ad 01.023 Révision totale de l'organisation judiciaire fédérale Rapport additionnel de la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats relatif au projet de loi fédérale sur le Conseil de la magistrature (LCM) du 16 novembre 2001

1

Situation initiale

Dans le cadre du traitement du projet de loi sur le Tribunal pénal fédéral, la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats (CAJ-E) a examiné de manière approfondie la question de la surveillance des tribunaux fédéraux et celle de la préparation de l'élection des juges fédéraux.

Le Tribunal pénal fédéral comprendra 15 à 35 postes de juges et le Tribunal administratif fédéral 50 à 70 postes de juges. L'engagement à temps partiel étant possible, il faudra compter avec plus de 100 titulaires de charge; leur élection (réélection) et la surveillance représentent déjà du point du vue purement quantitatif une charge considérable.

Dans le message du 28 février 2001 concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale (FF 2001 4005 ss), il est proposé que le Conseil fédéral soit compétent pour élire les juges du Tribunal pénal fédéral (et ceux du Tribunal administratif fédéral). Les deux tribunaux sont soumis uniquement à la haute surveillance de l'Assemblée fédérale. (ch. 2.5.5/6; FF 2001 4056).

La CAJ-E a en revanche décidé que les juges du Tribunal pénal fédéral (et du Tribunal administratif fédéral) sont élus pas l'Assemblée fédérale. Celle-ci exerce aussi la haute surveillance. Lors de l'exécution de cette tâche, l'Assemblée fédérale doit être assistée par un Conseil de la magistrature à instituer.

La CAJ-E a adopté le projet de loi ci-joint à l'unanimité.

2

Proposition d'instaurer un Conseil de la magistrature

2.1

Description

L'analyse de droit comparé (cf. annexe) montre en particulier que la constitution italienne conçoit le Consiglio Superiore della Magistratura (CSM) comme un organe spécifique, d'un rang élevé, extérieur aux trois types traditionnels d'autorités (parlement, gouvernement, justice) et auquel de larges compétences de décision et de surveillance sont dévolues dans le domaine de la justice.

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2001-2606

L'institution d'un tel organe pour la justice fédérale équivaudrait à un changement de système, car certaines compétences de l'Assemblée fédérale seraient transférées au Conseil de la magistrature. Il faudrait alors soumettre impérativement le Tribunal fédéral à cet organe. Cela impliquerait une modification de la Constitution fédérale.

Il n'est pas prévu d'aller aussi loin. La CAJ-E a décidé que ce sera l'Assemblée fédérale qui élira les juges des tribunaux inférieurs de la Confédération. L'Assemblée fédérale a également de par la Constitution la haute surveillance sur la justice (art. 169, al. 1, Cst.)

Avec ces prémisses, la CAJ-E propose un autre modèle, selon lequel le Conseil de la magistrature est un organe intermédiaire qui agit en complément de l'Assemblée fédérale. Le Conseil de la magistrature constitue une sorte de pont entre le parlement et les tribunaux. Il collabore lors de la préparation de l'élection des juges et décharge l'Assemblée fédérale dans l'exerce de la haute surveillance en surveillant les tribunaux inférieurs. Un tel modèle ne toucherait pas à la compétence électorale de l'Assemblée fédérale et laisserait également inchangée la haute surveillance de l'Assemblée fédérale.

2.2

Avantages et inconvénients

Avantages:

1

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L'Assemblée fédérale dispose des compétences essentielles (élection, haute surveillance), sans être surchargée grâce à l'interposition du Conseil de la magistrature.

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Cela évite également d'attribuer au Tribunal fédéral, qui est déjà surchargé, une tâche nouvelle de surveillance qui lui donnerait beaucoup de travail.

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Le Conseil de la magistrature offre la possibilité d'établir une surveillance professionnelle efficace sans remettre en cause la haute surveillance (politique) de l'Assemblée fédérale.

­

Le Conseil de la magistrature établit une sorte de pont entre la justice et le parlement.

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Les responsabilités sont claires.

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La confiance des justiciables dans les tribunaux est renforcée si ceux-ci font l'objet d'une surveillance efficace.

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L'élection des juges est quelque peu dépolitisée. La sélection des juges peut être fondée principalement sur la base de critères objectifs, c'est-à-dire en fonction de l'aptitude personnelle et professionnelle.

­

Si la procédure de réélection des juges expose l'indépendance des tribunaux à certains dangers (justice favorable à l'organe électif, mauvaise réélection voire non-réélection de juges ayant déplu à certains courants politiques1), l'intervention d'un organe professionnel tel que le Conseil de la magistrature réduit ces dangers.

Cf. Regina Kiener, Richterliche Unabhängigkeit, Bern 2001, p. 285 ss avec des références.

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­

Il existe une autorité qui est compétente pour la justice fédérale. Le concept pourrait être ultérieurement développé, p. ex. en chargeant le Conseil de la magistrature de veiller à la formation continue des juges.

Inconvénients: ­

Il faut créer une nouvelle autorité.

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La création d'une autorité spéciale pour la surveillance des tribunaux inférieurs pourrait donner l'impression que l'appareil de surveillance est surdimensionné.

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Il existe un déséquilibre: dans la plupart des cantons, les tribunaux administratifs ne sont soumis qu'à la haute surveillance du parlement alors que le Tribunal administratif fédéral serait en outre surveillé par le Conseil de la magistrature.

2.3

Compétence du Conseil de la magistrature aussi à l'égard du Tribunal fédéral?

La CAJ-E a examiné si le Conseil de la magistrature doit aussi collaborer lors de la préparation des élections des juges du Tribunal fédéral et en outre assister l'Assemblée fédérale lors de l'exécution de la haute surveillance sur le Tribunal fédéral.

Par courrier du 20 septembre 2001, la CAJ-E a invité le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances (TFA) à prendre position.

Dans leur prise de position du 12, respectivement 15 octobre 2001, les deux tribunaux sont de l'opinion déterminée qu'une compétence du Conseil de la magistrature pour le Tribunal fédéral et le TFA n'est ni nécessaire ni opportune. Par contre, ils approuvent la compétence de l'Assemblée fédérale pour les élections des juges du Tribunal pénal fédéral et du Tribunal administratif fédéral. Le Tribunal fédéral, tout comme le TFA, peuvent se rallier à la proposition de la CAJ-E pour l'institution d'un Conseil de la magistrature pour les tribunaux inférieurs de la Confédération.

Après avoir pris connaissance de ces prises de position et pesé tous les avantages et les inconvénients, la CAJ-E a décidé que le Conseil de la magistrature doit aussi collaborer à la préparation des élections des juges fédéraux. Les raisons suivantes en particulier parlent en faveur de cette solution: ­

Allégement des tâches de l'Assemblée fédérale: Actuellement, il y a 41 juges fédéraux (y compris le TFA) et 41 suppléants. Selon le projet de loi sur le Tribunal fédéral, celui-ci se composera de 35 à 45 juges ordinaires, le nombre des juges suppléants s'élevant au maximum aux deux tiers du nombre des juges ordinaires. Les élections des juges du Tribunal fédéral représentent ainsi une tâche quantitativement importante, ce qui justifie ­ afin d'alléger les tâches de l'Assemblée fédérale ­ que le Conseil de la magistrature collabore à la préparation des élections.

­

Optimisation de la procédure d'élection: La seule condition que pose la loi pour être juge au Tribunal fédéral est d'être titulaire du droit de vote en matière fédérale. L'Assemblée fédérale décide donc souverainement si un candidat possède les compétences professionnelles et personnelles néces-

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saires pour revêtir la fonction de juge suprême2. Pour cette décision, l'évaluation des candidatures par le Conseil de la magistrature, qui sera composé de spécialistes, peut lui être d'une grande aide.

­

Dépolitisation: La collaboration pour la préparation des élections des juges par le Conseil de la magistrature, à savoir par une autorité spécialisée, conduit à un renforcement des qualifications professionnelles. Les services rendus aux partis et les considérations politiques passent à l'arrière-plan, ce qui serait également souhaitable pour les juges suprêmes.

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Transparence: La mise au concours des postes de juges au Tribunal fédéral apporte plus de transparence et permet en outre à des personnalités sans appartenance politique de se porter candidates.

­

Sauvegarde de l'indépendance des juges: Les risques de perte d'indépendance liés à la réélection sont réduits si une autorité spécialisée telle que le Conseil de la magistrature collabore à la préparation des réélections3.

Les dangers des «renvois d'ascenseur» pour des motifs politiques sont naturellement plus grands pour les juges suprêmes que pour les juges des tribunaux fédéraux inférieurs.

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Homogénéité: Tous les juges de la Confédération seraient élus selon la même procédure.

La CAJ-E veut décider plus tard, lors des délibérations sur la loi sur le Tribunal fédéral, la question de savoir si le Conseil de la magistrature doit aussi assister l'Assemblée fédérale lors de l'exercice de la haute surveillance sur le Tribunal fédéral.

2.4

Participation à la préparation de l'élection des juges du Tribunal militaire de cassation

Le président, les juges et les juges suppléants sont élus par l'Assemblée fédérale (art. 14 de la Procédure pénale militaire du 23 mars 1979; RS 322.1). L'homogénéité du droit exige que le Conseil de la magistrature participe également à la préparation de ces élections: ainsi, dans la mesure où elle incombe à l'Assemblée fédérale, l'élection de tous les juges obéirait à une même procédure.

3

Commentaire article par article

3.1

Chapitre 1

Statut et tâches

Art. 1 L'art. 1 définit le but du Conseil de la magistrature et par la même occasion décrit son statut. Il est conçu comme un organe auxiliaire de l'Assemblée fédérale. En effet, il est à la disposition de l'Assemblée fédérale pour l'assister dans la prépa2 3

Martin Schubarth, Bundesgericht, in: Thürer/Aubert/Müller, Verfassungsrecht der Schweiz, Zurich 2001, p. 1071 ss, p. 1072.

La doctrine recommande de donner le même poids à la préparation des réélections qu'à celle des élections, notamment en prévoyant l'intervention préalable d'une commission consultative (Regina Kiener, n. 1, p. 288 s.).

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ration de l'élection des juges du Tribunal fédéral, du Tribunal pénal fédéral et du Tribunal militaire de cassation, et dans l'exercice de la haute surveillance sur le Tribunal pénal fédéral.

3.2 Art. 2

Chapitre 2

Organisation

Composition et élection

Le Conseil de la magistrature a sept membres (al. 1). Une telle taille permet à la fois une composition équilibrée et un fonctionnement efficace.

Pour être éligible comme membre du Conseil de la magistrature il faut avoir le droit de vote en matière fédérale (al. 1). C'est là une condition de base qui vaut pour tous les membres. S'y ajoutent les conditions spécifiques prévues aux al. 2 à 4.

L'organe électoral est l'Assemblée fédérale. Cette réglementation est la conséquence du statut du Conseil de la magistrature comme auxiliaire de l'Assemblée fédérale.

Elle assure également au Conseil de la magistrature une haute légitimité.

La présidence du Conseil de la magistrature doit être assurée par une personnalité reconnue qui dispose d'une (longue) expérience judiciaire (al. 2). L'expérience requise est celle de juge, pas simplement celle de greffier. Entrent en ligne de compte notamment d'anciens juges fédéraux qui enseignent à une université ou d'anciens juges cantonaux qui ont été membres de l'Assemblée fédérale.

Le Conseil de la magistrature doit garantir que les personnes élues comme juges satisfont au mieux aux exigences professionnelles et personnelles de leur fonction.

Par ailleurs, la tâche consistant à assister l'Assemblée fédéral dans l'exercice de la haute surveillance sur le Tribunal pénal fédéral requiert des connaissances sur l'administration de la justice, sur le déroulement des procédures et sur le fonctionnement de la jurisprudence. Ces exigences (cf. art. 1 LCM) se répercutent sur les critères dont l'Assemblée fédérale doit tenir compte lors de l'élection de quatre autres membres, conformément à l'al. 3: ­

La représentation des professeurs de droit garantit que les qualifications professionnelles des candidats seront suffisamment prises en considération.

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Le représentant des avocats apporte une autre perspective. Les avocats connaissent le fonctionnement des tribunaux du point de vue des parties à la procédure. Ils peuvent donc contribuer de manière importante à la surveillance des tribunaux.

­

La magistrature garantit que la surveillance tiendra compte de l'optique interne à la justice. Comme «insider», les juges de la Confédération disposent des connaissances immédiates des besoins et des problèmes de la justice. Le droit comparé confirme aussi qu'il se justifie de permettre à la magistrature de prendre place dans le Conseil de la magistrature (cf.

annexe). Entrent aussi en considération des représentants du Tribunal fédéral ainsi que des représentants du Tribunal pénal fédéral ou du Tribunal militaire de cassation. Les juges du Tribunal fédéral sont en premier lieu concernés, parce qu'ils peuvent apporter leurs connaissances spécifiques et leur expérience en tant juges suprêmes. Les juges du Tribunal fédéral sont en outre en mesure d'évaluer, dans l'optique de l'autorité de recours, le travail et le fonctionnement des tribunaux inférieurs (mais pas des juges

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individuels, car les tribunaux inférieurs ne rendent guère de jugements avec un juge unique).

­

L'administration de la justice a aussi bien des aspects relevant de l'économie d'entreprise. C'est pourquoi il faut qu'un membre du Conseil de la magistrature ait des connaissances d'économie d'entreprise. Il peut s'agir d'un membre élu en fonction de ce critère ou d'un membre qui appartient pour d'autres raisons au Conseil de la magistrature (p. ex. sur la base de l'al. 4).

Le Conseil national et le Conseil des Etats désignent chacun un membre du Conseil supérieur de la magistrature parmi les membres de leur conseil (al. 4). La présence de parlementaires au sein du CSM permet d'assurer la coordination avec l'Assemblée fédérale, donc avec l'autorité chargée d'exercer la haute surveillance.

Le Conseil de la magistrature peut convoquer aux délibérations le ou la chef du DFJP (al. 5). Il peut également inviter des représentants de l'administration fédérale (p. ex. le directeur de l'Administration fédérale des finances), s'il a besoin d'informations ou de renseignements techniques.

Art. 3

Activités incompatibles

Pour assurer une composition équilibrée, les al. 1 et 2 prévoient des incompatibilités pour les membres du Conseil de la magistrature qui ne sont pas membres de l'Assemblée fédérale.

Afin d'éviter toute suspicion de partialité de la part des juges du Tribunal fédéral, du Tribunal pénal fédéral et du Tribunal militaire de cassation, le représentant des avocats ne pourra pas représenter une partie devant ces tribunaux tant qu'il est membre du Conseil de la magistrature (al. 3).

Art. 4

Récusation

Les membres du Conseil de la magistrature et le personnel juridique de son secrétariat seront soumis aux mêmes règles de récusation que les juges et les greffiers.

Ainsi, il est par exemple évident qu'un membre du Conseil de la magistrature, qui appartient au Tribunal fédéral, au Tribunal pénal fédéral ou au Tribunal militaire de cassation, ne peut pas collaborer lorsqu'il s'agit de sa propre réélection.

Art. 5

Période de fonction

La période de fonction des membres du Conseil de la magistrature dure six ans, comme pour les juges du Tribunal pénal fédéral (al. 1). Dans le but d'assurer la continuité, la réélection est admise.

Si un membre quitte le Conseil de la magistrature pendant la période de fonction, son successeur est élu pour le reste de la période (al. 2).

Des membres de l'Assemblée fédérale prennent part au Conseil de la magistrature afin d'assurer la coordination avec l'Assemblée fédérale comme autorité de haute surveillance. Les représentants du Tribunal fédéral, du Tribunal pénal fédéral ou du Tribunal militaire de cassation sont élus dans le Conseil de la magistrature à cause de leur aptitude spécifique en tant que juges suprêmes, respectivement initiés des tribunaux. Logiquement, ils se retirent du Conseil de la magistrature lorsqu'ils quittent la fonction au titre de laquelle ils ont été élus au Conseil de la magistrature (al. 3).

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Art. 6

Activité à titre accessoire

Les membres du Conseil de la magistrature exercent leur fonction à titre accessoire.

Il est ainsi clair qu'ils peuvent exercer une profession à titre principal.

Art. 7

Indemnités journalières et remboursement des frais

Les membres du Conseil de la magistrature qui sont en même temps agents de la Confédération (les juges du Tribunal fédéral, les juges du Tribunal pénal fédéral) sont libérés de leur activité principale pour le temps nécessaire à l'exercice de leur fonction au sein du Conseil de la magistrature. Ils ne reçoivent donc pas d'indemnités supplémentaires. Les autres membres reçoivent une indemnité journalière (al. 1).

L'Assemblée fédérale règle le montant de l'indemnité journalière et le remboursement des frais dans une ordonnance (al. 2).

Art. 8

Siège

Le Conseil de la magistrature est un organe auxiliaire de l'Assemblée fédérale. Son secrétariat est rattaché administrativement aux services parlementaires. Le Conseil de la magistrature a donc son siège à Berne.

Art. 9

Règlement intérieur

Les points les moins importants de l'organisation du Conseil de la magistrature, comme par exemple la vice-présidence, le nombre et la modalité des séances, la procédure de vote, ou la manière d'exercer la charge, peuvent être réglés par voie d'ordonnance (cf. art. 164, al. 1, let. g, Cst.).

Art. 10

Rapport de gestion

Le Conseil de la magistrature présente chaque année à l'Assemblée fédérale un rapport sur son activité.

Art. 11

Secrétariat

Le Conseil de la magistrature constitue un secrétariat permanent qui est rattaché administrativement aux services du parlement. L'attribution administrative du secrétariat aux services du parlement se justifie par le fait que le Conseil de la magistrature fait fonction d'organe auxiliaire de l'Assemblée fédérale.

Art. 12

Secret de fonction

L'al. 1 règle le secret de fonction pour les membres du Conseil de la magistrature et pour le personnel de son secrétariat. C'est le Conseil de la magistrature qui a la compétence de libérer du secret de fonction (al. 2).

3.3 Art. 13

Chapitre 3 Participation à la préparation de l'élection des juges Propositions

L'une des tâches principales du Conseil de la magistrature est la participation à l'élection des juges. A la différence de la surveillance, la tâche de préparer les élections ne concerne pas seulement l'élection des juges du Tribunal pénal fédéral, mais 1134

aussi celle des juges du Tribunal fédéral et du Tribunal militaire de cassation. Le potentiel d'optimisation, qui est lié à la participation du Conseil de la magistrature, doit aussi être développé pour l'élection de tous les juges, dans la mesure où elle incombe à l'Assemblée fédérale (cf. à ce propos en détail le ch. 2.3).

Le Conseil de la magistrature soumet à la commission compétente de l'Assemblée fédérale (Chambres réunies) des propositions pour l'élection et la réélection des juges du Tribunal fédéral, du Tribunal pénal fédéral et du Tribunal militaire de cassation (al. 1). La commission compétente de l'Assemblée fédérale (Chambres réunies) est inscrite dans la loi sur les rapports entre les conseils (cf. annexe, ch. 2: art. 38a, LREC; RS 171.11). L'Assemblée fédérale n'est pas liée par les propositions du Conseil de la magistrature. Il serait toutefois souhaitable qu'elle n'élise que des personnes que le Conseil de la magistrature a estimées compétentes. La réglementation, d'après laquelle la commission compétente de l'Assemblée fédérale Chambres réunies reçoit en premier lieu les propositions d'élection, sert d'une part à assurer la discrétion. De cette manière, une candidature manifestement dépourvue de chance peut être retirée avant que le public n'en ait pris connaissance. D'autre part, il est tenu compte du fait que seules les commissions parlementaires, contrairement aux commissions non parlementaires, parmi lesquelles le Conseil de la magistrature, sont autorisées formellement à soumettre des propositions à l'Assemblée fédérale (Chambres réunies).

Le Conseil de la magistrature doit veiller dans ses propositions à une composition équilibrée du Tribunal fédéral et du Tribunal pénal fédéral (al. 2). Il doit notamment garantir une représentation équitable des langues officielles, des deux sexes ainsi que des diverses régions du pays. Les opinions politiques des candidats jouent un rôle dans la mesure où elles devraient être le miroir du pluralisme politique.

L'appartenance à un parti politique ne doit être ni en droit ni dans les faits une condition d'éligibilité. En ce qui concerne les juges qu'il est proposé d'élire au Tribunal militaire de cassation, il y a lieu par ailleurs de tenir compte des conditions particulières énoncées à l'art. 14, al. 2, de la Procédure pénale militaire, et, s'agissant de la composition dudit tribunal, de veiller au respect des conditions énoncées à l'art. 15 de la Procédure pénale militaire.

Art. 14

Mise au concours

La mise au concours public des postes vacants de juge assure la transparence de la procédure. Comme des engagements à temps partiel sont aussi possibles au Tribunal pénal fédéral (cf. art. 11 P-LTPF), la mise au concours doit indiquer aussi le taux d'occupation. Si, par exemple, un poste à 80 % se libère, il doit être mis au concours avec le même taux d'occupation afin que la somme totale des postes reste inchangée.

Seul le parlement peut modifier la somme totale des postes (cf. art. 1, al. 4, P-LTPF). En ce qui concerne toutefois le Tribunal militaire de cassation, il n'y a pas lieu de préciser le taux d'occupation pour la mise au concours des postes de juge, puisque les juges de ce tribunal ne siègent qu'à titre accessoire.

Art. 15

Non-réélection

En règle générale, les juges peuvent escompter être réélus sans problème. Cela est important du point de vue de l'indépendance des tribunaux. Il peut néanmoins y avoir des cas patents dans lesquels l'intérêt public requiert la non-réélection, par exemple lorsqu'un juge a perdu la capacité d'exercer sa fonction ou lorsqu'il a encouru une sanction pénale. A titre d'ultima ratio le Conseil de la magistrature peut 1135

proposer à l'Assemblée fédérale de ne plus réélire un juge. L'art. 15 garantit au juge concerné le droit d'être entendu à temps et de pouvoir prendre position à l'intention de l'Assemblée fédérale qui doit décider de sa non-réélection ­ pour des raisons de discrétion, par le biais de la commission compétente de l'Assemblée fédérale Chambres réunies.

3.4

Chapitre 4 Conseils au Tribunal pénal fédéral et surveillance

Art. 16

Principe

La seconde tâche principale du Conseil de la magistrature est d'assister l'Assemblée fédérale dans l'exercice de la haute surveillance sur le Tribunal pénal fédéral. Cette assistance s'effectue sous la forme d'une surveillance du fonctionnement des tribunaux (al. 1). Le Conseil de la magistrature tient lieu d'organe de contact direct vis-à-vis du Tribunal pénal fédéral. Il se fait notamment informer sur la gestion du Tribunal pénal fédéral et sur l'état des affaires liquidées. Le Tribunal pénal fédéral peut profiter de visites du Conseil de la magistrature pour l'informer de ses préoccupations et de ses problèmes.

L'objet de la surveillance des tribunaux comprend le contrôle de la liquidation des affaires, celui du fonctionnement correct du tribunal et celui de la bonne administration de la justice; en revanche, la surveillance ne s'étend pas au contenu de la jurisprudence, car cela porterait atteinte à l'indépendance des autorités judiciaires.

La surveillance des tribunaux est en principe un contrôle a posteriori. Elle consiste à vérifier si la jurisprudence a été rendue de manière formellement correcte. Des recommandations générales permettant d'améliorer le fonctionnement des tribunaux sont admissibles. Le pouvoir de surveillance sur les tribunaux ne comprend en revanche pas la compétence d'adresser des injonctions sur la manière de traiter à l'avenir les affaires ni celle d'exercer une véritable direction (surveillance dite préventive)4.

L'al. 1, 2e phrase, qui indique que le Conseil de la magistrature tient compte des directives des commissions parlementaires de surveillance, précise les relations qu'entretiennent ces deux types d'organes de surveillance: en cas de conflit, les directives des commissions parlementaires de surveillance sont déterminantes. Pour autant, la 2e phrase ne signifie pas que le Conseil de la magistrature agit uniquement sur directives de ces commissions parlementaires: au contraire, il peut parfaitement, et doit même, agir de sa propre initiative. La loi lui confère certes pour mission de conseiller et de surveiller le Tribunal pénal fédéral en qualité d'interlocuteur privilégié: il ne lui en incombe pas moins de se concerter avec les commissions parlementaires de surveillance, afin d'éviter les doublons.

Le Conseil de la magistrature a notamment pour mission de
prendre position à l'intention de l'Assemblée fédérale sur le projet de budget, les comptes et le rapport de gestion du Tribunal pénal fédéral (al. 2). L'Assemblée fédérale est compétente pour approuver ces documents. Elle est cependant grandement déchargée si le Conseil de la magistrature fait un préexamen de ces documents. Le contrôle du budget est par ailleurs l'occasion de discuter les investissements prévus et les 4

Rainer J. Schweizer, Rechtsfragen der Justizverwaltung am Beispiel der Schweizerischen Asylrekurskommission, PJA 2001, p. 661 ss, p. 664.

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processus. Il faut cependant tenir compte du fait que les tribunaux décident en principe eux-mêmes de l'utilisation des moyens que le parlement leur a accordé (principe selon lequel les tribunaux s'administrent eux-mêmes, cf. pour le Tribunal fédéral l'art. 188, al. 3, Cst. selon la réforme de la justice). Il serait ainsi incompatible avec le caractère a posteriori de la surveillance que le Conseil de la magistrature modifie le projet de budget pour des raisons d'opportunité. Il peut uniquement prendre position sur le sujet, mais n'a pas de droit de correction.

Art. 17

Violation des devoirs de fonction par un juge et perte de la capacité d'exercer sa fonction

La surveillance des différents juges vise les violations (qualifiées) des devoirs de fonction. Cela comprend par exemple la violation des dispositions sur les activités accessoires (art. 6 et 7 P-LTPF) ou l'ébriété à la place de travail. Il faut cependant distinguer deux degrés d'intensité: Un premier degré englobe la simple négligence ou la violation simple des devoirs de fonctions (al. 1). Pour de tels manquements de peu de gravité, il doit exister la possibilité de ramener la situation à l'ordre de manière informelle et interne au tribunal. C'est pourquoi l'al. 1 prévoit que le Conseil de la magistrature, lorsqu'il constate un tel incident, rend attentifs le ou la juge fautif et la direction du tribunal.

Ceux-ci doivent alors y remédier.

Un deuxième degré englobe les violations graves des devoirs de fonction intentionnelles ou par négligence grave, ou une incapacité d'exercer ses fonctions durable, par exemple pour cause de maladie (al. 2). Pour empêcher qu'un juge, manifestement fautif ou devenu incapable d'exercer ses fonctions, reste en fonction pendant toute une période de fonction, il doit être possible de destituer un juge avant la fin de sa période de fonction5. Une réglementation correspondante est prévue dans la loi sur le Tribunal pénal fédéral (art. 9a P-LTPF). Pour des raisons de parallélisme, l'Assemblée fédérale (organe d'élection) est compétente pour prononcer la révocation. Le Conseil de la magistrature est chargé d'élucider l'état de fait et de soumettre un rapport avec une recommandation à la commission compétente de l'Assemblée fédérale (Chambres réunies). Le fait que le rapport assorti d'une recommandation est adressé à la commission compétente de l'Assemblée fédérale (Chambres réunies), sert à assurer la confidentialité de tels dossiers. La commission compétente de l'Assemblée fédérale (Chambres réunies) décide de l'opportunité de soumettre à l'Assemblée fédérale (Chambres réunies) une proposition visant à révoquer le juge concerné.

L'al. 3 garantit le droit d'être entendu du juge concerné.

Art. 18

Libération des juges du secret de fonction

A titre d'organe de contact direct du Tribunal pénal fédéral dans le cadre de la surveillance, le Conseil de la magistrature est déclaré compétent pour libérer les juges du Tribunal pénal fédéral de leur secret de fonction.

5

Par analogie avec l'art. 9, al. 6, de la loi sur le personnel de la Confédération; selon cette disposition, l'autorité de nomination peut, pour de justes motifs, modifier ou résilier les rapports de service des personnes nommées pour une période de fonction avant la fin de celle-ci.

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3.5 Art. 19

Chapitre 5

Dispositions finales

Modification du droit en vigueur

La modification du droit en vigueur est réglée dans l'annexe.

Art. 20

Référendum et entrée en vigueur

Cette disposition contient la clause référendaire et attribue au Conseil fédéral la compétence de fixer la date d'entrée en vigueur.

3.6

Modification du droit en vigueur

1. Loi du 14 mars 1958 sur la responsabilité Art. 1, al. 1, let. cbis (nouvelle) Le champ d'application de la loi sur la responsabilité (LRCF) est étendu aux membres du Conseil de la magistrature. Ils sont ainsi soumis notamment à la responsabilité patrimoniale des art. 7 et 8 LRCF (responsabilité envers la Confédération pour des dommages causés intentionnellement ou par négligence grave).

Art. 10, al. 2, 1re phrase Des procès directs devant le Tribunal fédéral sont prévus pour les prétentions découlant de l'activité du Conseil de la magistrature, tout comme ce qui vaut pour les prétentions découlant de l'activité des membres du Conseil national et du Conseil des Etats et du Tribunal fédéral. Ceci est justifié, parce que deux membres du Conseil de la magistrature sont en même temps parlementaires et que des juges fédéraux peuvent aussi faire partie du Conseil de la magistrature. La voie de droit ordinaire (décision, puis recours devant la commission de recours pour les questions de responsabilité, à l'avenir recours devant le Tribunal administratif fédéral) serait d'ailleurs problématique parce qu'à l'avenir le Conseil de la magistrature surveillera le Tribunal administratif fédéral.

Art. 14, al. 1 La responsabilité des membres du Conseil de la magistrature pour les infractions qui concernent leur activité officielle sera régie par les mêmes règles que pour les membres du Conseil national et du Conseil des Etats et les juges fédéraux. Cela signifie que ces infractions ne pourront être poursuivies qu'avec l'autorisation de l'Assemblée fédérale. Cette solution se justifie d'abord par le fait que le Conseil de la magistrature est une sorte d'organe auxiliaire de l'Assemblée fédérale et ensuite par le fait que quelques membres du Conseil sont simultanément membres de l'Assemblée fédérale ou juges fédéraux. Les membres du Conseil de la magistrature sont spécialement mentionnés à côté des «membres d'autorités élus par l'Assemblée fédérale» mentionnés à l'art. 14, al. 1, LRCF, parce que tous les membre du Conseil de la magistrature ne sont pas élus par l'Assemblée fédérale. Deux membres sont désignés par le Conseil national, respectivement le Conseil des Etats (cf. art. 2, al. 2 à 4, LCM).

Il ne serait en revanche pas souhaitable d'octroyer aux membres du Conseil de la magistrature une immunité pour les infractions commises en dehors du cadre de

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l'activité de cet organe. C'est pourquoi aucune révision de la loi sur les garanties politiques n'est prévue.

Art. 15, al. 1, 2e phrase Le Conseil de la magistrature est l'employeur du personnel du secrétariat du Conseil de la magistrature. Il est donc compétent pour délivrer l'autorisation nécessaire pour ouvrir une poursuite pénale contre les membres du personnel du secrétariat.

2. Loi du 23 mars 1962 sur les rapports entre les conseils Art. 38a (nouveau) Aux termes de l'al. 1, il est institué une nouvelle commission permanente de l'Assemblée fédérale (Chambres réunies), chargée de préparer les élections et les révocations conformément à la loi fédérale sur le Conseil de la magistrature.

Aux termes de l'al. 2, ladite commission se compose de neuf membres du Conseil national et de quatre membres du Conseil des Etats. Sa composition est ainsi identque à celle de la Commission des grâces.

Enfin, aux termes de l'al. 3, ladite commission a la compétence, et de soumettre à l'Assemblée fédérale le nom des candidats qu'elle propose d'élire, et, le cas échéant, de lui soumettre le nom des personnes dont elle propose la révocation.

3. Loi du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confédération Art. 2, al. 1, let. h (nouvelle) Le personnel du secrétariat du Conseil de la magistrature est soumis à la loi sur le personnel de la Confédération.

Art. 3, al. 3 Le Conseil de la magistrature est mentionné comme employeur.

4. Procédure pénale militaire du 23 mars 1979 Art. 14, al. 3 (nouveau) L'article régissant l'élection des juges du Tribunal militaire de cassation est complété par une disposition précisant que le Conseil de la magistrature est associé à la préparation de cette élection.

4

Conséquences financières

Les coûts en personnel du Conseil de la magistrature comprennent: 1.

les indemnités journalières pour les membres du Conseil de la magistrature qui ne sont pas par ailleurs agents de la Confédération;

2.

la réduction de la capacité de travail pour les membres qui assument une autre fonction au service de la Confédération;

3.

les frais du secrétariat.

Ad 1: Selon l'art. 7 du P-LCM, les membres du Conseil de la magistrature qui ne sont pas des agents de la Confédération reçoivent une indemnité journalière. Ici, on

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part du fait qu'un membre du Conseil de la magistrature (p. ex. un juge fédéral ordinaire) ne sera pas fondé à recevoir l'indemnité journalière. Ainsi, il faudrait verser des indemnités journalières à six membres (y compris la personne qui occupe la présidence).

Le montant de l'indemnité journalière est fixé par décret. Il est supposé que le montant correspond à celui qui est prévu pour les juges suppléants du Tribunal fédéral, c'est-à-dire: ­

1000 francs pour les indépendants

­

800 francs pour les autres.6

A supposer que ­ sur la base d'une évaluation plutôt basse ­ le Conseil de la magistrature tient 12 séances par an, cela impliquerait pour cinq membres 60 indemnités journalières à 1000 (év. 800), ce qui revient à 60 000 francs. S'y ajoutent les indemnités journalières pour le président. Celui-ci devrait être davantage impliqué, environ un à deux jours par semaine (taux d'occupation de 30 à 50 %). Estimé avec retenue, cela devrait équivaloir à 60 jours de travail par an, ce qui correspond à 60 000 francs d'indemnités journalières par an. Le total des indemnités journalières s'élève ainsi à 120 000 francs par an.

Avec le remboursement des éventuels autres frais, il résulte une indemnisation des membres du Conseil de la magistrature évaluée à environ 126 000 francs par année.

Ad 2: Pour la participation aux quelques 12 séances par année, doivent aussi entrer en ligne de compte les frais qui correspondent à la perte de travail (par exemple) du représentant du Tribunal fédéral.

Ad 3: Le secrétariat comptera environ quatre postes7, dont trois postes académiques et un poste pour un employé de commerce.

Le secrétariat implique aussi des coûts en matériel (infrastructure, matériel de bureau, etc.)

Remarque: Les frais de secrétariat devraient atteindre plus ou moins les mêmes chiffres pour les modèles d'élection et de surveillance. Tous les modèles impliquent des frais pour l'indemnisation (respectivement la perte de travail) des membres de l'organe de préparation des élection, resp. de surveillance, que l'on crée un Conseil de la magistrature, une commission parlementaire spéciale (commune), ou que le Tribunal fédéral élit un nombre déterminé de juges dans une commission équivalente.

5

Constitutionnalité

Selon la conception suisse, le droit constitutionnel matériel comprend le droit fondamental de l'ordre juridique, qui se distingue quant au fond par sa portée particulière. Dans le domaine de l'organisation des autorités, la constitution doit

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Art. 2, al. 1bis, de l'ordonnance fixant les indemnités de déplacement et les indemnités journalières des membres du Tribunal fédéral et du TFA (RS 173.122).

Estimation du président du Tribunal fédéral au cas où le Tribunal fédéral devrait assumer la surveillance sur les tribunaux inférieurs.

1140

prévoir «par la séparation des pouvoirs, une séparation fonctionnelle, organisationnelle et personnelle du pouvoir public dans le législatif, l'exécutif et le judiciaire»8.

Le droit constitutionnel matériel en matière d'organisation judiciaire contient les règles sur l'organisation et les compétences des tribunaux suprêmes ainsi que les garanties de protection juridique et de procédure9.

L'institution du Conseil de la magistrature, telle qu'elle est proposée ici, ne tombe pas sous cette définition du contenu nécessaire de la constitution.

D'après le concept proposé, le Conseil de la magistrature apparaît comme une sorte d'«organe auxiliaire» de l'Assemblée fédérale. Il n'a lui-même aucun pouvoir de décision et ne prend pas part à l'exercice du pouvoir étatique. Ses fonctions ont une nature d'assistance. Ceci vaut autant pour la participation à la préparation des élections des juges que pour la surveillance des affaires du tribunal.

Sur ce point, la position du Conseil de la magistrature est comparable à celle du Contrôle fédéral des finances10. Le Tribunal fédéral est soumis à la surveillance du Contrôle fédéral des finances, «en tant que cela concerne la haute surveillance par l'Assemblée fédérale» (art. 8, al. 2, de la loi fédérale sur le contrôle fédéral des finances). Bien que le Contrôle fédéral des finances exerce aussi sa fonction à l'encontre du Tribunal fédéral, il n'est pas ancré dans la constitution, mais est institué par la loi fédérale sur le contrôle fédéral des finances. Cela n'a à juste titre pas été critiqué, car le Contrôle fédéral des finances doit assister l'Assemblée fédérale et le Conseil fédéral.

En suivant le même raisonnement, le Conseil de la magistrature n'a pas non plus besoin d'une base particulière dans la constitution. Une base légale formelle dans une loi est par contre nécessaire, mais aussi suffisante pour la création du Conseil de la magistrature (art. 164, al. 1, let. g, Cst.).

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Message du 20.11.1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale; FF 1997 I 13.

Rhinow/Koller/Kiss, Öffentliches Prozessrecht und Justizverfassungsrecht des Bundes, Bâle 1996, ch. 43.

L'art. 1 de la loi fédérale du 28 juin 1967 sur le Contrôle fédéral des finances (RS 614.0) décrit la position du Contrôle fédéral des finances comme suit: 1. Le Contrôle fédéral des finances est l'organe suprême de la Confédération en matière de surveillance financière. Dans l'exercice de ses fonctions de contrôle, il est soumis uniquement à la constitution et à la loi. Il assiste: a. l'Assemblée fédérale dans l'exercice de ses attributions financières constitutionnelles et de sa haute surveillance de l'administration et de la justice fédérales; b. le Conseil fédéral dans l'exercice de sa surveillance de l'administration fédérale.

2. Le Contrôle fédéral des finances exerce une activité autonome et indépendante dans les limites des prescriptions légales. Il fixe chaque année son programme de révision qu'il communique à la Délégation des finances des Chambres fédérales et au Conseil fédéral. Il peut refuser les mandats spéciaux qui compromettraient la réalisation du programme de révision.

3. Le Contrôle fédéral des finances est rattaché au Département fédéral des finances sur le plan administratif.

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Annexe

Droit comparé Le modèle d'un Conseil de la magistrature s'est avant tout imposé dans les systèmes juridiques latins11. Ce système trouve en outre un écho de plus en plus important dans les Etats de l'Europe de l'Est12.

Deux cantons connaissent un tel modèle (TI et GE). Dans le canton de FR, l'introduction d'un Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) est examinée. Dans le canton du JU, le CSM partage la fonction de surveillance avec le Tribunal cantonal13.

Italie: Consiglio Superiore della Magistratura Pour garantir l'indépendance de la justice, la Constitution italienne prévoit un Conseil supérieur de la magistrature (CSM; art. 104 à 110).

Composition: ­

Le président de la République assume la fonction de président.

­

Le premier président et le procureur général de la cour de cassation font partie du CSM de plein droit.

­

20 membres tirés des rangs des diverses catégories de magistrats: ils sont élus par tous les magistrats ordinaires.

­

10 membres tirés des rangs de professeurs de droit à l'université et d'avocats justifiant d'au moins quinze ans de pratique: ils sont élus par le Parlement.

Incompatibilité: Pendant la durée de leur mandat, les membres ne peuvent ni être inscrits au tableau des avocats ni appartenir au Parlement ou au Conseil régional.

Durée du mandat: Quatre ans, une réélection immédiate étant exclue.

Tâches: Le CSM est compétent pour la nomination, l'attribution des tâches, la mutation, la promotion et l'exercice du pouvoir disciplinaire sur les magistrats.

Le ministre de la justice contrôle l'administration des tribunaux et la marche ordinaire de la justice. Il est compétent pour la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire.

France: Le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) La Constitution française décrit le président de la République comme le garant de l'indépendance de la justice. Pour ce faire, il est assisté par le Conseil Supérieur de

11 12

13

Ainsi en France, en Italie, en Espagne, mais aussi au Canada.

P. ex. en Hongrie. Voir les indications données par Peter Stolz/Stephan Gass, Kontrolle und Bewertung von Richterarbeit aus rechts- und wirtschaftswissenschaftlicher Sicht, recht 1996, p. 169 ss, n. 42.

Voir aussi la proposition émise à l'époque par le DJS pour la constitution d'un Conseil de la magistrature dans le canton LU, plädoyer 1992, 30 ss. Dans la doctrine suisse, l'institution du Conseil de la magistrature a suscité encore peu d'attention. L'ouvrage le plus récent sur l'indépendance des juges, de Regina Kiener, Bern 2001, mentionne le Conseil de la magistrature uniquement en passant, p. 297.

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la Magistrature (CSM) (art. 64 et 65). L'organisation du CSM est réglée dans la Loi organique sur le Conseil Supérieur de la Magistrature du 5.2.1994.

Avec la révision de la Constitution de 1993, le CSM comprend deux formations comptant chacune dix membres. L'une est compétente à l'égard des magistrats du siège, l'autre à l'égard des magistrats du parquet.

Composition: ­

Le président de la République assume la fonction de président.

­

Le garde des Sceaux assume la fonction de vice- président.

Quatre membres appartiennent en commun aux deux formations: ­

Un membre du Conseil d'Etat: nommé par le Conseil d'Etat.

­

Trois personnalités qui n'appartiennent ni au Parlement, ni à l'ordre judiciaire, qui sont nommées respectivement par le président de la République, le président le l'Assemblée nationale et le président du Sénat.

La formation compétente pour magistrats du siège comprend: ­

Cinq magistrats du siège (appartenant à différentes instances): élus par les magistrats du siège (selon une procédure différenciée).

­

Un magistrat du parquet: désigné par les magistrats du parquet.

La formation pour les magistrats du parquet comprend: ­

Cinq magistrats du parquet: élus par les magistrats du parquet.

­

Un magistrat du siège: désigné par les magistrats du siège.

Dans chaque formation siègent ainsi cinq «confrères» du groupe de fonction qu'il s'agit de surveiller.

Incompatibilité: Les membres du CSM ne peuvent être actifs ni comme avocats, notaires ou investis d'une fonction similaire («officier public ou ministériel») ni exercer un mandat législatif.

Durée du mandat: Quatre ans, une réélection immédiate étant exclue.

Tâches: Le CSM exerce la surveillance disciplinaire sur les magistrats.

L'élection des magistrats hors hiérarchie s'effectue par le président de la République sur proposition du CSM. En ce qui concerne l'élection des autres magistrats du siège, le CSM doit donner un avis conforme aux propositions arrêtés par le garde des Sceaux.

Tessin: Consiglio della magistratura Fondement: art. 79 de la Constitution tessinoise; art. 77 à 89 de la loi sur l'organisation de la procédure civile et pénale.

Composition: Le Consiglio della magistratura se compose de sept membres et cinq suppléants: ­

Trois membres et deux suppléants provenant des magistrats de carrière avec emploi à plein temps: ils sont élus par l'assemblée des magistrats (assemblea dei magistrati).

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­

Quatre membres et deux suppléants parmi les autres magistrats, les anciens magistrats de carrière ou d'autres membres du corps électoral tessinois: ils sont élus par le Grand Conseil. Cependant, seuls deux membres et un suppléant peuvent être inscrits au registre des avocats du canton du Tessin.

Incompatibilité: Pendant la durée de leur mandat, les membres et les suppléants du Consiglio della magistratura ne peuvent appartenir ni au Conseil d'Etat, au Parlement fédéral, au Grand Conseil ou à l'administration communale, cantonale ou fédérale.

Durée du mandat: Six ans, une réélection étant admissible pour un maximum de douze ans en tout.

Tâches: Le Consiglio della magistratura exerce la surveillance sur les magistrats, en tant qu'elle n'est pas du ressort du Grand Conseil. Il a les compétences suivantes: ­

Il surveille le fonctionnement de la justice et présente au Conseil d'Etat un rapport annuel.

­

Il signale au Département compétent les éventuels problèmes de nature organisationnelle.

­

Il exerce contre les magistrats le pouvoir disciplinaire (avertissement, amende jusqu'à Fr. 10 000.­, suspension des fonctions jusqu'à trois mois avec déchéance du droit à la rémunération, licenciement disciplinaire).

­

Il est compétent pour la destitution des magistrats qui, pour des raisons physiques, psychiques ou autres, sont devenus inaptes à exercer leur charge.

En ce qui concerne l'élection des magistrats, le Consiglio della magistratura n'a aucune compétence.

Genève: Conseil supérieur de la magistrature14 Fondement: art. 135 de la Constitution genevoise; loi sur le conseil supérieur de la magistrature du 25.9.1997.

Composition: ­

Le président de la Cour de justice assume la fonction de président: ex officio.

­

Le procureur général: ex officio.

­

Quatre magistrats de carrière ou ancien magistrats de carrière (y compris les magistrats titulaires de la Cour de cassation): ils sont élus par les magistrats de carrière en fonction (y compris tous les magistrats titulaires de la Cour de cassation).

­

Trois personnalités: désignées par le Conseil d'Etat.

­

Deux avocats au barreau: sont élus par les avocats inscrits au tableau.

Durée du mandat: Trois ans, une réélection étant admissible.

14

Voir les considérations de Pierre Heyer, le Conseil supérieur de la magistrature, RDAF 1996, S. 331 ff.

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Tâches: Le Conseil supérieur de la magistrature exerce la surveillance sur les magistrats et veille au bon fonctionnement des tribunaux.

Le Conseil supérieur de la magistrature peut prendre des mesures étendues: avertissement ou blâme en cas de faute dans l'exercice de la charge ou de comportement portant atteinte à la dignité de la magistrature; privation du traitement jusqu'à six mois en cas de faute grave dans l'exercice de la charge ou de comportement portant gravement atteinte à la dignité de la magistrature; destitution en cas de perte des conditions d'éligibilité, d'indignité d'exercer la charge ou d'insoumission à une décision du CSM; destitution sous réserve des droits à la retraite en cas d'incapacité d'exercer la charge suite à l'âge ou la maladie. Les décisions du CSM sont définitives.

En ce qui concerne l'élection des magistrats, le Conseil supérieur de la magistrature n'a aucune compétence.

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