ou pédagogique) ou une formation professionnelle supérieure (écoles supérieures, examens professionnels fédéraux, examens professionnels fédéraux supérieurs).

La nouvelle délimitation schématique proposée entre les frais déductibles et les frais non déductibles permet de prendre en compte fiscalement tous les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles, aussi bien ceux du degré secondaire II (après l'obtention du premier diplôme) et du degré tertiaire que ceux engagés en dehors du système de formation formel. La déduction peut être demandée indépendamment de l'institut de formation choisi à condition que le contribuable possède un diplôme du degré secondaire II ou qu'il ait 20 ans révolus pour autant qu'il ne s'agisse pas de frais engagés pour obtenir un tel diplôme.

La délimitation schématique proposée entraîne une simplification du droit fiscal dans le domaine des déductions. Elle n'a pas d'influence sur les définitions du droit civil.

Exemple d'une étudiante exerçant une activité lucrative dépendante: Une étudiante travaille à temps partiel pour financer ses études à l'université. Elle acquitte personnellement les taxes semestrielles et achète les livres dont elle a besoin pour ses études dans une librairie. Elle reçoit en plus de ses parents une mensualité pour subvenir à son entretien. Elle peut déduire de son revenu, à titre de frais de formation et de perfectionnement, les dépenses pour ses études (par ex. taxes semestrielles et livres) jusqu'à concurrence du plafond fixé. Par contre, les parents ne peuvent pas demander la déduction de frais de formation ou de perfectionnement pour leur fille.

Le cas échéant, ils peuvent demander pour leur fille, dont ils assument l'entretien, la déduction pour enfant mineur ou suivant des études.

1.3.3

Distinction avec les loisirs

Les cours de formation qui servent aux loisirs ou à l'épanouissement personnel ne sont pas déductibles, car ils ne sont pas suivis à des fins professionnelles.

Pour distinguer les cours relevant des loisirs ou de l'épanouissement personnel, il faut commencer par déterminer les cours qui servent à des fins professionnelles. Les cours de formation conduisant à une qualification professionnelle sont déductibles comme frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles, même s'il n'est pas prouvé que le contribuable exerce effectivement la nouvelle activité professionnelle. Une formation est considérée comme un loisir si elle ne mène à aucune qualification professionnelle et qu'elle n'est pas effectuée à des fins professionnelles. Il y a qualification professionnelle si le contribuable est en mesure d'atteindre l'indépendance financière en cas d'engagement à temps complet, sur la base de la formation qu'il a suivie et des connaissances acquises pendant cette 20

Le Serveur suisse de l'éducation, http://www.educa.ch (état: 20.01.2011)

2450

formation. En d'autres termes, il serait théoriquement en mesure de gagner sa vie grâce à cette formation. Le contribuable doit en apporter la preuve.

Le contribuable qui veut suivre tous les degrés d'une filière de formation professionnelle pendant plusieurs périodes fiscales devra fournir la preuve qu'il veut suivre tous ces degrés jusqu'à l'obtention des qualifications professionnelles correspondantes.

Exemples: un assistant social ne peut pas déduire le coût de ses cours de salsa, car ces cours ne lui donnent aucune qualification professionnelle (professeur de danse) et doivent par conséquent être qualifiés de hobby. Les cours d'informatique font en principe partie des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles déductibles. Les cours de langue qui n'ont pas au moins un lointain rapport avec l'activité professionnelle sont considérés comme des loisirs. Ce serait sans doute le cas d'un employé de l'administration fédérale qui désire apprendre le russe parce qu'il veut passer ses prochaines vacances en Russie.

1.3.4

Plafond

La motion demande que la nouvelle déduction introduite dans la LIFD et la LHID soit plafonnée. Le montant de ce plafond a été sujet à discussion durant la procédure préparlementaire. Il a été avancé qu'il fallait encourager la formation et le perfectionnement des contribuables en accordant des déductions fiscales généreuses. Il faut toutefois prendre en compte le fait que, comme l'affirme le professeur Stefan C.

Wolter dans son avis de droit21, il faudrait alors compter avec un effet d'aubaine de pratiquement 100 %. De plus, dans son rapport, le Département fédéral de l'économie (DFE)22 est arrivé à la conclusion que la disposition à prendre part à une formation continue augmente fortement plus le niveau de formation est élevé. Une personne qui a un niveau de formation élevé, et donc généralement un revenu assez élevé, suivra une formation continue dans son propre intérêt, même sans possibilité de déduction. Les personnes peu formées, qui ont généralement un revenu plus bas, sont moins enclines à suivre une formation continue. La cause en est moins les coûts directs d'une formation continue que la perte de revenu qu'elle engendre. Les effets d'une déduction fiscale sont faibles pour les personnes qui ont un revenu bas.

Le Conseil fédéral est donc parvenu à la conclusion, notamment en raison de l'importance des effets d'aubaine, que fixer un plafond de 6000 francs pour l'impôt fédéral direct était une solution qui se justifie et se défend. Ce montant signifie que 85 % des contribuables peuvent déduire l'entier des frais de leur formation ou de leur perfectionnement à des fins professionnelles.

Seuls les frais d'une formation ou d'un perfectionnement d'une filière très coûteuse et très complète ne sont pas entièrement déductibles. Ces filières sont suivies en règle générale par des personnes très instruites.

Dans la LHID, le soin de fixer un plafond pour les impôts cantonaux et communaux est laissé au législateur cantonal.

21 22

Voir ch. 1.1.6 Rapport du DFE sur la future politique de la Confédération dans le domaine de la formation continue, rédigé en collaboration avec le Département fédéral de l'intérieur (DFI), novembre 2009

2451

1.3.5

Possibilités de déduction pour les indépendants

Les contribuables de profession indépendante ont la possibilité de déduire du revenu brut les frais résultant de leur activité indépendante qui sont justifiés par l'usage commercial ou professionnel23. Les frais de formation et de perfectionnement peuvent ainsi être déduits de façon illimitée du revenu brut en tant que frais d'acquisition du revenu, pour autant qu'ils soient justifiés par l'usage commercial ou professionnel, c'est-à-dire qu'ils soient liés à l'exercice de l'activité indépendante.

Les frais de formation et de perfectionnement qui ne remplissent pas ce critère peuvent être déduits dans le cadre de la déduction générale jusqu'au plafond fixé.

Seuls les frais effectivement supportés par le contribuable peuvent être déduits.

Cette réglementation peut conduire à une inégalité de traitement entre les indépendants et les salariés. Les indépendants peuvent en effet déduire entièrement les frais de formation et de perfectionnement en relation avec leur activité lucrative indépendante. Pour les salariés en revanche, la déduction des frais de formatin et de perfectionnement liés à leur activité professionnelle est aussi soumise au plafond de 6000 francs.

1.3.6

Procédure de consultation

Le 14 avril 2010, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral des finances d'organiser une procédure de consultation des cantons, des partis politiques, des associations faîtières des communes, des villes et des régions de montagne, des associations faîtières de l'économie et des milieux intéressés sur la loi fédérale sur l'imposition des frais de formation et de perfectionnement. La consultation s'est déroulée du 14 avril au 7 août 2010 et 81 participants ont exprimé leur avis. La majorité d'entre eux soutient le projet de loi entièrement ou avec certaines réserves.

Seuls trois cantons, deux partis et cinq organisations rejettent les modifications proposées.

Les réserves concernent notamment l'introduction d'un plafond pour la nouvelle déduction et son montant. Est aussi controversée la question de savoir si les coûts de la formation initiale devraient aussi être déductibles et si la déduction devrait être conçue comme une déduction générale ou comme une déduction pour les frais d'acquisition du revenu.

1.3.6.1

Déduction générale ou déduction pour les frais d'acquisition du revenu

Onze cantons se montrent explicitement favorables à l'aménagement d'une déduction générale. Quatre cantons, deux partis et sept organisations préfèrent, quant à eux, une déduction sous forme de déduction élargie pour les frais d'acquisition du revenu. Ils justifient leur point de vue en expliquant que le fait de ne plus autoriser la déduction des frais de perfectionnement en tant que frais d'acquisition du revenu, comme jusqu'à présent, irait à l'encontre de l'imposition selon la capacité économique. Les contribuables dont la formation continue est prise en charge par 23

Art. 27 LIFD

2452

l'employeur seraient favorisés. Elargir la déduction pour les frais d'acquisition du revenu serait une solution meilleure et plus simple que celle du Conseil fédéral. Une déduction pour les frais d'acquisition du revenu permettrait de résoudre tous les problèmes évoqués, ce qui va dans le sens de ce que préconise la motion. La déduction devrait rester liée aux frais d'acquisition du revenu, mais un plafond devrait être introduit. Abandonner la déduction pour les frais d'acquisition du revenu entraînerait une dégradation de la situation actuelle.

1.3.6.2

Plafonner la déduction

La motion prévoit l'introduction d'un plafond. Le projet du Conseil fédéral mis en consultation proposait donc de limiter la déduction à 4000 francs dans la LIFD.

Douze cantons, trois partis et vingt-deux organisations se sont prononcés contre la fixation d'un plafond ou ont émis des réserves quant au plafond proposé, en lui préférant une limite beaucoup plus élevée. Ils ont critiqué le fait que la déduction plafonnée à 4000 francs proposée par le Conseil fédéral entraînerait une dégradation de la situation actuelle, notamment parce que les formations continues actuelles coûtent nettement plus cher.

1.3.6.3

Rapport entre le plafond et le Guide d'établissement du certificat de salaire et de l'attestation de rentes

Les participants à la consultation ont proposé divers plafonds pour la déduction.

A l'exception de l'un d'eux, les participants ont déclaré que le plafond de la déduction devait être considérablement rehaussé. Les montants articulés vont de 8000 à 40 000 francs.

Plus de la moitié des participants a demandé que le plafond soit fixé à 12 000 francs, en expliquant qu'il fallait coordonner la déduction avec la déclaration obligatoire selon le nouveau certificat de salaire. Cela permettrait d'instituer l'égalité de traitement entre les employés qui paient eux-mêmes les dépenses pour la formation et ceux dont les dépenses sont prises en charge par l'employeur. Par ailleurs, les participants ont ajouté que les contributions de l'employeur de moins de 12 000 francs n'étaient pas traitées comme une part du salaire et ne devaient donc pas figurer sur le certificat de salaire. En outre, c'est après d'intenses discussions entre les associations économiques et les administrations fiscales de la Confédération et des cantons, accompagnées de diverses commissions des Chambres fédérales, que la limite de 12 000 francs a été fixée dans le nouveau certificat de salaire pour la déclaration de frais liés à la formation, et elle est aujourd'hui acceptée. Si un autre montant était choisi pour plafonner la nouvelle déduction, cette réglementation pour le certificat de salaire ne pourrait plus être maintenue.

Dans le certificat de salaire doivent figurer toutes les indemnités versées en numéraire par l'employeur à l'employé pour sa formation et son perfectionnement.

2453

Les sommes d'argent pour la formation et le perfectionnement versées par l'employeur à des tiers (notamment des instituts de formation) doivent être indiquées lorsqu'elles concernent un employé précis et qu'elles représentent un montant de 12 000 francs ou plus par événement en une année24.

Les contributions de plus de 12 000 francs pour la formation et le perfectionnement versées par l'employeur à des tiers sont certes indiquées dans le certificat de salaire mais ne sont pas prises en compte dans l'assiette de l'impôt. Elles n'ont donc aucune influence sur le montant des impôts, mais servent uniquement à des fins de contrôle.

Etant donné que le salarié peut demander, dans sa déclaration d'impôt, la déduction des frais de perfectionnement qu'il a payés, la mention de ces frais dans le certificat de salaire garantit qu'il ne pourra déduire que ses frais nets.

C'est pourquoi les parallèles tirés par certains des participants à la consultation entre le plafond de la nouvelle déduction et la réglementation pour le certificat de salaire ne peuvent pas servir d'argument pour une hausse du plafonnement à 12 000 francs.

1.3.6.4

Déductibilité des coûts de la formation initiale

Une minorité composée de trois cantons, trois partis et sept organisations a proposé que la totalité de frais de formation soient déductibles, c'est-à-dire aussi les coûts de la formation initiale. Leur proposition se fonde sur le fait qu'avec la réglementation proposée les différenciations dans les opérations de masse entraîneraient des difficultés et que le risque d'un traitement inéquitable serait grand. Selon cette minorité, il n'est pas possible de définir la formation initiale avec la clarté nécessaire et, du point de vue qualitatif, une discrimination de la formation initiale par rapport à une deuxième formation ne se justifie pas objectivement. Il serait dommage, s'agissant de la pratique et de la simplification du système fiscal, que la délimitation entre formation initiale et deuxième formation soit un problème à l'origine de nouveaux débats liés au droit fiscal.

1.4

Application et entrée en vigueur

En raison de la nouvelle disposition et de la modification de l'art. 26, al. 1, let. c et d, LIFD, l'ordonnance du 10 février 1993 sur les frais professionnels25 doit être adaptée.

L'entrée en vigueur aura lieu en même temps pour les cantons et la Confédération.

Le Conseil fédéral détermine la date de l'entrée en vigueur et laisse aux cantons suffisamment de temps pour adapter leur législation cantonale à la présente modification.

24 25

Guide d'établissement du certificat de salaire et de l'attestation de rentes, ch. 13.3, p. 13.

RS 642.118.1

2454

1.5

Classement d'interventions parlementaires

Malgré la différence concernant la formation initiale, la modification de la loi proposée permet de mettre en oeuvre la motion 08.3450 «Pour une fiscalité équitable des frais de formation et de perfectionnement». C'est pourquoi le classement de cette motion est demandé.

2

Commentaires des articles

2.1

Loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD)

Art. 26, al. 1, let. c et d L'actuel art. 26 LIFD énumère les frais professionnels déductibles en raison de leur caractère de frais d'acquisition du revenu. En font partie les frais de déplacement nécessaires entre le domicile et le lieu de travail (let. a), les frais supplémentaires résultant des repas pris hors du domicile et du travail par équipes (let. b), les autres frais indispensables à l'exercice de la profession (let. c), ainsi que les frais de perfectionnement et de reconversion professionnels en rapport avec l'activité exercée (let. d).

Il faut donc apporter une précision aux autres frais indispensables à l'exercice de la profession mentionnés à la let. c en ce sens qu'ils ne comprennent pas les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles (ni les frais de reconversion), car la déduction de ces frais sera autorisée dans le cadre de l'art. 33, al. 1, let. j. Pour cette même raison, la let. d de l'art. 26 LIFD doit être abrogée.

Art. 33, al. 1, let. j (nouvelle) En plus des frais d'acquisition du revenu, la LIFD autorise d'autres déductions qui ne sont pas en rapport direct avec l'obtention du revenu. Elles concernent en général des frais d'entretien qui ne sont en principe pas déductibles. Ces déductions sont justifiées par le fait que ces frais diminuent la capacité économique ou qu'ils permettent de promouvoir un comportement déterminé. C'est pourquoi elles sont aussi appelées déductions de politique sociale, déductions anorganiques ou déductions générales. Les déductions générales prennent toujours en considération les frais effectivement payés par le contribuable.

La nouvelle déduction pour les frais de formation et de perfectionnement conçue comme une déduction générale est inscrite à l'art. 33, al. 1, let. j. Sont déductibles tous les frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles, frais de reconversion compris, engagés après l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II ou après 20 ans révolus, pour autant qu'il ne s'agisse pas de frais engagés en vue d'obtenir un tel diplôme. Par diplôme, on entend tout titre sanctionnant des études, une formation générale ou une formation professionnelle du degré secondaire II. La déduction de tous les frais de formation qui n'ont pas de fins professionnelles n'est pas admise. C'est notamment le cas lorsqu'il s'agit d'une formation relevant de l'organisation du temps libre (loisirs, hobby).

2455

Le montant de la déduction est limité. Le plafond proposé est fixé à 6000 francs par personne et par an pour l'ensemble des frais déductibles. Pour les époux qui vivent en ménage commun, la déduction est accordée à chaque époux, car ils sont considérés chacun comme un sujet fiscal.

Art. 34, let. b L'art. 34 LIFD suit le concept statué aux art. 25 à 33, en énumérant expressément les frais qui ne sont pas déductibles du revenu imposable. Actuellement, les frais de formation sont mentionnés à la let. b.

La nouvelle réglementation proposée opère une distinction entre les frais de formation engagés jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II et les autres frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles.

En vertu de réflexions de politique financière, les frais de formation engagés jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II sont exclus des frais déductibles. L'art. 34, let. b, LIFD est adapté en conséquence.

2.2

Loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)

Art. 9, al. 1 La première phrase de l'actuel art. 9, al. 1, pose le principe de la déduction des frais nécessaires à l'obtention des revenus imposables (frais d'acquisition du revenu) et des déductions générales. La deuxième phrase de cet alinéa mentionne explicitement que les frais de perfectionnement et de reconversion liés à la profession sont des frais d'acquisition du revenu.

La déduction des frais de formation à des fins professionnelles doit aussi être autorisée dans la LHID (comme pour la LIFD) en tant que déduction générale. C'est ce qui est réglé par l'art. 9, al. 2, let. n. C'est pourquoi la deuxième phrase de l'art. 9, al. 1, doit être abrogée.

Art. 9, al. 2, let. n (nouvelle) L'art. 9, al. 2, LHID énumère les déductions générales que les personnes physiques peuvent retrancher de l'ensemble des revenus imposables. Une déduction pour les frais de formation et de perfectionnement (y compris les frais de reconversion) conçue comme pour l'impôt fédéral direct est introduite ici. Sont exclus de cette déduction les frais de formation engagés jusqu'à l'obtention d'un premier diplôme du degré secondaire II. En revanche,les frais de formation et de perfectionnement peuvent être déduits à partir de 20 ans révolus si le contribuable ne possède pas de diplôme du degré secondaire II et s'il ne s'agit pas de frais engagés en vue d'obtenir un tel diplôme.

Le plafond par personne sera fixé par le droit fiscal cantonal. Pour les époux qui vivent en ménage commun, la déduction est accordée à chaque époux, car ils sont considérés chacun comme un sujet fiscal.

2456

Art. 72m (nouveau) Les cantons devront avoir adapté leur législation pour l'entrée en vigueur de la modification proposée. Le Conseil fédéral fixera donc la date de l'entrée en vigueur suffisamment tard, de manière à laisser assez de temps aux cantons pour adapter leur législation fiscale.

S'il devait y avoir des retardataires, l'al. 2 de cet article prévoit que les nouvelles dispositions seront directement applicables si la législation fiscale cantonale les contredit.

3

Conséquences

3.1

Conséquences sur la Confédération, les cantons et les communes

3.1.1

Conséquences financières

D'après des estimations26 de l'Administration fédérale des contributions (AFC), la déduction proposée d'un montant maximal de 6000 francs par contribuable (personne physique) et par an entraînerait une diminution annuelle du produit de l'impôt fédéral direct de plus de 5 millions de francs par rapport à la situation actuelle.

L'avant-projet mis en consultation prévoyait un plafond de 4000 francs. Compte tenu du fait que 80 % environ des contribuables ne déclarent pas des frais de formation supérieurs à 4000 francs, il ne reste qu'un petit pourcentage de contribuables qui peuvent demander des déductions comprises entre 4000 et 6000 francs. C'est pourquoi la diminution des recettes ne devrait pas être très supérieure à celle indiquée dans l'avant-projet.

D'après une étude de l'AFC analysant d'une manière détaillée les données disponibles sur les dépenses pour le perfectionnement professionnel, les coûts du perfectionnement professionnel supportés par les contribuables se répartissent de la manière suivante: Coût du perfectionnement professionnel supporté par le contribuable (en fr.)

Nombre de contribuables en %

Pourcentage cumulé

De 0 à 1000 1001 à 2000 2001 à 3000 3001 à 4000 4001 à 5000 Plus de 5000

40 23 10 8 4 15

40 63 73 81 85 100

Les conséquences financières sur les impôts sur le revenu des cantons et des communes ne peuvent pas être chiffrées car le plafond de la déduction n'est pas prescrit.

Toutefois, si les cantons s'en tiennent au plafond de 6000 francs valable pour 26

Ces estimations font partie d'une étude complète de Marc Dubach «Die steuerliche Behandlung der Kosten für die Aus- und Weiterbildung» du 6 juin 2008, publiée sur Internet à l'adresse suivante: www.estv.admin.ch

2457

l'impôt fédéral direct, la diminution annuelle des recettes des cantons et des communes devrait se monter globalement à 30 millions de francs environ.

Les calculs de coût sont statiques. A long terme, la diminution des recettes fiscales devrait être un peu plus élevée en raison des changements de comportement et des tendances à la hausse des taxes d'écolage. Compte tenu des simplifications concernant les délimitations, on peut compter en outre sur une augmentation effective du nombre des dépenses qui seront déclarées. C'est pourquoi l'estimation de la diminution des recettes doit être considérée comme une limite inférieure.

3.1.2

Conséquences sur l'état du personnel

Il n'y a en principe pas de conséquences à long terme sur l'état du personnel de la Confédération et des cantons. Les effets sur le personnel du recul probable des recours fondés sur des problèmes de délimitation ne peuvent pas être jugés clairement. Dans un premier temps, l'adaptation des programmes informatiques mobilisera un certain nombre de ressources en personnel.

3.2

Conséquences économiques

Si la déduction des frais de formation et de perfectionnement fait baisser indirectement le coût de la formation à des fins professionnelles, il faudrait s'attendre en principe à une augmentation de la demande. Sur ce point, il faut cependant émettre les réserves suivantes: ­

L'ampleur de la réaction de la demande de formation et perfectionnement à une diminution du coût n'a guère été étudiée et elle est difficilement prévisible théoriquement. Du fait que l'allégement des coûts ne se fait sentir en règle générale qu'un an ou deux après leur échéance réelle dans le cadre de l'impôt fédéral direct, il ne faut pas s'attendre à une importante participation supplémentaire à la formation professionnelle, sur la base de réflexions théoriques.

­

Etant donné que l'allégement augmente avec le revenu, les effets incitatifs, s'il en existe, déploient leurs effets plutôt chez les personnes qui disposent de revenus élevés. Cet effet est renforcé du fait que les frais doivent être financés d'avance, car le dégrèvement n'a lieu qu'ultérieurement. La déduction des frais de formation professionnelle assure donc la déduction la plus grande des frais aux contribuables qui, actuellement déjà, prennent part le plus souvent à la formation professionnelle. En revanche, les couches les moins instruites de la population ne pourraient pas en profiter beaucoup.

­

Le dégrèvement vaut pour tous les cours de formation selon la nouvelle conception, donc aussi pour ceux que le contribuable aurait financés même sans dégrèvement. Le subventionnement d'activités qui auraient été exercées même sans aide de l'Etat doit être classé dans ce qu'on appelle les effets d'aubaine. Pour ce qui est du dégrèvement des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles, on admet que l'effet d'aubaine est relativement important. Sur la base de réflexions théoriques, on peut même penser que l'effet d'aubaine est pratiquement égal à 100 %.

2458

­

De plus, ce dégrèvement peut inciter les employeurs à reporter sur leurs employés le coût de cours de formation et de perfectionnement qu'ils auraient payés sinon.

­

En raison de l'importance assez limitée des diminutions attendues du produit des impôts et du fait que la participation à la formation et au perfectionnement ne devrait guère augmenter en raison de l'importance des effets d'aubaine, les conséquences économiques de cette mesure devraient être plutôt faibles. Etant donné que les personnes bien instruites qui gagnent bien leur vie suivent plus fréquemment des cours de formation et de perfectionnement, la nouvelle déduction devrait diminuer légèrement la progressivité des impôts directs sur le revenu.

Les effets d'un élargissement de la déduction fiscale des frais de formation et de perfectionnement à des fins professionnelles sur l'économie devraient être certes positifs, mais très limités.

4

Liens avec le programme de la législature

Le présent projet n'est pas mentionné dans le message du 23 janvier 2008 sur le programme de la législature 2007 à 201127 ni dans l'arrêté fédéral du 18 septembre 2008 sur le programme de la législature 2007 à 201128, car la motion à l'origine du présent projet n'a été transmise que le 23 septembre 2009.

5

Aspects juridiques

5.1

Constitutionnalité et conformité aux lois

L'art. 128 Cst. autorise la Confédération à prélever un impôt fédéral direct sur le revenu des personnes physiques. L'art. 129 Cst. lui donne en plus la compétence de fixer les principes de l'harmonisation des impôts directs de la Confédération, des cantons et des communes. En l'occurrence, l'harmonisation s'étend à l'assujettissement, à l'objet et au calcul des impôts dans le temps, à la procédure et au droit pénal fiscal. Les barèmes de l'impôt, les taux d'imposition et les franchises demeurent exclus de l'harmonisation.

Les droits fondamentaux lient le législateur fédéral lorsqu'il légifère. Dans le domaine des impôts directs, il doit donc respecter, outre le principe de l'égalité juridique, celui de l'imposition selon la capacité économique (art. 127 Cst.).

Le présent projet poursuit un but extrafiscal: il s'agit d'encourager la formation continue au moyen d'incitations fiscales (déductions). La promotion de buts extrafiscaux dans la législation fiscale est subordonnée à des conditions de fond. Tout d'abord, le législateur doit posséder une compétence législative ou incitative inscrite dans la Constitution. En l'occurrence, cette base se trouve à l'art. 64a, al. 2, Cst., qui attribue à la Confédération la compétence d'encourager la formation continue. En

27 28

FF 2008 639 FF 2008 7745

2459

plus de la compétence objective requise, la doctrine29 et la jurisprudence du Tribunal fédéral30 ont formulé d'autres conditions qui doivent être remplies. En particulier, la législation fiscale doit être plus efficace pour atteindre le but fixé que d'autres moyens comme les aides financières directes ou les mesures régulatrices. La question de savoir si ces conditions sont remplies en l'occurrence est sans réponse. Les commentaires des ch. 1.1.8 et 1.1.9 permettent cependant d'en douter.

De plus, la solution proposée entraîne de nouvelles inégalités: d'une part, les frais de formation étroitement liés à la profession exercée ne peuvent plus être déduits entièrement en tant que frais d'acquisition du revenu, mais sont soumis à un plafonnement, alors que les indépendants peuvent toujours déduire entièrement leurs frais de formation. D'autre part, les personnes de moins de 20 ans et celles de plus de 20 ans ne sont pas traitées d'un manière égale pour ce qui est de la déduction des frais de formation en dehors du système de formation ordinaire. Les moins de 20 ans ne peuvent pas déduire des frais de formation s'ils ne possèdent pas un diplôme du degré secondaire II. En revanche, les plus de 20 ans peuvent déduire ce genre de frais même s'ils ne possèdent pas un tel diplôme.

La modification proposée améliore toutefois sensiblement l'imposition des différents degrés de formation et simplifie grandement les problèmes de délimitation. En outre, le projet renonce au critère actuel de la formation initiale et se fonde à la place sur les critères plus objectifs et plus simples de la formation en Suisse (ch. 1.1.4).

Ces considérations montrent que le présent projet n'échappe pas à la contradiction entre le mandat impératif des Chambres fédérales au Conseil fédéral d'élaborer un projet législatif poursuivant cet objectif extrafiscal (encourager la formation et le perfectionnement professionnels au moyen de déductions fiscales) et le respect des principes constitutionnels.

5.2

Compatibilité avec les obligations internationales de la Suisse

La nouvelle conception de la déduction des frais de formation et de perfectionnement n'a aucune influence sur les engagements internationaux de la Suisse.

5.3

Frein aux dépenses

Il n'est pas nécessaire de soumettre cet objet au frein aux dépenses.

29

30

Paul Richli: Rechtsprobleme im Zusammenhang mit der Verbesserung der steuerlichen Rahmenbedingungen für die Wirtschaft, Archives 54 (1985/86), p. 97 à 135; Markus Reich: Das Leistungsfähigkeitsprinzip im Einkommenssteuerrecht: Archives 53 (1984/85), p. 5 à 28; Peter Gurtner: Die Steuerbilanz als wirtschaftspolitisches Lenkungsinstrument ­ Würdigung der wehrsteuerlichen Erleichterungen zur Milderung der wirtschaftlichen Schwierigkeiten, Archives 47 (1978/79), p. 561 à 577.

2P.43/2006, p. 24

2460