ad 10.443 Initiative parlementaire Contre-projet indirect à l'initiative populaire «contre les rémunérations abusives» Rapport complémentaire du 22 novembre 2010 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats Avis du Conseil fédéral du 3 décembre 2010

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, En vertu de l'art. 112, al. 3, de la loi du 13 décembre 2002 sur le Parlement, nous vous transmettons ci-après notre avis sur le rapport complémentaire du 22 novembre 2010 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats relatif au contreprojet indirect à l'initiative populaire «contre les rémunérations abusives».

Veuillez agréer, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

3 décembre 2010

Au nom du Conseil fédéral suisse: La présidente de la Confédération, Doris Leuthard La chancelière de la Confédération, Corina Casanova

2010-3166

241

Avis 1

Contexte

1.1

Initiatives parlementaires

Le 20 mai 2010, la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats (CAJ-E) a décidé, par 9 voix contre 4, d'élaborer dans le cadre d'une initiative parlementaire un (nouveau) contre-projet indirect à l'initiative populaire1 «contre les rémunérations abusives»2. La Commission des affaires juridiques du Conseil national a approuvé, le 2 juin 2010, par 15 voix contre 11, la décision prise par son homologue (art. 109, al. 3, de la loi sur le Parlement; LParl3).

Le 21 juin 2010, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) a décidé, par 7 voix contre 3 et 1 abstention, d'élaborer une initiative parlementaire intitulée «traitement des rémunérations très élevées du point de vue du droit des sociétés et du droit fiscal» (10.460). Cette initiative formulée de toutes pièces prévoit que les rémunérations supérieures à trois millions de francs sont considérées comme étant des tantièmes au sens de l'art. 677 du code de obligations (CO; RS 220). Le 28 juin 2010, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national a approuvé cette décision par 14 voix contre 12.

1.2

Travaux des commissions

Le 25 juin 2010, la CER-E a présenté un co-rapport à la CAJ-E par lequel elle la priait de tenir compte de l'initiative parlementaire 10.460 «traitement des rémunérations très élevées du point de vue du droit des sociétés et du droit fiscal» lors de son examen du contre-projet indirect. La CAJ-E a examiné ledit co-rapport au cours de sa séance du 19 août 2010. Par 9 voix contre 4, elle a pris la décision de principe de donner suite à la demande de la CER-E. Cette dernière a constaté dans un deuxième co-rapport du 3 septembre 2010 qu'il était important de traiter parallèlement la question des rémunérations très élevées en droit des sociétés et le contre-projet indirect. Elle a constaté en outre qu'il serait peu plausible, pour des motifs d'égalité de traitement, de restreindre la réglementation aux seules entreprises dont les actions sont cotées en bourse. La CER-E a finalement indiqué qu'elle n'avait pas clarifié certains points, en particulier les conséquences juridiques d'une telle réglementation pour le droit de la société anonyme, comme également pour d'autres lois, relevant notamment du droit fiscal ou des assurances sociales. La CER-E a décidé de suspendre ses travaux concernant l'initiative parlementaire en attendant le projet de la CAJ-E.

1 2

3

242

Objet no 08.080, cf. à ce sujet le message du Conseil fédéral du 5 décembre 2008, FF 2009 265 Cf. pour de plus amples informations au sujet du contexte politique le ch. 1.1 du rapport de la CAJ-E du 25 octobre 2010 concernant le contre-projet indirect à l'initiative populaire «contre les rémunérations abusives», FF 2010 7521.

RS 171.10

Le 25 octobre 2010, la CAJ-E a auditionné, en lien avec l'initiative parlementaire de la CER-E, deux experts du droit des sociétés, un expert du droit du travail, des représentants de trois associations économiques et des représentants de la Conférence des Directeurs Cantonaux des Finances (CDCF). A l'issue de ces auditions, la CAJ-E est arrivée à la conclusion que des investigations plus poussées s'imposaient.

Toutefois, pour des raisons de calendrier, elle a déjà adopté un contre-projet indirect (ci-après «projet 1») lors de sa séance du 25 octobre 2010. Le Conseil fédéral a pris position le 17 novembre 2010 et salué le contre-projet indirect de la CAJ-E. Le 22 novembre 2010, la CAJ-E a décidé, par 7 voix contre 6, de soumettre au Conseil des Etats la demande de la CER-E sous la forme d'un projet séparé (ci-après «projet»). Le modèle dit des tantièmes («modèle-tantièmes») doit par conséquent être traité comme un complément autonome au projet 1.

2

Avis du Conseil fédéral

2.1

Approbation du nouveau contre-projet indirect

Le Conseil fédéral reste d'avis que l'initiative populaire «contre les rémunérations abusives» restreint trop la liberté économique, organisationnelle et contractuelle des entreprises et de leurs actionnaires et présente un sérieux potentiel d'insécurité juridique; l'initiative populaire propose notamment la stricte interdiction de certaines indemnités (par ex. les indemnités de départ), des règles détaillées quant au contenu obligatoire des statuts et l'approbation des rémunérations des membres de la direction par l'assemblée générale et des sanctions pénales allant jusqu'à trois ans de privation de liberté. L'initiative populaire «contre les rémunérations abusives» présente donc de sérieux risques pour l'attrait de la place économique suisse.

Le Conseil fédéral a déjà indiqué dans son message du 5 décembre 2008 relatif à l'initiative populaire4 que la politique de rémunération des entreprises ne peut être laissée à leur seule autorégulation. Partant, il approuve dans son avis du 17 novembre 20105 le nouveau contre-projet indirect de la CAJ-E du 25 octobre 20106.

Le Conseil fédéral n'a pas encore eu l'occasion de prendre position sur le «modèletantièmes», celui-ci n'étant pas intégré, ni dans le contre-projet indirect de la CAJ-E du 25 octobre 2010, ni dans les messages du 21 décembre 20077 et du 5 décembre 2008.

2.2

Présentation du «modèle-tantièmes»

La part des rémunérations versées aux membres du conseil d'administration, de la direction, du conseil consultatif et des travailleurs qui n'ont pas le statut d'organe, qui dépasse trois millions de francs par bénéficiaire et personnes qui leur sont proches, par exercice annuel, est désormais considérée comme «tantième» au sens de 4 5 6 7

Objet no 08.080, cf. à ce sujet le message du Conseil fédéral du 5 décembre 2008, FF 2009 265.

FF 2010 7589 FF 2010 7521 Objet no 08.011, cf. à ce sujet le message du Conseil fédéral du 21 décembre 2007, FF 2008 1407.

243

l'art. 677 CO («modèle-tantièmes»). Ces participations au bénéfice ne peuvent être prélevées que sur le bénéfice résultant du bilan et sont autorisées uniquement après une attribution à la réserve et le versement aux actionnaires d'un dividende de 5 % au moins.

Afin d'éviter que cette règle puisse être éludée, le projet prévoit que pour déterminer le montant global des rémunérations au sens de l'art. 677, toutes les rémunérations versées à des bénéficiaires par les sociétés appartenant à un groupe ou par des personnes proches de la société sont additionnées. Dans les groupes de sociétés, la rémunération versée par la société mère n'est dès lors pas seule déterminante; il faut bien plus tenir compte de l'ensemble des rémunérations versées par les différentes sociétés qui font partie du groupe, dans une approche consolidée.

2.3

Absence de coordination avec l'actuel code des obligations

Seul l'art. 677 CO a été matériellement modifié par la CAJ-E en lien avec le «modèle-tantièmes». Le Conseil fédéral estime cependant qu'il serait impératif de procéder à la coordination d'autres dispositions avec ce modèle. En effet, l'introduction du «modèle-tantièmes» pourrait engendrer des difficultés plus importantes s'agissant des dispositions suivantes de l'actuel code des obligations: Afin que l'assemblée générale puisse disposer de suffisamment d'informations au sujet des rémunérations très élevées versées à des travailleurs qui n'ont pas le statut d'organe, les dispositions sur la transparence, selon l'art. 663bbis CO, doivent être adaptées en conséquence.

D'après le «modèle-tantièmes», les indemnités très élevées sont toujours considérées comme des tantièmes. En matière d'action en restitution, cette approche permet d'exiger des bénéficiaires qu'ils restituent des rémunérations très élevées lorsque les conditions (formelles) de l'art. 677 au sens du projet ne sont pas respectées (art. 678, al. 1, CO/selon projet 1); cette exigence ne s'applique cependant pas lorsqu'on est en présence d'une disproportion entre la prestation et la contre-prestation (art. 678, al. 2, CO/selon projet 1). Les indemnités très élevées, soit chaque part de rémunération qui dépasse trois millions de francs, seraient ainsi mieux protégées du point de vue du bénéficiaire que les indemnités pouvant s'élever jusqu'à trois millions de francs qui ne tomberaient pas dans le champ d'application du «modèle-tantièmes».

Cette nouvelle configuration résulte automatiquement du «modèle-tantièmes»: en tant que parts de bénéfice, les indemnités très élevées ne doivent plus être proportionnées à la contre-prestation des bénéficiaires, situation qui ne reflète pas les objectifs ou les aspirations du nouveau contre-projet indirect (projet 1).

En cas de faillite de la société, les membres du conseil d'administration doivent restituer les tantièmes qu'ils ont reçus au cours des trois ans précédant l'ouverture de la faillite, à moins qu'ils ne prouvent que les conditions posées par la loi et les statuts pour la distribution de tantièmes étaient remplies (art. 679 CO). Le champ d'application personnel de cette disposition ne correspond pas au «modèle-tantièmes», car les membres de la direction notamment ne sont pas concernés.
Le droit de la société à responsabilité limitée (art. 798b CO) et le droit de la société en commandite par actions (art. 764, al. 2, CO) renvoient également en matière de tantièmes au droit de la société anonyme. D'après la jurisprudence du Tribunal 244

fédéral, les renvois généraux au droit de la société anonyme sont de nature dynamique; le «modèle-tantièmes» s'appliquerait donc aussi aux deux types de sociétés précitées. Par contre, les sociétés coopératives, indépendamment de leur taille, ne tomberaient pas dans le champ d'application du «modèle-tantièmes», faute de renvoi du droit de la société coopérative à celui de la société anonyme. Il n'existe donc pas de réglementation uniforme en matière de rémunérations très élevées pour les sociétés de capitaux et les sociétés coopératives.

Par ailleurs, certains aspects en partie contraignants du droit du travail pourraient entrer en conflit avec des éléments du «modèle-tantièmes», notamment l'art. 322a CO (participation au résultat de l'exploitation), l'art. 322d CO (gratification) et l'art. 323 CO (paiement du salaire, délais et terme de paiement).

En raison du délai très court dont il dispose, le Conseil fédéral n'a pas la possibilité de proposer des solutions à cet égard. L'ajustement éventuel du «modèle-tantièmes» à ces dispositions, voire à d'autres dispositions, relevant ou non du code des obligations, irait cependant au-delà de simples adaptations techniques.

2.4

Absence de coordination avec le nouveau contre-projet indirect (projet 1)

Le Conseil fédéral est d'avis que le «modèle-tantièmes» n'est pas suffisamment coordonné avec l'approbation par l'assemblée générale des rémunérations de base et des rémunérations supplémentaires versées aux membres du conseil d'administration, du conseil consultatif et de la direction (art. 731c ss du projet 1).

Pour pouvoir verser des rémunérations très élevées, les conditions de l'art. 677 du projet doivent être remplies; l'exercice doit être bénéficiaire, une attribution aux réserves doit être faite et un dividende d'au minimum cinq pourcent doit être versé.

Selon l'art. 717, al. 1bis, du projet 1, les rémunérations doivent correspondre à la situation économique de la société et à sa prospérité à long terme. Or, le «modèletantièmes» n'établit aucune relation explicite avec ces différentes conditions.

Non seulement le règlement de rémunération (art. 731d du projet 1), mais aussi le rapport de rémunération (art. 731f du projet 1) comportent des règles impératives respectivement des informations sur l'ensemble des rémunérations qui sont versées aux membres du conseil d'administration, du conseil consultatif et de la direction.

Le champ d'application personnel du «modèle-tantièmes» comprend certes les travailleurs sans fonction d'organe, mais la loi ne dit pas où les informations indispensables à la prise de décision d'approbation par les actionnaires doivent être recherchées, ni si elles doivent être publiées.

Sur la base de ces différences, les actionnaires pourraient devoir voter deux fois sur les mêmes rémunérations, étant donné que des conditions matérielles différentes doivent être remplies. En conséquence, le danger que l'assemblée générale prenne des décisions inconsistantes est réel.

245

2.5

Aspects fiscaux

Différents participants à l'audition du 26 octobre 2010 ont mentionné que le «modèle-tantièmes» grèverait triplement les rémunérations de plus de trois millions de francs. L'impôt sur le bénéfice des entreprises, de même que l'impôt sur le revenu des personnes physiques seraient prélevés. De plus, les rémunérations de plus de trois millions de francs représenteraient le salaire déterminant pour le calcul des cotisations sociales.

Le Conseil fédéral considère que le «modèle-tantièmes» ne conduirait, s'agissant des impôts sur le revenu et des cotisations sociales, à aucune nouvelle charge pour les personnes concernées. Selon le droit en vigueur, les tantièmes sont déjà soumis à l'impôt sur le revenu (art. 17, al. 1, 84, al. 2, et 93, al. 1 et 2, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur les impôts fédéraux directs; LIFD8) et représentent des éléments du salaire déterminant pour le calcul des cotisations sociales (art. 7, let. h, du règlement du 31 octobre 1947 sur l'assurance-vieillesse et survivants; RAVS9).

Le «modèle-tantièmes» conduirait à une charge supplémentaire pour les sociétés en termes d'impôt sur le bénéfice. La part des rémunérations versées aux membres du conseil d'administration, de la direction du conseil consultatif et des travailleurs sans fonction d'organe, qui dépasse trois millions de francs, par bénéficiaire et personnes qui leur sont proches, par exercice annuel, ne pourrait plus être comptabilisée comme une charge justifiée par l'usage commercial, susceptible de réduire le bénéfice annuel imposable. Cette part de rémunération constituerait en revanche une répartition de bénéfice.

Le Conseil fédéral juge cette charge supplémentaire prévisible pour les entreprises.

Ce faisant, aucun nouvel impôt et aucun nouveau système d'imposition ne seraient introduits, puisque cette nouvelle charge repose sur l'impôt sur le bénéfice connu depuis des décennies. Les chiffres les plus récents de l'Office fédéral des assurances sociales établissent que 383 travailleurs ont touché en 2007 des salaires supérieurs à trois millions de francs assujettis à cotisations sociales. Le salaire cumulé de ces personnes se monte au total à 2,346 milliards de francs. De ces 2,346 milliards de francs, dont il faut déduire les trois premiers millions de francs du «modèletantièmes» non soumis à l'impôt sur
le bénéfice, il resterait 1,197 milliards de francs pouvant au maximum faire l'objet d'une imposition à titre de bénéfice.

Le Conseil fédéral est d'avis que des rémunérations d'une certaine importance ­ selon le «modèle-tantièmes», à partir de trois millions de francs ­ représentent, du point de vue du droit de la société anonyme et du droit comptable, une participation au bénéfice et non une charge justifiée par l'usage commercial.

3

Modèle alternatif et modèle mixte

3.1

Du modèle alternatif selon la minorité Schweiger ...

Le Conseil fédéral observe que le «modèle-tantièmes» lui paraît inachevé et qu'il ne saurait s'inscrire en l'état dans le système du droit des sociétés en vigueur, faute de coordination avec l'actuel code des obligations et avec le contre-projet indirect 8 9

246

RS 642.11 RS 831.101

(projet 1) qu'il soutient. Le Conseil fédéral se félicite toutefois que la CAJ-E soit disposée à renforcer le droit des sociétés et le droit fiscal en matière d'octroi de rémunérations très élevées ainsi que les droits des actionnaires dans ce domaine.

A la lumière de ce qui précède, le Conseil fédéral propose à la CAJ-E d'adopter le modèle alternatif, selon la minorité Schweiger. Ce modèle n'est pas rattaché à l'institution juridique des tantièmes mais est basé sur le mécanisme des rémunérations dites «inadmissibles» au sens de l'art. 731m selon le projet 1 (interdiction de principe avec exceptions). Selon le modèle alternatif, si une perte ressort du compte de résultat ou si le capital-actions et les réserves ne sont plus couverts, les rémunérations très élevées sont en principe inadmissibles. Face à une telle situation de crise, le conseil d'administration peut toutefois proposer aux actionnaires des exceptions justifiées, à condition qu'elles soient dans l'intérêt de la société et s'inscrivent dans la perspective d'une prospérité à long terme de l'entreprise. Les actionnaires doivent approuver ces exceptions par un vote à la majorité qualifiée. Le modèle alternatif de la minorité Schweiger étend ainsi les droits des actionnaires, sans reprendre cependant les problèmes posés sous l'angle du droit des sociétés par le «modèletantièmes».

Le Conseil fédéral est en outre de l'avis qu'il n'existe aucune raison impérative de traiter séparément le modèle alternatif de la minorité Schweiger. Il propose partant d'intégrer ce deuxième projet dans le contre-projet indirect (projet 1), ce qui facilitera aussi le traitement du dossier par le Parlement.

3.2

... au modèle mixte du Conseil fédéral

Par ailleurs, le Conseil fédéral soumet à la CAJ-E quatre propositions relevant du droit des sociétés, une proposition ressortant au droit fiscal et une ressortant au droit des assurances sociales qui, à son avis, rapprochent le modèle alternatif de la minorité Schweiger du «modèle-tantièmes», sans en reprendre toutefois les inconvénients: Etant donné que la problématique des rémunérations très élevées ne touche pas seulement les sociétés dont les actions sont cotées en bourse, le champ d'application personnel du modèle alternatif (selon la minorité Schweiger) devrait être étendu à l'ensemble des sociétés anonymes (art. 731c, al. 2). Considérant le délai très court dont il dispose, le Conseil fédéral n'est pas en mesure de proposer une réglementation pour les sociétés coopératives et les sociétés à responsabilité limitée.

La disposition sur la transparence des rémunérations versées aux membres de la direction devrait être adaptée à celle qui s'applique aux membres du conseil d'administration et du conseil consultatif. Les actionnaires devraient pouvoir savoir à quel membre de la direction des indemnités très élevées ont été versées et à combien elles se sont élevées. Les indemnités individuelles versées à chaque membre de la direction devraient par conséquent être publiées (art. 731h, al. 2, ch. 2).

La définition des rémunérations très élevées selon la minorité Schweiger paraît trop vabhe au Conseil fédéral.Selon le Conseil fédéral, chaque part de rémunération qui dépasse trois millions de francs constitue une rémunération très élevée. Seule cette part (et non pas les trois premiers millions) doit être soumise à la nouvelle réglementation qu'il propose. Il propose dès lors une définition identique dans son sens, mais plus précise (art. 731n, al. 1, 1re phrase).

247

Le Conseil fédéral estime que le principe de l'approbation par l'assemblée générale des rémunérations très élevées doit s'appliquer également lors des exercices au cours desquels on ne constate ni perte annuelle, ni couverture insuffisante du capital (art. 731n, al. 4bis).

En outre, il est justifié pour le Conseil fédéral qu'à partir du seuil de trois millions de francs les rémunérations versées aux membres du conseil d'administration, de la direction, du conseil consultatif ou aux travailleurs, ainsi qu'aux personnes qui leur sont proches, soient comparées à une participation au bénéfice, notamment en ce qui concerne les droits de participation des actionnaires, et ne constituent pas une dépense justifiée par l'usage commercial qui réduirait le bénéficie de l'exercice de l'entreprise.

Partant, il propose d'adapter l'art. 59, al. 3, LIFD10 et l'art. 25, al. 1ter, de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation directe des impôts des cantons et des communes (LHID)11. Du point de vue de son bénéficiaire, la rémunération très élevée est un revenu provenant d'un activité dépendante. Les cotisations AVS sont dues sur la rémunération très élevée. En revanche, comme il s'agit d'un salaire, l'impôt anticipé n'est pas dû.

La modification de la LHID aurait des effets similaires sur les recettes fiscales cantonales à ceux du «modèle-tantièmes». Les représentants de la CDCF ont déjà été consultés à ce sujet, lors de l'audition du 25 octobre 2010. Ils se sont montrés critiques à l'égard du «modèle-tantièmes», mais se sont montrés favorables à son application aux sociétés dont les actions sont cotées en bourse ou non. Le Conseil fédéral se réserve la possibilité d'entendre encore la CDCF sur ce point.

Le modèle alternatif de la minorité Schweiger se muerait, au travers des six propositions additionnelles du Conseil fédéral, en un nouveau modèle mixte. D'un côté, le point positif du «modèle-tantièmes» concernant l'utilisation du bénéfice et l'impôt sur le bénéfice est combiné avec les avantages du modèle alternatif au niveau du droit des sociétés. De l'autre, les problèmes exposés dans la présente prise de position (absence de coordination avec le droit actuel et le contre-projet indirect) seraient écartés, car le modèle mixte n'est pas construit sur la réglementation des tantièmes mais s'inscrit
dans le juste prolongement du nouveau contre-projet indirect.

Le Conseil fédéral fait remarquer qu'on ne peut exclure que la réglementation proposée en droit commercial et droit fiscal ne soit contournée.

4

Détail des propositions

4.1

Biffer les dispositions du «modèle-tantièmes»

Art. 677 CO selon projet Biffer Art. 5 LAVS selon projet Biffer 10 11

248

RS 642.11 RS 642.14

4.2

Adopter le modèle alternatif de la minorité Schweiger

Art. 704, al. 1, ch. 10 Une décision de l'assemblée générale recueillant au moins les deux tiers des votes exprimés et la majorité des valeurs nominales représentées est nécessaire pour:

1

10. l'approbation du montant total des rémunérations très élevées en cas de perte durant l'exercice ou lorsque le capital-actions et les réserves ne sont plus couverts; Art. 731d, al. 2, ch. 8 2

Le règlement de rémunération définit en particulier: 8.

les dispositions plus contraignantes pour les rémunérations très élevées.

Art. 731g, al. 1, ch. 4bis et. 4ter 1

Le rapport de rémunération contient les éléments suivants: 4bis.

les rémunérations très élevées que la société a versées directement ou indirectement aux travailleurs actuels;

4ter.

les rémunérations très élevées que la société a versées directement ou indirectement à d'anciens travailleurs, lorsqu'elles sont en relation avec leur ancienne activité dans la société ou lorsqu'elles ne sont pas conformes à la pratique du marché;

Art. 731h, al. 2, ch. 5 2

Les indications sur les rémunérations et les crédits doivent inclure: 5.

le montant global des rémunérations très élevées accordées aux travailleurs ainsi que le nombre de bénéficiaires.

Art. 731k, al. 1bis 1bis

L'art. 731n est réservé.

Art. 731l, al. 1bis 1bis

L'art. 731n est réservé.

Art. 731n

Rémunérations très élevées

Les rémunérations des membres du conseil d'administration, de la direction, du conseil consultatif et des travailleurs qui dépassent trois millions de francs par bénéficiaire et personnes qui leur sont proches, par exercice annuel, sont réputées très élevées. Pour déterminer si ce seuil est atteint, toutes les rémunérations versées aux bénéficiaires par la société et les personnes qui lui sont proches sont comptabilisées.

1

249

Les rémunérations très élevées sont interdites lorsque le compte de résultat présente une perte ou lorsque le capital-actions et les réserves ne sont plus couverts.

2

En dérogation à l'al. 2, le conseil d'administration peut proposer à l'assemblée générale des exceptions pour l'exercice écoulé, pour autant que celles-ci soient dans l'intérêt de la société et contribuent à sa prospérité à long terme. L'assemblée générale se prononce sur l'approbation du montant total des rémunérations très élevées pour l'exercice écoulé.

3

Le règlement de rémunération peut prévoir des dispositions plus contraignantes, telles qu'un seuil inférieur à celui prévu à l'al. 1 ou une interdiction absolue des rémunérations très élevées.

4

L'approbation par l'assemblée générale ne restreint pas la responsabilité du conseil d'administration.

5

4.3

Intégrer le second projet dans le projet 1

Intégrer les dispositions du modèle alternatif de la minorité Schweiger dans le contre-projet indirect (projet 1).

4.4

Six propositions complémentaires du Conseil fédéral

Art. 731c, al. 2 Les dispositions sur les rémunérations très élevées sont applicables par analogie aux sociétés dont les actions ne sont pas cotées en bourse.

2

Art. 731h, al. 2, ch. 2 2

Les indications sur les indemnités et les crédits doivent inclure: 2.

le montant global accordé aux membre de la direction, ainsi que le montant accordé à chacun d'entre eux, avec mention de son nom et de sa fonction.

Art. 731n, al. 1, 1re phrase Chaque part de rémunération versée aux membres du conseil d'administration, de la direction, du conseil consultatif et aux travailleurs, qui dépasse trois millions de francs par bénéficiaire et personnes qui leur sont proches, par exercice annuel, est réputée très élevée. ...

1

Art. 731n, al. 4bis L'assemblée générale se prononce annuellement sur l'approbation du montant total des rémunérations très élevées.

4bis

250

Art. 59, al. 3, LIFD 3 Les rémunérations très élevées au sens de l'art. 731n du code des obligations12 ne font pas partie des charges justifiées par l'usage commercial.

Art. 25, al. 1ter, LHID Les rémunérations très élevées au sens de l'art. 731n du code des obligations13 ne font pas partie des charges justifiées par l'usage commercial.

1ter

Art. 5, al. 2, LAVS Le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Il englobe les allocations de renchérissement et autres suppléments de salaire, les commissions, les gratifications, les rémunérations très élevées selon l'art. 731n du code des obligations14, les prestations en nature, les indemnités de vacances ou pour jours fériés et autres prestations analogues, ainsi que les pourboires, s'ils représentent un élément important de la rémunération du travail.

2

12 13 14

RS 220 RS 220 RS 220

251

252