01.057 Message concernant la loi fédérale sur la transplantation d'organes, de tissus et de cellules (Loi sur la transplantation) du 12 septembre 2001

Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Par le présent message, nous vous soumettons, en vous proposant de l'adopter, un projet de loi fédérale sur la transplantation d'organes, de tissus et de cellules.

Par la même occasion, nous vous proposons de classer les interventions parlementaires suivantes: 1989

P

89.695

Transplantations thérapeutiques (E 15.3.90, Jelmini)

1993

M

93.3573

Commerce d'organes humains. Interdiction (E 22.9.94, Onken; N 23.3.95)

1994

M

94.3052

Législation sur la transplantation d'organes (E 22.9.94, Huber; N 23.3.95)

1999

P

99.3000

Responsabilité dans le cas des transplantations (N 4.3.99, Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national)

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

12 septembre 2001

Au nom du Conseil fédéral suisse: Le président de la Confédération, Moritz Leuenberger La chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz

2001-0917

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Condensé A l'heure actuelle, la médecine de transplantation est sans doute l'une des spécialités qui suscite le plus vif intérêt de la part du public: d'abord, elle occupe une place spéciale parce que dans chaque cas, elle met en jeu deux personnes ­ le donneur et le receveur ­ et qu'elle soulève réellement des questions d'ordre social, éthique et juridique. Ensuite, elle est l'exemple même des progrès médicaux d'envergure, ouvrant d'importantes perspectives. Au cours de ces 35 dernières années, la transplantation d'organes, de tissus et de cellules est devenue une thérapie pratiquée avec succès. Beaucoup de personnes lui doivent une amélioration sensible de leur qualité de vie ou même leur vie. Ces 15 dernières années, 4989 organes ont été transplantés en Suisse, dont 3394 reins, 595 coeurs, 664 foies et 190 poumons.

La Suisse dispose aujourd'hui de bonnes infrastructures pour la médecine de transplantation. En l'an 2000, les six centres de transplantation suisses de Bâle, Berne, Genève, Lausanne, Saint-Gall et Zurich ont effectué 402 transplantations. Depuis 1985, les activités de ces centres sont coordonnées par SwissTransplant, une fondation privée pour les dons d'organes et la transplantation. Cette institution s'est en outre, donné pour objectif d'encourager la coopération internationale dans le domaine de la médecine de transplantation ainsi que d'informer et de sensibiliser la population, le personnel soignant et le corps médical.

Les transplantations d'organes ne seraient pas possibles sans les nombreuses personnes qui se déclarent prêtes à donner leurs organes. Cependant, en Suisse comme ailleurs, le nombre des organes disponibles ne suffit pas à couvrir la demande.

Cette pénurie d'organes se traduit par de longs délais d'attente pour les patients et parfois aussi par le décès des personnes pour lesquelles un organe n'a pu être trouvé à temps. Au début de 2001, 468 patients étaient dans l'attente d'un nouvel organe, dont 362 d'un rein. En 2000, 50 personnes sont décédées du fait qu'aucun organe adéquat n'a été disponible à temps.

Contrairement à la plupart des autres Etats européens, la Suisse n'a pas édicté de loi générale régissant le don, le prélèvement et la transplantation d'organes, de tissus et de cellules. Ce domaine est pour le moment réglementé par des principes et de règles
générales, par les lois cantonales, en partie, ainsi que par des directives et des recommandations émanant d'organismes privés. La première réglementation fédérale est entrée en vigueur le 1er août 1996: l'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants, qui règle la protection contre les infections et le commerce des transplants.

La Confédération ne disposait jusqu'à présent que de compétences constitutionnelles partielles pour réglementer le domaine de la médecine de transplantation. C'est pourquoi, il a fallu compléter la Constitution par un article permettant d'élaborer une loi sur l'utilisation des transplants. Cet article constitutionnel a été accepté le 7 février 1999 à une forte majorité du peuple et des cantons. Il prescrit à la Confédération d'édicter des dispositions dans le domaine de la transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine et d'origine animale. La Confédération est donc également habilitée à réglementer la xénotransplantation, en

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d'autres termes la greffe d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale sur l'être humain. En outre, elle doit fixer des critères propres à assurer une attribution équitable des organes. L'article constitutionnel interdit de faire le commerce d'organes humains et dispose que le don d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine doit être gratuit. Il prévoit également que la loi devra veiller à assurer la protection de la dignité humaine, de la personnalité et de la santé.

Le projet de loi sur la transplantation qui fait l'objet du présent message règle l'utilisation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine ou animale ainsi que de produits issus de ceux-ci, qui sont destinés à être transplantés sur l'être humain.

Le présent projet de loi vise à répondre aux impératifs suivants: ­

A l'heure actuelle, les normes juridiques régissant la médecine de transplantation sont disséminées dans une multitude de textes, ce qui ne contribue pas à la sécurité du droit. Il convient donc de mettre fin à cette situation d'autant plus que ce domaine soulève de nombreuses questions fondamentales d'ordre éthique, qui doivent faire l'objet d'un large débat et être réglées de manière uniforme.

­

En vertu du nouvel article constitutionnel, la loi doit protéger la dignité humaine, la personnalité et la santé. Elle doit également protéger, dans la même mesure, les donneurs et les receveurs. Il ne serait, en effet, pas admissible de limiter les droits et les intérêts des donneurs pour préserver les intérêts des patients en attente de la transplantation d'un organe. Nul ne doit pouvoir prétendre l'attribution d'un organe comme un droit pas plus que nul ne doit être contraint de donner ses organes par mesure de solidarité.

­

La loi doit par ailleurs empêcher l'utilisation abusive d'organes, de tissus ou de cellules. Les principes de la gratuité du don et de l'interdiction de faire le commerce des organes humains, déjà établis dans la Constitution fédérale, vont dans ce sens comme certaines interdictions inscrites dans la loi, par exemple celles qui s'appliquent à la transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine. Enfin, les dispositions pénales de la loi devraient aussi contribuer à prévenir les utilisations abusives .

­

Il est impératif que la médecine de transplantation soit réglementée et pratiquée de manière transparente. La transparence, ainsi que la sécurité du droit, permettront de mieux faire connaître aux personnes concernées, mais aussi et surtout au public, ce domaine de la médecine et, partant, d'accroître leur confiance dans les techniques de transplantation. Il est fondamental que l'attribution des organes se fonde sur des procédures et des critères clairs.

Les grandes lignes du projet de loi: ­

L'interdiction de faire le commerce d'organes humains et la gratuité du don d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine sont inscrites dans la Constitution fédérale. Le projet de loi étend cette interdiction aux tissus et

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aux cellules d'origine humaine. Il précise, en outre, ces principes en prévoyant la possibilité d'indemniser le donneur de certains frais qui lui ont été occasionnés ou du dommage qu'il a subi du fait du prélèvement.

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­

En ce qui concerne le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées, on a retenu le principe du consentement au sens large. Cela signifie que pour qu'un prélèvement soit légal il faut soit que le donneur y ait consenti avant son décès soit, en l'absence d'un tel consentement, que les proches aient donné leur accord.

­

Le critère du décès retenu dans le projet est celui de la «mort cérébrale» (arrêt irréversible des fonctions du cerveau, y compris du tronc cérébral).

­

Le don d'organes, de tissus ou de cellules par des personnes vivantes est vivement souhaité. Toute personne peut entrer en considération pour un tel don. Le projet n'exige pas qu'il y ait un lien de parenté ou un lien émotionnel particulièrement étroit entre le donneur et le receveur. Il prévoit, cependant, d'accorder une protection particulière aux personnes incapables de discernement ou mineures en disposant que celles-ci ne peuvent faire l'objet de prélèvements de tissus ou des cellules régénérables que dans des cas exceptionnels et à des conditions précisément définies.

­

Il importe d'observer une stricte équité lors de l'attribution d'organes, a fortiori si l'on tient compte du fait que la médecine de transplantation souffre d'une pénurie chronique d'organes d'origine humaine. Partant de ce constat, nous avons fixé comme principe que nul ne doit subir de discrimination lors de l'attribution d'un organe d'origine humaine. Seuls l'urgence médicale de la transplantation, l'efficacité thérapeutique qu'on en escompte et le délai d'attente pourront être déterminants dans la décision. Toute attribution sera décidée en fonction des spécificités du patient par un organe central: le service national des attributions.

­

Le Conseil fédéral sera habilité à limiter le nombre des centres de transplantation par voie d'ordonnance. Selon toute vraisemblance, il envisagera de faire usage de cet instrument uniquement si les efforts actuels visant à coordonner la médecine de pointe ne permettent pas d'obtenir les résultats espérés. Compte tenu de la pénurie d'organes disponibles, une telle limitation pourrait être motivée par le souci d'accroître l'efficacité des transplantations d'organes, ce qui permettrait d'obtenir une meilleure utilisation des ressources disponibles. Une limitation pourrait aussi être décidée pour des raisons logistiques (p. ex. en matière d'allocation) ou pour permettre des mesures de formation et de perfectionnement plus adéquates dans le domaine de la médecine de transplantation. Avant de faire usage de cette compétence, le Conseil fédéral devra cependant s'entendre avec les cantons.

Cette clause implique un vrai dialogue, qui ne saurait se limiter à une participation des cantons à la procédure de consultation.

­

La loi réglemente également l'utilisation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine. Pour cette technique, qui ne va pas sans poser de problèmes, nous avons prévu une réglementation restric-

tive: toute transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine devra être subordonnée à une autorisation du service fédéral compétent. En outre, certaines activités précises, par exemple le don à une personne choisie par la donneuse ou l'utilisation de tels tissus ou cellules prélevés sur des femmes incapables de discernement, seront interdites.

­

S'agissant de la xénotransplantation, le projet de loi reprend la réglementation adoptée par le Parlement dans le cadre de la modification de l'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants. En conséquence, les xénotransplantations seront subordonnées à l'autorisation du service fédéral compétent. Dans ce domaine, le projet renonce à réglementer à cet égard la responsabilité civile individuelle. Il prévoit, en revanche, une modification de la loi fédérale sur la responsabilité du fait des produits.

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Message 1

Partie générale

1.1

Situation initiale

1.1.1

La transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine

1.1.1.1

Introduction

En médecine humaine, la transplantation d'organes, de tissus ou de cellules est devenue, ces trente dernières années, une technique chirurgicale courante. Elle permet de remplacer par des organes, des tissus ou des cellules sains, ceux qui sont endommagés de manière irréversible. Dans nombre de cas ­ par exemple, la transplantation d'un foie en cas d'insuffisance hépatique grave, la greffe de cellules souches du sang lors de leucémies ou encore, la greffe de peau aux grands brûlés ­ le recours à cette technique est vital. En outre, les transplantations sont de nature à améliorer considérablement la qualité de vie de certains patients, en leur évitant par exemple d'être tributaires de la dialyse (transplantation de reins) ce qui leur permet souvent de mener à nouveau une vie professionnelle normale ou encore en leur permettant de se mouvoir à nouveau sans douleur (transplantation de cartilage en cas de problèmes articulaires).

La transplantation porte sur des organes tels que le coeur, les reins, le foie, les poumons, le pancréas et l'intestin grêle. Sont également transplantés des tissus (cornée, peau, artères, tissus osseux et cartilages) ainsi que des cellules (cellules souches sanguines, des îlots de cellules Langerhans). Selon l'origine des organes, des tissus ou des cellules à transplanter, on distingue l'autotransplantation, l'allotransplantation et la xénotransplantation. L'autotransplantation consiste à prélever le transplant sur le patient même dans le but de lui regreffer (à un autre endroit de l'organisme ou lors d'une intervention chirurgicale ultérieure). L'autotransplantation est surtout pratiquée pour la peau, les tissus cartilagineux et osseux, ainsi que pour les cellules souches sanguines. L'allotransplantation (greffe sur un receveur de transplants issus d'un donneur) constitue toutefois la technique la plus répandue. Quant à la xénotransplantation (greffe sur l'homme de transplants d'origine animale), elle en est encore au stade expérimental.

Des transplantations ont déjà été tentées avant la Seconde Guerre mondiale, le plus souvent sans grand succès, les transplants ayant rapidement fait l'objet d'un phénomène de rejet par les systèmes immunitaires des receveurs. Par la suite, plusieurs étapes importantes ont jalonné l'évolution vers la médecine de transplantation moderne,
notamment les découvertes qui ont permis de mieux comprendre les processus conduisant au rejet du transplant par l'organisme, en particulier celle du système HLA par le Professeur J. Dausset à Paris en 1958. La première transplantation rénale selon des critères de typisation tissulaire fut effectuée en 1962, à Paris également, par le Professeur J. Hamburger. En 1967, la première transplantation du coeur réalisée par le Professeur Ch. Barnard au Cap (Afrique du Sud), rencontra un écho médiatique planétaire. Toutefois, ce n'est qu'en 1972 que l'on assista à une percée dé-

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cisive: la découverte de la ciclosporine A par le Docteur J-F Borel chez Sandoz à Bâle. Ce produit immunosuppresseur empêche le système immunitaire de réagir à la greffe par un rejet du transplant. Cependant, il doit être administré aux receveurs jusqu'à la fin de leur vie. Il faut aussi relever que les immunosuppresseurs inhibent les fonctions du système immunitaires responsables pour la défense contre les agents pathogènes et d'élimination des cellules cancéreuses. D'où le risque plus élevé chez les receveurs traités aux immunosuppresseurs que chez les personnes dont le système immunitaire fonctionne normalement de contracter des maladies infectieuses ou le cancer. C'est en 1984 qu'eut lieu le premier traitement clinique d'un rejet d'organe au moyen de la ciclosporine A. A partir du moment (1985) où l'on est parvenu à maîtriser le rejet des transplants par un traitement médicamenteux, la médecine de transplantation a connu un essor rapide. Le perfectionnement des techniques chirurgicales et la mise au point d'immunosuppresseurs mieux tolérés par l'organisme font que de plus en plus de patients choisissent la transplantation.

Le succès de la médecine de transplantation a pour corollaire que le besoin d'organes est nettement supérieur au nombre d'organes disponibles. C'est pourquoi on s'efforce de suivre d'autres pistes pour combler cette immense lacune. La xénotransplantation en est une; le ch. 1.1.2 examine cette technique plus en détail.

1.1.1.2

Transplantation d'organes d'origine humaine

En 1999, près de 46 000 organes ont été transplantés en Europe, aux Etats-Unis, au Canada et en Australie (cf. annexe A2 tableau 1). Plus de la moitié de ces transplantations ont porté sur des reins (21 251 provenaient de donneurs décédés et 6762 avaient été prélevés sur des personnes vivantes). L'organe qui arrive en deuxième position pour ce qui est de la fréquence de transplantation est le foie (9997). Suivent le coeur (4854), les poumons (1895) et le pancréas (963). L'intestin grêle, quant à lui, est très rarement transplanté (84 cas en 1999). Aujourd'hui, les transplantations du rein, du coeur et du foie peuvent être considérées comme des opérations de routine. Quant à la technique de transplantation des poumons, elle est sur le point de se standardiser. La fréquence de telles transplantations d'organes par rapport au nombre d'habitants varie très fortement d'un pays à l'autre. En tête, on trouve l'Espagne, l'Autriche et les Etats-Unis avec 80 à 90 transplantations pour 1 million d'habitants.

La Suisse se situe au milieu du classement avec 58,9 transplantations pour 1 million d'habitants (cf. annexe A2 tableau 2).

La fréquence à laquelle on pratique les transplantations d'organes dépend du nombre de donneurs. Celui-ci varie considérablement d'un pays à l'autre. Il en va de même du nombre de dons multiples d'organes (cf. annexe A2 tableau 3). Sur le plan européen, l'Espagne, l'Autriche et la Belgique/Luxembourg sont les mieux placés avec 33,6 à 23,0 donneurs pour 1 million d'habitants. Aux Etats-Unis la proportion est de 22,9 donneurs pour 1 million d'habitants. Avec 14,4 donneurs, la Suisse occupe une place médiane. Conséquence de cette pénurie d'organe, les délais d'attente se sont allongés ces dernières années. On notera toutefois qu'en matière de greffe cardiaque, le délai d'attente est plus court que pour les transplantations des autres organes. C'est pour les greffes d'un rein ou de l'ensemble coeur-poumons que l'on enregistre les délais d'attente les plus longs. De par le monde, des milliers de

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patients décèdent chaque année faute d'avoir pu trouver à temps un organe disponible pour une transplantation. Cela concerne en particulier les personnes en attente d'un coeur ou d'un foie, car, dans leur cas, il n'existe généralement pas d'autre traitement susceptible de leur sauver la vie. Si le nombre de patients sur liste d'attente peut être un indice qu'il y a pénurie d'organes humains, il ne reflète, cependant, que jusqu'à un certain point l'ampleur que prendrait la demande s'il n'y avait pas pénurie d'organes appropriés. L'offre et la demande sont influencées par un grand nombre de facteurs différents. Ainsi, les informations relatant l'existence de trafics d'organes ou d'autres abus dans ce domaine, influent de manière négative sur la propension au don d'organes. On peut d'autre part supposer que s'il y avait davantage d'organes disponibles, les spécialistes auraient tendance à prôner plus souvent la transplantation comme thérapie indiquée dans le cas d'espèce, ce qui revient à dire que la demande grandirait.

En raison des progrès enregistrés par la médecine moderne de transplantation, les greffes d'organes donnent aujourd'hui d'excellents résultats1 (cf. annexe A2 tableau 4). Les résultats les plus satisfaisants sont obtenus par les transplantations de reins prélevés sur des donneurs vivants: plus de 90 % des organes greffés fonctionnent encore un an après l'opération et presque 80 % au bout de cinq ans. Le taux moyen des organes (pris dans leur ensemble) continuant de fonctionner après cinq ans oscille entre 40 (intestin grêle) et 70 % (coeur, foie). Les principales causes de la défaillance à long terme de l'organe transplanté sont le rejet chronique par l'organisme, qui jusqu'à présent n'a pas pu être maîtrisé à suffisance, le décès des patients, enfin la résurgence de la maladie qui avait entraîné le dysfonctionnement de l'organe remplacé.

1.1.1.2.1

Reins

La transplantation de reins est, de loin, celle qui est la plus fréquemment pratiquée.

Sur les 22 697 organes transplantés en Europe en 1999, 14 066 étaient des reins, ce qui correspond à une proportion de 62 %. L'Espagne, l'Autriche, la Belgique/Luxembourg, la Norvège, Chypre et les Etats-Unis figurent parmi les pays qui enregistrent les taux les plus forts de transplantations de reins par million d'habitants (cf. annexe A2 tableau 2). Au niveau mondial, un tiers des reins transplantés proviennent de personnes vivantes qui ont fait don d'un de leurs reins. Sur les 14 006 reins transplantés en Europe en 1999, 1785 provenaient de donneurs vivants, ce qui correspond à un taux de 12,7 %. Toutefois, là encore, on constate de grandes différences entre les pays. C'est à Chypre, aux Etats-Unis, en Norvège et en Suède que l'on enregistre un taux supérieur à la moyenne de dons de reins (par million d'habitants) provenant de personnes vivantes alors qu'en Espagne ­ pays pourtant leader en matière de transplantation d'organes ­ ce taux est tout à fait négligeable.

1

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Ces résultats sont mesurés à la survie de l'organe chez le receveur. En moyenne, les taux de survie des patients auxquels un organe a été greffé sont supérieurs aux taux de survie des organes transplantés.

Selon les estimations, il suffirait de 25 à 30 donneurs par million d'habitants pour couvrir dans un pays les besoins des patients en attente de transplantation rénale.

Toutefois, dans la plupart des pays, le nombre des personnes sur liste d'attente s'est accru nettement plus fortement que celui des organes propres à une transplantation.

Il s'en est suivi une prolongation des délais d'attente pour les transplantations rénales, au point même que celles-ci représentent aujourd'hui les interventions donnant lieu à l'attente la plus longue. Aux Etats-Unis, la médiane des temps d'attente2 pour une transplantation rénale, qui était de 444 jours en 1989, a passé à 938 jours en 1996, soit plus du double.

La défaillance d'un rein peut notamment avoir les causes suivantes: le diabète, des maladies rénales inflammatoires (néphrites des glomérules), des maladies héréditaires ou congénitales, des lésions découlant de l'abus de médicaments (néphrites interstitielles) ou des infections du système immunitaire. Outre la greffe du rein, le patient peut être traité selon les diverses techniques de dialyse (hémodialyse ou dialyse péritonéale). En règle générale, chez les patients adultes, on ne pratique la transplantation d'un rein que lorsque l'on a constaté que la dialyse, dont ils sont tributaires n'apportera pas d'amélioration à leur état de santé. La transplantation du rein est pratiquée sur des patients âgés de 5 mois à 75 ans. En tant que thérapie de l'insuffisance rénale terminale, non seulement cette opération affranchit les receveurs de la dialyse, ce qui entraîne une amélioration de leur qualité de vie, mais encore elle augmente leur espérance de vie et souvent leur permet de reprendre une activité professionnelle. Le taux de survie des patients une année après la transplantation d'un rein provenant d'un donneur vivant est de 95 %; il n'est que légèrement inférieur lorsque l'organe prélevé provient d'un donneur décédé (89,4 %). Mais cinq ans après leur transplantation, le taux de survie de reins transplantés provenant d'une personne vivante est nettement meilleur (78 % en comparaison de 65 %; cf.

Annexe A2 tableau 4).

1.1.1.2.2

Coeur

Du point de vue de la fréquence des transplantations, le coeur arrive en troisième position, après les reins et le foie. En Europe en 1999, on a transplanté 2429 coeurs, ce qui correspond à un taux de 10,7 %. Parmi les pays qui enregistrent des taux de transplantations cardiaques supérieurs à la moyenne par million d'habitants, on trouve l'Espagne, l'Autriche, la Belgique/Luxembourg et les Etats-Unis (cf. annexe A2 tableau 2). La transplantation du coeur est indiquée pour les patients qui souffrent de myopathie cardiaque, d'affections coronariennes, de dysfonctionnements congénitaux du coeur ou d'autres affections cardiaques au stade terminal. Elle constitue souvent la seule intervention médicale propre à assurer la survie des patients à long terme. A la différence de ce qui vaut pour les autres organes, les délais d'attente pour une transplantation cardiaque sont courts. A noter, toutefois, qu'aux Etats-Unis, la médiane des temps d'attente a notablement augmenté, passant de139 jours en 1989 à 209 jours en 1998.

2

La médiane des temps d'attente exprime en jours le temps qui s'écoule jusqu'à ce qu'au moins 50 % des patients inscrits pour la première fois dans la liste d'attente aient subi la transplantation en question.

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Dans le cas des greffes du coeur, la proportion des organes qui fonctionnent une année après la transplantation n'est que légèrement inférieure à celle que l'on enregistre pour les greffes de reins provenant de personnes décédées; elle est de l'ordre de 85 % au bout d'un an et se situe aux alentours de 68 % au bout de cinq ans (cf. annexe A2 tableau 4). Plus de 90 % des personnes qui ont subi une transplantation cardiaque recouvrent un fonctionnement du coeur suffisant et plus de 70 % peuvent reprendre une vie sociale normale.

1.1.1.2.3

Foie

La technique de transplantation du foie s'est développée nettement plus tard que celle des reins et du coeur. Quand bien même cette transplantation est difficile à réaliser sur le plan chirurgical, elle constitue aujourd'hui une opération courante. Après le rein, le foie est l'organe le plus souvent transplanté. En Europe en 1999, on a transplanté 4790 foies, ce qui correspond à un taux de 21,1 %. Au nombre des pays qui enregistrent des taux de transplantations hépatiques supérieurs à la moyenne (par million d'habitants) figurent l'Espagne, les Etats-Unis, l'Autriche, la Belgique/Luxembourg et le Portugal (cf. annexe A2 tableau 2).

A l'heure actuelle, la transplantation du foie constitue l'intervention médicale permettant de traiter efficacement les patients atteints d'une insuffisance hépatique aiguë ou encore d'une affection chronique du foie au stade terminal. Une insuffisance hépatique aiguë peut soit se déclarer en l'absence de toute maladie du foie et se manifester, par exemple, sous la forme d'une hépatite fulgurante ou suite à un empoisonnement, soit être le signe de l'aggravation sévère d'une affection hépatique chronique. La transplantation du foie peut être indiquée comme thérapie lors de troubles congénitaux du métabolisme chez l'enfant. En Europe occidentale, 1 millier de personnes sont victimes chaque année d'une défaillance aiguë du foie. 10 à 30 % d'entre elles peuvent en guérir grâce à un traitement médical intensif classique, autrement dit sans transplantation. Toutefois, au moment où il s'agit de prendre la décision de pratiquer ou non une transplantation du foie, il est impossible de prédire avec certitude que tel ou tel patient guérira spontanément ou que tel ou tel autre aura impérativement besoin d'une transplantation.

Aux Etats-Unis, les délais d'attente lors de transplantation du foie se sont notablement prolongés: la médiane des temps d'attente, qui n'était que de 39 jours en 1989, s'établissait à 515 jours en 1998. La proportion des foies transplantés qui fonctionnent encore un an après l'opération s'élève à plus de 80 %. Elle se situe à plus de 65 % au bout de cinq ans (cf. annexe A2 tableau 4). Ces taux sont légèrement inférieurs à ceux enregistrés pour les transplantations du rein ou du coeur.

Afin de faire bénéficier davantage de patients d'une greffe hépatique,
on pratique de plus en plus fréquemment la division des foies à transplanter (technique dite de «split liver»). En règle générale, on obtient ainsi deux parties d'inégale grandeur qui peuvent être transplantées soit sur deux enfants, soit sur un adulte de petite taille et un enfant. Le prélèvement de parties du foie sur des donneurs vivants est également pratiqué. Compte tenu de leur petite taille, les lobes ainsi obtenus se prêtent essentiellement à la transplantation sur des enfants, mais il est arrivé que l'on en greffe

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sur des adultes (p. ex., à Genève et à Zurich). Autre technique qui en est encore au stade expérimental: l'infusion de cellules isolées à partir du foie de donneurs. On escompte que cette technique permette: ­

de satisfaire avec un seul foie les besoins de plusieurs patients;

­

d'utiliser également les foies qui ne se prêtent pas à une transplantation dans leur intégralité;

­

d'administrer plusieurs traitements de suite aux patients, cette procédure étant moins éprouvante qu'une transplantation proprement dite.

A fin d'accroître le taux de survie des patients atteints d'une défaillance aiguë du foie, on développe aussi des systèmes bio-artificiels de stimulation du foie (cf. ch. 1.1.2).

1.1.1.2.4

Poumons

En Europe en 1999, on a transplanté 834 poumons, ce qui correspond à un taux de 3,7 %. Au nombre des pays qui enregistrent des taux de transplantations de poumons supérieurs à la moyenne (par million d'habitants) figurent l'Autriche, le Danemark, la Suède et la Suisse (cf. annexe A2 tableau 2). Aux Etats-Unis, la médiane des temps d'attente pour une transplantation de poumons s'élevait à 320 jours en 1989 et à 643 jours en 1997. Quant à la médiane relative aux transplantations de l'ensemble coeur/poumons, elle s'élevait à 795 jours en 1997.

On recourt à la transplantation de poumons chez les patients qui, atteints d'une insuffisance pulmonaire au stade terminal, souffrent de troubles respiratoires aigus et auxquels aucune autre mesure thérapeutique ­ y compris une alimentation constante en oxygène ­ ne peut plus être d'aucun secours, autrement dit des patients dont les probabilités de vie sont inférieures à 12­18 mois. La transplantation de poumons est principalement indiquée en cas d'emphysème pulmonaire, de fibrose pulmonaire quelle qu'en soit l'origine, de mucoviscidose (fibrose kystique) ou encore de maladie engendrant une hypertension au niveau de la circulation pulmonaire. Lorsqu'en sus d'une des affections susmentionnées, le patient souffre d'une lésion irréversible du coeur, il faut procéder à la transplantation d'un ensemble coeur/poumons. Pour traiter les patients souffrant d'emphysème ou de fibrose on opte souvent pour la transplantation d'un seul poumon (transplantation unilatérale). En revanche, la transplantation bilatérale est fréquemment pratiquée chez les patients souffrant de mucoviscidose. S'il est théoriquement possible de prélever un lobe du poumon chez un donneur vivant, cette opération ne fait pas encore partie des interventions courantes.

Organes assurant les fonctions respiratoires, les poumons sont en contact direct avec le milieu ambiant. C'est dire qu'après la transplantation, ils sont particulièrement exposés au risque d'infection. Outre les phénomènes de rejet, les infections constituent d'ailleurs les principales complications survenant après une transplantation. La proportion des poumons qui survivent une année après leur transplantation est d'environ 75 %, chiffre similaire à celui que l'on trouve pour le foie. Elle descend cependant à 60 % pour ce qui est des ensembles coeur/poumons transplantés. Quant au taux de survie enregistré au bout de 5 ans, il s'établit à un peu plus de 40 % en ce

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qui concerne tant les poumons que les ensembles coeur/poumons transplantés (cf.

annexe A2 tableau 4).

1.1.1.2.5

Pancréas

Depuis 1966, date de la première transplantation du pancréas, près de 14 000 (chiffre établi à mi-2000) autres transplantations de cet organe ont été pratiquées dans le monde entier. Aujourd'hui, à l'échelle mondiale, on compte 1000 transplantations du pancréas par année, la plupart d'entre elles pratiquées aux Etats-Unis.

En dépit des bons résultats qu'elle permet d'obtenir à court terme, la transplantation isolée du pancréas n'est pratiquée que dans des cas exceptionnels, le plus souvent pour prévenir l'apparition du diabète chez des patients qui ont subi une ablation de cet organe à la suite d'une affection. Les transplantations isolées du pancréas représentent 4 à 5 % des transplantations du pancréas qui ont lieu chaque année.

La majeure partie de ces interventions sont toutefois pratiquées aujourd'hui sur des patients souffrant de diabète de type I et qui présentent de graves dysfonctionnements typiques de cette maladie. Parmi ceux-ci, on trouve fréquemment les insuffisances rénales qui rendent les personnes concernées tributaires de la dialyse. Pour ces patients, une transplantation du rein entraîne un taux de survie à long terme nettement supérieur à celui qu'un traitement par hémodyalise. Initialement, seule la transplantation du rein était envisagée pour les personnes atteintes par ce type de diabète. Toutefois, comme la transplantation de rein ne supprime pas les troubles du métabolisme des glucides chez le receveur, l'organe transplanté est à nouveau endommagé par le diabète quelques années après l'intervention. C'est la raison pour laquelle on a renoncé à la transplantation isolée du pancréas chez les patients atteints du diabète de type I et souffrant d'une insuffisance rénale. Depuis le début des années 90, on préfère en effet de plus en plus recourir à la transplantation simultanée du pancréas et du rein chez ces patients. Ce type de transplantation permet, en effet, à la majorité des patients de recouvrer un métabolisme des glucides normal, sans parler de l'amélioration notable de leur qualité de vie. Compte tenu des progrès réalisés sur le plan médico-technique, un nombre de plus en plus important de diabétiques de type I dont le rein greffé fonctionne à satisfaction peut envisager de subir ultérieurement une transplantation du pancréas.

La médecine considère qu'une transplantation
du pancréas est réussie lorsque le receveur n'a plus besoin d'insuline exogène. Il faut, cependant, noter que la transplantation du pancréas et/ou du rein ne se traduit par une atténuation des séquelles tardives causées par le diabète qu'au bout de plusieurs années, encore que dans une faible mesure.

La proportion des organes qui survivent une année après leur transplantation est d'environ 84 % pour le pancréas et de plus de 90 % pour le rein en cas de transplantation simultanée. Elle se situe à quelque 76 % pour le pancréas en cas de transplantation isolée de cet organe (cf. annexe A2 tableau 4).

Aux Etats-Unis, ces dernières années, la médiane des temps d'attente pour une transplantation du pancréas a été soumis à de fortes fluctuations (il est passé de 96 jours en 1992 à 413 jours en 1994, alors que le chiffre indiqué pour 1998 est de

30

193 jours). La médiane des temps d'attente d'une transplantation simultanée du rein et du pancréas s'élevait, quant à elle, à 381 jours en 1998, délai nettement plus court que celui qui est enregistré pour une transplantation isolée du rein (938 jours en 1996).

1.1.1.2.6

Intestin grêle

L'expérience acquise en matière de transplantation de l'intestin grêle est encore restreinte en comparaison au savoir-faire atteint en matière de greffe d'autres organes.

Jusqu'en 1997, 273 transplantations de l'intestin grêle, au total, ont été pratiquées dans 33 centres spécialisés répartis dans le monde entier. Dans 113 cas, l'opération a porté sur le seul intestin grêle, dans 130 cas sur l'ensemble foie/intestin grêle. Enfin, dans 30 cas, l'intestin grêle a été greffé dans le cadre d'une transplantation multiple (estomac, duodénum, pancréas et foie). Sur le total de 22 697 transplantations pratiquées en Europe en 1999, 13 seulement ont porté sur l'intestin grêle, ce qui correspond à un taux de 0,06 %. Elles ont été effectuées en France, en Autriche, en Espagne, en Italie et en Suisse. Par ailleurs, 71 transplantations de l'intestin grêle ont été pratiquées aux Etats-Unis en 1999.

Les progrès enregistrés en matière d'immunosuppression et le perfectionnement des techniques chirurgicales ont permis d'accroître notablement la durée de fonctionnement des intestins grêles transplantés. Cette durée est cependant faible si on la compare à celle des autres organes. Si en 1991, le taux de survie des intestins grêles un an après l'opération n'était encore que de quelque 30 %, il atteignait déjà près de 60 % après 1995. Quant à la proportion d'organes qui continuent de fonctionner au bout de cinq ans, elle serait de l'ordre de 35 %. C'est la transplantation de l'ensemble foie/intestin grêle qui enregistre le taux de survie le plus élevé, suivie de la transplantation isolée de l'intestin grêle, puis de la transplantation multiple. La greffe de l'intestin grêle donne lieu à des réactions de rejet particulièrement violentes et à de fréquentes infections, facteurs qui contribuent à ce que les taux de survie des organes transplantés soient encore insuffisants. 70 à 80 % des opérés ne sont plus tributaires de la nutrition artificielle. Les intestins grêles transplantés peuvent provenir soit de personnes décédées soit de donneurs vivants.

On recourt à la transplantation de l'intestin grêle chez les patients qui, en permanence, doivent être nourris artificiellement au moyen d'une sonde reliée à la circulation sanguine, parce que la quantité de nourriture normale nécessaire à leur subsistance dépasse les capacités
d'absorption de l'intestin grêle et chez lesquels la nutrition artificielle entraîne des complications. La plupart de ces patients ont dû subir l'ablation d'une partie de l'intestin grêle à la suite d'affections telles que troubles de l'irrigation sanguine de cet organe, maladie de Crohn ou encore cancer de l'intestin grêle.

1.1.1.2.7

Transplantation multiple

La première transplantation multiple (appelée aussi «transplantation multiple des viscères») a été pratiquée aux Etats-Unis en 1983. Jusqu'en 1993, elle fut suivie 31

dans le monde entier de 18 opérations de ce type. Il s'agit, en fait, de transplanter sur un patient plusieurs organes au cours de la même intervention, par exemple l'intestin grêle, le foie et le pancréas. Une transplantation multiple (intestin grêle, foie, pancréas et rein) a été pratiquée en Suisse en 1999. Une telle opération constitue parfois la seule thérapie appropriée pour des patients souffrant de la défaillance de plusieurs organes ou atteints de tumeurs non opérables au milieu du foie, du pancréas et de l'intestin grêle.

1.1.1.2.8

Transplantation d'extrémités de membres

En chirurgie plastique, le recours à la transplantation autogène d'extrémités de membres n'est pas chose nouvelle. Il arrive, par exemple, qu'après un accident on greffe des orteils sur la main des victimes pour leur permettre la préhension d'objets, faculté qui contribue notablement à la qualité de vie.

La transplantation allogène d'extrémités de membres n'en est en revanche qu'à ses balbutiements. Jusqu'à présent, elle n'a été pratiquée que sur un nombre très restreint de patients, à des fins de recherche. En septembre 1998, une équipe médicale internationale est parvenue à transplanter pour la première fois, à Lyon, en France, la main d'une personne décédée. La même opération a également eu lieu aux EtatsUnis en janvier 1999.

La transplantation d'extrémités de membres est cependant encore loin de compter parmi les interventions courantes. Trop de points sont encore en suspens et la recherche doit faire encore des progrès pour les élucider. Ainsi, il a fallu procéder à l'ablation de la main greffée lors de la première transplantation susmentionnée parce qu'elle était rejetée par le système immunitaire du patient. Si l'on peut attribuer cet échec au manque de discipline du patient, il faut relever que les mécanismes de rejet de la peau sont encore mal connus à divers égards. Ces mécanismes se distinguent des phénomènes de rejet des tissus et des organes et l'immunosuppression adaptée à ces cas fait l'objet de recherches.

1.1.1.3

Transplantation de tissus d'origine humaine

Outre les organes, on transplante aujourd'hui couramment différents tissus d'origine humaine: cornée, peau, cartilage, tissus osseux, etc.

1.1.1.3.1

Cornée

La cornée (cornea) ferme l'oeil vers l'avant et vers l'extérieur, tel un verre de montre. Elle peut se voiler ou se déchirer à la suite d'infections, de lésions ou d'autres affections, ce qui peut entraîner la cécité, voire la perte de l'ensemble du globe oculaire. Chaque année on enregistre quelque 100 000 transplantations de cornée dans le monde entier. Les réactions de rejet étant rares, le taux de survie des tissus transplantés est de l'ordre de 90 %. Une fois la transplantation effectuée, le traitement

32

immunosuppresseur est limité à la phase initiale. La cornée peut être prélevée sur toute personne décédée et pas seulement sur des donneurs dont le cerveau a subi un arrêt irréversible, mais que l'on continue à maintenir artificiellement en vie. En effet, à la différence d'autres tissus, la nutrition et l'oxygénation de la cornée ne sont pas assurées par la circulation sanguine, mais par les sécrétions lacrymales et par diffusion à partir des tissus internes. Ce tissu particulier peut se maintenir trois jours au maximum sans oxygénation, ce qui revient à dire que son prélèvement peut avoir lieu dans ce délai.

1.1.1.3.2

Peau

Aujourd'hui, on pratique couramment la transplantation autogène de peau. Il s'agit de prélever sur une partie saine du corps du patient une portion de peau pour la transplanter à un endroit qui a subi des lésions. Une telle transplantation s'impose non seulement en cas de brûlures graves, mais encore ­ et plus fréquemment ­ pour soigner des plaies qui sont difficilement guérissables suite à diverses affections du métabolisme. De telles transplantations ne sont toutefois pas toujours possibles parce que ­ et c'est bien souvent le cas ­ il n'y a pas suffisamment de peau saine à disposition. Il faut donc ­ le plus souvent, pour panser temporairement de telles plaies ­ recourir à la transplantation allogène de peau provenant de personnes décédées.

Parmi les innovations récemment développées par l'ingénierie du tissu cellulaire (tissue engineering) figurent des produits et des procédés permettant de cultiver en laboratoire de la peau destinée aux transplantations. D'une part, on prélève sur le patient de petites pièces de peau que l'on fait croître en laboratoire selon des procédés standardisés, jusqu'à ce que l'on obtienne des fragments suffisamment grands pour recouvrir les plaies. Il faut toutefois relever que ces transplants n'ont pas la structure multicouches de la peau saine et ne permettent donc d'implanter chez le patient qu'une peau très mince et, partant, très sensible. Cela explique que, par ailleurs, on développe des substances biologiques constituant un substrat sur lequel viennent se greffer les cellules de la peau qui repoussent, processus qui leur permet de reconstituer une structure multicouches naturelle. Il existe aujourd'hui un produit de substitution de la peau, multicouches et fabriqué industriellement à partir de cellules allogènes.

1.1.1.3.3

Cartilages et tissus osseux

La transplantation de cartilages et de tissus osseux obéit au même processus que celle de la peau: on prélève sur le patient du cartilage que l'on cultive en laboratoire pour le réimplanter ultérieurement. Les transplantations autogènes de cartilage sont pratiquées notamment sur les patients souffrant de lésions et de défaillance des articulations. On recourt à la transplantation autogène de tissus osseux lors de graves fractures. Il s'agit de prélever dans l'organisme du patient des fragments d'os qui serviront à pallier les carences les plus importantes ou à reconstituer certaines portions de l'os. Dans ce domaine on pratique aussi couramment la transplantation de

33

tissus osseux allogènes qui peuvent être stockés à long terme dans ce qu'il est convenu d'appeler les «banques d'os».

Enfin, les osselets de l'oreille interne, petits éléments osseux et cartilagineux qui servent à la transmission mécanique des ondes sonores, qui peuvent eux aussi être transplantés. Aujourd'hui cependant, les osselets sont souvent stérilisés avant leur implantation, de sorte qu'ils ne sont plus vitaux et, partant, ne constituent plus à proprement parler des transplants.

1.1.1.4

Transplantation de cellules d'origine humaine

La transplantation de certaines cellules, par exemple de cellules souches du sang dans le cadre du traitement de la leucémie, est une thérapie courante. Quant à la transplantation de cellules des îlots de Langerhans à titre de traitement contre le diabète, elle a enregistré de tels progrès qu'elle est en passe de devenir une intervention de routine. La transplantation d'autres cellules, par exemple de cellules nerveuses foetales (cf. ch. 1.3.7) pour traiter les patients atteints de la maladie de Parkinson, fait actuellement l'objet de recherches. Depuis deux ans environ, les chercheurs s'attachent tout particulièrement à déterminer dans quelle mesure les cellules souches pourraient un jour être utilisées en médecine de transplantation.

1.1.1.4.1

Cellules souches du sang

La moelle osseuse constitue un réservoir de cellules souches du système hémoplastique (cellules souches hématopoïétiques). On suppose qu'une centaine à un millier de ces cellules sont suffisantes pour assurer la production de sang chez un être humain sa vie durant. Depuis le début des années 60, on pratique la transplantation de cellules souches hématopoïétiques à titre de traitement des graves affections du système hémoplastique ainsi que de certains cancers chimiosensibles et radiosensibles.

Parmi ces maladies, citons les leucémies, les lymphomes, l'anémie hémolytique, la thalassémie, la maladie de Gaucher ainsi que certaines déficiences du système autoimmunitaire. Cette thérapie est appliquée en deux temps: il s'agit d'abord de détruire les cellules malignes du sang par radiothérapie et chimiothérapie puis de transfuser au patient des cellules souches saines qui assurent la reconstitution du sang. Les cellules souches transfusées vont se loger dans la moelle osseuse du receveur en empruntant les voies sanguines et lymphatiques. Scientifiquement parlant, les cellules souches du sang sont considérées comme des transplants puisque, à la différence du sang, elles sont des cellules étrangères qui subsistent, après la transfusion, dans l'organisme du receveur et s'y multiplient.

Aujourd'hui, pour déterminer si des cellules souches du sang sont compatibles avec un receveur, on recourt à 6 marqueurs (appelés antigènes HLA) dont cinq au moins doivent être identiques chez le donneur et chez le receveur. A défaut, non seulement l'organisme de celui-ci risque de rejeter les cellules souches hématopoïétiques transplantées, mais encore, à l'inverse, ces cellules défensives risquent de se retourner contre l'organisme du receveur en provoquant des réactions de rejet au niveau de la peau, des muqueuses et de certains organes, notamment du foie. Cette réaction 34

de rejet du tissu du receveur par les cellules «immunitaires» issues des cellules souches du sang qui lui ont été transplantées est appelée «graft versus host». Elle peut entraîner des complications mortelles, par exemple une défaillance hépatique.

A l'heure actuelle, on peut prélever des cellules souches hématopoïétiques à des fins de transplantation de la moelle osseuse, du sang périphérique, du sang ombilical et du foie de foetus.

On a tout d'abord développé la transplantation de cellules issues de la moelle osseuse. La technique consiste à ponctionner à plusieurs reprises l'os du bassin du donneur pour en extraire près d'un demi-litre de liquide contenant de la moelle, cette intervention étant pratiquée sous anesthésie générale. Depuis le début des années 60, on a tout d'abord procédé à des transplantations de moelle osseuse entre membres d'une même famille ­ au premier chef entre frères et soeurs ­ afin de garantir l'histocompatibilité HLA. La probabilité de trouver, dans la population, un donneur de moelle osseuse histocompatible selon les critères HLA est de 1 sur 1 million. Il n'a donc été possible d'élargir le cercle des donneurs potentiels par delà celui des proches qu'en créant, à la fin des années 70 et au début des années 80, des registres de donneurs de moelle osseuse où sont recensées toutes les informations nécessaires sur les personnes disposées à faire don de leur moelle et qui mettent en rapport les cliniques pratiquant la transplantation avec des donneurs compatibles.

Depuis lors, plus de 6,2 millions de donneurs bénévoles de moelle osseuse ont été enregistrés dans le monde.

Au cours des années 90, l'extraction de cellules souches hématopoïétiques du sang périphérique est devenue une méthode courante qui ne nécessite pas une anesthésie générale. Le donneur est d'abord traité avec un facteur de croissance produit par génie génétique. Ce facteur entraîne la division et la multiplication des cellules souches hématopoïétiques qui sont ensuite extraites du sang grâce à un processus de séparation des cellules qui dure plusieurs heures (ce processus est appelé cytophérèse). Aujourd'hui, pour les transplantations autogènes, on utilise uniquement des cellules souches extraites du sang et non de la moelle osseuse alors que dans le cadre d'une allotransplantation, on a le choix entre
les deux solutions.

Des cellules souches hématopoïétiques peuvent également être extraites du sang de la veine ombilicale après coupure du cordon. Comme il n'est possible d'isoler ainsi qu'un nombre restreint de cellules souches, leur transplantation n'a, jusqu'ici, été pratiquée que sur des enfants et de jeunes adultes dont le poids n'excède pas 40 kg.

La multiplication de ces cellules souches en laboratoire (expansion) fait actuellement l'objet de recherches. Ces cellules ne peuvent toutefois pas encore être utilisées au stade clinique. Le sang ombilical est stocké dans des banques ad hoc dont les fichiers, pour l'Europe, sont en réseau au travers d'EUROCORD (European Research Project on Cord Blood Transplantation). Il est aussi possible de faire conserver le sang ombilical par une entreprise privée à titre de «mesure de précaution» pour l'ensemble des membres d'une même famille.

Les premières expériences de transplantations de cellules souches semi-identiques selon les critères HLA, qui sont prélevées chez les parents du patient, datent de 1998.

A l'heure actuelle quelque 60 % des transplantations de cellules souches sont autogènes. Dans 40 % des cas, il s'agit d'allotransplantations qui recourent à des cellules 35

prélevées chez des proches parents du receveur. Quant aux allotransplantations de cellules extraites chez des donneurs hors du cercle familial, elles ne représentent que 10 % de l'ensemble des transplantations de cellules souches.

1.1.1.4.2

Cellules des îlots du pancréas

De 1990 à 1998, quelque 308 allotransplantations des cellules des îlots de Langerhans ont été pratiquées dans le monde, dont 267 sur des personnes atteintes du diabète de type I. A l'instar de la transplantation du pancréas, celle desdites cellules vise à affranchir le receveur de l'injection régulière d'insuline. Toutefois, elle est moins complexe et moins éprouvante pour le patient que la transplantation d'un pancréas entier.

Lors de l'allotransplantation de cellules des îlots de Langerhans, 500 000 à 1 million d'équivalents-îlots sont injectés dans la veine porte du foie. Afin d'obtenir une telle quantité, il faut procéder à l'extraction d'une dizaine de pancréas environ. Il est vrai que l'on peut utiliser à cette fin des pancréas qui ne se prêteraient pas à être transplantés comme organes entiers. Sur les 267 allotransplantations pratiquées dans le monde depuis 1990, seules 33 ont permis d'affranchir le patient des injections d'insuline pendant plus d'une semaine et dans 22 cas seulement, les transplants ont fonctionné plus d'une année. Ces maigres résultats tiennent notamment au fait que la plupart des immunosuppresseurs traditionnels endommagent les cellules des îlots de Langerhans.

Dans ces conditions, les résultats ­ publiés en l'an 2000 ­ d'une étude menée à l'université d'Alberta à Edmonton (Canada) ont été considérés par le monde médical comme une percée en matière d'allotransplantation de cellules des îlots de Langerhans3. En appliquant un dispositif d'immunosuppression spécifique, l'équipe de recherche est parvenue à affranchir plus d'un an des injections d'insuline les 7 patients atteins du diabète de type I qui avaient subi une transplantation de cellules des îlots de Langerhans. Cette étude a révélé, pour la première fois, que des transplants allogènes de telles cellules, non enkystés, permettaient d'assurer une normoglycémie constante et une indépendance de l'insuline sur une assez longue période, à condition que l'on applique un dispositif immunosuppresseur adéquat.

1.1.1.4.3

Cellules souches

Les cellules souches sont des cellules qui, à un stade précoce de développement, sont indifférenciées et ont la propriété de se diviser. A certaines conditions, elles peuvent se muer en différents tissus et types de cellules, voire, dans le cas des cellules souches totipotentes issues de l'embryon, en l'ensemble des types de tissus et de

3

36

Shapiro A.M., Lakey J.R.T., Ryan E.A., Korbutt G.S., Toth E., Warmock G.L., Kneteman N.M., Rajotte R.V., Islet transplantation in seven patients with type I diabetes mellitus using a glocucorticoid-free immunosuppressive regimen, The New England Journal of Medicine, 343 (4), 2000, p. 230.

cellules que compte un organisme, et en organisme tout entier. Les cellules souches peuvent être extraites de différentes sources, à savoir: ­

de certains organes et tissus, par exemple la moelle osseuse, ayant atteint leur stade adulte;

­

du sang ombilical après la naissance;

­

d'embryons et de foetus après un avortement ou une fausse couche;

­

d'embryons surnuméraires issus de la fécondation artificielle (aux termes de l'art. 17 de la loi fédérale du 18 décembre 1998 sur la procréation médicalement assistée [loi sur la procréation assistée, LPMA; RS 814.90], la production d'embryons surnuméraires est interdite en Suisse);

­

de cellules adultes reprogrammées par «clonage thérapeutique» selon la technique dite de «Dolly». Elle consiste à transplanter dans l'ovule énuclée d'une donneuse et à cultiver le noyau d'une cellule somatique prélevée par biopsie. Il en résulte une blastocyste dont on extrait des cellules souches embryonnaires, qui, par culture appropriée, vont se différencier en tissu voulu.

En médecine de transplantation comme en ingénierie du tissu cellulaire (tissue engineering), l'utilisation de cellules souches revêt un intérêt certain car elle recèle les potentialités suivantes: ­

Elle pourrait déboucher sur la production, en tout temps et en quantité illimitée, d'un matériau cellulaire uniforme, utile aux thérapies cellulaires, même de celui qui n'est présent qu'en faibles quantités dans les cellules primaires isolées, ne peut être isolé qu'avec beaucoup de travail ou encore est très difficilement cultivable.

­

Elle pourrait permettre d'améliorer constamment, voire de «tailler sur mesure», des lignées de cellules souches à des fins précises, en procédant, par exemple, à une modification génétique. Un des objectifs essentiels de ces mesures d'optimisation serait de produire des transplants qui n'exigeraient plus que les receveurs soient traités à vie aux immunosuppresseurs.

­

Si l'on parvenait à comprendre dans quelles conditions les cellules souches se différencient en tissus et organes déterminés, on serait alors en mesure de cultiver in vitro des tissus plus complexes, voire, un jour, des organes (ingénierie du tissu cellulaire).

Les perspectives qui viennent d'être esquissées ne pourront se réaliser que sur le long terme, encore que l'on n'ait aucune certitude que tel sera le cas ni quand elles pourront se réaliser. L'intérêt pour la recherche sur les cellules souches a été éveillé par les progrès capitaux qui ont été faits à la fin des années 90. En 1998, en effet, deux équipes de chercheurs américains sont parvenues à cultiver pour la première fois, des lignées de cellules souches issues de l'embryon humain. En outre, de plus en plus d'indices portent à croire que même dans des tissus et organes adultes, il y a des cellules souches qui ­ selon toute apparence ­ non seulement peuvent se différencier en de ces organes et tissus correspondants, mais encore ont la propriété de se développer en tissus totalement différents, à certaines conditions. Cela ouvre une possibilité de développement à partir de processus bien établis au stade clinique, tels

37

que la transplantation de cellules hématopoïétiques. On pourrait tout à fait concevoir que de telles cellules soient isolées du sang selon des procédés bien rodés, puis se différenciant en autres types cellulaires en laboratoire afin de pouvoir être utilisées sous la forme de transplants cellulaires dans la thérapie de certaines maladies.

1.1.2

Transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine animale (xénotransplantation)

1.1.2.1

Introduction

Par xénotransplantation on entend la transplantation d'organes, de cellules et de tissus vivants au-delà de la limite des espèces et, en particulier, la transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine animale sur l'être humain. Elle inclut également les «perfusions extracorporelles» d'organes, de tissus et de cellules d'origine animale, au cours desquelles des substances liquides présentes chez l'homme ou des cellules, des tissus et des organes d'origine humaine sont mis en contact, à l'extérieur du corps, avec des organes, des tissus ou des cellules d'origine animale puis sont réimplantés dans l'organisme des patients.

On escompte que la xénotransplantation d'organes permette de remédier à la grande disparité. Par la xénotransplantation de cellules, on cherche soit à appliquer un premier traitement soit à améliorer la thérapie des pathologies les plus diverses. Cette technique vise aussi partiellement à renoncer à la greffe de transplants prélevés sur les embryons et les foetus d'origine humaine.

C'est principalement chez les porcs que l'on prélève les transplants. Si la xénotransplantation porte sur des organes, les porcs doivent être génétiquement modifiés afin de permettre de garder sous contrôle les violentes réactions de rejet (dites rejet hyper aigu) que l'organisme humain manifeste à l'égard des transplants de porc.

N'est en revanche pas considérée comme xénotransplantation l'utilisation de certains tissus d'origine animale, tels que les valvules de porc, les os de porcs et les veines de bovins. Ces tissus (dits implants) qui sont utilisés depuis de nombreuses années en chirurgie, sont traités spécialement avant l'opération de sorte qu'ils ne contiennent plus de matière vivante.

1.1.2.2

Xénotransplantation d'organes

De l'avis des spécialistes de la science médicale, la xénotransplantation d'organes ­ si tant est qu'elle soit réalisable ­ ne pourra pas être pratiquée avant 15 ou 20 ans.

D'importants problèmes doivent, en effet, être résolus préalablement. Si l'on parvenait, cependant, à greffer avec succès des organes d'origine animale sur des êtres humains, on aurait fait un progrès essentiel dans la solution des innombrables problèmes que pose la transplantation d'organes: ­

38

Toute personne qui en aurait besoin d'une transplantation recevrait l'organe nécessaire puisqu'il est possible d'élever des animaux en nombre suffisant pour répondre à la demande des receveurs.

­

Les transplantations ne seraient plus des interventions pratiquées en urgence.

Elles pourraient être planifiées, ce qui ne ferait qu'accroître les chances de succès de l'opération sur le plan médical et atténuerait le stress subi par les patients, leurs proches et le personnel médical.

­

Les problèmes d'ordre éthique de même que les pressions psychiques liés à l'application du critère de «mort cérébrale»4 seraient atténués.

­

Le trafic d'organes qui exploite la détresse des êtres humains n'aurait plus de raison d'être.

La xénotransplantation n'offrira toutefois les avantages susmentionnés qu'à la condition que les transplants d'origine animale équivalent aux organes humains du point de vue médical, en d'autres termes que la xénotransplantation atteigne le même degré d'efficacité thérapeutique que l'allotransplantation. En l'état actuel de la recherche, tel n'est encore pas le cas. En effet, si l'on transplantait aujourd'hui sur un receveur un organe xénogène, il faudrait s'attendre, à la différence des résultats d'une allotransplantation, à ce que les facteurs suivants aient des incidences graves sur la durée de fonctionnement de l'organe greffé, la durée de survie du patient et sur sa qualité de vie:

4

­

Rejet: par rapport aux organes humains, ceux d'origine animale font l'objet d'une réaction de rejet plus violente, aboutissant parfois à ce qu'il est convenu d'appeler un rejet hyper aigu. Alors qu'en matière d'allotransplantation, la proportion moyenne des reins, coeurs et foies qui continuent de fonctionner au bout d'un an est de l'ordre de 80 % et de 50 à 60 % au bout de cinq ans, plusieurs singes auxquels on avait greffé un organe provenant de porcs génétiquement modifiés n'ont survécu que quelques jours à la transplantation (53 au maximum s'agissant du rein et 39 pour le coeur).

Donc, le receveur d'un greffon xénotransplanté risque d'être exposé aux problèmes suivants: crises de rejet assez fréquentes et pertes assez fréquentes ou relativement précoces de l'organe transplanté, enfin effets secondaires relativement puissants ou d'une autre nature provoqués par les immunosuppresseurs. Il existe toutefois des possibilités d'améliorer la situation: par exemple, en apportant aux animaux sur lesquels les organes seront prélevés des modifications génétiques différentes ou supplémentaires, en optimisant les protocoles afférents aux immunosuppresseurs, enfin en développant la tolérance dans les organismes des receveurs à l'égard de tissus étrangers (induction de la tolérance).

­

Fonctionnement de l'organe: jusqu'à présent, les chercheurs ne se sont guère penchés sur la question de savoir si et comment un organe d'origine animale peut durablement et correctement fonctionner dans un organisme humain; au surplus, sur ce point, l'expérimentation de solutions est pratiquement inexistante. Dans ces conditions, les receveurs d'un organe xénotransplanté risquent d'être confrontés aux difficultés suivantes: durée

Etant que la notion de «mort cérébrale» est courante, elle est utilisée dans le présent message. Elle sera toutefois mise entre guillemets pour rappeler que cette formule est malheureuse (cf. ch. 1.3.3.2).

39

de fonctionnement du greffon relativement restreinte et fonctionnement insuffisant de l'organe xénotransplanté.

­

Infections: la xénotransplantation pourrait s'accompagner de l'apparition dans l'organisme du receveur d'agents pathogènes d'un nouveau type, susceptibles de causer de graves infections, des défaillances du système immunitaire ou des tumeurs. Il n'est pas impossible alors que ces agents pathogènes soient transmissibles à d'autres personnes ainsi qu'à d'autres couches de la population par simple contact. A l'heure actuelle, les spécialistes envisagent d'appliquer les mesures suivantes afin de limiter ces risques: poursuivre les recherches sur les risques d'infection (notamment chez les singes), mettre au point des conditions de détention spéciales destinées à permettre l'élevage d'animaux exempts autant que possible d'agents pathogènes, au besoin, éradiquer certains agents pathogènes (p. ex. rétrovirus endogènes) présents dans le génome des animaux, soumettre les receveurs, jusqu'à la fin de leur vie, à un contrôle visant à dépister d'éventuelles infections, imposer à ceux-ci des restrictions précises (p. ex. interdiction de donner du sang ou des organes, obligation d'avoir des rapports sexuels protégés, mise en quarantaine en cas d'infection, etc.). Si le risque d'infection peut, d'ores et déjà, sembler tolérable pour la personne qui a subi une xénotransplantation, parce qu'elle représente la thérapie de la dernière chance, on ne saurait cependant s'accommoder, sans plus, d'exposer la population à un tel risque.

­

Incidences sur l'identité et le psychisme: comment les receveurs d'un organe xénotransplanté réagiront-ils sur le plan psychique? Jusqu'à présent, force a été de raisonner par analogie à la situation dans le domaine de l'allotransplantation pour répondre à cette question. Quelques receveurs ayant bénéficié d'une allotransplantation sont effectivement en proie à des problèmes d'identité.

La poursuite des recherches permettra-t-elle de venir à bout des risques qui viennent d'être exposés, et dans l'affirmative, quand? Il est impossible de répondre à cette question pour l'instant. Il semble toutefois plausible que les travaux de recherche en matière de xénotransplantation qui vont se poursuivre permettent, dans un premier temps, d'assurer aux receveurs un fonctionnement satisfaisant des transplants xénogènes durant une période limitée (allant de quelques jours à quelques mois). On pourrait ainsi:

40

­

stabiliser, voire améliorer l'état de santé de certains patients souffrant de la défaillance aiguë d'un organe, à tel point que l'on puisse envisager pour eux une allotransplantation;

­

déterminer avec une plus grande certitude la nécessité (ou, au contraire, l'inutilité) de procéder à une transplantation d'organe;

­

assurer la transition jusqu'à ce qu'il soit possible de transplanter un organe d'origine humaine approprié.

1.1.2.3

Xénotransplantation de cellules et de tissus

Dans certaines applications de la xénotransplantation de cellules et de tissus, les problèmes de rejet, de risques d'infection et d'utilisation des animaux ne se posent pas dans la même mesure que lors de la xénotransplantation d'organes. La raison en est que la très violente réaction de rejet hyper aigu que provoque notoirement la xénotransplantation d'un organe, ne se produit pas lors de la greffe de cellules et de tissus xénogènes. Par ailleurs, les transplants de cellules peuvent s'isoler du système immunitaire en s'enkystant dans des membranes semi-perméables. La transplantation de cellules enkystées n'exige donc pas que le receveur subisse un traitement aux immunosuppresseurs. De surcroît, l'enkystement doit faire obstacle au passage d'agents pathogènes dans l'organisme, réduisant ainsi le risque d'infection par le xénotransplant. Enfin il est possible, dans le cas de xénotransplantations cellulaires déterminées, de recourir à des cellules et à des lignées cellulaires cultivées et multipliées en laboratoire. L'avantage est double: d'une part, les animaux sont moins mis à contribution et, d'autre part, le risque d'infection est restreint par le fait qu'avant la transplantation les cultures de cellules et les lignées cellulaires peuvent faire l'objet d'un examen plus approfondi quant à la présence d'agents pathogènes, que ce n'est le cas pour des tissus fraîchement prélevés sur un animal.

Depuis le début des années 90, plus de 500 patients à travers le monde ont été traités par xénotransplantation cellulaire, dans le cadre d'études cliniques, autrement dit de travaux de recherche (cf. annexe A4). C'est dans le traitement de trois catégories de maladies que les connaissances acquises cliniquement sont les plus vastes, à savoir: ­

le traitement du diabète par la xénotransplantation de cellules des îlots de Langerhans;

­

le traitement de pathologies du système nerveux central, notamment de la maladie de Parkinson par la transplantation dans le cerveau de cellules nerveuses issues de foetus de porcs; ainsi que

­

le traitement de l'insuffisance hépatique aiguë au moyen d'un dispositif de stimulation artificielle du foie, extérieur au patient, qui contient des cellules hépatiques de porc et au travers desquelles circule le sang, respectivement, le plasma du patient.

Dans ce contexte, il convient enfin de mentionner la thérapie dite «par cellules fraîches». On entend par là un traitement développé vers 1930 par le médecin suisse Paul Niehans (1882­1971), dans lequel des cellules vivantes d'origine animale sont extraites, la plupart du temps d'organes d'embryons ou de foetus, puis implantées sur l'être humain. Cette suspension cellulaire contient, outre des cellules entières, des fragments de cellules et des protéines, ainsi que d'autres antigènes. La thérapie par cellules fraîches est utilisée pour un grand nombre d'indications, mais des études cliniques contrôlées manquent encore aujourd'hui pour prouver son efficacité. C'est pourquoi cette méthode est controversée et rejetée par les organisations professionnelles médicales. Dans le nombre susmentionné de 500 patients qui ont été traités par xénotransplantation cellulaire ne sont pas comprises les personnes auxquelles on a appliqué la thérapie par cellules fraîches.

41

1.1.2.4

La xénotransplantation en Suisse et au niveau international

La xénotransplantation d'organes fait l'objet de recherches aux quatre coins du monde. Dans ce domaine, les Etats-Unis sont à la pointe. Outre les universités qui pratiquent la recherche en matière de xénotransplantation sur une grande échelle, plusieurs entreprises de biotechnologie se sont spécialisées dans les xénotransplantations, qui ont le plus souvent leur siège à proximité des centres universitaires de xénotransplantation. Au sein de l'Europe, c'est la Grande Bretagne, la France et l'Allemagne qui comptent les groupes de recherche les plus importants.

Depuis le début du 20e siècle, on a pratiqué dans le monde quelque 50 xénotransplantations d'organes sur des êtres humains, la plupart au cours des années 60 et les plus récentes en 1992 (Pologne) et 1996 (Inde). En Suisse aucune xénotransplantation d'organes n'a été effectuée jusqu'ici. Hormis une seule patiente qui a survécu près de neuf mois à la greffe de deux reins de chimpanzé, aucun receveur n'a survécu plus de 70 jours à la transplantation d'un organe de singe. En outre, chaque fois que l'on a transplanté des organes d'animaux autres que les singes, en particulier les porcs, les receveurs ont survécu un jour au maximum. Depuis le milieu des années 90, il existe, toutefois, des porcs transgéniques, dont les organes peuvent, à certaines conditions, être transplantés sans provoquer une réaction de rejet hyper aiguë. Jusqu'ici, des organes prélevés sur de tels porcs ont fait l'objet de plusieurs centaines de transplantations sur des singes, mais jamais encore sur l'homme. En 1999, aux Etats-Unis, deux patients souffrant d'une insuffisance hépatique aiguë ont subi une perfusion extracorporelle à base de foies prélevés sur des porcs transgéniques. Ce traitement leur a permis de survivre jusqu'à ce que l'on puisse leur transplanter un foie d'origine humaine.

En matière de xénotransplantation de cellules, les scientifiques ont acquis une expérience assez riche. Aux Etats-Unis, plusieurs études cliniques de moindre envergure sont en cours. Elles portent sur le traitement du diabète par transplantation de cellules porcines des îlots de Langerhans ainsi que de maladies du système nerveux central par transplantation de cellules nerveuses issues de foetus de porcs. Au nombre de ces affections figurent la maladie de Parkinson, l'apoplexie, les
douleurs chroniques et l'épilepsie. Par ailleurs on projette actuellement de mener des études sur le traitement de la maladie de Huntington et des lésions de la moelle épinière. En outre, aux Etats-Unis comme en Europe, on mène aujourd'hui des études cliniques sur l'emploi de dispositifs bio-artificiels de stimulation du foie en cas d'insuffisance hépatique aiguë. Ces appareils extracorporels contiennent des cellules hépatiques de porcs au travers desquelles circule ­ comme dans un appareil de dialyse ­ le sang du patient. En Suisse également quelques études cliniques relatives à la xénotransplantation de cellules ont été menées à Lausanne et à Bâle. A Lausanne, elles ont porté sur le traitement des douleurs chroniques chez les personnes atteintes du cancer ainsi que sur la thérapie de la pathologie nerveuse appelée «sclérose latérale amyotrophique». A Bâle, on a expérimenté, dans le cadre de projets de thérapie génique, l'utilisation d'une lignée cellulaire (les cellules VERO, issue de singe). D'autres études cliniques sont en préparation. Les cellules d'origine animale utilisées à Lausanne sont conditionnées dans des capsules semi-perméables afin d'empêcher le

42

passage dans l'organisme du receveur d'agents pathogènes que contiendrait le transplant.

1.1.3

La médecine de transplantation en Suisse

1.1.3.1

Transplantation d'organes d'origine humaine

Il y a plus de 35 ans que la transplantation d'organes est pratiquée en Suisse. C'est en 1964 qu'a eu lieu à l'hôpital universitaire de Zurich la première transplantation d'un rein prélevé sur une personne décédée. Elle fut suivie, en 1966, de la première greffe d'un rein provenant d'un donneur vivant (cf. Rétrospective historique figurant à l'annexe A8). Aujourd'hui, on pratique couramment des transplantations du coeur, du foie, des poumons, des reins et du pancréas (organe entier) dans les six centres de transplantation, à savoir Bâle, Berne, Saint-Gall, Genève, Lausanne et Zurich (cf.

annexe A3 tableau 1).

Depuis 1986, 4989 organes ont été transplantés en Suisse. Le nombre annuel des transplantations d'organes est passé de 268 en 1988 à 402 en l'an 2000, ce qui représente quelque 59 transplantations par million d'habitants. En comparaison internationale, la Suisse se situe ainsi au milieu du tableau avec la Norvège, la Suède et le Portugal, mais nettement derrière le peloton de tête composé de l'Espagne, de l'Autriche et des Etats-Unis qui enregistrent chacun plus de 80 transplantations par année et par million d'habitants.

Depuis le début des années 90, le nombre des transplantations des reins et du coeur a tendance à stagner, même à régresser certaines années. En revanche, on constate une nette augmentation du nombre des transplantations de reins prélevés sur des donneurs vivants, ainsi que du foie et des poumons. Le nombre des transplantations de l'ensemble rein/pancréas est, quant à lui, en régression depuis 1994 (cf. annexe A3 tableau 2). Dans l'ensemble, l'évolution enregistrée en Suisse correspond grosso modo à celle que l'on note généralement dans les autres pays. Au niveau de la fréquence des transplantations d'organes, celles de reins (y compris de reins prélevés sur des donneurs vivants) arrive en tête (250 opérations par année, soit quelque 60 % de l'ensemble des transplantations pratiquées). Chaque année, par million d'habitants, on enregistre en Suisse 26,9 transplantations de reins prélevés sur des personnes décédées et 9 transplantations de reins provenant de donneurs vivants.

Ces chiffres sont supérieurs à la moyenne européenne (22,7 et 3,3 transplantations par million d'habitants, respectivement). Les reins sont aussi les seuls organes qui soient transplantés dans les six
centres ad hoc que compte la Suisse. Depuis le début des années 90, on constate que la transplantation de reins prélevés sur des donneurs vivants prend une importance croissante. Sur les 265 reins transplantés en Suisse en l'an 2000, 12 provenaient de l'étranger.

Depuis 1992, le nombre des coeurs transplantés en Suisse est inférieur à celui des foies. En l'an 2000, on a pratiqué en Suisse 38 transplantations du coeur, ce qui correspond à 9,2 % de l'ensemble des transplantations d'organes. Avec 6,7 transplantations du coeur par million d'habitants, la Suisse se situe au-dessus de la moyenne européenne (4,5). En l'an 2000, deux des coeurs transplantés provenaient de l'étranger.

43

En 2000, 77 transplantations du foie au total (19 % de l'ensemble des transplantations d'organes) ont été réalisées dans les centres spécialisés de Berne, Genève, Lausanne et Zurich. Avec 11 transplantations du foie par million d'habitants, la Suisse se situe légèrement au-dessus de la moyenne européenne (8,9). En l'an 2000, 8 foies prélevés sur des donneurs vivants ont été transplantés, dont deux selon la technique du «split liver» et un selon la technique dite «des dominos»5. La même année, neuf des 77 foies transplantés provenaient de l'étranger.

En l'an 2000, 24 transplantations de poumons (soit à peine 6 % de l'ensemble des transplantations) ont été pratiquées en Suisse, dont quinze à Zurich, quatre à Genève et cinq à Lausanne. Avec 4,6 transplantations de poumons par million d'habitants, la Suisse se situe au-dessus de la moyenne européenne (1,6). Si en 1999, six des 32 poumons transplantés avaient été acquis à l'étranger, en l'an 2000, en revanche, tous les poumons transplantés provenaient de Suisse.

En 1999, le centre de Genève a procédé à une multitransplantation: le foie, le pancréas, le rein et l'intestin grêle d'un donneur ont été greffés sur une receveuse.

1.1.3.2

Transplantation de tissus et de cellules d'origine humaine

Outre les transplantations d'organes, on pratique couramment en Suisse la greffe de certains tissus et cellules. Parmi ces derniers, citons, par exemple, la peau, la cornée, le cartilage et les cellules souches du sang. Dans le monde, il n'existe que quelques centres spécialisés également dans la transplantation de cellules des îlots de Langerhans. La Suisse en compte deux: celui de Genève et celui de Zurich. De 1990 à 2000, le nombre des transplantations de moelle osseuse6 est passé, en Suisse, d'une bonne centaine en 1990 à plus de 350 en l'an 2000 (cf. annexe A3 tableau 2). Sur les 374 transplantations de moelle osseuse pratiquées en l'an 2000, 264 (71 %) étaient autogènes et 110 (29 %) allogènes. Des transplantations allogènes de moelle osseuse ont été réalisées à Bâle, Genève et Zurich. Quant aux transplantations autogènes, elles ont été pratiquées à Aarau, Bâle, Bellinzona, Berne, Genève, Lausanne, Saint-Gall et Zurich, le nombre d'entre elles variant de 4 (Genève) à 85 (hôpital universitaire de Zurich) selon les centres. En l'an 2000, les cellules souches provenaient de cellules souches du sang tirées de la circulation périphérique dans 99 % 5

6

44

La polyneuropathie amyloïdique est une maladie rare pour laquelle la transplantation du foie est indiquée. Le foie qui a été retiré à un patient atteint de cette maladie peut, cependant, être transplanté sur une personne souffrant d'une cancer hépatique. Ces transplantations en chaîne sont appelées «transplantations selon la technique des dominos».

Aujourd'hui la notion de «transplantation de moelle osseuse» est remplacée par celle de «transplantation de cellules souches hématopoïétiques», notion qui couvre la transplantation de moelle osseuse, la transplantation de cellules souches du sang périphérique, la transplantation de cellules souches du sang ombilical, enfin la transplantation de cellules souches hématopoïétiques prélevées sur le foie d'un foetus. Les cellules souches hématopoïétiques proviennent de donneurs vivants et se prêtent à la transplantation tant autogène qu'allogène. Dans le cadre de la transplantation allogène de cellules souches hématopoïétiques, on établit une distinction entre les donneurs selon qu'ils sont parents du receveur ou non.

des transplantations autogènes. Dans le cas des transplantations allogènes, ce taux s'établissait à 35 %. Ajoutons que durant la période 1997/1998, deux transplantations de cellules souches du sang ombilical ont eu lieu, pour la première fois. Depuis lors, on n'a plus utilisé ce genre de cellules. Dans ce domaine, on note, en outre, une tendance à répéter les transplantations plusieurs fois.

1.1.3.3

Liste d'attente

Le 1er janvier 2001, 468 patients étaient inscrits sur la liste d'attente de SwissTransplant (cf. annexe A3 tableau 7), soit 13 de moins qu'à la même époque de l'année précédente. Parmi ces personnes, 362 attendaient un rein, 20 un coeur, 12 un poumon, 29 un pancréas ou des îlots de Langerhans et 45 un foie. Il s'agit en l'occurrence essentiellement d'adultes. Mais le 1er janvier 2001, la liste comportait trois enfants.

En l'an 2000, 50 patients, dont un enfant, enregistrés sur la liste d'attente de SwissTransplant sont décédés avant d'avoir pu subir la transplantation dont ils avaient besoin.

1.1.3.4

Nombre de donneurs

En Suisse, l'effectif des donneurs d'organes oscille aux alentours d'une centaine depuis des années (cf. annexe A3 tableau 5). Avec 14,4 donneurs par million d'habitants en 1999, la Suisse figurait dans le peloton du milieu des Etats européens (cf. annexe A2 tableau 3). Depuis 1989, la proportion des dons multiples d'organes a nettement augmenté, atteignant, en 1999, le pourcentage record de 87,1 % en comparaison tant nationale qu'internationale. Durant la période 1992­2000, la proportion moyenne des personnes disposées à donner plusieurs organes s'est établie à 78 %, en Suisse.

La répartition des donneurs entre les trois régions linguistiques du pays fait ressortir que, proportionnellement au chiffre de sa population, la Suisse italienne présente ­ et de loin ­ la plus forte proportion de donneurs (cf. annexe A3 tableau 6): alors qu'en Suisse italienne le nombre de donneurs est passé de 17 personnes par million d'habitants en 1996 à 37 personnes par million d'habitants en l'an 2000, durant la même période la propension au don d'organes a stagné tant en Suisse alémanique (12 personnes par million d'habitants) qu'en Suisse romande (17 personnes par million d'habitants). Il convient d'ailleurs de noter que ces trois dernières années, les habitants de la Suisse italienne ont fait montre d'une propension au don d'organes hors du commun sur le plan international et à peu près équivalente à celle des Espagnols.

45

1.1.3.5

Organisation

1.1.3.5.1

SwissTransplant

La Fondation suisse pour le don d'organes et la transplantation, SwissTransplant, est née en 1985. SwissTransplant poursuit les objectifs suivants: ­

favoriser, développer et coordonner en Suisse la transplantation d'organes, de tissus et de cellules;

­

coordonner les activités des six centres de transplantation suisses et constituer des fichiers de donneurs et de receveurs d'organes;

­

promouvoir le don d'organes et de tissus auprès du public et des professionnels de la santé;

­

favoriser la collaboration avec les organismes internationaux officiels de transplantation.

L'organe suprême de SwissTransplant est le conseil de fondation. Lui sont subordonnées l'administration et la centrale de coordination nationale créée en 1992. A l'exception des groupes de travail STATKO et STAX qui sont compétents, le premier pour la coordination et le second pour la xénotransplantation, chaque groupe de travail a en charge un type d'organe ou de tissu (p. ex. moelle osseuse) transplanté en Suisse. Les groupes de travail se composent de médecins des centres de transplantation. Ils règlent les problèmes médicaux ainsi que l'attribution des organes.

Outre les groupes de travail et la centrale de coordination nationale, un Comité médical (organe spécialisé dans les questions médicales) est subordonné au Conseil de fondation. Composé de représentants des centres de transplantation, ce comité a pour mission de coordonner les activités des centres ainsi que de résoudre des problèmes d'ordre médical. SwissTransplant publie chaque année un rapport d'activités.

La centrale de coordination nationale a été créée afin d'améliorer la répartition des organes en Suisse. Son mandat est de recenser les organes à disposition et de les répartir entre les différents centres de transplantation en Suisse et à l'étranger. En 2000, la centrale a fourni un total de 336 organes aux centres de transplantation suisses. Des organes ne sont proposés à l'étranger que si aucun receveur adéquat n'est trouvé en Suisse.

SwissTransplant s'emploie depuis des années à sensibiliser la population suisse au don d'organes, par exemple par la distribution de brochures et de cartes de donneur.

En 1994, elle a lancé une campagne nationale d'information visant à promouvoir le don d'organes. Le 11 septembre 1994 a été déclaré Journée nationale du don et de la transplantation d'organes. Une enquête représentative, menée en 1995, a révélé que la transplantation d'organes était bien acceptée par la population7. Le nombre de personnes favorables à la transplantation d'organes est toutefois en régression (1993 80 %, 1994 77 %, 1995 73 %). Par contre, le nombre de cartes de donneur distribuées est resté stable (1994 11 %, 1995 10,2 %), alors que celui des personnes dési7

46

Gutzwiller F., Schilling M., Einstellung zur Organtransplantation in der Schweiz, Bulletin des médecins suisses 1996, p. 2079.

reuses d'en obtenir une a nettement augmenté, passant de 18,7 % à 22,1 %. Les détenteurs d'une carte de donneur sont donc relativement peu nombreux par rapport aux personnes qui se déclarent favorables à la transplantation.

1.1.3.5.2

Registre suisse de donneurs de moelle osseuse

Le registre suisse des donneurs de moelle osseuse a été créé en 1988 sur décision du groupe de travail «Transplantations de moelle osseuse» de SwissTransplant. Suivit, en 1993, la création de la Fondation du registre suisse des donneurs de moelle osseuse. Enfin, c'est en 1997 qu'a débuté la mise sur pied d'une banque des cellules souches tirées du sang ombilical.

Le registre suisse des donneurs de moelle osseuse assume les tâches suivantes: ­

administration du registre national des donneurs de cellules souches de la moelle osseuse ainsi que de sang du cordon ombilical;

­

recherche de donneurs non parents ainsi que de sang du cordon ombilical en Suisse et à l'étranger;

­

participation à l'organisation des tests de compatibilité tissulaire et des transplantations de cellules souches ou de sang du cordon ombilical;

­

coordination de la collaboration internationale.

Le registre suisse des donneurs de moelle osseuse collabore avec le groupe de travail «Blood and Marrow Transplantation» de SwissTransplant (STABMT), le laboratoire national de référence pour les problèmes de compatibilité histologique ainsi qu'avec les centres de transplantation de Bâle, Genève et Zurich. Les donneurs de moelle osseuse sont recrutés en étroite collaboration avec les centres régionaux de transfusion sanguine (cf. annexe A3 tableau 9). En Suisse, l'effectif des donneurs de moelle osseuse enregistrés n'a cessé de croître depuis 1988 pour atteindre plus de 17 000 personnes à fin 2000 (cf. annexe A3 tableau 8). En l'an 2000, la Suisse comptait 23,9 donneurs enregistrés pour 10 000 habitants, chiffre qui la classait au milieu du tableau des Etats européens. Avec 174,6 donneurs pour 10 000 habitants, l'Allemagne est en tête du classement. La Grande Bretagne (72,8) arrive en seconde position, suivie par l'Autriche (57,7). A fin 2000, 17 440 donneurs de moelle osseuse étaient enregistrés en Suisse, dont 15 956 (91,7 %) étaient typisés. Cette typisation tissulaire est très coûteuse mais importante car seuls des registres contenant des données complètes permettent une recherche efficace et rapide d'un donneur approprié. La majorité des registres des autres pays présentent un taux de typisation des tissus inférieur à celui du registre suisse.

La Fondation du registre suisse des donneurs de moelle osseuse travaille en étroite collaboration avec les organismes européens et internationaux oeuvrant dans ce domaine.

Cette collaboration est très importante parce que, à la différence de ce qui vaut pour les autres transplants, la compatibilité tissulaire doit être très élevée s'agissant de la moelle osseuse. De ce fait, la probabilité de trouver un donneur approprié est plus forte lorsque l'on a à disposition un très grand collectif. Grâce à cette bonne collaboration internationale, la Suisse a aujourd'hui accès aux registres étrangers qui recensent plus de 6,2 millions de donneurs potentiels aux quatre coins du monde. De 1988 à 2000, le registre

47

suisse a traité plus de 26 000 demandes internationales de recherche d'un donneur provenant de l'étranger. En l'an 2000, 69 recherches ont été effectuées pour des patients suisses et 3925 pour des patients étrangers.

Depuis 1988, le laboratoire central de transfusion sanguine de la Croix Rouge Suisse assume la moitié des frais de personnel et des coûts d'exploitation du registre suisse.

L'autre moitié est couverte par des crédits accordés par des compagnies d'assurance au titre de la participation aux frais. Toutefois, à la suite de la vente, au cours de l'automne 2000, du laboratoire central susmentionné qui est devenu ZLB Bioplasma SA, la situation financière s'est modifiée et les modalités du financement ultérieur desdits travaux sont encore en suspens.

1.1.3.5.3

Registre de donneurs vivants

A l'heure actuelle, SwissTransplant n'a aucun contrôle des activités de transplantation d'organes prélevés sur des donneurs vivants. Dans le domaine des transplantations rénales, il existe un registre suisse des donneurs vivants de reins8. Fondé en avril 1993, ce registre est le premier de ce type dans le monde. Il s'est assigné les objectifs suivants: ­

assurer un recensement clair de l'ensemble des donneurs vivants de reins en Suisse;

­

enregistrer dans un but prospectif toutes les complications et la fréquence à laquelle elles se produisent;

­

reconnaître suffisamment tôt les complications qui pourraient apparaître ultérieurement chez le donneur (p. ex. hypertension, micro albuminurie) pour que l'on puisse intervenir à temps;

­

fournir aux donneurs potentiels des données objectives sur la situation en Suisse;

­

empêcher une commercialisation des organes provenant de donneurs vivants.

Depuis 1993, les centres de transplantation que compte la Suisse informent à bien plaire le registre des dons de reins qui ont été effectués par des personnes vivantes.

A fin 2000, 401 personnes étaient enregistrées dans ce registre. Le registre suisse des donneurs vivants de reins recense non seulement des informations sur le donneur (nom, adresse, médecin de famille) mais encore, systématiquement, des données médicales dûment sélectionnées (p. ex. pression sanguine; teneur en créatinine)9. Le premier examen qui précède le don est effectué par le centre de transplantation lui-même. A compter du début de la deuxième année, ce sont généralement les médecins de famille qui s'en chargent. Le registre envoie aux donneurs, au moment opportun, les documents idoines accompagnés du matériel d'examen néces8

9

48

Ce registre est administré à titre honorifique par le professeur Gilbert Thiel. Avant d'accéder au titre de professeur émérite le 31 juillet 1999, le professeur Thiel a assumé la direction médicale de la division de néphrologie et de médecine de transplantation de l'hôpital cantonal de Bâle.

La définition de la teneur en créatinine sert à contrôler le fonctionnement des reins.

saire. Les donneurs se rendent ensuite avec le matériel chez le médecin de leur choix. Les donneurs font l'objet d'un examen médical 1 an, 3, 5, 7, 10 ans après le don, puis tous les deux ans. Les analyses de laboratoire sont centralisées à Bâle pour l'ensemble de la Suisse et effectuées gratuitement. Si un problème de santé survient chez le donneur sans que celui-ci s'en aperçoive (p. ex. augmentation de la pression artérielle ou albuminurie), la direction du registre en informe le donneur et son médecin de famille et leur conseille d'entreprendre un traitement.

Le fonctionnement du registre repose, dans une large mesure, sur des bénévoles ou des personnes exerçant des fonctions à titre honoraire.

Un tel registre n'existe ni pour les poumons, ni pour le foie, ni pour le pancréas, ni pour l'intestin grêle, organes qui, pourtant, peuvent, aujourd'hui, être prélevés sur des donneurs vivants. Les spécialistes qui pratiquent la transplantation estiment qu'il est nécessaire d'introduire en Suisse un registre des donneurs vivants de foie, de poumons et d'intestin grêle. Par ailleurs, on étudie actuellement la faisabilité d'un «registre général des donneurs vivants d'organes».

Allant dans le même sens que les démarches susmentionnées entreprises en Suisse, l'American Society of Transplant Surgeons (ASTS), par exemple, a décidé, en été 2000, de mettre sur pied un registre national des donneurs vivants de foie dans le but de mieux identifier les risques médicaux que présentent ces donneurs.

1.1.3.6

Coût des transplantations

En 1999, le coût des transplantations s'est élevé au total à 137,4 millions de francs10. Ce coût se répartit entre la phase de transplantation proprement dite (79,4 millions de francs ou 58 %) et la phase de traitement postérieure (58 millions de francs ou 42 %). Les coûts afférents à la phase de transplantation ont été pris en charge à raison de 39,4 millions de francs par les cantons et du solde (40 millions) par les assureurs maladie (cf. annexe A5). Pour les 634 transplantations pratiquées en l'an 2000, les coûts afférents à la phase de transplantation proprement dite ont été supportés à raison de 36 millions de francs par les assureurs maladie.

En 1999, près de 75 % du coût total des transplantations étaient imputables à celles des reins (53,2 millions de francs) et à celles des cellules souches (47,8 millions de francs). Les transplantations du coeur, des poumons et du foie étant moins fréquentes ­ quand bien même elles sont plus onéreuses qu'une transplantation rénale ­ les dépenses qu'elles engendrent sont plus faibles (35,3 millions de francs; 25 % du coût total).

Une transplantation de reins est moins onéreuse que la dialyse. Le montant total des coûts d'une telle transplantation s'élève entre environ 35 000 à 60 000 francs. Le montant annuel des coûts afférents à la phase de traitement postérieure à l'opération, qui sont à la charge des assureurs, s'élève à quelque 15 000 francs, alors que, dans le 10

Rapport d'activité 1999 de la Fédération suisse pour tâches communes des assureursmaladie (SVK). Les coûts mentionnés n'englobent pas tout à fait la totalité des transplantations, le montant total ne reflétant que les charges supportées par les assureurs maladie affiliés à la SVK.

49

cas d'une hémodialyse permanente, il est estimé à quelque 78 000 francs. Les coûts des pompes cardiaques artificielles se composent du prix d'achat (60 000 à 80 000 fr.), des coûts journaliers fixes et des frais divers (opération, honoraires, diagnostic, médicaments). Pour les pompes cardiaques artificielles externes, les coûts journaliers des soins prodigués au patient et d'entretien de la pompe oscillent entre 4000 et 5500 francs. En ce qui concerne les pompes cardiaques artificielles internes, les coûts s'élèvent à 1200 francs. La durée d'utilisation des pompes artificielles varie de quelques jours à plusieurs semaines. Le montant total d'une transplantation du foie se chiffre à environ 100 000 à 120 000 francs. Il s'établit à environ 115 000 à 145 000 francs pour les poumons et à environ 95 000 à 120 000 francs pour l'ensemble rein/pancréas. Enfin il oscille entre 210 000 et 330 000 francs pour une transplantation allogène de moelle osseuse. Ces montants ne comprennent pas les coûts du traitement postérieur à l'opération, notamment ceux des immunosuppresseurs qui doivent être administrés au receveur pour prévenir une réaction de rejet. A noter qu'en matière de transplantation de moelle osseuse les coûts sont occasionnés pour une part prépondérante, par la recherche d'un donneur approprié.

1.1.4

Thérapies alternatives

Aujourd'hui, la transplantation est reconnue comme étant la thérapie la plus appropriée au traitement des insuffisances d'organes au stade terminal ainsi que de certaines formes de cancer chez les adultes et chez les enfants. Elle est pratiquée lorsque les autres thérapies ne sont pas applicables ou font défaut. Ces dernières années, le nombre de pathologies pour lesquelles une transplantation est indiquée s'est accru, ce qui n'a fait que renforcer la pénurie d'organes.

On tente actuellement d'y remédier en menant des recherches intensives. Outre le recours à des organes artificiels, des mesures de prévention ou des interventions chirurgicales peuvent être de nature à pallier, dans une certaine mesure, la pénurie d'organes. Dans l'état actuel de la médecine, les solutions thérapeutiques décrites ci-après ne constituent pas, à long terme, une véritable alternative en cas de défaillance irréversible d'un organe. A moyenne échéance, il faut donc s'attendre à ce que la pénurie d'organes perdure.

1.1.4.1

Prévention

La défaillance chronique d'un organe peut avoir diverses origines. Elle peut être d'origine héréditaire ou inflammatoire. Elle peut aussi être causée par certains comportements des patients. On sait, par exemple, que l'abus de médicaments peut provoquer des maladies rénales et que la consommation abusive d'alcool drogues peut entraîner des affections hépatiques. Les insuffisances rénales, en particulier, peuvent aussi être la conséquence d'autres maladies telles que l'hypertension artérielle ou le diabète mellitus.

Une vulgarisation bien ciblée des connaissances sur les comportements dommageables pour les organes ou encore une information sur l'importance que revêt un 50

traitement optimal des pathologies de base peuvent contribuer à empêcher que des dommages ne soient causés aux organes lorsqu'ils peuvent être évités.

1.1.4.2

Traitement pharmacologique

Le diabète de type I est dû à la destruction des cellules productrices d'insuline des îlots de Langerhans (pancréas). Cette maladie se traite depuis des décennies par des injections d'insuline. Dans la mesure où les injections sont correctement dosées, l'espérance de vie des personnes atteintes du diabète n'est pas trop restreinte. Dans quelques cas, cependant, le taux de glycémie ne peut être qu'imparfaitement contrôlé, d'où l'impossibilité d'empêcher l'apparition de telles séquelles. A l'heure actuelle, la mise au point de nouveaux modes d'administration de l'insuline (par voie buccale ou nasale et par inhalation) fait l'objet d'intenses efforts de recherche.

De l'insuline inhalable, en particulier, devrait être disponible sous peu.

Pour ce qui est des autres affections d'organes, un traitement médicamenteux peut souvent être efficace durant la phase initiale de la maladie (p. ex. digoxine en cas d'insuffisance du myocarde). Toutefois, si la maladie évolue, les médicaments peuvent, à un stade donné, ne plus avoir une efficacité suffisante pour assurer le fonctionnement de l'organe. En pareille occurrence, il peut être vital de procéder à une transplantation.

1.1.4.3

Intervention chirurgicale

Dans certains cas, une intervention chirurgicale autre que la transplantation peut constituer une solution de rechange valable. Ainsi, au lieu de transplanter un coeur à des personnes qui souffrent de graves malformations des valvules cardiaques on peut très bien envisager de remplacer celles-ci.

Un cardiologue brésilien a mis au point une nouvelle méthode chirurgicale destinée aux patients souffrant d'une grave insuffisance cardiaque et d'une hypertrophie des ventricules. Depuis 1995, il a procédé sur le coeur hypertrophié et très faible de plus de 90 patients à l'ablation d'un lambeau d'environ 120 grammes, puis recousu l'organe dont les dimensions ont été ainsi réduite. Cette intervention permet d'atténuer la tension des cloisons cardiaques, d'augmenter la puissance de pompage, enfin de réduire le besoin d'énergie du coeur. Un autre procédé visant les mêmes effets a été appliqué pour la première fois en avril 1999: il consiste à entourer le coeur malade et hypertrophié d'un filet en polyester. Jusqu'à présent, une trentaine de patients ont bénéficié de cette thérapie.

1.1.4.4

Organes artificiels

Le recours aux appareils médicaux (medical devices) permet de pallier les dysfonctionnements du coeur, des poumons, du foie et des reins. A l'exception de la dialyse, ces dispositifs ne constituent pas une solution alternative car ils ne peuvent suppléer

51

l'organe déficient que pendant une période limitée, à savoir jusqu'à ce qu'un autre organe d'origine humaine puisse être transplanté ou que l'organe déficient se soit régénéré.

Pour les patients qui ont été victimes d'une défaillance cardiaque et dont le coeur est trop faible pour pomper le sang dans tout l'organisme, il existe aujourd'hui le coeur artificiel ou le stimulateur cardiaque, appareils qui permettent de remédier temporairement aux insuffisances cardiaques jusqu'à ce qu'un coeur approprié soit disponible pour la transplantation. Plusieurs chercheurs oeuvrent intensément à la mise au point de pompes sanguines de différentes conceptions. Une entreprise allemande, par exemple, développe actuellement un coeur artificiel destiné à être implanté en permanence. Toutefois, il ne remplacera pas le coeur malade du patient mais stimulera son fonctionnement. Il fera l'objet d'essais cliniques ces prochains mois. Quant à la pompe, fonctionnant par induction de courant depuis l'extérieur, elle n'a plus besoin d'être alimentée au travers de la paroi abdominale. Sont également en cours de développement des «pompes axiales» qui assurent un flux continu et régulier du sang et non une circulation par saccades. En 1998, un appareil similaire, actionné par une turbine, qui a été développé par un spécialiste américain de la chirurgie cardiaque, a été implanté sur un patient de 56 ans au Centre de transplantation cardiaque de Berlin. Il s'agissait là d'une première mondiale.

Quel que soit le type de pompe, l'objectif est d'atteindre un degré de miniaturisation qui permette d'implanter sans difficultés l'appareil dans la cage thoracique ou la cavité abdominale de manière à permettre au patient de jouir d'une liberté de mouvement totale. Parviendra-t-on un jour à remplacer définitivement le coeur naturel du patient par un coeur artificiel qui serait intégralement implanté dans la cage thoracique? Rien ne permet de l'affirmer, aujourd'hui pas plus qu'hier.

Les poumons humains sont dotés d'innombrables alvéoles qui permettent les échanges gazeux sur une surface de quelque 180 mètres carrés. Si l'on voulait reconstituer artificiellement ce système, il faudrait développer un appareillage trop peu pratique et encombrant. On a donc mis au point un dispositif de fibres creuses, qui peut être implanté dans les veines
et qui permet une alimentation directe en oxygène. Ce dispositif d'oxygénation intraveineuse ne peut être utilisé que pour pallier temporairement une déficience pulmonaire. A l'avenir, la recherche devra tendre à développer des systèmes qui constituent une alternative permanente à la transplantation chez les patients souffrant d'une affection pulmonaire chronique.

Une dialyse extracorporelle recourant à de cellules d'origine humaine ou animale peut être appliquée temporairement à des patients souffrant d'une insuffisance hépatique aiguë. L'an dernier, des chercheurs autrichiens ont mis au point un nouveau système de stimulation du foie: l'appareil MDS (Microspheres Based Detoxification System). Il s'agit d'un système extracorporel de dialyse basé sur la technologie combinée des membranes et de l'adsorption. Le sang prélevé chez les patients est séparé en plasma, d'une part, et cellules, d'autre part, au moyen d'un filtre à plasma.

Une fois purifié, le plasma est refiltré dans le même filtre à plasma que les cellules pour être ensuite réinjecté dans l'organisme des patients.

Différentes thérapies peuvent être appliquées en cas de défaillance de la fonction rénale. Dans ce domaine, l'hémodialyse et la dialyse péritonéale constituent des alternatives à la transplantation. L'hémodialyse consiste à purifier le sang au moyen

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d'un «rein artificiel». Les substances qui doivent être éliminées par voie urinaire sont artificiellement évacuées du système circulatoire du patient. Cette thérapie ambulatoire doit, généralement, être pratiquée trois fois par semaine et, chaque fois, pendant plusieurs heures. En dialyse péritonéale, le liquide est évacué plusieurs fois par jour dans la cavité abdominale grâce à un cathéter. En l'occurrence le péritoine fait fonction de filtre des substances à éliminer par excrétion urinaire. Il existe plusieurs formes de dialyse péritonéale. La dialyse péritonéale ambulatoire continue (DPAC) est aujourd'hui la forme la plus répandue dans le monde, car elle n'exige pas d'appareil et peut donc être pratiquée par les patients eux-mêmes que ce soit à leur domicile, au travail ou en vacances.

Même lorsque la dialyse permet de suppléer efficacement à une insuffisance rénale, une transplantation de reins peut être indiquée car les patients sous dialyse voient leur qualité et même parfois leur espérance de vie notablement restreintes. En outre, la transplantation est une thérapie plus économique que la dialyse à vie. La transplantation rénale lorsqu'elle est réussie, constitue sans doute la meilleure thérapie de la déficience des reins.

1.1.5

Situation juridique actuelle

1.1.5.1

Aperçu

Faute de disposition expresse dans la Constitution fédérale (RS 101), le législateur était, il y a peu de temps encore, dans l'incapacité de réglementer globalement le prélèvement et la transplantation d'organes, de tissus et de cellules. En conséquence, ce sont essentiellement les cantons qui ­ en vertu de leur compétence générale de légiférer en matière de santé ­ ont réglementé ces activités (cf. ch. 1.1.5.2). De son côté ­ et depuis les années soixante ­ l'Académie suisse des sciences médicales (ASSM) a, en outre, édicté des directives applicables à la médecine de transplantation (cf. ch. 1.1.5.3).

A l'échelon fédéral, plusieurs dispositions sont pertinentes au regard de ladite médecine. Ainsi, l'art. 10 de la Constitution qui statue le droit à la liberté personnelle. Par ailleurs, en droit privé, les art. 27 et 28 (protection de la personnalité) du Code civil (CC; RS 210) jouent un rôle protecteur identique. Certains abus peuvent, en outre, donner lieu à l'application de normes du Code pénal (CP; RS 311.0), par exemple les art. 122 (lésions corporelles) et 181 (contrainte). Enfin, la législation sur l'assurance-maladie qui définit la prise en charge (conditions à remplir et ampleur) des frais médicaux engendrés par les transplantations (cf. ch. 1.1.5.4) remplit en l'occurrence une fonction déterminante.

En 1995, les conseils législatifs ont transmis deux motions (Onken du 7.12.1993 et Huber du 28.2.1994) qui exigeaient une réglementation uniforme de l'utilisation de transplants. La motion Onken demandait l'interdiction de faire le commerce de transplants; quant à la motion Huber elle exigeait l'élaboration au niveau fédéral d'une réglementation exhaustive de la médecine de transplantation.

53

Les compétences conférées alors par la Constitution fédérale étant insuffisantes pour permettre au Conseil fédéral de s'acquitter de ces deux mandats, il a fallu, d'abord, élaborer une base constitutionnelle expresse (cf. ch. 1.1.5.5).

Enfin une réglementation transitoire a été édictée (cf. ch. 1.1.5.6) afin d'assurer dans l'immédiat la protection des patients contre les risques d'infection dans le domaine de la médecine de transplantation.

1.1.5.2

Législations cantonales

En substance, l'état actuel des législations cantonales en matière de médecine de transplantation est le suivant:

54

­

22 cantons disposent d'une législation, mais aucun d'entre eux n'a réglé de manière exhaustive le prélèvement ni la greffe d'organes.

­

Quatre cantons n'ont pas encore élaboré de réglementation spécifique dans ce domaine (GL, SH, SZ, ZG).

­

La plupart des législations cantonales se limitent à régler la question du consentement du donneur et à exiger que le médecin compétent pour le constat du décès ne soit ni membre de l'équipe responsable du prélèvement des organes ni de celle procédant à la transplantation.

­

Les dispositions concernant le consentement du donneur à un prélèvement d'organes diffèrent d'un canton à l'autre et ne règlent pas, sauf dans le Valais et à Fribourg, les cas où il y a conflit entre la volonté du donneur et celle de ses proches parents. Les cantons du Valais et de Fribourg ont adopté une réglementation prévoyant que les proches parents ne peuvent s'opposer au prélèvement d'organes si le défunt y a expressément consenti de son vivant.

­

Le prélèvement d'organes sur des donneurs vivants est réglementé dans huit cantons (AG, BL, FR, GE, NE, SO, TI, VS).

­

Plusieurs législations cantonales (p. ex. AR, BL, BE, LU, OW, SO, TI, ZH) renvoient, soit de manière générale, soit sur des points spécifiques (notamment en ce qui concerne le constat du décès) aux directives de l'ASSM.

­

Les cantons de Bâle-Campagne, de Fribourg et du Valais ont inscrit dans la loi le principe de l'anonymat du donneur et du receveur.

­

Le canton de Genève interdit le commerce d'organes et de tissus d'origine humaine, le canton d'Argovie celui de substances embryonnaires et foetales ainsi que leur exploitation industrielle et commerciale.

­

Les cantons d'Argovie, de Fribourg, de Neuchâtel, du Tessin et du Valais ont statué la gratuité du don d'organes. Les cantons d'Argovie et du Tessin autorisent toutefois une indemnisation du donneur pour ses frais et la perte de gain.

­

Les cantons du Jura, de Fribourg et du Valais ont inscrit dans leur législation le principe selon lequel l'Etat apporte son soutien aux campagnes d'information visant à promouvoir le don d'organes.

­

Aucun canton n'a légiféré sur l'attribution des organes disponibles.

1.1.5.3

Directives de l'Académie suisse des sciences médicales (ASSM)

1.1.5.3.1

Directives médico-éthiques pour les transplantations d'organes

L'ASSM a adopté, pour la première fois, des directives sur ce sujet le 17 novembre 1981. Elle les a remplacées le 8 juin 1995 par les «Directives médico-éthiques pour les transplantations d'organes». Ces nouvelles directives, qui s'inspirent dans une large mesure des principes du Conseil de l'Europe et de l'Organisation mondiale de la santé, règlent le prélèvement d'organes sur les donneurs décédés et sur les donneurs vivants, ainsi que l'attribution de ces organes. Elles statuent qu'un organe peut être prélevé sur une personne décédée, à l'état de mort cardiaque ou cérébrale, pour autant que toutes les conditions légales et jurisprudentielles soient remplies et que la personne décédée ne s'y soit pas expressément opposée de son vivant. Il est possible d'effectuer un prélèvement chez une personne vivante, majeure et capable de discernement à condition qu'elle y ait donné librement son consentement et que son état de santé le permette. En ce qui concerne l'attribution des organes, les directives prévoient que tout patient dont la maladie peut être guérie ou atténuée durablement au moyen d'une transplantation d'organe a droit à la greffe d'un organe devenu disponible. Les organes doivent être attribués sur la base de critères médicaux et conformément aux principes de l'égalité de traitement et de l'équité, principes qui doivent être respectés dans l'ensemble de la Suisse.

1.1.5.3.2

Directives médico-éthiques concernant la transplantation de tissus foetaux humains

Le 3 juin 1998, l'ASSM a adopté des «Directives concernant la transplantation de tissus foetaux humains». Ces directives complètent les «Directives médico-éthiques pour les transplantations d'organes» et traitent exclusivement de la transplantation de tissus foetaux dans le cadre de projets de recherche bien définis. Dans l'introduction, l'ASSM relève que jusqu'à présent cette possibilité thérapeutique n'a été appliquée en Suisse que dans quelques rares cas. Le procédé initial qui consistait à greffer les tissus foetaux prélevés s'est révélé être peu efficace, avant tout en raison du nombre restreint de cellules ainsi récoltées. La culture de cellules in vitro, technique qui a cours aujourd'hui ouvre de nouvelles perspectives. Bien que ces essais thérapeutiques soient encore loin de constituer une pratique courante, l'ASSM est d'avis que les questions fondamentales d'éthique qui se posent en l'occurrence doivent, d'ores et déjà, être évoquées et discutées. Dans le préambule, elle relève que médecins et chercheurs escomptent que la transplantation de tissus foetaux

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humains11 permette un traitement plus efficace de certaines maladies graves. A ce jour, l'expérimentation thérapeutique a porté sur la maladie de Parkinson (transplantation de neurones dopaminergiques d'origine foetale), sur certaines maladies métaboliques héréditaires (transplantations de cellules souches de moelle osseuse et de foie), sur le diabète juvénile (transplantation de cellules pancréatiques) ainsi que sur la rétinite pigmentaire (transplantation de cellules foetales rétiniennes). Les directives soulignent que le fait que le tissu foetal utilisé pour la transplantation provienne d'avortements provoqués est à l'origine du débat fondamental d'ordre éthique et politique qui s'est instauré en la matière. D'aucuns ont, en effet, redouté que le besoin de tissus foetaux à des fins thérapeutiques ne suscite des avortements supplémentaires ou n'offre une légitimation sociale nouvelle à l'interruption de grossesse. Empêcher que la perspective d'une utilisation thérapeutique du tissu foetal n'influence la décision de la femme d'interrompre sa grossesse est l'impératif éthique primordial auquel ces directives cherchent à répondre. Il s'agit d'opérer une stricte séparation entre la décision d'interrompre la grossesse et celle qui concerne l'usage ultérieur du tissu foetal. La femme et le médecin doivent être soustraits à toute influence résultant d'un lien entre ces deux interventions.

Les directives contiennent d'autres normes éthiques. Ainsi, toute transaction commerciale portant sur le foetus, ses organes ou ses cellules est interdite. Une transplantation de tissu foetal ne peut être effectuée que s'il existe une indication étayée par la science médicale. L'intervention doit, en outre, s'insérer dans un projet de recherche qui aura été approuvé par la commission d'éthique compétente. De plus, les membres du personnel médical concerné par les transplantations doivent être informés du projet de recherche et de la nature du tissu, chacun d'entre eux pouvant refuser sa participation sans que ce refus ait des répercussions négatives sur son cursus professionnel.

1.1.5.3.3

Directives sur la définition et le diagnostic de la mort en vue d'une transplantation d'organes

C'est en 1969, que l'ASSM a édicté, pour la première fois, des «Directives sur la définition et le diagnostic de la mort». Au cours des années 80, les progrès réalisés notamment dans l'appareillage, ont rendu leur révision nécessaire. Une version complétée fut donc publiée le 6 mai 1983. Par la suite, la mise au point de nouvelles techniques et d'appareils plus performants a nécessité une nouvelle révision qui a été adoptée le 13 juin 1996 par l'ASSM. Les nouvelles «Directives sur la définition et le diagnostic de la mort en vue d'une transplantation d'organes» proposent des critères purement cliniques censés permettre au médecin de constater avec certitude le décès présumé. Il y a décès en cas d'arrêt cardiaque irréversible ayant pour conséquence l'interruption de l'irrigation sanguine cérébrale (arrêt cardio-circulatoire) ou en cas de défaillance complète et irréversible du cerveau et du tronc cérébral (mort cérébrale). Les étapes et la conduite générale à adopter pour s'assurer du diagnostic 11

56

D'après les directives, cette définition s'applique au tissu pendant la période embryonnaire et foetale. L'embryologie opère une distinction entre la période embryonnaire (de la 2e à la 10e semaine de grossesse) et la période foetale (dès la 11e semaine de grossesse).

sont décrites avec précision. Un protocole pour la constatation de la mort cardio-circulatoire et un autre pour la constatation de la mort cérébrale sont annexés aux directives. Actuellement, une sous-commission de l'ASSM est en train de revoir, une fois encore, les directives de manière à ce qu'elles tiennent mieux compte des problèmes liés à la constatation de la mort chez les personnes atteintes d'un arrêt cardiaque irréversible (non-heart-beating-donors).

1.1.5.3.4

Directives concernant les problèmes éthiques aux soins intensifs

Le 3 juin 1999, l'ASSM a, en outre, édicté les «Directives concernant les problèmes éthiques aux soins intensifs». Elles établissent des principes généraux qui s'adressent avant tout aux personnes qui s'occupent des patients aux soins intensifs.

Les principes éthiques valables pour le traitement d'un patient dans un service de soins intensifs ­ par exemple, le respect de ses droits ainsi que de sa volonté ­ doivent également être respectés lorsque le patient devient un donneur potentiel d'organes. Les questions en relation avec la constatation du décès en vue d'une transplantation d'organes ne sont, en revanche, pas abordées puisqu'il existe des directives distinctes sur le sujet.

Dans le cas où la mort cérébrale apparaît comme inéluctable, les directives concernant les problèmes éthiques aux soins intensifs admettent qu'un minimum de mesures destinées à préserver les organes (p. ex. examens diagnostiques, administration de médicaments vaso-actifs) peuvent être mises en oeuvre jusqu'au prélèvement définitif de ceux-ci. Les directives recommandent, pour des raisons pratiques, d'effectuer le prélèvement d'organes dans les 24 heures qui suivent la constatation de la mort cérébrale. En outre, une personne doit être nommée au sein de l'équipe des soignants en vue d'assister les proches et les tenir informés en permanence.

1.1.5.3.5

Principes médico-éthiques concernant les xénotransplantations

Le 18 mai 2000, le Sénat de l'ASSM a adopté les «Principes médico-éthiques concernant les xénotransplantations». Soulignant à la fois l'impératif de respecter la personnalité de l'être humain et l'aspect de la sécurité biologique, l'ASSM «met le doigt» sur les problèmes d'ordre infectiologique, immunologique et physiologique liés à la xénotransplantation, qu'elle considère comme une «ultima ratio». Pour la phase des essais cliniques, l'ASSM a défini une série de principes médico-éthiques applicable à la phase des essais cliniques.

Ces principes régissent la sécurité biologique, par exemple l'utilisation d'organes, de tissus ou de cellules exempts de germes pathogènes connus, les tests pré- et postopératoires ainsi que les contrôles à court, moyen et long terme à effectuer. La compatibilité physiologique et la survie du xénotransplant doivent, au moins, permettre l'amélioration de la qualité de vie des patients. L'ASSM prévoit également des obligations concernant les animaux ressource: il s'agit, d'une part, d'établir des règles de bonne conduite en matière de production et d'élevage 57

d'animaux exempts d'agents pathogènes connus. Il importe, d'autre part, de préserver la dignité des animaux ressource et de renoncer à l'utilisation de primates en raison du risque plus élevé d'infection qu'ils présentent et des difficultés liées à leur élevage. L'utilisation d'animaux génétiquement modifiés doit être justifiée par une utilité thérapeutique pour l'être humain. Le choix des receveurs doit obéir aux critères suivants: il faut que le patient souffre d'une maladie incurable, et que la xénotransplantation constitue la seule thérapie possible ou qu'il n'y ait pas d'organe d'origine humaine à disposition. La xénotransplantation doit avoir pour but d'améliorer la qualité ou l'espérance de vie du receveur plus sensiblement que toute autre thérapie connue.

Une xénotransplantation ne concerne pas seulement le receveur. Elle touche aussi son entourage, par exemple le ou la partenaire et les enfants. Aussi le receveur doitil consentir expressément à ce que ces personnes de contact soient informées précisément de l'intervention qu'il va subir. Les tests devant être effectués sur l'animal ressource ainsi que sur le receveur et les personnes de contact doivent également être mentionnés dans un protocole. Après la transplantation, plus personne ne doit pouvoir se soustraire aux examens. La création d'un registre de données national est nécessaire pour la surveillance des infections.

Afin d'atténuer les effets de la pénurie d'organes d'origine humaine, il faut prioritairement rechercher et promouvoir des solutions qui permettent d'éviter les xénotransplantations. Au nombre de celles-ci figurent notamment une meilleure information du public, l'organisation d'un service de coordination dans les cliniques, la motivation au don d'organes par des personnes vivantes, l'intensification de la prévention des maladies pour lesquelles une transplantation constitue la seule thérapie durable, enfin, le soutien de la recherche dans tous les domaines ayant un rapport avec les transplantations, qu'elles soient allogènes ou xénogènes.

1.1.5.3.6

Importance des directives de l'ASSM

Les directives de l'ASSM matérialisent le consensus qui prévaut en Suisse parmi les spécialistes d'un domaine. Aussi sont-elles prises très au sérieux par les professionnels de ce domaine. Du point de vue juridique, ces directives n'ont cependant qu'une portée restreinte. En effet, comme elles relèvent de l'éthique professionnelle, elles n'ont force obligatoire que dans ce cadre-là. Il ne faut cependant pas oublier que ces directives ont déployé des effets qui vont bien au-delà puisque certains cantons s'y réfèrent partiellement, voire totalement dans leur législation (cf. ch.

1.1.5.2).

1.1.5.4

Législation en matière d'assurance-maladie

Aux termes de l'art. 25 de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10), l'assurance obligatoire des soins prend en charge les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter une maladie et ses séquelles, a condition, précise l'art. 32, al. 1, que lesdites prestations soient efficaces, appropriées et économiques.

58

A l'annexe 1 de l'ordonnance du 29 septembre 1995 sur les prestations dans l'assurance obligatoire des soins en cas de maladie (OPAS; RS 832.112.31), le Département fédéral de l'intérieur (DFI) a indiqué les prestations dont les coûts soit sont pris en charge, soit ne le sont pas, soit encore le sont à certaines conditions. Le ch. 1.2 de cette annexe, qui a trait à la chirurgie de transplantation, prévoit que la transplantation rénale, la transplantation cardiaque, la transplantation du foie, la transplantation isolée du poumon ainsi que la transplantation simultanée du pancréas et du rein sont obligatoirement à la charge de l'assureur. Selon le ch. 2.1 de ladite annexe, l'assureur doit également prendre en charge les coûts de la transplantation autogène ou allogène de cellules souches hématopoïétiques. Relevons cependant que toutes les transplantations ne sont pas couvertes par l'assurance de base. Tel est le cas de la transplantation de l'ensemble coeur/poumons et de la transplantation isolée du pancréas. La non prise en charge de ces interventions se justifie par le fait qu'elles ont un caractère expérimental ou semi-expérimental et que, partant, leur efficacité thérapeutique n'est pas encore scientifiquement reconnue.

1.1.5.5

Art. 119a de la Constitution fédérale

La disposition constitutionnelle relative à la médecine de transplantation a été adoptée le 7 février 1999 par une large majorité du peuple et des cantons. La norme en question astreint la Confédération à légiférer en matière de transplantation d'organes, de tissus et de cellules, qu'ils soient d'origine humaine ou d'origine animale. En conséquence, la Confédération peut également réglementer la xénotransplantation, c'est-à-dire le transfert d'organes, de tissus et de cellules de l'animal vers l'être humain. La nouvelle norme constitutionnelle charge, en outre, la Confédération de fixer des critères en vue d'assurer une répartition équitable des organes.

Une telle attribution revêt une importance particulière eu égard au caractère endémique de la pénurie d'organes d'origine humaine. L'art. 119a de la Constitution interdit, par ailleurs, le commerce d'organes d'origine humaine et statue la gratuité du don d'organes, de tissus et de cellules. Ces principes sont censés permettre de faire obstacle à la commercialisation du corps humain et d'éviter les abus. En s'acquittant de ce mandat législatif, la Confédération doit veiller à assurer la protection de la dignité humaine, de la personnalité et de la santé.

1.1.5.6

Arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants

Dans un domaine connexe à la médecine de transplantation, une première réglementation est entrée en vigueur: l'arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants (RS 818.111). Le Conseil fédéral avait indiqué à l'époque, dans son message, qu'une réglementation exhaustive de l'utilisation des organes, telle que celle que réclament les motions Onken et Huber ne pouvait être établie dans le cadre de cet arrêté fédéral, mais qu'en revanche, il fallait immédiatement assurer la protection des receveurs contre une infection par des agents pathogènes (Message du 1er mars 1995 relatif à l'arrêté fédéral sur le

59

contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants; FF 1995 II 945). Lors des débats parlementaires, les Chambres fédérales ont élargi le cadre de cette réglementation en y incluant le commerce des transplants d'origine humaine. L'art. 17 de l'arrêté fédéral prescrit la gratuité: il est interdit de mettre sur le marché, en Suisse ou à l'étranger à partir de la Suisse, des transplants d'origine humaine contre rémunération ou de greffer des transplants d'origine humaine obtenus contre rémunération. Le Conseil fédéral a cependant la possibilité, pour certains transplants, de prévoir des dérogations au principe de la gratuité. Cette interdiction est renforcée par une disposition pénale (cf. art. 32, al. 1, let. c de l'arrêté fédéral).

Concernant les xénotransplantations, l'art. 18 de l'arrêté fédéral institue une obligation d'informer et l'art. 19 des tests obligatoires. En juin 1998, compte tenu de l'insécurité régnant en matière de protection contre les infections, le Conseil fédéral a proposé au Parlement de modifier rapidement l'arrêté en question et de rendre plus stricte la réglementation en vigueur concernant la xénotransplantation (Message du 3 juin 1998 concernant la modification de l'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants; FF 1998 3209) Soucieux d'assurer un maximum de sécurité face aux risques d'infection, le Conseil fédéral a proposé d'instaurer l'interdiction des xénotransplantations, en prévoyant toutefois des dérogations accordées à des conditions extrêmement strictes. Au lieu de cette interdiction de principe, le Parlement a préféré soumettre les xénotransplantations au régime général de l'autorisation. En vertu de cette réglementation, des transplants d'origine animale peuvent être greffés sur des êtres humains, dans le cadre d'essais cliniques, pour autant que l'on puisse exclure avec une forte probabilité tout risque d'infection de la population et escompter de la transplantation une utilité thérapeutique. Dans le cadre d'un traitement standard, une xénotransplantation n'est autorisée que si, au stade atteint par les connaissances techniques et scientifiques, l'on peut exclure un risque d'infection de la population, et si l'efficacité thérapeutique de la transplantation a été établie dans le cadre d'essais cliniques. Ces modifications
de l'arrêté fédéral sont entrées en vigueur le 1er juillet 2001 en même temps que celles de l'ordonnance qu'elles ont induites. Il s'agit là d'une réglementation transitoire qui aura effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation.

1.2

Résultats de la procédure préliminaire

1.2.1

Elaboration de l'avant-projet

Par les motions Onken et Huber, le Conseil fédéral a été chargé de soumettre au Parlement un projet de réglementation univoque de l'utilisation de transplants en Suisse. De même, la Conférence des directeurs cantonaux de la santé publique a adressé au Conseil fédéral, le 9 décembre 1994, une lettre dans laquelle elle plaide pour une réglementation de la médecine de transplantation au niveau fédéral. Jusqu'alors, cependant, la Confédération ne disposait que de compétences constitutionnelles partielles de légiférer en matière de médecine de transplantation. Pour lui permettre d'élaborer une réglementation exhaustive, il a donc fallu créer une base constitutionnelle expresse. La disposition en question qui a trait à la médecine de transplantation a été acceptée le 7 février 1999, à une écrasante majorité du peuple et des cantons. Parallèlement, un groupe de travail interne à l'OFSP, assisté des 60

conseils de M. Marco Borghi, professeur de droit, Fribourg, a élaboré un avantprojet de loi fédérale sur la transplantation. Le 1er décembre 1999, le Conseil fédéral a autorisé le DFI à ouvrir une procédure de consultation sur cet avant-projet. Parmi les 170 destinataires figuraient, en particulier, le Tribunal fédéral, les cantons, les institutions intercantonales, la Principauté du Liechtenstein, les partis politiques, les organisations faîtières de l'économie ainsi que d'autres associations et organismes intéressés. 125 prises de position ont été recueillies dont 26 provenaient d'organisations qui n'avaient pas été consultées et 12 de particuliers. 25 cantons sur 26, tous les grands partis politiques, une organisation intercantonale et 2 organisations faîtières de l'économie se sont exprimés. Le délai pour prendre position expirait le 29 février 2000.

1.2.2

Grandes lignes de l'avant-projet

La loi telle qu'elle ressort de l'avant-projet a pour but d'assurer la protection de la dignité humaine, de la personnalité et de la santé lors de l'application à l'être humain de la médecine de transplantation ainsi que d'empêcher toute utilisation abusive d'organes, de tissus ou de cellules. Elle vise aussi à contribuer à ce que davantage d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine soient disponibles pour la transplantation. La loi est censée s'appliquer à toute utilisation d'organes, de tissus ou de cellules vivants, d'origine humaine ou animale, destinés à être transplantés sur l'homme. Elle ne s'applique pas à la procréation médicalement assistée chez l'être humain ni à l'utilisation du sang et des produits sanguins, à l'exception des cellules souches. Concernant le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées, l'avant-projet mettait en discussion deux modèles possibles: celui du consentement au sens large et celui de l'opposition au sens large.

Le texte prévoyait également d'adopter comme critère de décès celui de la «mort cérébrale».

S'agissant du don par des personnes vivantes, l'avant-projet pose le principe selon lequel il ne doit y avoir aucun lien de parenté ni relation affective particulièrement étroite entre le donneur et le receveur. Le texte exige dans chaque cas l'accord de la commission dite «du don d'organes par des personnes vivantes». L'avant-projet accordait une protection spéciale aux personnes incapables de discernement ou mineurs. Le texte visait également à instaurer un régime d'attribution fondé sur le principe de l'équité. Il prévoit qu'en matière d'attribution d'organes nul ne doit subir de discrimination en raison de ses origines, de son sexe ou de sa situation financière, les seuls critères applicables étant l'urgence médicale de la transplantation, la compatibilité des tissus avec ceux du receveur, le pronostic médical et le délai d'attente. Les organes doivent, dans chaque cas, être attribués par une instance nationale centralisée. L'avant-projet prévoyait, par ailleurs, la possibilité de limiter ­ par souci de la qualité et par mesure d'économie ­ le nombre des centres de transplantation. Il soumettait également l'exploitation de tels centres à une autorisation délivrée par le Conseil fédéral. Enfin, selon l'avant-projet,
les xénotransplantations de même que les transplantations de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus humains ne pourraient être pratiquées que moyennant une autorisation délivrée par l'autorité fédérale compétente.

61

1.2.3

Résultats de la procédure de consultation

1.2.3.1

Généralités

Les résultats de la consultation ont été publiés dans un rapport du DFI daté de novembre 2000.

Au niveau de l'appréciation générale de l'avant-projet, environ 40 % des milieux consultés saluent sur le fond le texte présenté. Un quart le rejette ou demande un profond remaniement. L'avant-projet est surtout critiqué par les médecins et les praticiens de la médecine de transplantation, alors que les cantons l'approuvent dans leur majorité. Parmi les partis, le rapport entre ceux qui l'approuvent et ceux qui s'y opposent est à peu près équilibré.

Un aspect est positivement apprécié: le fait que le texte présenté instaure un cadre juridique uniforme pour l'ensemble de la Suisse, qui se substituera au régime des législations cantonales présentant forcément des variations. Il ne pourra en résulter que davantage de transparence, ce qui devrait contribuer de manière décisive à renforcer la confiance de la population dans la médecine de transplantation.

Certains cantons estiment que le projet délègue des compétences trop larges au Conseil fédéral, ce qui revient à vider de son sens le principe de la légalité. A l'opposé, nombreux sont les participants qui trouvent le projet trop détaillé. A leur sens, la loi sur la transplantation devrait être conçue comme une loi-cadre qui ne règle de manière centralisée que les points qui doivent l'être. Nombre de participants ont également déploré que le projet se traduise par la création d'un trop grand nombre de nouvelles instances et commissions, ce qui pourrait bien s'accompagner d'une complication superflue des procédures et d'une bureaucratie inutile. A leur sens, il importe de travailler ­ même sous l'empire de la nouvelle réglementation ­ avec des organismes existants et qui ont fait leur preuve, tels que SwissTransplant.

Certains participants ont préconisé que l'on réglemente la xénotransplantation, d'une part, et la transplantation de tissus et de cellules issus de foetus humains d'autre part dans des textes distincts considérant que chacun de ces actes médicaux pose des problèmes d'ordre éthique, juridique, scientifique et social qui lui sont spécifiques. A leur sens, vouloir réglementer ensemble ces domaines «sensibles» dans la loi sur la transplantation risque de remettre en cause l'ensemble de l'édifice.

1.2.3.2

Résultats sur les points les plus importants

Prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées 38 parmi les milieux consultés approuvent le modèle du consentement au sens large (12 cantons, 4 partis, 20 organisations, 2 particuliers); 34 s'expriment en faveur du modèle de l'opposition au sens large (13 cantons, 2 partis, 18 organisations, 1 particulier). 4 participants donnent leur préférence au modèle du consentement au sens étroit. Aucun des participants n'a opté pour le modèle de l'opposition au sens étroit.

62

La constitution d'un registre des transplantations a été approuvée par la majorité des milieux consultés. Il en a été de même de la proposition d'ancrer dans la loi la «mort cérébrale» comme critère de décès, ainsi que de l'indépendance exigée entre les différents intervenants dans le but d'éviter tout conflit d'intérêts.

Don par une personne vivante Le principe selon lequel il ne doit pas y avoir de lien particulier entre le donneur vivant et le receveur a été bien accepté. Cependant, deux points qui avaient été repris de la Convention du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme et la biomédecine ont fait l'objet de critiques: la majorité des milieux consultés a estimé trop restrictif le principe selon lequel on ne peut prélever des organes ou des tissus sur un donneur vivant que s'il n'y en a aucun d'approprié provenant d'un donneur décédé.

A leur sens, le don par une personne vivante devrait également être une option thérapeutique primaire, parce qu'elle donne de meilleurs résultats. La règle selon laquelle on ne peut prélever que dans des cas exceptionnels des tissus ou des cellules qui se régénèrent sur des personnes incapables de discernement est considérée par certains comme trop libérale et par d'autres, au contraire, comme trop restrictive.

On propose d'un côté d'interdire absolument tout prélèvement sur les personnes incapables de discernement. D'un autre côté, on fait valoir que l'on ne comprend pas pourquoi le receveur ne pourrait être qu'un frère ou une soeur du donneur et non un autre proche. La création d'une commission des dons par des personnes vivantes est majoritairement rejetée. On estime en effet que l'instauration d'une telle commission se traduirait par des travaux administratifs superflus, de nature à freiner l'application de la méthode prévue pour ce type de don.

Attribution La réglementation proposée pour l'attribution d'organes a été diversement appréciée. Dans son principe, la disposition relative à la non-discrimination est approuvée. Certains participants ont proposé que l'on renonce à établir une liste des critères puisque la Constitution fédérale interdit, d'ores et déjà, toute discrimination.

Concernant les critères d'attribution proposés, on a fait remarquer ça et là que leur liste ne peut pas être exhaustive. De manière générale, on est favorable au
critère du délai d'attente. En revanche, la majorité des participants est opposée à l'application du critère de la compatibilité la meilleure entre le donneur et le receveur, de même qu'au principe voulant que l'on donne la préférence aux jeunes patients.

L'attribution centralisée des organes a, elle aussi, été majoritairement rejetée. De l'avis des participants, il serait préférable de continuer à laisser aux centres de transplantation le soin de décider de l'attribution définitive car, à la différence d'une instance centrale, ils sont au fait des spécificités locales et peuvent en tenir compte.

Au niveau national, on devrait se borner à organiser et à coordonner l'attribution.

Seule une minorité est favorable à l'attribution d'organes par une instance centralisée, estimant qu'il s'agit là du prix à payer pour garantir l'égalité de traitement.

63

Centres de transplantation La réglementation tendant à soumettre les centres de transplantation au régime de l'autorisation et, par voie de conséquence, à donner au Conseil fédéral la faculté de créer des centres de compétence a été diversement appréciée. La majorité des milieux consultés salue l'idée de faire dépendre l'exploitation d'un centre de transplantation d'une autorisation délivrée par le Conseil fédéral. Seule une minorité est opposée à un tel régime arguant de ce que la santé de la population et la planification hospitalière sont du ressort des cantons. Le fait que la Confédération soumette à autorisation la pratique d'une thérapie telle que la transplantation serait donc étranger au système. La création projetée de centres de compétence a été saluée par la majorité des participants. En revanche, les avis sont partagés quant au nombre optimal des centres de transplantation. Il oscille entre 2 et 6 pour les transplantations rénales et entre 1 et 3 pour les transplantations d'autres organes. Une minorité à refusé de donner au Conseil fédéral le pouvoir de créer des centres de compétence.

A l'appui de cet avis, elle invoque essentiellement les motifs suivants: il n'existe pas de base constitutionnelle à cet effet; une telle délégation de pouvoir constituerait une atteinte à la liberté académique et à la souveraineté cantonale en matière de santé publique; la qualité d'un centre de transplantation ne dépendrait ni du nombre des transplantations qu'il a effectuées ni du fait que le nombre des centres soit aussi restreint que possible; enfin, la fermeture de centres existants se répercuterait négativement sur la propension au don d'organes dans la région.

Utilisation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine La majorité des participants considèrent que l'utilisation à des fins de transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine est problématique. Nombreux sont ceux qui réclament l'interdiction de cette technique.

Une organisation se déclare prête à lancer un référendum s'il advenait que la loi permette de transplanter des tissus ou des cellules issus d'embryons ou de foetus.

D'autres, parmi les milieux consultés, ne sont pas, par principe, opposés à cette technique. Ils relèvent toutefois les problèmes médico-éthiques
qu'elle pose et émettent de sérieux doutes quant à sa praticabilité.

Xénotransplantation La majorité des participants critique ou rejette la réglementation des xénotransplantations, reprise pourtant de la modification de l'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants, adoptée par le Parlement le 8 octobre 1999.

Nombreux sont les milieux consultés qui demandent que les xénotransplantations soient interdites ou, du moins, soumises à un moratoire. A l'appui de leurs revendications ils font valoir divers arguments: risques d'infections, aspects touchant la protection des animaux et atteinte à l'intégrité des organismes vivants, utilité incertaine de ladite technique tant du point de vue médical que sur le plan économique, enfin réserves d'ordre éthique. Quelques participants demandent que les dispositions sur la xénotransplantation soient purement et simplement biffées, estimant qu'une réglementation en la matière est aujourd'hui prématurée et risque de faire rejeter la loi et d'empêcher les citoyens de prendre clairement position sur les allotransplantations. D'autres, parmi les milieux consultés, sans être fondamentalement opposés

64

aux xénotransplantations, expriment des doutes et des réserves. Une minorité approuve la réglementation proposée et considère l'instauration du régime de l'autorisation comme opportune. Enfin, quelques-uns des participants font remarquer que la protection des animaux et l'intégrité des organismes vivants sont des biens juridiques protégés par la Constitution fédérale. Aussi, estiment-ils, ne sauraitil être question de régler ultérieurement la protection des animaux ressource.

1.2.4

Remaniement de l'avant-projet par le DFI/ énumération des modifications les plus importantes

Le 22 novembre 2000, le Conseil fédéral a chargé le DFI d'élaborer un message à l'appui d'un projet de loi, en tenant compte des résultats de la procédure de consultation. A cette fin, le DFI est parti du projet soumis à la consultation et l'a modifié compte tenu des principales objections, remarques et propositions exprimées par les milieux consultés. Le projet a, par ailleurs, été simplifié et sa systématique partiellement revue.

Par rapport à l'avant-projet, les modifications essentielles sont les suivantes: ­

Par principe, la transplantation autogène d'organes, de tissus ou de cellules a été exclue du champ d'application de la loi (art. 2, al. 3);

­

On renonce à instaurer un registre des transplantations (cf. ch. 1.3.2.1.4);

­

S'agissant du don d'organes par des personnes vivantes, le projet instaure une réglementation plus libérale: on renonce à imposer le principe selon lequel on ne peut prélever des organes, des tissus ou des cellules sur un donneur vivant que s'il n'y en a aucun d'approprié à disposition, provenant d'un donneur décédé. Par ailleurs on introduit la possibilité de prélever des tissus ou des cellules sur des personnes incapables de discernement ou mineures lorsque le receveur est un des deux parents, un enfant ou encore un frère ou une soeur de ces personnes (art. 13, al. 2, let. c);

­

On renonce à créer une commission des dons par une personne vivante. En revanche, le prélèvement chez une personne incapable de discernement ou mineure de tissus ou de cellules qui se régénèrent ne peut être pratiqué qu'avec le consentement d'une autorité indépendante instituée par le canton (art. 13, al. 2, let. h et al. 4);

­

On renonce à la création de centres de compétences. Le Conseil fédéral reçoit la compétence de limiter le nombre des centres de transplantation. Il doit toutefois s'entendre avec les cantons et tenir compte de l'évolution de la médecine de transplantation (art. 27);

­

Au chapitre de la xénotransplantation, on renonce à une réglementation spéciale en matière de responsabilité civile. En revanche, le projet remanié propose une modification de la loi fédérale sur la responsabilité du fait des produits;

­

Les transplants standardisés font l'objet d'une réglementation plus détaillée, diverses dispositions de la loi fédérale du 15 décembre 2000 sur les produits

65

thérapeutiques (RS 812.21; RO 2001 5689) leur étant applicables par analogie; ­

On renonce à instaurer dans la loi une commission nationale de la transplantation. Selon les besoins, le Conseil fédéral peut instituer une telle commission en se fondant sur l'art. 57 de la loi sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA; RS 172.010);

­

On renonce également à inscrire dans la loi une commission de recours en matière de médecine de la transplantation étant donné qu'il est prévu de réunir les commissions fédérales de recours et les commissions arbitrales au sein de la Cour fédérale administrative dans le cadre de la révision complète de l'organisation judiciaire (message du 28 février 2001 relatif à la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale; FF 2001 4000). En matière d'organisation judiciaire, les principes généraux de la procédure administrative et de la jurisprudence s'appliquent par principe. Ce sont donc les dispositions de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA; RS 172.021) et celles de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (OJ; RS 173.110) qui sont applicables.

­

On renonce à modifier la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurancemaladie (LAMal; RS 832.10) pour y prévoir que les coûts liés aux complications subies par les donneurs d'organes, de tissus ou de cellules doivent être intégralement pris en charge par l'assureur du bénéficiaire de la greffe.

Les coûts de l'intervention chirurgicale et du traitement d'éventuelles complications sont déjà pris en charge par les assurances sociales. Le projet de loi confie en outre au Conseil fédéral le soin de régler l'indemnisation de la perte de gain du donneur (art. 14, al. 1).

1.2.5

PubliForum sur la médecine de transplantation

Du 24 au 27 novembre 2000 a eu lieu le PubliForum sur le thème de la médecine de transplantation. Il a été organisé par le Centre d'évaluation des choix technologiques du Conseil suisse de la science et de la technologie (Centre TA), en collaboration avec le Fonds national suisse (FNS) et l'Office fédéral de la santé publique (OFSP).

Le PubliForum est inspiré du modèle de la conférence dite du «consensus» développé au Danemark. Il est une plate-forme de dialogue entre les milieux scientifiques, industriels et politiques, les personnes concernées et le public en général. Il crée les conditions propres à garantir une participation transparente et nuancée des citoyens à la vie publique, contribuant ainsi à renforcer la compréhension mutuelle.

Le panel de citoyens constitué pour l'occasion se composait de 28 personnes choisies au hasard mais constituant un groupe aussi équilibré que possible au niveau des régions linguistiques, des tranches d'âge, du nombre d'hommes et de femmes ainsi que des catégories socioprofessionnelles représentés. Au cours de deux week-ends préparatoires, les membres du panel ont eu la possibilité de se familiariser avec les différents aspects de la médecine de transplantation et de préparer un ensemble de questions à débattre avec des personnes de référence soigneusement sélectionnées, lors du PubliForum lui-même. La réflexion du panel a porté plus spécialement sur 66

les points suivants: définition de la mort; point de vue des personnes concernées; attribution des organes; réglementation du don d'organes; recherche; enfin xénotransplantation. Pendant deux jours, les citoyennes et citoyens membres du panel se sont entretenus du thème de la médecine de transplantation avec des spécialistes issus des milieux de la médecine, de la biologie, de la religion, du droit, de la philosophie, de la psychologie et de l'éthique, ainsi qu'avec des infirmiers, des représentants des patients et des personnes concernées. Ils ont mis un point d'honneur à entendre partisans et opposants sur chacun des thèmes abordés. A l'issue de ces auditions, le panel de citoyens a rédigé un rapport12 dans lequel il présente, pour chaque thème, une synthèse des réponses données par les personnes de référence, l'opinion du panel sur la problématique examinée, enfin des recommandations quant aux mesures à mettre en oeuvre pour améliorer la situation. Ledit rapport a été présenté aux milieux intéressés ainsi qu'aux médias le 27 novembre 2000. En substance, le panel de citoyens a formulé les recommandations suivantes à l'enseigne des différents thèmes étudiés:

12

­

La «mort cérébrale», estime le panel, est un critère raisonnable et suffisant pour permettre un prélèvement d'organes. Encore faut-il que la fiabilité du diagnostic soit garantie. Il est important de relever que le terme de «mort cérébrale» n'est utilisé que dans le cadre de la médecine de transplantation.

Comme ce terme est peu satisfaisant et suscite des malentendus, il serait judicieux de le remplacer dans la loi par l'expression «défaillance irréversible des fonctions cérébrales».

­

Le panel estime qu'il est impérieux de prévoir dans la loi un soutien psychologique par des professionnels pour les proches du donneur, cela avant, pendant et après le prélèvement de l'organe. Le panel recommande aussi que le receveur et le personnel soignant bénéficient également d'un tel soutien.

­

De l'avis du panel, l'attribution des organes doit être prioritairement réalisée à partir de critères médicaux. Le système actuel d'attribution ayant fait ses preuves, il est recommandé de le maintenir, tout en introduisant un système de contrôle approprié. L'inscription sur la liste d'attente ne doit pas obéir seulement à des critères médicaux mais encore à des critères psychosociaux.

Le panel estime important que ces critères soient les mêmes pour les différents centres de transplantation.

­

Le panel recommande de retenir dans la loi la solution du consentement au sens large. Il émet également le souhait que la population soit mieux informée au sujet de la médecine de transplantation afin d'accroître la transparence et de développer la propension au don d'organes. Il préconise aussi que l'on étudie la création d'un registre centralisé des transplantations, ainsi que le coût d'un tel registre. Par cette mesure, le panel escompte que l'on parvienne, à terme, à une situation de fait dans laquelle le consentement explicite prévaut sans qu'il soit nécessaire de le statuer expressément dans la loi.

Le rapport du panel de citoyens peut être commandé auprès du secrétariat du Centre d'évaluation des choix technologiques (no tél. 031 322 99 63; no fax 031 323 36 59).

Publié en allemand, français, italien et anglais, il peut également être consulté sur Internet à l'adresse suivante: www.publiforum2000.ch.

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­

Le panel considère que la réglementation de la xénotransplantation prévue dans le projet de loi est suffisante. Aussi la majorité de ses membres renonce-t-elle à exiger un moratoire. Il conviendrait cependant d'aller dans le sens d'un renforcement des dispositions relatives à la responsabilité civile.

Le panel attache également beaucoup d'importance à ce que l'on applique des thérapies alternatives telles que la prévention et le développement d'organes artificiels de manière à atténuer la pénurie d'organes.

Par l'intermédiaire de ses recommandations, le panel de citoyens a influé sur les travaux législatifs dans la mesure où la mort cérébrale a été admise comme critère de décès, où la solution du consentement au sens large est celle qui a été retenue dans la loi sur la transplantation et où la xénotransplantation a été régie de manière restrictive. Il est également prévu dans le projet de confier au coordinateur local la responsabilité de veiller à ce que les donneurs et leurs proches soient pris en charge de manière appropriée. Contrairement à la recommandation du panel, qui souhaitait le maintien du système d'attribution actuel, il est prévu de centraliser l'attribution et de l'organiser en fonction des besoins spécifiques des patients.

Lors de la présentation du rapport, Madame la conseillère aux Etats Christine Beerli et Madame la conseillère nationale Rosmarie Dormann, présidentes des Commissions de la sécurité sociale et de la santé publique des deux conseils législatifs ont remercié les membres du panel pour leur précieuse contribution et ont promis de faire état de leurs recommandations dans le cadre des délibérations parlementaires sur le projet de loi. Elles ont également convié le panel à assister aux auditions d'experts organisées dans le cadre des séances des commissions.

Le PubliForum a démontré que des soi-disant «profanes» sont tout à fait prêts d'aborder une matière complexe, de débattre à un haut niveau avec des experts, de les pousser dans leur retranchement sur les questions délicates sans craindre d'être importuns, de rédiger, parfois jusqu'aux petites heures du matin, un rapport final d'excellente qualité et de le présenter de main de maître au cours d'une conférence publique.

1.3

Grandes lignes du projet de loi sur la transplantation

1.3.1

Prélèvement sur des personnes décédées; les modèles de consentement

1.3.1.1

Introduction

S'agissant des conditions auxquels il serait admissible de prélever des organes, des tissus ou des cellules sur des personnes décédées, différents modèles de consentement sont en discussion. Tous ont, cependant, en commun qu'un prélèvement est admissible si le donneur y a consenti et, e contrario, qu'il est toujours illicite si la personne pressentie pour le don s'y est opposée.

68

1.3.1.2

Modèle de l'opposition

Le modèle de l'opposition peut revêtir différentes formes: le modèle de l'opposition au sens étroit, le modèle de l'opposition au sens large et le modèle de l'information.

Selon le modèle de l'opposition au sens étroit, le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules est autorisé si la personne décédée ne s'y est pas opposée de son vivant. La caractéristique principale de ce modèle est d'assimiler à un consentement le fait que la personne concernée n'a jamais manifesté son opposition à un tel prélèvement. Pour justifier un tel point de vue, on fait valoir que la personne qui, de son vivant, n'a pas exprimé son opposition, a fait preuve d'une réelle indifférence quant au respect de l'intégrité de son corps après sa mort. Eu égard à l'importance que revêt la médecine de transplantation, estiment les partisans de ce modèle, on est en droit d'attendre d'une personne qui entend faire obstacle à un prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules après son décès, qu'elle manifeste expressément son opposition.

On parle de modèle de l'opposition au sens large, lorsque le droit d'opposition est également concédé aux proches.

Dans le modèle de l'information, les personnes ayant qualité pour refuser le prélèvement (autrement dit le patient lui-même ou ses proches) doivent être informées de leur droit de faire opposition. En outre, si la personne décédée n'a ni donné son consentement ni exprimé une opposition, les proches doivent être informés de l'éventualité d'un prélèvement, leur attention étant dûment attirée sur la faculté qu'ils ont de s'y opposer. Il est loisible de prélever les organes, les tissus ou les cellules sur la personne décédée si aucune opposition de la part de proches n'a été enregistrée à l'expiration d'un délai déterminé.

En ce qui concerne le modèle de l'information, le silence est là aussi interprété comme un consentement. En outre ­ et c'est là un point non négligeable ­ l'obligation de se déterminer dans un certain délai ne fait qu'ajouter au stress que cause aux proches l'exercice du droit d'opposition.

Le modèle de l'opposition se fonde sur le malaise qu'éprouvent naturellement de nombreuses personnes à s'interroger sur leur propre mort; il part donc de l'idée que les oppositions seront peu nombreuses. En théorie, le modèle de l'opposition, au sens étroit comme au sens large,
devrait donc avoir pour avantage de favoriser la disponibilité d'organes, de tissus et de cellules. Toutefois, comme la plupart des pays qui ont adopté cette solution dans leur législation appliquent en fait la solution du consentement au sens large, on ne dispose d'aucune donnée étayant cette hypothèse.

Un élément plaide en défaveur du modèle de l'opposition: l'obligation qu'il impose au particulier de se préoccuper de sa propre mort, puisqu'il ne pourra user de son droit d'opposition qu'à la condition qu'il ait disposé de toute l'information nécessaire et se soit penché sur la problématique en question. Au surplus, il apparaît problématique de soumettre le don à une réglementation qui oblige ceux qui ne veulent pas que l'on prélève des organes, des tissus ou des cellules de leur corps après leur décès, à le spécifier expressis verbis.

69

Dans l'arrêt Gross (ATF 98 Ia 508 ss), le Tribunal fédéral a statué que, d'une manière générale, le modèle de l'opposition était en harmonie avec la Constitution.

Dans un autre arrêt (ATF 123 I 112) il n'en a pas moins relevé ­ ce qui contraste avec la première jurisprudence citée ­ que la population, en général, et les proches du donneur potentiel, en particulier, doivent être informés du droit qu'ils ont de s'opposer au prélèvement. De ce qui précède, on peut inférer que le modèle de l'opposition n'est conforme à la Constitution que dans le modèle de l'information.

L'application du modèle de l'information exige, outre l'instauration d'un registre, l'information régulière et intensive de la population, à charge pour les responsables d'assurer que l'information atteigne tous les cercles de la population et soit correctement comprise ce qui, compte tenu de la structure démographique que présente la Suisse (notamment du fort pourcentage d'étrangers), n'est pas une tâche facile.

1.3.1.3

Modèle du consentement

Le modèle du consentement existe, lui aussi, au sens étroit et au sens large Selon le modèle du consentement au sens étroit, le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules n'est licite que si la personne décédée y a elle-même consenti de son vivant. Si tel n'est pas le cas, l'absence de consentement est assimilée à un refus, ce qui rend tout prélèvement illicite.

Selon le modèle du consentement au sens large, l'absence de déclaration de don n'est considérée ni comme un refus ni comme un consentement, mais simplement comme une non déclaration. En pareille occurrence, les proches sont donc consultés.

Ils disposent, à titre subsidiaire, du droit de décider de ce qu'il adviendra du corps du défunt. Un prélèvement n'est licite que si les proches y ont consenti.

Le modèle du consentement au sens étroit est celui qui garantirait le mieux aux donneurs, une fois décédés, le respect du droit de disposer de leur corps. Cela revient à dire qu'un prélèvement ne serait licite que si la personne décédée y a expressément consenti de son vivant. Cet avantage est toutefois contrebalancé par un inconvénient de taille: celui de paralyser, selon toute probabilité, une bonne partie des activités de la médecine de transplantation puisque le nombre des personnes qui font, de leur vivant, la déclaration de dons qu'exige le modèle du consentement au sens étroit est insuffisant. La question de l'opportunité d'introduire au niveau suisse le modèle du consentement au sens étroit a été soulevée lors des délibérations parlementaires relatives à l'arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants. Le 28 septembre 1995, le Conseil national a approuvé une disposition selon laquelle les transplants ne peuvent être prélevés que s'il existe un consentement écrit du donneur. Par la suite, les médecins responsables des centres de transplantation ont fait remarquer que les 331 transplantations effectuées en 1994 n'ont été possibles que grâce à l'accord des proches, car aucun des donneurs décédés n'avait fait une déclaration de don de son vivant. Le 11 décembre 1995, le Conseil des Etats a décidé de biffer cette disposition ­ à ses yeux, trop restrictive et trop tranchée ­ en arguant de ce que les problèmes délicats du don d'organes devaient être réglés de façon détaillée dans une loi sur la transplantation et non pas

70

dans un arrêté fédéral conçu comme une solution transitoire. Le 7 mars 1996, le Conseil national s'est rallié à cette décision.

Sous l'angle de la protection du droit des donneurs de disposer de leur corps, le modèle du consentement au sens large constitue la solution la meilleure après le modèle du consentement au sens étroit. Il protège mieux les droits du donneur que les modèles de l'opposition et de l'information. Il tient également compte au mieux de la situation de ceux qui reconnaissent à leurs proches un droit subsidiaire d'opter ou non pour le prélèvement dans le cadre des décisions qu'il leur appartient de prendre quant au sort à réserver au corps du défunt. En outre, il est conforme à la pratique suivie en Suisse. Ce modèle présente cependant l'inconvénient d'obliger les proches à prendre une décision qui peut leur être très pénible.

Le fait que l'on exige le consentement exprès du donneur ou de ses proches respecte à la fois le droit du donneur de disposer de son corps et le droit subsidiaire de décision de ses proches. Si le donneur n'a pas de proches ou s'il est impossible de les trouver, on devra s'abstenir de procéder au prélèvement.

1.3.1.4

Aperçu de la réglementation appliquée dans les autres pays et situation en Suisse

Nombre de pays ont adopté, dans leur législation, le modèle de l'opposition ou celui du consentement (cf. annexe A6 tableau 1). Seul le Japon a adopté le modèle du consentement au sens étroit: le prélèvement d'organes n'y est autorisé que si la personne décédé y a consenti par écrit. Dans sa législation sur la transplantation, la Corée a retenu le modèle du consentement au sens large. Toutefois, le législateur, soucieux de mettre en exergue l'importance fondamentale de la famille, a donné à la volonté des proches la préséance sur celle de la personne décédée. Ainsi donc, en Corée, il est illicite de procéder à un prélèvement si les proches du défunt s'y sont opposés et quand bien même celui-ci avait donné son consentement.

En Suisse, cinq cantons appliquent aujourd'hui le modèle du consentement au sens large, alors que tous les autres qui ont légiféré en la matière, ont adopté le modèle de l'opposition ou de l'information (cf. annexe A6 tableau 2). Il convient, cependant, de relever que dans la pratique on applique, dans toute la Suisse, le modèle du consentement au sens large.

1.3.1.5

Modèle de la motivation, modèle du club et système du délai d'attente qualifié

Face à la baisse du nombre des dons d'organes, on s'est efforcé ces derniers temps de dégager de nouveaux modèles qui, à terme, sont censés se traduire par un accroissement du nombre des organes disponibles.

71

Modèle de la motivation Il s'agit ici d'un modèle de consentement au sens étroit qui repose sur l'idée selon laquelle un membre de la société n'a aucun droit de tirer un quelconque profit de celle-ci tant qu'il n'est pas disposé à supporter une partie des charges liées à ce profit. Toute personne qui s'est déclarée prête à faire un don d'organes et qui, par conséquent, se tient à la disposition de congénères malades, doit, en contrepartie, savoir qu'en cas de maladie, elle bénéficiera à son tour, très probablement, d'un don d'organe. Au niveau de l'attribution des organes, l'application de ce principe exigerait que l'on répartisse tous les patients en attente d'une transplantation en deux catégories: ceux qui sont prioritaires et les autres. Ne pourraient faire partie de la première catégorie que les patients qui, en temps utile, se sont déclarés prêts à faire un don d'organes et ont fait enregistrer cette volonté. Dans la mesure du possible, tous les organes disponibles sont ensuite attribués selon les règles habituelles. Il n'y a que dans les cas où il est impossible de trouver un receveur approprié parmi les patients prioritaires que l'organe en question sera mis à la disposition des receveurs de la seconde catégorie. Afin que le modèle de la motivation garde son effet incitatif, il convient d'introduire un délai de carence qui permette d'exclure absolument qu'un patient ne fasse une déclaration de don qu'à partir du moment où il est prévisible qu'il aura lui-même prochainement besoin d'un organe.

Modèle du club Dans ce modèle, les personnes qui sont prêtes à conclure, sous condition, une disposition par laquelle elles font don de leurs organes au cas où elles viendraient à décéder, constituent un «club de donneurs d'organes». Chaque membre du club dispose qu'au cas où il viendrait à décéder, ses organes seront d'abord mis à la disposition des membres du club, puis, en second lieu, de la collectivité. Ce modèle présente les avantages suivants: ­

Il permet une attribution plus équitable des organes disponibles (dont le nombre est insuffisant) que les modèles traditionnels qui accordent aux personnes qui ont manifesté expressément leur opposition à ce qu'on leur prélève des organes après leur décès, le même droit de bénéficier d'un organe que les personnes qui, au contraire, ont fait une déclaration de don.

­

Il stimule la propension au don d'organes, puisqu'en contrepartie, il confère au donneur un droit préférentiel de bénéficier, à son tour, d'un organe s'il tombe malade. Mais surtout, il supprime le blocage psychologique puisqu'en prenant la décision de faire ou non un don d'organes la personne n'est plus seulement renvoyée à sa propre mort, mais encore amenée à s'interroger sur sa propre survie au cas où elle serait victime d'une grave maladie.

Système du délai d'attente qualifié Le système du délai d'attente qualifié13 vise à instaurer davantage d'équité dans l'attribution des organes disponibles, à accroître le volume des transplants et, 13

72

Ce système a été préconisé par Charles B. Blankart, spécialiste de l'économie publique près la faculté des sciences économiques de l'Université Humboldt (Berlin).

partant, à réduire le nombre des patients qui décèdent par suite de la pénurie d'organes. L'attribution d'organes disponibles n'est plus seulement décidée selon des critères médicaux. Elle se fait également de manière différenciée compte tenu du délai d'attente, selon que la personne s'est déjà déclarée disposée à donner ses organes au cas où elle viendrait à décéder. Dans ce système, la liste d'attente est tenue sous la forme d'une liste «qualifiée». Les personnes qui ne se sont pas déclarées disposées à faire un don d'organes sont inscrites sur la liste d'attente qualifiée à la suite des personnes qui sont disposées à le faire. Parmi ces dernières, priorité est donnée à celles qui l'ont fait avant les autres.

1.3.1.6

Modèle à adopter dans la loi sur la transplantation

Le 22 novembre 2000, le Conseil fédéral a pris acte des résultats de la procédure de consultation sur l'avant-projet et décidé d'adopter le modèle du consentement au sens large dans la loi sur la transplantation. Les motifs suivants plaident en faveur de cette option: ­

Le modèle du consentement au sens large correspond à la pratique usuelle en Suisse.

­

Aucune étude n'a, jusqu'ici, permis de corroborer l'hypothèse ­ souvent entendue ­ selon laquelle le modèle de l'opposition permettrait de collecter un plus grand nombre d'organes. Même en Espagne, pays qui enregistre le plus haut taux de don d'organes au monde, on applique au quotidien le modèle du consentement au sens large alors même que le législateur a adopté celui de l'opposition.

­

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le droit qu'a toute personne vivante de pouvoir librement disposer de son corps après la mort, relève de la liberté personnelle garantie par la Constitution fédérale. Aussi la loi doit-elle prévoir une solution qui porte le moins possible atteinte à ce droit fondamental tout en permettant de tenir compte des besoins de la personne nécessitant absolument une transplantation.

­

Des motifs relevant des droits fondamentaux amènent à formuler des réserves contre le modèle de la motivation, contre le modèle du club et contre le système du délai d'attente qualifié. Il serait bien entendu souhaitable que le plus grand nombre possible de personnes se déclarent disposées à faire un don d'organe, mais l'Etat doit aussi respecter la volonté contraire. La protection de la personnalité prescrite par la Constitution fédérale et l'obligation de l'égalité de traitement exigent que toutes les décisions relatives au don d'organe soient traitées sur un pied d'égalité.

73

1.3.2

Enregistrement et documentation de l'attestation du don d'organes de tissus ou de cellules

1.3.2.1

Registre des transplantations

1.3.2.1.1

Situation initiale

Un registre des transplantations permet de s'assurer, au moyen de l'outil informatique, si des personnes ont consenti à ce qu'on leur prélève des organes, des tissus ou des cellules après leur décès.

Quelques pays européens14 tiennent un tel registre, toutefois sous des formes, avec des moyens financiers et dans des cadres juridiques variant fortement les uns des autres. Certains tiennent un registre où sont consignées uniquement les oppositions au don d'organes, d'autres un registre qui recense exclusivement les consentements au don, d'autres encore un registre général des transplantations dans lequel il est possible d'inscrire aussi bien une opposition qu'un consentement au don. Aux PaysBas, il est, en outre, possible de désigner dans le registre la personne qui sera appelée à statuer sur le don en cas de décès.

L'Allemagne et la Norvège ont récemment étudié l'opportunité d'instaurer un registre des transplantations. Cependant, compte tenu des expériences négatives faites par d'autres pays ainsi que des coûts très élevés engendrés par un tel registre, elles y ont renoncé.

Le taux d'inscription varie fortement d'un registre à l'autre. En ce qui concerne le registre des oppositions (France, Autriche), il est inférieur à 0,08 %. Il s'établit à environ 10 % pour le registre des dons (Grande-Bretagne). Enfin, les registres dans lesquels peuvent être consignés à la fois les dons et les oppositions, ainsi que le nom de la personne appelée à statuer en cas de décès accusent des taux qui varient entre 4 % (Danemark) et 29 % (Pays-Bas). On constate également d'importantes fluctuations au niveau des coûts de mise en place et d'actualisation. Si l'Autriche n'a pas eu à supporter de coûts de mise en place parce que le registre des oppositions a été intégré à une infrastructure qui existait déjà, dans d'autres pays, en revanche, la mise sur pied d'un registre a exigé des investissements oscillant entre 1,8 million de francs (Suède) et 27 millions de francs (Pays-Bas). Quant aux coûts d'actualisation il ne sont connus que pour trois registres. Ils varient entre 200 000 francs (Suède) et 5,7 millions de francs (Pays-Bas). Toutefois, il n'est pas aisé d'établir une comparaison des coûts des registres notamment parce que leurs contenus ne sont pas homogènes et que les montants indiqués comprennent parfois les
frais occasionnés par l'information du public. La majorité des registres est soit financée en totalité par les pouvoirs publics soit subventionnée par eux.

Dans un régime où l'inscription dans le registre des transplantations relève du choix personnel, il reste toujours l'option de ne pas se faire inscrire. Trois raisons principales peuvent motiver une telle option:

14

74

La Belgique, le Danemark, la France, l'Italie, les Pays-Bas, l'Autriche, la Pologne, le Portugal, la Suède et la Grande-Bretagne.

­

La personne qui l'a prise n'a pas étudié le thème de la transplantation;

­

Elle préfère déléguer tacitement à ses proches le soin de prendre la décision;

­

Elle exprime ainsi tacitement son refus du don d'organes (lorsque le modèle appliqué est celui du consentement au sens large).

Il n'existe aucun indice fiable qui permette d'affirmer que l'instauration d'un registre des transplantations exerce une influence sur la propension au don d'organes.

Parmi les pays qui enregistrent les proportions de dons les plus faibles (moins de 15 dons par million d'habitants), les Pays-Bas, la Suède, la Grande-Bretagne, le Danemark, la Pologne et l'Italie (depuis l'été 2000) ont un registre, alors que l'Allemagne n'en connaît pas. Le registre des Pays-Bas existe depuis le printemps 1998, ce qui n'a pas empêché la proportion de dons d'organes de chuter (1997: 14,4 personnes par million d'habitants; 1998: 13,1 personnes par million d'habitants; 1999: 10,3 par million d'habitants). L'Espagne qui, en 1999, présentait la proportion de dons la plus élevée au monde (33,6 par million d'habitants) n'a pas de registre des transplantations.

Le canton de Genève a introduit en 1996 un registre des oppositions suite à l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation15. Ce registre est tenu par le médecin cantonal. Il ne permet que l'inscription d'une opposition générale. A fin 2000, il comptait quelque 2000 inscriptions ce qui représente un taux d'inscription de 0,3 %.

Comme le nombre mensuel moyen des nouvelles inscriptions est de l'ordre de trois, l'actualisation n'occasionne qu'une charge administrative négligeable. Les responsables considèrent que le registre a des retombées positives car il permet d'améliorer la qualité du dialogue avec les proches. En revanche, la programmation du système a été émaillée de problèmes à telle enseigne qu'à l'heure actuelle ce système ne peut pas encore être utilisé dans toutes les fonctionnalités qui avaient été définies.

1.3.2.1.2

Avantages d'un registre des transplantations

Le registre des transplantations présente l'avantage de permettre à toute personne de prouver de façon certaine sa volonté ou son refus de faire un don, de façon générale ou en se limitant à des organes, tissus ou cellules particuliers. Il est, en tout temps, possible de modifier ou de radier une inscription. Contrairement à ce qui peut se passer avec des cartes de donneur, il est quasiment impossible d'égarer une déclaration d'intention documentée. De même ­ et si tant est que la procédure d'alimentation du registre obéisse à des standards de qualité très exigeants ­ la probabilité d'une confusion de personnes ou de falsification de la volonté exprimée est quasiment nulle.

La volonté ou le refus de faire un don sont établis de façon indubitable; en outre, les personnes habilitées peuvent disposer de cette information de façon simple, rapide et fiable.

15

Loi du 28 mars 1996 sur les prélèvements et les transplantations d'organes et de tissus.

75

Un registre est de nature à créer une certaine confiance au sein de la population. Le public est, en effet, assuré du respect de la volonté qui a été exprimée. En outre, l'existence du registre peut inciter chacun à s'interroger sur sa propension à être donneur.

1.3.2.1.3

Inconvénients d'un registre des transplantations

La création d'un registre informatisé des transplantations présente, en revanche, l'inconvénient d'exiger des ressources d'envergure. Elle implique, notamment, l'acquisition d'un matériel et le développement d'un logiciel. Les coûts de mise en place calculés par les pays qui disposent d'un tel registre accusent d'énormes différences (total des coûts calculé par rapport à la population: Grande-Bretagne: 2,6 millions de francs, soit 0,04 franc, Suède: 1,8 million de francs, soit 0,20 franc, Pays-Bas: 27 millions de francs, soit 1,69 franc). Ces différences s'expliquent peutêtre par la complexité des logiciels à développer dans chaque cas ou encore par des exigences variables quant au degré de sécurité des données à atteindre. Aux coûts uniques de mise en place du système, s'ajoutent chaque année les frais de maintenance. Parmi les frais périodiques figurent, outre les frais de maintenance du système informatique et les frais de personnel.

1.3.2.1.4

Renonciation à instaurer un registre suisse des transplantations

L'avant projet prévoyait la création d'un registre des transplantations qui serait tenu par le service fédéral compétent. La majorité des milieux consultés a d'ailleurs salué cette proposition, estimant qu'un tel registre servirait de baromètre de la propension au don d'organes et aurait pour effet d'inciter chacun et chacune à s'interroger sur ce thème. Cependant, une proportion non négligeable des participants à la consultation s'est opposée à la création d'un tel registre, essentiellement pour des raisons de coûts.

A l'issue d'une nouvelle analyse de la situation, il a été décidé de qu'il faut renoncer à instaurer un registre suisse des transplantations.

La seule raison qui pourrait justifier une telle instauration serait qu'elle permet aux personnes désireuses de se faire inscrire de prouver de manière fiable leur volonté de faire un don et, par voie de conséquence, aux personnes habilitées à consulter les données, de savoir rapidement qui a fait une déclaration de don. L'adoption du modèle du consentement au sens large garantit qu'aucune personne ne subira un prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules si elle n'y a expressément consenti.

Compte tenu de cette réglementation et des taux d'inscription qu'accusent les registres existants, force est de supposer que la majorité de la population renoncera à se faire inscrire dans un registre des transplantations. En effet, la population suisse ne semble pas avoir un besoin viscéral de faire attester de sa volonté de faire un don d'organes. En conséquence, si un tel registre existait, il faudrait, dans la grande majorité des cas, non seulement vérifier qu'il existe bien une inscription mais encore

76

consulter les proches. Par rapport au système actuel, cela ne ferait que compliquer le travail puisqu'il faudrait ajouter une vérification. Pour qu'un registre soit efficace16, il faut qu'il comporte un nombre minimum d'inscriptions, nombre qu'il semble impossible de recueillir si l'on s'en réfère aux expériences faites dans d'autres Etats européens. Comme l'a par ailleurs démontré une comparaison internationale, on ne peut notamment pas partir de l'idée selon laquelle, si l'on créait un registre en Suisse, le taux d'inscription s'élèverait au moins à 10 %, pourcentage correspondant à celui des cartes de donneur.

L'instauration d'un registre des transplantations ne peut pas avoir pour objectif d'accroître la proportion des donneurs. Cependant, il se peut que l'on prenne en considération un rapport: lorsqu'une personne qui a la possibilité d'attester de son consentement au don d'organes en s'inscrivant dans un tel registre mais ­ pour une raison ou pour une autre ­ néglige de le faire, ses proches auront tendance à considérer l'absence d'inscription plutôt comme une opposition que comme un consentement. Cela explique qu'en règle générale les proches ne soient pas enclins à prendre la décision à la place de la personne défunte.

Un registre des transplantations ne permet pas d'apaiser les craintes ­ nombreuses ­ que suscite la médecine de transplantation (p. ex. à propos du critère du décès, de la sûreté de la constatation du décès, du trafic d'organes). Il ne contribuerait donc pas à lever les réserves exprimées.

En outre, un tel registre induirait des coûts non négligeables qui pourraient se monter à plusieurs millions de francs si l'on en croit les chiffres indiqués par d'autres pays. Dans ces conditions, il apparaît plus judicieux d'investir ces montants dans l'information du public ainsi que dans la formation continue et le perfectionnement du personnel médical, mesures dont on peut attendre davantage d'effets, ainsi que le montre l'exemple de l'Espagne.

1.3.2.2

Autres possibilités de l'enregistrement et de la documentation

Aux USA, dans beaucoup d'Etats il est possible de faire inscrire son consentement au don d'organes dans le permis de conduire. Dans la zone UE, un seul pays autorise une telle inscription dans des papiers officiels: la Grande-Bretagne. En Suisse également, d'aucuns ont exprimé ça et là le souhait que l'on puisse faire mentionner le consentement au don d'organes dans des papiers officiels existants (passeport et carte d'identité [CI], permis de conduire, certificat d'assurance-maladie, passeportsanté, médicard proposée par les assureurs-maladie).

16

Il ressort de la majorité des études menées à l'étranger que la proportion des dons qu'il est théoriquement possible d'atteindre est de l'ordre de 60 personnes par million d'habitants puisque, pour des raisons d'ordre médical, seul 0,5 % des personnes décédées chaque année peut entrer en considération pour un don d'organe. D'un point de vue médical, il n'est donc pas toujours indispensable de pouvoir consulter les données du registre. Aussi, dans ce contexte entend-on par efficacité le fait qu'une inscription consultée reflète avec une certaine probabilité la volonté réelle du donneur potentiel. De telles considérations ont amené la Norvège à la conclusion que l'efficacité du registre passait par l'inscription d'au moins deux tiers de la population, ce qui relève de l'utopie.

77

L'enregistrement d'une déclaration de don dans des papiers officiels se heurte à diverses difficultés: ­

Modification de la volonté du donneur: il serait impossible de prouver rapidement que la volonté du donneur a changé. On ne pourrait donc avoir la garantie que l'inscription correspond à la volonté effective du titulaire du document. Cet inconvénient d'envergure subsisterait même si la déclaration de don était inscrite dans des papiers renouvelés à intervalles réguliers, tels que le certificat d'assurance-maladie qui est valable une année.

­

Réunion problématique de données hétéroclites: le passeport, la CI et le permis de conduire n'ont rien à voir avec le don d'organes. Il semble donc problématique de réunir dans le même document une rubrique «déclaration de don» avec des informations totalement étrangères (p. ex. l'aptitude à conduire une automobile).

­

Disponibilité des documents: tout le monde n'a pas sur lui en permanence les papiers en question (notamment le passeport et le permis de conduire).

Dans ces conditions, il ne serait pas possible de s'assurer rapidement et de manière fiable qu'il y a bien consentement au don d'organes.

­

Transparence de l'inscription: au cas où l'information serait stockée sur un support électronique, il faudrait pourvoir à ce que la personne titulaire puisse en tout temps consulter la totalité des données enregistrées. Il s'agit de permettre aux porteurs de pièces d'identité d'avoir le contrôle des données personnelles enregistrées sur elles, possibilité qui ne peut que créer la confiance.

Suite aux postulats Ostermann et Zisyadis il a été examiné la question de savoir s'il était possible d'inscrire sur les papiers officiels que sont les passeports, les CI et les permis de conduire, que leur titulaire a consenti au don d'organes.

­

S'agissant du passeport et de la CI, l'analyse des avantages et des inconvénients conduit à la renonciation à une telle inscription, parce que ces papiers servent à attester d'une identité et d'une nationalité, ce qui n'a rien à voir avec le don d'organes (message du 28 juin 2000 concernant la loi fédérale sur les documents d'identité des ressortissants suisses, FF 2000 4391).

­

Au recto du permis de conduire valable dans l'UE (format carte de crédit), il y a un champ dans lequel l'Etat qui délivre le document peut inscrire des données concernant la sécurité de la circulation ou la décision du titulaire (avec l'accord de celui-ci) quant au don d'organes. En Suisse, on étudie actuellement l'introduction d'un permis de conduire au format carte de crédit. Toutefois, dans ce cas de figure également, il semble préférable, compte tenu du manque d'espace, de donner la priorité à des données touchant la circulation et de renoncer à l'inscription d'une déclaration de don.

Aussi, les considérations qui précèdent suggèrent de renoncer à prévoir une disposition légale qui instaure un registre des transplantations.

La volonté quant au don d'organe peut aujourd'hui être attestée dans la carte de donneur ou elle peut être indiquée aux proches. Ces deux possibilités subsisteront.

78

On envisage par ailleurs de créer en Suisse un carnet de santé. Une étude a été menée pour examiner son utilité; elle portait sur l'analyse des aspects juridiques et techniques de l'introduction d'une carte de santé électronique à puce17. L'inscription dans un carnet de santé de la volonté du don d'organes semble envisageable. Même si des arguments d'ordre médical ou relevant des droits des patients, sans parler des arguments économiques plaident en faveur de la solution que représente une carte multifonctionnelle de santé, d'urgence et d'assurance, il conviendrait d'étudier plus précisément au cas par cas les aspects suivants: le but précis d'utilisation, la technologie de la carte à puce et la mise à jour des inscriptions.

1.3.3

Définition de la mort, critère et constatation du décès

1.3.3.1

Introduction

Jusqu'à la fin des années 60, les scientifiques ont soutenu le point de vue selon lequel la vie de l'être humain prenait fin par l'arrêt respiratoire et circulatoire causé par la défaillance irréversible du coeur. Ce point de vue s'inspire de la conception philosophique ancienne voulant que le coeur soit le siège de l'âme et, partant, l'organe où frappait la mort. Si l'on était conscient que la mort était un processus, on voyait toutefois en elle l'événement dont la survenance pouvait être clairement décelée à l'arrêt cardiaque. L'être humain était réputé vivre jusqu'à «son dernier souffle», celui par lequel il «expirait» et qui représentait le stade à partir duquel la médecine ne pouvait plus rien. Le critère ­ considéré aujourd'hui comme classique ­ de «l'arrêt cardiaque», qui désigne en fait la défaillance irréversible du coeur et des poumons, a permis d'établir un certain nombre de signes indubitables à partir desquels on pouvait facilement déterminer la survenance de la mort, événement, au surplus irréversible et intangible. Après que le coeur eut cessé de battre et que la respiration se fut éteinte, apparaissaient bientôt les signes indubitables de décès tels que la fixité des yeux, l'absence de pouls et de réflexes, suivis de la rigidité cadavérique et de l'apparition de taches sur le corps. Il n'existait pas de définitions légales du critère de décès et il ne semblait d'ailleurs pas nécessaire d'en établir, étant donné la netteté manifeste de la conception que l'on avait alors de la mort.

Par la suite, le critère classique du décès est devenu progressivement inapplicable compte tenu du recours de plus en plus fréquent à des appareils et techniques permettant de maintenir ou de rétablir les fonctions vitales. Si, autrefois, la médecine ne pouvait plus rien pour un patient frappé d'un arrêt respiratoire et circulatoire, par exemple, elle était en mesure de le maintenir en vie, en réussissant à rétablir les fonctions cardiaques et pulmonaires par des techniques nouvelles de réanimation (massage cardiaque extra-corporel; bouche à bouche). A compter de ce progrès, l'arrêt respiratoire et circulatoire a été considéré comme une mort clinique, c'est à dire un état qui, cliniquement parlant, a toutes les apparences de la mort. Celle-ci ne devient cependant effective que si les médecins ne sont pas
parvenus à rétablir les fonctions respiratoire et circulatoire, en d'autres termes si l'on se trouve en présence d'une défaillance irréversible d'organes vitaux.

17

Office fédéral des assurances sociales, Un carnet de santé en Suisse?, rapport de recherche no 3, OCFIM 1999.

79

De surcroît, les progrès enregistrés par la médecine intensive depuis le début des années 50 ont permis de maintenir les fonctions respiratoires et circulatoires grâce à des coeurs et poumons artificiels, appareils qui permettent de compenser pendant un certain temps la défaillance des organes naturels. Ainsi donc, la médecine intensive moderne permet, aujourd'hui, d'allonger artificiellement le laps de temps séparant l'arrêt cardiaque de la mort cérébrale. Dans ces conditions, le critère classique de l'arrêt circulatoire et respiratoire devenait caduc. Dès lors, la question de savoir ce qui fait en réalité qu'un être humain est mort et dans quel état la mort est intervenue se posait avec d'autant plus d'acuité.

1.3.3.2

Le concept de «mort cérébrale»et son évolution

En 1959, les neurologues français Mollaret et Goulon ont décrit l'état de «coma dépassé». Ils ont constaté que dans un tel état, malgré le succès d'un début de réanimation, on ne pouvait finalement pas empêcher le décès du patient en le plaçant sous respiration artificielle continue. En recourant à des soins intensifs, on a donc pu maintenir l'organisme en fonction quand bien même le cerveau était déjà endommagé de manière irréversible.

Ce fut cependant le Comité ad hoc de la Harvard Medical School qui, en 1968, soutint pour la première fois l'opinion que les patients en état de «coma dépassé» fussent décédés et introduisit la notion de «mort cérébrale»18. Ce comité plaida pour l'application du «coma dépassé» comme nouveau critère de décès, cela pour deux motifs: ­

Il est un fait que les mesures de réanimation et de soutien pratiquées sur des blessés graves ne sont parfois que partiellement couronnées de succès, avec pour conséquence que le coeur du patient continue à battre alors que son cerveau a subi des lésions irréversibles. Un tel état constitue une très lourde épreuve pour le patient, sa famille, les hôpitaux, sans parler des personnes qui pourraient avoir besoin des lits de ces patients comateux.

­

Les intérêts de la médecine de transplantation: des critères dépassés de définition de la mort pourraient prêter à controverse quand il s'agit de se procurer des organes en vue de transplantations.

Au regard des impératifs de la médecine de transplantation, il n'était pas pertinent d'appliquer le critère classique de l'arrêt circulatoire et respiratoire pour déterminer le décès d'un patient hospitalisé aux soins intensifs, après que l'on ait arrêté l'appareillage de réanimation. L'arrêt de ces appareils aurait, en effet, pour conséquence d'interrompre la circulation et l'oxygénation. Or la condition dont dépend le succès des transplantations est précisément que les organes à greffer ne subissent qu'une ischémie très courte et soient aussi «frais» que possible, en d'autres termes continuent d'être irrigués jusqu'au moment où ils seront prélevés.

18

80

Ad Hoc Committee of the Harvard Medical School to Examine the Definition of Brain Death, A Definition of Irreversible Coma, Journal of the American Medical Association, 205, 1968, p. 337.

Par la suite, cette conception s'est imposée au point de prévaloir aujourd'hui dans presque tous les Etats (cf. ch. 1.3.3.5).

L'expression «mort cérébrale», très usitée aujourd'hui, est malheureuse, car elle peut conduire à la conclusion erronée qu'au stade de la «mort cérébrale», seul le cerveau est mort et qu'il y a différentes sortes de mort. Il serait donc juste de parler de «décès par défaillance irréversible de l'intégralité du cerveau».

1.3.3.3

Contenu du concept de «mort cérébrale»

Le concept de «mort cérébrale» repose sur les hypothèses suivantes: ­

La mort est un phénomène biologique. Seuls des organismes vivants peuvent mourir et tous ceux-ci doivent mourir. Il est donc question de la mort d'un organisme et non pas de la mort de parties de celui-ci, c'est-à-dire d'organes, de tissus ou de cellules particuliers.

­

La mort est irréversible.

­

La mort est un événement et non un processus. «Vivant» et «mort» sont des états d'un organisme, alors que «mourir» et «se désintégrer» sont des processus que subit l'organisme: le processus du «mourir» se déroule pendant que l'organisme est vivant et celui du «se désintégrer» alors qu'il est mort.

L'organisme est soit vivant, soit mort. Le décès marque le passage de la mort à la désintégration.

A partir de ces hypothèses, le concept de «mort cérébrale» permet d'analyser et de répondre en trois phases successives19 à la question de savoir ce qui constitue à proprement parler la mort d'une personne:

19

­

Il s'agit tout d'abord de définir la mort, autrement dit de répondre à la question: «qu'est-ce que la mort?»

­

Il importe ensuite de fixer un critère de mort, afin de pouvoir déterminer à quel moment on est en présence d'une situation qui répond à la définition.

Le critère indique l'état de fait qui marque la survenance du décès. Il permet de répondre à la question:«à quoi reconnaît-on la mort?»

­

Enfin, il faut arrêter des procédures de tests, à l'aide desquels on puisse constater si le critère de la mort déterminé précédemment est rempli. Les tests permettent de répondre à la question: «comment peut-on établir qu'il y a mort?»

Bernat J.L., A Defense of the Whole-Brain Concept of Death, Hastings Center Report 28, no. 2, 1998, p. 14.

81

1.3.3.3.1

Définition

Nombre de propositions sont impropres à constituer une définition: définir la mort comme «la perte de la vie» est tautologique et n'est pas d'un grand secours, car une telle définition n'induit aucune information utile. De même, la perte irréversible de la conscience («higher brain») est une définition inadéquate. En effet, si on s'y conformait, il faudrait déclarer morts les patients en état végétatif persistant, mais qui respirent de façon autonome.

Dans le concept de «mort cérébrale», la mort est définie comme «la défaillance irréversible de toutes les fonctions critiques de l'organisme pris dans sa totalité» («the permanent cessation of the critical functions of the organism as a whole»). Par «fonctions critiques», on entend les fonctions vitales que sont la respiration spontanée et le contrôle autonome de la circulation sanguine, les fonctions intégrantes qui garantissent l'homéostasie de l'organisme, ainsi que la conscience. Pour qu'une personne soit décédée, il faut que toutes ces fonctions aient cessé de façon permanente; autrement dit, il suffit qu'une seule de ces trois fonctions subsiste pour que le patient soit en vie.

1.3.3.3.2

Critère de la mort

Dans le concept de «mort cérébrale», la mort est décrite comme «la défaillance irréversible de toutes les fonctions cliniques du cerveau pris comme un tout» («the irreversible cessation of all clinical functions of the entire brain»). La limitation aux fonctions cliniques vient du fait que s'agissant des fonctions cérébrales on doit opérer une distinction entre les fonctions «intégrantes» et la simple «activité physiologique». Seules les premières sont visées par la notion de «fonctions cliniques»; les «activités électro-encéphalographiques spontanées» résiduelles chez les personnes en état de «mort cérébrale» font partie de la seconde catégorie et ne constituent donc pas des «fonctions cliniques». Le critère de la mort n'implique donc pas la défaillance des fonctions de chaque cellule nerveuse.

Pour satisfaire à la définition, les fonctions cliniques du cerveau dans son ensemble doivent avoir cessé: les fonctions vitales sont contrôlées par le tronc cérébral, les fonctions intégrantes par le tronc cérébral et l'hypothalamus, la conscience par le tronc cérébral, le thalamus et le cortex.

1.3.3.3.3

Tests

Chez les patients qui ne sont pas sous respiration artificielle, les tests viseront à établir que les battements du coeur et la respiration ont cessé de façon irréversible. Si tel est bien le cas, on peut en inférer avec certitude que le cerveau subira également des lésions irréversibles au bout d'un certain temps, de sorte que le critère de la mort est ainsi rempli.

Chez les patients sous respiration artificielle, on ne peut pas recourir aux tests de mesure de la circulation et de la respiration. Il faut donc mesurer directement ou

82

indirectement les fonctions cliniques du cerveau (p. ex. par des tests des réflexes, notamment le test d'apnée, par l'encéphalogramme ou l'angiographie).

Il convient de relever que les tests traditionnels ont toujours aussi compris la mesure directe des fonctions cérébrales; en effet, pendant des centaines d'années, les médecins ont vérifié la présence de la respiration, d'une réaction pupillaire à la lumière ainsi que des battements cardiaques. Une mesure de ces derniers ne constitue par une mesure directe des fonctions cérébrales, mais une mesure indirecte, car sans respiration, les battements du coeur cessent en quelques minutes. On peut donc affirmer que le concept de «mort cérébrale» a transformé la conception implicite traditionnelle de la mort en une conception explicite. Ce qui est nouveau, c'est que les méthodes de test actuelles permettent de constater le décès à un stade très précoce.

1.3.3.4

Critique et problèmes concernant le concept de «mort cérébrale»

Le concept de «mort cérébrale» est critiqué de différentes parts. D'aucuns font valoir que pour qu'il y ait mort, il n'est pas nécessaire qu'il y ait défaillance de toutes les fonctions cérébrales et qu'il suffirait que la conscience ait disparu sans rémission ou que le tronc cérébral ait subi une défaillance irréversible (concept de «mort cérébrale» partielle). D'autres soutiennent que la «mort cérébrale» ne saurait être assimilée à la mort d'une personne, cette dernière n'intervenant que lorsque la circulation sanguine a également cessé. Cette critique a surtout été émise en Allemagne, où la conception de la «mort cérébrale» fut un thème central pendant les délibérations du Parlement sur la loi sur les transplantations20.

Autre critique émise: le concept de «mort cérébrale» servirait avant tout les intérêts de la médecine de transplantation, en ce sens qu'il permet le prélèvement d'organes dans des circonstances favorables. L'autre motif qui fut indiqué en 1968 pour introduire ce concept de «mort cérébrale», soit de permettre d'arrêter le traitement de médecine intensive, n'est plus depuis longtemps un argument en faveur de ce concept, du fait que pour des patients souffrant d'un coma irréversible, pour lesquels ne subsiste plus aucun espoir de récupération, les soins médicaux sont arrêtés avec leur consentement ou celui de leurs proches sans que la «mort cérébrale» ne soit constatée auparavant.

L'un des problèmes est certainement aussi constitué par le fait que la «mort cérébrale» n'est pas perceptible. Chez une personne sous respiration artificielle, elle ne se laisse pas constater à des signes extérieurs comme la raideur cadavérique ou les taches livides: la personne n'est pas accessible aux perceptions sensorielles. Grâce à la respiration artificielle, la circulation reste maintenue; c'est pourquoi une personne en état de «mort cérébrale» ne se distingue pas extérieurement d'une personne inconsciente, mais en bonne santé. Cette non perceptibilité est la cause de grandes difficultés et inhibitions psychologiques, notamment pour le personnel soignant et

20

Les députés se sont prononcés par 424 voix contre 201 en faveur du concept de «mort cérébrale».

83

les proches, pour ne plus voir une personne en état de «mort cérébrale» comme une personne très gravement malade, mais comme un cadavre.

1.3.3.5

Concept de «mort cérébrale» au niveau international

Le concept de «mort cérébrale» a aujourd'hui cours dans pratiquement tous les Etats21. Aucun ne connaît le concept de «mort cérébrale» partielle au sens de la «higher brain death», concept selon lequel un être humain est déjà considéré comme mort lorsque sa conscience s'est éteinte de manière irréversible. La Grande-Bretagne, quant à elle, applique un concept limité au tronc cérébral.

La plupart des pays ont ancré le concept de «mort cérébrale» dans leur législation sur la transplantation. Deux (la Suède et l'Italie) ont même adopté une loi spéciale à ce sujet.

La réglementation de certains pays contient les particularités suivantes:

21

84

­

Grande-Bretagne: ce pays n'exige que la preuve de la défaillance des fonctions du tronc cérébral; il n'applique ainsi qu'un concept de «mort cérébrale» partielle. Comme la défaillance des fonctions du tronc cérébral est un signe fiable de lésion d'autres régions du cerveau, il n'y a, à vrai dire, pas de différence sérieuse avec le concept de «mort cérébrale» intégrale.

­

Danemark: en 1987, le Danemark était le seul pays d'Europe occidentale qui ne reconnaissait pas le concept de «mort cérébrale». Le Conseil éthique danois recommandait de continuer à utiliser comme critère de la mort l'arrêt irréversible de la circulation sanguine et de la respiration. La défaillance des fonctions cérébrales ne devait pas être considérée comme la mort. Elle devait cependant caractériser un état particulier, le «processus irréversible de la mort». Le prélèvement d'organes était possible sur une personne dans cet état, selon la recommandation du Conseil éthique danois, si cette personne y avait consenti. L'idée de prélever des organes sur une personne qui n'était pas déclarée morte a semblé trop radicale au gouvernement danois. Il édicta donc en 1990 une loi qui mettait le Danemark au même niveau, sur cette question, que les autres pays européens, en instaurant la «mort cérébrale» comme critère de décès.

­

Japon: ce n'est qu'en 1997 que le Japon a reconnu et ancré dans la loi le concept de «mort cérébrale». La loi sur la transplantation contient une particularité en ce sens que le donneur doit avoir consenti par écrit avant son décès à la constatation de sa «mort cérébrale». Il doit donc décider lui-même si son décès doit être constaté par la preuve de la défaillance de la circulation sanguine et de la respiration ou à l'aide de tests neurologiques.

P. ex. en Allemagne, Autriche, France, Italie, Belgique, aux Pays-Bas, en Espagne, en Grèce, en Finlande, en Norvège, au Danemark, en Suède, en Russie, en Pologne, en Hongrie, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et au Japon.

1.3.3.6

Constatation du décès chez les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible

1.3.3.6.1

Situation initiale et définitions

De nos jours, les prélèvements d'organes sont principalement effectués sur des personnes en état de «mort cérébrale», sous respiration artificielle et dont le coeur bat encore pour cette raison. Toutefois, en raison de la pénurie d'organes, on prélève aussi de plus en plus des organes sur des personnes dont le décès est constaté par la défaillance irréversible des fonctions cardio-circulatoires, c'est-à-dire dont le coeur a déjà cessé de battre avant le prélèvement22. En Suisse, la part que représentent ces personnes dans le total des donneurs est relativement modeste puisque durant la période 1994­2000, l'effectif annuel moyen de ces personnes s'élevait à 6.

Ces personnes se répartissent en deux catégories: ­

les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible contrôlées: il s'agit de patients en phase terminale, chez lesquels les mesures médicales de maintien de la vie ont été arrêtées avec leur accord ou celui de leurs proches.

Comme chez ces patients le décès est prévisible et le prélèvement d'organes, après l'arrêt des mesures médicales, peut être contrôlé et planifié à l'avance, on parle de personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible contrôlées.

­

les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible non contrôlées: il s'agit des patients dont le coeur s'est arrêté brusquement et qui ne peuvent être réanimés. Comme chez ces patients la défaillance cardiaque est inopinée et que le prélèvement d'organe ne peut de ce fait être planifié à l'avance, on parle de personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible non contrôlées.

Chez les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible on prélève principalement les reins, car ces organes sont les moins sensibles à un arrêt de l'irrigation sanguine. Cependant, d'autres organes (foie, pancréas et poumons), ainsi que des tissus et des cellules peuvent aussi être prélevés et transplantés avec succès. Les organes de personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible présentent des taux de survie comparables à ceux de donneurs conventionnels. Une étude américaine a montré que le fait d'attendre l'arrêt cardiaque n'influe guère sur la probabilité de survie des reins dans un nouvel organisme: le taux de survie après un an (83 %) était presque aussi élevé que lors de transplantations de reins prélevés de façon conventionnelle (86 %)23.

22

23

En anglais, on désigne ces donneurs par les termes de «Non Heart-Beating Donors». On les remplacera dans le présent message par la notion de «personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible».

Yong W. Cho et al., Transplantation of Kidneys from Donors whose Hearts have stopped beating, The New England Journal of Medicine, 338, 1998, p. 221.

85

1.3.3.6.2

Constatation du décès

Chez les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible, comme chez les donneurs conventionnels, le prélèvement d'organes ne peut être pratiqué qu'une fois le décès survenu. En règle générale, cependant, la circulation est maintenue artificiellement après la constatation du décès, de sorte que les organes continuent à être irrigués et leurs fonctions vitales préservées. Tel n'est pas le cas pour les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible. Si l'on veut transplanter des organes possédant encore toute leur vitalité, il faut les prélever aussi rapidement que possible après l'arrêt cardiaque, c'est-à-dire faire en sorte que le «temps d'ischémie chaude» soit aussi bref que possible. En raison de cette situation particulière, il existe le risque que le donneur soit déclaré mort trop tôt.

Il est parfois possible de remédier à l'arrêt cardiaque en prenant des mesures de réanimation. Il arrive aussi que le coeur se remette en marche tout seul. C'est pourquoi, l'arrêt cardiaque ne constitue pas en lui-même un indice de décès assez sûr.

Pour établir que le patient est mort, il faut avant tout que l'arrêt cardiaque soit irréversible, en d'autres termes, qu'il ait duré assez longtemps pour que l'on soit en droit d'affirmer que les fonctions du cerveau et du tronc cérébral se sont éteintes de manière irréversible. A partir de quel moment est-ce le cas? La réponse à cette question est aujourd'hui controversée.

Chez les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible contrôlées, que l'on renonce à réanimer, il s'agit de déterminer à partir de quel moment le coeur ne peut plus se remettre en marche par lui-même. Au bout d'un certain laps de temps postérieur à l'arrêt cardiaque, le coeur perd cette faculté. Il n'y a cependant aucune étude scientifique qui permette de déterminer exactement la longueur de ce laps de temps.

Aux Etat-Unis, comme d'ailleurs dans d'autres pays, il existe de ce fait des pratiques très différentes quant à la fixation de cette durée. Selon le programme, soit il n'est exigé aucun intervalle, soit il est prescrit d'attendre une, deux ou plusieurs minutes.

Le protocole le plus connu à cet égard est certainement celui de l'Université de Pittsburgh, qui exige que l'on attende deux minutes après l'arrêt cardiaque24. Selon une étude de l'Université de Los Angeles,
l'intervalle de temps entre l'arrêt cardiaque et l'explantation s'est monté en moyenne à 14 minutes aux USA, pour 229 prélèvements de reins pratiqués entre 1994 et 199625.

L'Institute of Medicine des Etats-Unis a objecté que des laps de temps de deux minutes, par exemple, ne reposent pas sur des données expérimentales concernant la possibilité «d'autorétablissement» des fonctions cardiaques et sont trop courts pour permettre de constater la «mort cérébrale» sur la base de l'arrêt circulatoire. C'est pourquoi, il propose, pour les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible contrôlées, un intervalle de temps de 5 minutes (vérification de l'arrêt de la circula-

24

25

86

A propos de la fixation du décès, ce protocole fixe que: «... Given the above, any one of the following electrocardiographic criteria will be sufficient for certification of death: ­ 2 minutes of ventricular fibrillation ­ 2 minutes of electrical asystole (i.e. no complexes, agonal baseline drift only) ­ 2 minutes of electromechanical dissociation.» Yong W. Cho et al., Transplantation of Kidneys from Donors whose Hearts have stopped beating, The New England Journal of Medicine, 338, 1998, p.221.

tion sanguine pendant 5 minutes, par électrocardiogramme et par mesure de la tension artérielle)26.

En Europe, les recommandations de Maastricht préconisent un intervalle de temps de 10 minutes27. Dans ses directives, l'ASSM ne s'est pas encore prononcée sur cette question. Toutefois, elle est en train de remanier ses directives sur ce point.

La même incertitude règne quant à savoir combien de temps des mesures de réanimation peuvent avoir des chances de succès, question qui a toute sa pertinence dans le cas des personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible non contrôlées. A ce sujet, l'Institute of Medicine des Etats-Unis a relevé qu'il est difficile de définir une approche uniforme pour la constatation du décès de ces personnes, car leur statut médical peut être très variable. C'est pourquoi, en 1997, l'institut n'a pas été en mesure d'arrêter une recommandation. Il s'est borné à préconiser la poursuite des recherches et des discussions.

Selon les directives de l'ASSM, la constatation de la mort cardiaque ne peut s'effectuer au plus tôt qu'après 30 minutes de réanimation cardio-pulmonaire infructueuse dans des conditions cliniques. Les recommandations de Maastricht exigent un délai de 10 minutes après la cessation des mesures de réanimation.

En Allemagne, la «Bundesärztekammer» a considéré que jusqu'à présent il n'a pu être prouvé qu'un arrêt cardio-circulatoire de 10 minutes par une température corporelle normale était un équivalent sûr du critère de «mort cérébrale». En conséquence, un tel arrêt ne saurait remplacer les signes cliniques qui permettent d'établir à coup sûr le décès. Le fait qu'une réanimation biologique soit impossible et, partant, que l'arrêt cardiaque soit irréversible n'a jusqu'à présent pu être établi ni sur la base de la durée de la cessation des fonctions circulatoires, ni sur celle de critères autres que les signes cliniques sûrs de la mort. Les critères déterminant l'arrêt d'une thérapie, y compris des tentatives de réanimation, n'ont pas été standardisés jusqu'à présent, si tant est qu'ils puissent l'être28.

En résumé, force est de relever que les notables différences qui caractérisent les pratiques et recommandations découlent de l'absence d'identité de vue et de l'incertitude qui règne quant au stade à partir duquel l'arrêt cardiaque est «irréversible».

1.3.3.7

Incidences sur la réglementation à adopter

1.3.3.7.1

Situation initiale

Le droit fédéral ne connaît aujourd'hui aucune définition de la mort. L'art. 31 du CC dispose uniquement que la personnalité commence avec la naissance accomplie de l'enfant vivant et finit par la mort. A l'opposé, certains cantons ont édicté une réglementation qui soit est explicite (GE), soit renvoie aux directives de l'ASSM (AR, 26 27 28

Institute of Medicine, Non-Heart-Beating Organ Transplantation: Medical and Ethical Issues in Procurement, 1997.

Symposium: Statements and Recommendations of the Non Heart-Beating Donors, Maastricht, Pays-Bas, 30­31 mars 1995.

Bundesärztekammer, Organentnahme nach Herzstillstand («Non Heart-Beating Donor»), in: Deutsches Ärzteblatt 95, Heft 50, 1998, p. 3235.

87

TI). De son côté, le Tribunal fédéral a confirmé la constitutionnalité du concept de «mort cérébrale» dans deux arrêts (ATF 98 Ia 507, 123 I 112).

1.3.3.7.2

Avis de droit du Professeur Guillod

L'OFSP a demandé un avis de droit sur cette question au Professeur Guillod de l'Institut de droit de la santé de l'Université de Neuchâtel. Cet avis peut être résumé comme suit: Définition de la mort par le législateur La mort est un événement d'une portée juridique fondamentale, car elle marque la fin du statut juridique d'une personne et, ainsi, la fin de la protection constitutionnelle, civile et pénale de la vie. La définition de la mort est une question fondamentale, «une question de choix de valeurs», et non pas une simple question technique.

La définition de la mort a des effets pour chacun et non pas seulement pour certaines catégories de personnes ou pour les médecins. Cette définition doit être valable dans tous les cas: il n'y a qu'une seule mort et juridiquement, elle doit être la même pour tous (à cet égard, les procédures en vue de sa détermination peuvent être différentes selon le contexte). C'est pourquoi la tâche de définir la mort incombe au législateur et non pas au juge ou à une réunion d'experts (p. ex. l'ASSM ou la commission nationale d'éthique).

Définition de la mort dans le CC La mort devrait être définie dans une loi au sens formel, ne serait-ce que pour favoriser un large débat démocratique. De préférence, la définition de la mort devrait être insérée dans le CC et non pas dans la loi sur la transplantation. Cela soulignerait qu'il n'y a qu'une seule mort déployant des effets erga omnes.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le concept de «mort cérébrale» est compatible avec la Constitution fédérale, singulièrement avec le droit fondamental à la vie.

Outre la définition de la mort, il faut examiner les aspects suivants en vue d'une réglementation: ­

La détermination du moment du décès;

­

Le statut des médecins appelés à constater le décès;

­

La procédure de constatation du décès: il s'agit de règles scientifiques dont l'élaboration peut être déléguée à des organismes privés ou publics, p. ex.

l'OFSP ou l'ASSM.

Inadmissibilité du prélèvement d'organes sur des personnes mourantes Si une personne en état de «mort cérébrale» ne peut être considérée comme décédée, il n'est pas possible, d'un point de vue constitutionnel, de prélever ses organes. Cela consacrerait une nouvelle catégorie de personnes vivantes de rang inférieur, en

88

opposition avec le droit à la vie. Cette réflexion vaut également pour le cas où le prélèvement d'organes dans cet état correspondrait à la volonté expresse du donneur: le droit reconnaît certes aujourd'hui une certaine prééminence de la volonté personnelle: tout un chacun peut renoncer à un traitement médical, même s'il permet de sauver la vie; de même, toute personne peut accepter des mesures palliatives qui peuvent accélérer la survenance du décès. L'ordre juridique suisse ne reconnaît cependant aucune validité au consentement à un acte qui entraîne la mort. De même, l'intérêt prépondérant du receveur ne peut justifier un tel prélèvement. Il n'apparaît cependant pas acceptable de sacrifier une vie, même si elle est en train de s'éteindre, afin d'en sauver une autre. Le fait de considérer les personnes en état de «mort cérébrale» comme des mourants est de ce fait superflu, propre à induire un certain désarroi et dangereux.

1.3.3.7.3

Principes à la base de la réglementation légale

­

Les organes vitaux ne peuvent être prélevés que sur une personne décédée.

Un prélèvement d'organe avant le décès ne serait pas compatible avec l'ordre juridique suisse;

­

La définition de la mort et le critère de décès doivent s'appliquer à toutes les personnes: il n'existe qu'une seule mort et, juridiquement, elle doit être la même pour tous;

­

En revanche, les procédures de constatation du décès peuvent différer selon le contexte;

­

La réglementation incombe au législateur. Elle ne peut être le fait des médecins, des juges ou d'une réunion d'experts;

­

Les principes doivent être réglés au niveau de la loi. Cela devrait permettre un large débat démocratique, capital dans ce domaine où l'on touche à des valeurs éthiques primordiales;

­

Les principes doivent être établis dans la loi sur la transplantation, puisque c'est surtout dans le domaine de la médecine de transplantation que le besoin d'une réglementation se fait sentir.

1.3.3.7.4

Contenu de la réglementation légale

La loi doit statuer que le critère du décès est celui de la «mort cérébrale». Le législateur garantira ainsi une protection vis-à-vis de tendances indésirables: celles qui sont à l'adoption d'un concept de «mort cérébrale» partielle. Ainsi les patients appalliques, c'est-à-dire ceux dont la conscience quantitative (l'éveil) est préservée, mais dont le contenu qualitatif de la conscience (le vécu conscient) est définitivement éteint (ils se trouvent dans un «état végétatif persistant») et les patients anencéphales, c'est-à-dire les nouveau-nés dont la tête est caractérisée par des malformations typiques (absence du sommet du crâne, du cerveau, des méninges et, parfois, aussi du cervelet, du mésencéphale et du diencéphale) seront considérés

89

comme des personnes vivantes, même si leur qualité de vie et leur espérance de vie sont fortement hypothéquées.

La consécration du concept de «mort cérébrale» ne revient pas purement et simplement à passer outre la conviction des personnes qui le refusent. Les personnes qui sont dans ce cas pourront, en effet, renoncer à donner leur consentement ou encore déclarer leur opposition; elles pourront ainsi empêcher que ne soient prélevés sur elles des organes, des tissus ou des cellules si elles se trouvent en pareil état.

Afin d'éviter des conflits d'intérêts, les différents processus doivent être strictement séparés. Cela signifie, par exemple, que les médecins qui constatent le décès doivent être indépendants de ceux qui opèrent les prélèvements ou les transplantations.

La définition détaillée des procédures permettant de constater le décès, par exemple, des tests à appliquer, devrait être déléguée au Conseil fédéral. Il s'agit là, en effet, de normes techniques très fouillées et susceptibles d'être souvent révisées; elles n'ont donc pas leur place dans la loi.

1.3.4

Don d'organes par des personnes vivantes

1.3.4.1

Introduction

Le don d'organes peut avoir lieu non seulement après le décès du donneur mais encore de son vivant. En d'autres termes, un rein ou un poumon (organes doubles) ou des parties d'un organe simple (foie, intestin) peuvent être prélevés en vue de leur transplantation chez des donneurs en bonne santé et de leur vivant. Si, dans le cas du rein, le donneur se prive ainsi définitivement de l'un des deux organes, dans le cas du foie, en revanche, il bénéficie d'un processus de régénération. En effet, le foie dont on a prélevé un lobe se régénère en l'espace de trois à six semaines, retrouvant sa taille et son fonctionnement normaux. Cette propriété ­ unique en son genre ­ qu'a le foie fait que le fragment d'organe transplantée dans l'organisme du receveur se régénère spontanément par multiplication des cellules.

Le rein est l'organe qui fait le plus souvent l'objet d'un don par des personnes vivantes. Depuis quelques années, il est également possible de prélever un lobe du foie. Enfin, dans certains cas ­ rares il est vrai ­ on peut faire don d'une partie de poumon ou d'intestin, ces greffons n'ayant toutefois pas la propriété de se régénérer.

En Suisse, le prélèvement du rein sur des donneurs vivants est pratiqué dans les six centres de transplantation, celui de lobe du foie uniquement à Genève, Lausanne et Zurich. A fin 2000, 513 personnes au total avaient fait don d'un rein, treize d'un lobe du foie et une de parties de l'intestin grêle.

La proportion des dons de reins par des personnes vivantes s'est nettement accrue ces dix dernières années; en revanche, le don d'autres organes par des personnes vivantes est limité à un petit nombre de cas. S'agissant de celles du rein, ce pourcentage est cependant passé de 12 % à 27 % de 1992 à 2000 pour l'ensemble de la Suisse. A noter l'exception que représente le centre de transplantation de Bâle: en l'an 2000, il a enregistré un plus grand nombre de transplantations de reins prélevés sur des personnes vivantes que sur des donneurs décédés.

90

Aux USA29, le taux de dons provenant de personnes vivantes est passé de 33 % à 45 % en 1999 en ce qui concerne les transplantations de reins. S'agissant des autres organes, ce taux n'était que de quelques pour-cents au cours des cinq dernières années (3 % p. ex. pour les poumons en 1999). Au Canada, le taux de dons de reins provenant d'une personne vivante était, avec 44 %, du même ordre de grandeur30 qu'aux USA.

Dans l'ensemble, en Europe, 12,7 % des reins provenaient de personnes vivantes en 1999. Dans les pays européens, on recourt dans des proportions variables à la possibilité du don provenant d'une personne vivante dans le domaine de la thérapie rénale: si en 1998, 40 % des reins transplantés en Grèce et en Norvège provenaient de personnes vivantes, en France, en Italie et en Espagne, ce taux était inférieur à 5 %31.

1.3.4.2

Avantages du don d'organes par des personnes vivantes

Pour les receveurs, les avantages que présente un tel don sont évidents: il permet d'échapper aux délais d'attente, longs et éprouvants que l'on connaît habituellement en matière de transplantation d'organes prélevés sur des donneurs décédés. Il en résulte pour les patients souffrant d'une insuffisance rénale et tributaires de la dialyse un raccourcissement de la période durant laquelle cette thérapie leur est appliquée. Cela n'est pas sans importance lorsque l'on sait que comparativement aux personnes qui ont bénéficié d'une transplantation rénale, les patients sous dialyse présentent des risques nettement plus importants d'affections telles que l'infarctus du myocarde, l'hypertension artérielle et l'anémie.

Un autre avantage du don par des personnes vivantes réside dans le fait que la transplantation peut être planifiée. Les personnes (donneur et receveur) peuvent être opérées dans les meilleures conditions.

Bien souvent, la transplantation d'organes prélevés sur des donneurs vivants donne de meilleurs résultats que celle d'organes provenant de personnes décédées. Le risque de détérioration du transplant (p. ex. parce que la durée du transport a été trop longue), la perte du greffon suite à une réaction de rejet ainsi que d'autres complications sont moins fréquents. En moyenne, les taux de survie à long terme des organes transplantés à partir de donneurs vivants, surtout s'il s'agit de parents des receveurs, sont supérieurs de 10 % aux résultats que l'on obtient par la transplantation d'organes prélevés sur des personnes décédées.

Outre les avantages d'ordre médical, le don d'organes par des personnes vivantes peut contribuer au mieux être psychique du donneur et du receveur. Il ressort d'enquêtes réalisées à propos d'une thèse de doctorat soutenue en Suisse32, que 98 % des donneurs interrogés ont déclaré qu'ils ne regrettaient pas leur geste et 29 30 31 32

United Network for Organ Sharing, Annual Report 2000, tableau 1.

Organ Donation Ontario, 1999 Annual Statistics Report, p. iii.

The Renal Association, United Kingdom Guidelines for living donor kidney transplantation, janvier 2000, p. 6.

Spartà G., Basler Lebend-Nieren: 1 bis 21 Jahre danach; Dissertation, Bâle, 1995.

91

qu'ils le referaient. On a pu constater également que le partenariat étroit noué entre le donneur et le receveur avait même gagné en stabilité. On ne connaît que peu de cas où il en allait autrement.

Un dernier avantage du don d'organes par des personnes vivantes est qu'il contribue à réduire le temps pendant lequel les patients sont en attente d'un organe.

1.3.4.3

Inconvénients du don d'organes par des personnes vivantes

L'inconvénient de cette technique médicale est qu'elle implique une personne en bonne santé dans la pathologie d'une autre personne. Toutefois, sur le plan de la santé, l'explantation ne rapporte rien au donneur. Au contraire, celui-ci s'expose au risque que l'organe qui lui reste ne puisse pas assumer toutes ses fonctions, voire devienne totalement déficient. A cela s'ajoutent les risques que font courir au donneur les examens cliniques précédant l'intervention, l'explantation elle-même, sans parler d'éventuels troubles postopératoires. Le donneur peut également être confronté à des problèmes financiers si sa santé s'est détériorée par suite du don d'organe ou d'une portion d'organe.

Dans le cas du rein, le risque de complications est restreint. En revanche, il est plus sérieux pour le donneur d'un lobe du foie. Cet organe étant très vascularisé, il se peut qu'une hémorragie se produise dans la région du prélèvement. Dans le monde, trois donneurs sont décédés jusqu'à présent à la suite d'une explantation d'un lobe du foie.

La réaction de rejet est un processus biologique qu'il n'est pas toujours possible de déceler par des tests avant une transplantation. Tant le donneur que le receveur doivent être au courant du risque que fait courir la perte de l'organe et le prendre en compte dans leur réflexion. Cette perte met à rude épreuve le psychisme du donneur comme du receveur.

1.3.4.4

Relations entre donneurs et receveurs

En règle générale, on considère un lien de consanguinité avec le receveur comme un avantage pour un don d'organe par une personne vivante. Bien souvent, cela se justifie pour des raisons d'ordre médical et, plus précisément, immunologique. Juridiquement, toutefois, il faut que le don d'organe soit admissible même en l'absence d'un lien de consanguinité entre le donneur et le receveur.

Le don d'organe par une personne vivante ne doit donc pas seulement être licite lorsqu'il est fait en vue d'une transplantation sur un parent au premier ou au second degré, le conjoint, le fiancé ou la fiancée, ou encore d'une personne avec laquelle le donneur entretient des relations personnelles particulièrement étroites. Si, par exemple, un mari n'est pas en mesure de donner un organe à sa femme pour cause d'incompatibilité sanguine, il faut que grâce à l'intervention d'un autre couple dans la même situation mais présentant avec le premier une «compatibilité sanguine croisée», puisse avoir lieu un échange d'organes, autrement dit une transplantation

92

croisée. En Europe une transplantation croisée de reins a eu lieu pour la première fois le 26 mai 1999, à l'hôpital cantonal de Bâle.

Nombre de pays, par souci de se prémunir de l'éventualité d'un trafic d'organes exigent légalement qu'il y ait une relation sentimentale étroite ou un lien de parenté entre le donneur et le receveur. Ce raisonnement n'est cependant pas convaincant.

On ne voit en effet pas pourquoi le risque de trafic d'organes ou la probabilité que l'on exerce des pressions sur le donneur serait plus grand à l'extérieur de la famille qu'à l'intérieur. En outre, une opinion a longtemps prédominé: celle qui voudrait que pour des raisons d'ordre médical seuls des consanguins pouvaient prétendre faire un don d'organes de leur vivant. Des données cliniques permettent aujourd'hui de réfuter ce point de vue.

Dans le cadre de la procédure de consultation, les participants ont été unanimes à approuver le principe selon lequel la licéité du don d'organe par une personne vivante ne doit pas être subordonnée à l'existence d'un lien particulier entre le donneur et le receveur. Ce principe est donc maintenu dans le projet de loi.

1.3.5

Attribution d'organes

1.3.5.1

Introduction

En raison de la pénurie d'organes, la médecine de transplantation est, depuis ses débuts, confrontée plus particulièrement à un problème qui occupe une place de plus en plus importante dans le débat sur la politique de la santé: comment répartir judicieusement du point de vue médical et de manière acceptable sur le plan social des ressources thérapeutiques lorsqu'elles sont restreintes? Dans ce contexte, on relèvera que les capacités de soins potentielles de la médecine de transplantation sont moins déterminées par les restrictions économiques dans le domaine de la santé et les décisions de politique d'approvisionnement que par la propension de la population au don d'organes. A l'heure actuelle, la palette des thérapies offertes par la médecine de transplantation dépend uniquement du nombre d'organes disponibles et aussi, dans une mesure très importante, de la volonté de coopérer des hôpitaux dans lesquels les prélèvements sont effectués ainsi que de l'inclination dont fait montre le citoyen lambda pour le don d'organes.

L'appel à la solidarité des donneurs potentiels et le fait que les décisions d'attribution peuvent, dans certains cas, être synonymes de vie ou de mort pour le patient, font que la sélection des receveurs potentiels doit également être régie par le principe de la solidarité. En d'autres termes, il faut garantir à toutes les personnes en attente d'une transplantation les mêmes chances d'accéder à un organe ainsi qu'appliquer les critères de sélection généralement admis. Ce faisant, on veillera, en particulier, à exclure l'arbitraire et les traitements inéquitables.

Même s'il est incontestable que l'attribution doit être régie par le principe de l'équité, il n'apparaît pas si simple de l'appliquer dans la pratique. La recherche de critères objectifs, rationnels, transparents, socialement non discriminatoires et généralement reconnus permettant de définir l'équité en matière d'attribution est tout sauf aisée.

93

1.3.5.2

Attribution d'organes aujourd'hui en Suisse

1.3.5.2.1

Inscription dans la liste d'attente

La centrale de coordination nationale qu'est SwissTransplant tient à jour une liste d'attente nationale dans laquelle sont recensés tous les patients en attente d'une transplantation d'organe. Les centres de transplantation et la centrale de coordination nationale ont accès à cette liste par l'informatique. En sus de celle-ci, les centres de transplantation tiennent chacun une liste d'attente locale. La décision d'inscrire un patient dans la liste d'attente est prise par les centres de transplantation. Les critères selon lesquels ceux-ci prennent leurs décisions ne sont pas réglementés de manière générale et n'ont donc pas force impérative. Dans la pratique toutefois les critères déterminants sont les suivants: ­

L'existence d'une indication médicale manifeste: un organe vital (poumon, coeur, foie, pancréas, rein) doit avoir subi une lésion définitive telle que sans remplacement de cet organe à court terme, le patient risque de décéder. La transplantation doit, donc, être la seule thérapie appropriée à l'état de santé du patient ou, du moins, la plus efficace.

­

L'absence de sévères contre-indications médicales qui pourraient compromettre le succès de la transplantation ou y faire totalement obstacle. Par exemple, le patient ne doit pas souffrir d'une infection qui, sous l'effet du traitement aux immunosuppresseurs qui fait obligatoirement suite à la transplantation, pourrait se réveiller ou prendre des formes mortelles. Il est vrai qu'un traitement préopératoire permet d'atténuer voire d'éradiquer une partie des contre-indications.

­

Il faut que l'état psychique du patient permette d'escompter qu'après la transplantation celui-ci prenne régulièrement les médicaments immunosuppresseurs qui contribuent de manière décisive à assurer le succès de l'intervention.

­

L'âge du patient est également pris en compte puisque l'on sait que plus une personne vieillit plus elle risque de cumuler les contre-indications.

­

Le patient doit obligatoirement avoir son domicile en Suisse; sont donc admis dans la liste d'attente les ressortissants suisses, les étrangers domiciliés en Suisse et les frontaliers qui travaillent en Suisse.

­

Le patient doit avoir été dûment informé de la procédure, des risques et des thérapies alternatives et avoir consenti à son inscription sur la liste d'attente.

Les patients dont l'état de santé nécessite une transplantation d'urgence sont enregistrés sur une liste des cas «super urgents».

1.3.5.2.2

Attribution par la centrale de coordination nationale

Toute personne qui a consenti à faire un don d'organes et dont le décès a été constaté conformément aux directives de l'ASSM est déclarée à la centrale de coordination nationale. A partir de ce moment-là, toutes les informations concernant le don-

94

neur sont enregistrées dans le programme informatique de SwissTransplant. Afin de garantir l'anonymat, un chiffre remplace, toutefois, l'identité du donneur. En l'an 2000, la centrale de coordination nationale a organisé l'attribution des organes provenant de 98 donneurs dont 72 étaient enregistrés auprès de l'un ou l'autre des 6 centres de transplantation et 26 auprès de 10 hôpitaux ne pratiquant pas la médecine de transplantation (Aarau, Bellinzona, Brigue, Bruderholz, Coire, La Chaux-deFonds, Locarno, Lugano Civico, Lucerne, Sion).

Les organes appropriés à une transplantation sont proposés aux centres de transplantation selon des règles d'attribution spécifiques à chaque organe, établies par les groupes de travail de SwissTransplant. Lorsqu'un patient représente un cas «superurgent», l'organe proposé par la centrale de coordination l'est selon des critères qui tiennent compte de la situation spécifique de ce patient. Dans tous les autres cas, un organe disponible est proposé à un centre de transplantation, charge à lui de l'attribuer ensuite à un patient figurant sur la liste d'attente qu'il tient.

S'agissant de l'attribution on peut distinguer trois échelons ou degrés de priorité: Attribution en première priorité Dans ce cas, l'organe est attribué en priorité à un patient dont l'état justifie une telle décision. Cela vaut, au premier chef, pour les patients inscrits sur la liste des cas «super urgents» (SU). Dans ces cas, SwissTransplant propose le prochain organe disponible en Suisse ou à l'étranger, cette offre tenant compte de l'état spécifique du patient.

Les patients SU en attente de la transplantation d'un coeur ou d'un foie se voient attribuer le premier organe disponible qui soit compatible avec leur groupe sanguin, quels que soient l'hôpital où il a été prélevé et le centre où il sera transplanté. Si la liste des cas SU comporte plusieurs patients, l'organe disponible est attribué en priorité au centre dans lequel se trouvent à la fois le donneur et le receveur. A défaut, l'attribution a lieu selon des critères médicaux par concertation entre les centres. A vrai dire, les règles en vigueur ne permettent pas de se faire une idée précise de ce que recouvrent ces critères.

Pour les poumons, il n'existe pas de priorité SU. Si un patient a un impérieux besoin de ces organes, les centres
de transplantation se concertent directement à propos de l'attribution.

En ce qui concerne le coeur, une priorité supplémentaire est accordée aux enfants de moins de seize ans. Les donneurs de moins de seize ans doivent être déclarés à la centrale de coordination nationale, lorsque le centre de transplantation en question ne compte sur sa propre liste d'attente aucun receveur potentiel de moins de seize ans. La centrale nationale de coordination propose cet organe aux centres comptant des enfants sur leur liste d'attente. S'agissant du foie, il existe une priorité analogue pour les enfants de moins de quatorze ans.

Enfin, s'agissant du rein, on observe l'ordre de priorités suivant: la première priorité est accordée aux cas de transplantation double qui impliquent la greffe d'un coeur, d'un poumon, d'un foie ou d'un pancréas et d'un rein. En pareille occurrence, le centre qui procède au prélèvement doit céder les deux reins. Aux degrés de priorité 2 à 5, les reins sont attribués de préférence aux patients qui présentent un degré 95

d'immunisation relativement élevé, une concordance tissulaire déterminée et des résultats négatifs au test croisé du dernier sérum. A ce degré, un autre critère entre également en ligne de compte: le patient a-t-il subi ou non au cours des six derniers mois une réaction de rejet du rein qui lui a été transplanté?

Lorsqu'un centre met un rein à la disposition d'un autre (p. ex. pour respecter l'une des priorités décrites ci-dessus), il a droit à un «retour sur investissement» (= payback), en d'autres termes à la rétrocession d'un rein par le centre bénéficiaire, dès qu'il en a un de disponible. A noter que ce «retour sur investissement» arrive en 6e position dans l'ordre des priorités.

Attribution à l'échelon local L'échelon local représente le deuxième niveau: l'organe d'une personne qui en a fait don au centre de transplantation sis dans la région où elle réside est attribué à un receveur enregistré auprès de ce centre, puis transplanté sur cette personne. Les arguments qui plaident en faveur de cette pratique sont les suivants: réduction des coûts, brièveté du temps d'ischémie puisqu'il n'y a pas besoin de transporter l'organe à greffer, enfin simplification de la coordination.

Les reins sont attribués selon des critère géographiques, chaque centre de transplantation obtenant les reins des donneurs qui sont inscrits sur sa liste (locale) d'attente.

Attribution à l'échelon national L'attribution à l'échelon national constitue le troisième niveau: les organes de donneurs locaux, pour lesquels un receveur adéquat n'a pas pu être trouvé dans le centre de transplantation, ainsi que les organes de donneurs rattachés à un hôpital qui n'effectue pas lui-même de transplantations sont proposés aux centres de transplantation au travers de la centrale de coordination nationale et selon les règles établies pour chaque organe. Ce mode de faire est censé garantir aux centres de transplantation une certaine fréquence des transplantations pratiquées.

Les coeurs disponibles sont proposés aux centres de transplantation de Bâle, Berne, Genève, Lausanne et Zurich dans l'ordre inverse de l'ordre alphabétique. Les foies, en revanche, sont proposés aux centres de Berne, Genève, Lausanne et Zurich dans l'ordre alphabétique. Enfin, s'agissant des poumons, la première offre est adressée alternativement à Zurich et à un centre de transplantation de Suisse romande (Genève ou Lausanne).

1.3.5.2.3

Attribution par les centres de transplantation

Les cas dans lesquels la centrale de coordination nationale propose un organe en fonction de l'état spécifique d'un patient constituent l'exception. En effet, en règle générale, c'est-à-dire dans le cadre de la procédure d'attribution à l'échelon local et national, l'organe est proposé à un centre de transplantation qui sélectionne luimême le bénéficiaire sur la liste d'attente locale. Les règles internes qui président à l'attribution sont laissées à l'entière discrétion des centres. Elles ne sont ni officiellement codifiées ni publiées. Force est donc de supposer que les pratiques adoptées

96

par les centres de transplantation présentent des variations. Toutefois, en matière d'attribution d'organes, les critères généraux qui sont appliqués sont les suivants: ­

La compatibilité des groupes sanguins et compatibilité tissulaire: il doit y avoir une compatibilité absolue de l'organe avec le groupe sanguin du receveur. En outre, le sang du receveur doit être exempt d'anticorps qui pourraient rejeter le greffon, absence dont on s'assure au moyen du test dit «croisé» (cross match). En ce qui concerne la compatibilité tissulaire il importe que le degré de concordance soit aussi élevé que possible, en tout cas lors de la transplantation des reins et du pancréas.

­

La compatibilité de la taille de l'organe: dans le cas du coeur en particulier, il faut que l'organe ait la taille qui lui confère une capacité fonctionnelle suffisante. Pour le rein et le pancréas la taille n'a pratiquement aucune importance.

­

L'urgence médicale: par exemple, le candidat à la transplantation rénale dont le traitement par rein artificiel est fortement entravé par des complications d'ordre vasculaire doit avoir la priorité sur d'autres patients chez lesquels la dialyse ne pose aucun problème.

­

La durée d'attente: si, après application des critères susmentionnés, il reste plusieurs receveurs potentiels, l'organe est attribué à la personne qui présente la durée d'attente la plus longue.

Les ressortissants suisses et les étrangers résidant en Suisse sont traités sur un pied d'égalité.

1.3.5.2.4

Echanges internationaux d'organes

Lorsqu'il est impossible de trouver en Suisse un receveur adéquat pour un organe disponible, SwissTransplant propose cet organe à des organismes d'attribution étrangers. En outre des échanges internationaux d'organes ont lieu dans le cadre d'un programme européen spécialement consacré aux patients présentant un haut degré d'immunisation33.

En mai 1997, SwissTransplant a conclu avec l'Etablissement français des Greffes une convention portant sur l'échange de foies destinés à des patients SU. Aux termes de celle-ci, les patients SU suisses ont le même accès à des foies disponibles en France que les patients enregistrés sur la liste d'attente de l'Etablissement français des Greffes. De son côté, SwissTransplant s'est engagée à offrir prioritairement à l'Etablissement français des Greffes les foies pour lesquels un receveur adéquat n'a pas été trouvé en Suisse.

Le bilan des échanges se présente comme suit: en 1997, la Suisse a exporté 6 foies et en a importé 5; en 2000, ce sont 5 foies qui ont été exportés et 7 qui ont été impor-

33

Il s'agit de patients dont le sang recèle des anticorps aptes à réagir à de très nombreux antigènes. Aussi est-il très difficile de trouver à ces patients au moyen du test croisé négatif un organe qui soit compatible.

97

tés. Du point de vue de la Suisse, l'effet de cette convention est très positif dans la mesure où ces échanges ont permis d'éviter le décès de patients SU.

En outre, chez SwissTransplant on discute actuellement d'une éventuelle adhésion à Eurotransplant. En effet, au printemps 1999, le Conseil de fondation a décidé d'engager des pourparlers avec Eurotransplant dans le but de clarifier les modalités d'une adhésion de SwissTransplant ou des centres de transplantation suisses à cet organisme. A l'heure actuelle, toutefois, Eurotransplant doit faire face à d'autres priorités qui l'empêchent, pour l'instant, de mener ces pourparlers.

1.3.5.2.5

Directives de l'ASSM

Les directives de l'ASSM sur les transplantations d'organes disposent, s'agissant de l'attribution, que le respect des principes de l'égalité de traitement et de l'équité doivent être garantis dans toute la Suisse sur la base de critères médicaux (p. ex.

l'âge biologique, l'état immunitaire, l'existence de maladies associées ou concomitantes). L'annonce d'un receveur potentiel auprès d'un centre de transplantation, son inscription sur la liste d'attente ainsi que l'attribution à celui-ci d'un organe disponible doivent se faire à la lumière de considérations d'ordre strictement médical et non pas matériel ou social. Les directives interdisent que l'on prenne en compte des critères tels que l'origine ethnique, le sexe, l'état civil, la situation financière, la notoriété, le comportement social, cela en raison de leur subjectivité. En outre, précisent les directives, les receveurs locaux ne devraient pas bénéficier d'un traitement préférentiel s'il se trouve ailleurs un autre receveur plus approprié selon des critères médicaux (particulièrement quant à la compatibilité immunologique). Par ailleurs, lorsqu'on se trouve en présence de plusieurs receveurs potentiels présentant des pronostics médicaux comparables, l'organe sera attribué à celui qui occupe la meilleure position sur la liste d'attente. Enfin, en cas de pénurie d'organes, l'inscription sur la liste d'attente peut être restreinte aux patients domiciliés en Suisse.

1.3.5.3

Réglementation appliquée par d'autres pays

1.3.5.3.1

Introduction

En général, on constate que les directives internationales ou les lois d'autres pays soit ne règlent absolument pas la question de l'attribution des organes soit le font de façon très sommaire. Cela dit, les lois sur la transplantation les plus récentes (p. ex.

aux Etats-Unis, en France, en Allemagne et aux Pays-Bas) tendent à accorder une plus large place à cette question.

1.3.5.3.2

Etats-Unis

Aux Etats-Unis, le «Department of Health and Human Services» a proposé en 1998 de nouvelles règles pour l'attribution des organes, ce qui a déclenché une sérieuse

98

controverse sur la politique «correcte» à suivre en la matière. Aujourd'hui, le système de répartition est subdivisé en 11 régions. Il obéit à la politique dite du «local first», selon laquelle les organes sont d'abord attribués à des patients habitant la localité où ils ont été prélevés, puis en second lieu aux patients de la région environnante, enfin à des patients résidant dans le reste du pays. Cette politique a conduit à ce qu'un patient habitant une localité précise du pays s'est vu attribuer un organe avant un autre domicilié ailleurs alors que ce dernier avait, médicalement parlant, un besoin plus impérieux de cet organe.

Afin de réduire ces iniquités de nature géographique, le «Department of Health and Human Services» a préconisé de nouvelles règles visant à contraindre l'organisation nationale, «Organ Procurement and Transplantation Network» (OPTN), qui est gérée par une institution privée, «United Network for Organ Sharing» (UNOS), à modifier sa politique d'attribution d'organes. Selon les nouvelles règles, cette politique doit à l'avenir satisfaire aux impératifs suivants: ­

Il faut établir des critères standards pour l'inscription des patients sur la liste d'attente et pour la détermination de leur statut médical; et

­

Il faut réduire l'influence des facteurs géographiques sur l'attribution de telle sorte que les organes puissent être attribués en priorité aux patients présentant l'urgence médicale la plus grande.

L'UNOS s'est élevé avec véhémence contre ces règles, arguant de ce qu'elles conduiraient à une nationalisation du système actuel et obligeraient les médecins à attribuer les organes aux patients les plus malades. En outre, elles feraient que la plupart des patients éprouveraient plus de difficultés à obtenir des organes, car ceuxci devraient être attribués aux grands centres de transplantation ayant les plus longues listes d'attente et les patients les plus malades.

En raison de cette controverse, le Congrès a instauré, le 21 octobre 1998, un moratoire d'une année sur l'entrée en vigueur de nouvelles règles et a mandaté l'Institute of Medicine pour effectuer (jusqu'en mai 1999) une étude sur la pratique actuelle de l'attribution des organes et sur les nouvelles règles proposées. Dans son rapport34, l'Institute of Medicine arrive à la conclusion que le système actuel fonctionne correctement, mais qu'il pourrait être nettement amélioré tant sur le plan de l'équité que sur celui de l'efficacité. C'est pourquoi il propose que l'attribution des organes se fasse au niveau de régions d'au moins neuf millions d'habitants afin que les patients qui en ont le plus impérieusement besoin puissent être mieux pris en compte. Pour l'Institute of Medicine, rien ne permet d'affirmer que l'attribution des organes au niveau de grandes régions géographiques risque d'entraîner une diminution des dons ou de se traduire par un engagement moindre des hôpitaux effectuant les prélèvements. L'institut approuve donc pour l'essentiel les buts visés par les nouvelles règles émises par le Department of Health and Human Services. Les nouvelles règles sont entrées en vigueur le 19 novembre 1999.

34

Committee on Organ Procurement and Transplantation Policy, Institute of Medicine, Organ Procurement and Transplantation: Assessing Current Policies and the Potential Impact of the DHHS Final Rule; 1999.

99

1.3.5.3.3

France

L'Etablissement français des Greffes a pour mandat légal d'élaborer des règles d'attribution d'organes et de les soumettre à l'approbation du Ministère de la Santé35. Les règles décrites ci-dessous sont valables depuis février 199736.

L'attribution d'organes doit respecter les principes d'équité et de l'éthique médicale.

Il faut s'efforcer d'arriver à un équilibre entre la nécessité d'assurer une attribution aussi équitable que possible et celle de résoudre les problèmes techniques qui se posent lors du prélèvement, du transport et du maintien de la qualité des organes.

Ces derniers doivent, dans toute la mesure du possible, être utilisés de façon optimale; il faut cependant tenir compte de l'urgence et des difficultés particulières pour certains patients «préjudice».

Ces règles sont applicables aux transplantations cardiaques, pulmonaires, hépatiques, intestinales, rénales et pancréatiques. L'Etablissement français des Greffes tient une liste d'attente nationale. A défaut d'une inscription dans cette liste, aucune attribution ne peut être effectuée. L'inscription est assurée par une équipe autorisée, mais doit être confirmée par l'Etablissement français des Greffes. Il existe une obligation d'annoncer les donneurs à cette institution, laquelle fait des propositions aux centres de transplantation concernant l'attribution des organes. L'attribution définitive est du ressort de ces centres. Sont prioritaires les personnes dont la vie est directement menacée si elles ne bénéficient pas rapidement d'une transplantation ainsi que les enfants.

1.3.5.3.4

Allemagne

En vertu de la loi sur la transplantation, les organes doivent être attribués selon des règles qui suivent l'évolution des connaissances médicales. Ils doivent, en particulier, l'être en fonction des perspectives de succès et de l'urgence. Ces même règles doivent régir l'admission sur la liste d'attente, la nécessité et les perspectives de succès d'une transplantation d'organe étant en l'occurrence déterminantes37. La loi a conféré à la «Bundesärztekammer» (BÄK) le mandat de fixer dans des directives l'état des connaissances de la science médicale. Les directives sur l'attribution des organes et sur l'inscription dans la liste d'attente ont été élaborées par la Commission permanente sur la transplantation d'organes de la BÄK, puis adoptées par le comité directeur de la BÄK le 13 novembre 1999. Elles sont entrées en vigueur le 16 juillet 2000. L'ensemble des textes comprend 8 directives se rapportant chacune à un organe, trois directives ayant trait à l'admission dans la liste d'attente et cinq concernant l'attribution.

La distribution des organes est confiée à un organisme officiel, qui peut, en vertu de la loi, être un organisme étranger. Celui-ci est cependant tenu de se conformer aux 35 36

37

100

Art. L. 673-8 du Code de la santé publique.

Arrêté du 6 novembre 1996 portant homologation des règles de répartition et d'attribution des greffons prélevés sur une personne décédée en vue de transplantation d'organes.

Gesetz vom 5. November 1997 über die Spende, Entnahme und Übertragung von Organen (Transplantationsgesetz ­ TPG), par. 10, al. 2, ch. 2 et par. 12, al. 3.

prescriptions du droit allemand concernant l'attribution d'organes et la protection des données. Les tâches de cet organisme sont fixées dans un contrat soumis à l'approbation du Ministère fédéral de la santé publique. Le 16 juillet 2000, décision a été prise de confier la distribution des organes à Eurotransplant.

Cet organisme est seul compétent en matière d'attribution d'organes. Il traite les différentes listes d'attente tenues par les centres de transplantation comme une seule et même liste nationale. Ainsi donc, depuis l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation, l'Allemagne connaît un système d'attribution centralisé mais adapté aux spécificités de chaque patient.

1.3.5.3.5

Pays-Bas

La loi néerlandaise sur la transplantation de 1996 dispose que les seuls facteurs qui peuvent être pris en compte lors de la recherche du receveur adéquat, sont la compatibilité du groupe sanguin et des tissus entre le donneur et le receveur, l'urgence médicale, ainsi que d'autres facteurs en rapport avec l'état de l'organe. Si, après application de ces différents facteurs, il reste plusieurs receveurs potentiels, on se référera à la durée d'attente pour les départager.

1.3.5.3.6

Eurotransplant

Eurotransplant est une fondation privée d'utilité publique au sens du droit néerlandais. Elle a été fondée en 1967 et comprend les Etats du Bénélux, l'Autriche et l'Allemagne et, depuis janvier 2000, la Slovénie. Eurotransplant a pour objectifs d'assurer la distribution transfrontalière d'organes et la coordination des activités y afférentes, dans un bassin de population comprenant environ 118 millions de personnes. A ses débuts, cette institution organisait la répartition des reins; aujourd'hui elle s'occupe aussi de celle des coeurs, des foies, des poumons, des pancréas et des cornées.

Dans la zone d'activité d'Eurotransplant, un nouveau mode d'attribution des reins existe depuis 199638. Il doit permettre d'accroître l'équité dans l'attribution des organes ainsi que la transparence des décisions. Actuellement, quelque 14 000 patients sont inscrits sur la liste d'attente d'Eurotransplant. Selon l'ancien mode d'attribution, l'ordinateur central ne recherchait le receveur le plus adéquat que selon le critère de la compatibilité des tissus (antigènes HLA). S'il n'y avait aucun receveur présentant une concordance avec le donneur sur les six antigènes les plus importants, il était, alors, loisible au centre de transplantation compétent pour le prélèvement d'attribuer le rein sur place, ce qui se produisait dans près de la moitié des cas.

38

Ce nouveau système d'attribution (X-COMB), qui a été développé par le Dr. Thomas Wujciak et le Prof. Dr. Gerhard Opelz à Heidelberg, a commencé à fonctionner le 11 mars 1996.

101

Selon le nouveau mode de répartition, pour sélectionner un receveur, l'ordinateur prend en compte un total de cinq facteurs à l'aide d'une formule mathématique méticuleusement élaborée. Ces facteurs sont exprimés par les questions suivantes: ­

Y a-t-il concordance entre les groupes de tissus du donneur et du receveur (HLA-Match)?

­

Quelle est la probabilité qu'un patient obtienne un bon niveau de concordance?

­

Depuis combien de temps le patient attend-il une transplantation rénale?

­

Sur quelle distance le rein devrait-il être transporté pour être transplanté sur ce patient?

­

De quel Etat membre sont issus le donneur et le receveur? (bilan des échanges entre les Etats membres d'Eurotransplant)

Pour chaque réponse à ces cinq questions, chaque patient se voit attribuer un nombre de points précis. Ce nombre est d'autant plus grand que la réponse est favorable.

S'il y a, par exemple, concordance intégrale de l'ensemble des caractéristiques tissulaires, le patient obtient le nombre maximal de points. En revanche, à défaut de toute concordance, la note est un zéro. C'est le patient qui obtient le plus grand nombre de points qui bénéficiera de la transplantation.

Le résultat d'ensemble est influencé par le nombre maximal de points qui peut être attribué pour chaque réponse. Il s'agit de pondérer le système pour atteindre les objectifs suivants: ­

réduire la durée d'attente (tant la moyenne que la plus longue);

­

améliorer la situation des patients qui présentent les caractéristiques tissulaires les plus rares;

­

assurer un équilibre entre les bilans nationaux en matière d'échanges de reins;

­

maintenir, voire améliorer la qualité moyenne de la concordance HLA dans la zone d'activité d'Eurotransplant;

­

éviter les transports trop longs afin de ne pas compromettre le bon fonctionnement de l'organe à transplanter.

De vastes simulations par ordinateur ont permis de tester la manière d'atteindre au mieux ces objectifs. Il en est résulté que le poids le plus important (nombre de points) devait être accordé à la compatibilité HLA. Viennent ensuite ­ et en ordre décroissant ­ la durée du transport, la durée d'attente, le bilan des échanges, enfin la probabilité d'une concordance.

La condition la plus importante dont dépend le succès d'une transplantation rénale est la compatibilité des tissus; une concordance tissulaire parfaite entre le donneur et le receveur (= full house) réduit le risque d'une réaction de rejet de plus d'un tiers.

Grâce au nouveau mode de répartition, la durée d'attente moyenne, qui se montait jusqu'alors à 3­4 ans, devrait également diminuer. Les enfants sont crédités d'un «bonus temps». Sous l'empire de l'ancien mode d'attribution, les patients qui présentaient des caractéristiques tissulaires très rares n'avaient qu'une chance infime de

102

se voir attribuer un rein adéquat. On a pu, en partie, corriger cette situation en leur attribuant un rein sur place. Dorénavant, le facteur de «chance génétique» sera pris en compte. Pour un patient présentant des caractéristiques tissulaires rares, un rein dont la compatibilité HLA est moyenne est de nature à offrir la meilleure solution.

Bien que l'organe puisse être conservé dans une solution nutritive réfrigérée, un temps d'ischémie par trop long peut compromettre le succès de la transplantation.

C'est pourquoi le nouveau système prend en considération la distance à parcourir pour acheminer l'organe à son lieu de transplantation. Enfin, l'application du facteur «bilan des échanges» vise à empêcher qu'à l'avenir certains pays reçoivent plus de reins des autres pays membres d'Eurotransplant qu'ils n'en ont mis eux-mêmes à disposition.

Pour identifier le receveur adéquat selon un tel système de points, on a recours à l'ordinateur. Par rapport à la recherche effectuée par des personnes, il présente l'avantage de permettre une sélection du receveur selon des critères purement objectifs.

Le bilan que l'on peut tirer jusqu'à présent de l'application du nouveau système est positif. En effet, les objectifs fixés ont été atteints pour la plupart, parfois même audelà des prévisions. Les déséquilibres des échanges, qui avaient été d'importants facteurs de discorde, ont été corrigés en l'espace de quatre mois. Le nombre de patients qui ont pu bénéficier d'une transplantation à l'issue d'une longue période d'attente a sensiblement augmenté. La qualité moyenne de la compatibilité HLA s'est améliorée de façon réjouissante; en particulier, le nombre des transplantations pratiquées dans des conditions de concordance HLA parfaite entre le donneur et le receveur a atteint un niveau record. Ce nouveau système centré sur les patients induit ainsi une plus grande équité dans la répartition des organes.

1.3.5.4

Critères de l'attribution

1.3.5.4.1

Critères médicaux

Dans presque tous les pays disposant de structures pour la médecine de transplantation, les critères médicaux jouent un rôle clé dans les décisions d'attribution. Dans la majorité des cas, lorsque l'on demande comment les organes disponibles pour les transplantations sont attribués, on obtient la réponse suivante: selon des critères «médicaux». Ceux-ci sont en général dépeints comme étant neutres dans l'échelle des valeurs, objectifs et rationnels. Lorsqu'on dit que l'attribution est effectuée selon des critères médicaux, cette expression suggère une exactitude, une scientificité et un affranchissement de toute valeur, qu'on ne saurait en fait attendre si l'on y regarde de plus près. Force est de constater au contraire qu'un jugement de valeur d'ordre éthique sous-tend chaque critère médical.

Urgence médicale Le critère de l'urgence médicale signifie que dans une situation d'urgence, un organe doit être attribué à la personne qui en a besoin de la façon la plus impérieuse.

L'application de ce critère est ainsi justifiée par le fait que les personnes auxquelles

103

la priorité est accordée sont en danger de mort. Car, à la différence des candidats présentant une pathologie plus appropriée à la transplantation, ces personnes perdraient leur toute dernière chance si l'on ajournait le traitement. En leur donnant la priorité, on les fait passer avant des patients pour lesquels la transplantation de l'organe à disposition serait, selon toute probabilité, d'une plus grande utilité médicale et qui, peut-être, sont mieux placés sur la liste d'attente. Cela revient à donner la préséance «hors file d'attente» à un patient qui présente un pronostic de succès moins favorable. Appliquer le critère de l'urgence médicale revient donc à accorder une valeur plus importante au fait de sauver un maximum de vies qu'à celui de préserver un maximum d'années de vie. Cette option repose donc sur le principe qui veut que l'on évite autant que possible les dommages. Elle est en contradiction avec le principe selon lequel il y a lieu de choisir la thérapie qui présente la plus grande utilité possible pour le patient ainsi qu'avec le principe de l'équité. En effet, l'urgence fait que l'on est prêt à faire passer au second plan des préoccupations le pronostic quant à la durée de fonctionnement sans faille de l'organe transplanté ainsi que le temps qu'ont déjà attendu les différents patients.

Utilité médicale Afin d'optimiser, selon des critères médicaux, l'engagement de ressources limitées, il faut procéder à une évaluation comparative des pronostics de succès des interventions thérapeutiques selon les différentes pathologies présentées par les patients. Le critère d'«utilité médicale» repose sur l'idée que l'utilité d'une thérapie déterminée dépend dans une large mesure de l'état de santé du patient et a donc un rapport direct avec l'anamnèse du patient et les chances de succès du traitement que l'on pourrait envisager de lui administrer.

De prime abord, le critère de l'utilité médicale paraît être une évidence. En effet, son application permet d'escompter que les attributions d'organes soient décidées en dehors de toute considération touchant l'apparence des personnes. Seule la constitution physique des patients ­ et non des facteurs sociaux ­ semble déterminer l'accès aux organes. Là encore, il convient cependant de relever que ce critère n'est pas aussi neutre qu'il y paraît de
prime abord; en effet, par exemple, chez les patients âgés le succès de la transplantation que l'on peut escompter est généralement moins grand que chez les personnes plus jeunes. L'application de ce critère est de nature à générer un autre problème. Il se peut en effet qu'un organe soit attribué à un patient qui en a besoin avec moins d'urgence que d'autres, parce que sa relative bonne santé est le meilleur gage de succès de la thérapie.

1.3.5.4.2

Critères sociaux et critères tenant aux situations individuelles

Age Si l'âge servait de critère pour l'attribution des organes, ceux-ci devraient, en tout état de cause, être réservés aux patients jeunes parce qu'ils pourraient en profiter plus longtemps. L'application de ce critère se révélerait cependant problématique.

104

En effet, comment les personnes qui, durant toute leur vie professionnelle, ont cotisé régulièrement pour se prémunir des atteintes à la santé, en ne recourant que très peu aux prestations de l'assurance ne pourraient-elles pas ressentir comme une injustice le fait qu'on leur refuse l'accès à la thérapie appropriée lorsqu'ils en ont le plus besoin. En outre, la valeur d'une vie ne diminue pas avec les années.

Durée d'attente Selon le critère de la durée d'attente, les organes sont attribués aux patients en fonction du rang qu'ils occupent sur une liste d'attente, rang qui est exclusivement fonction de la date à laquelle ils se sont fait inscrire. Il s'agit là ni plus ni moins de l'application du principe de l'égalité. Cela dit, ce principe considéré isolément entre en conflit avec le principe selon lequel la thérapie choisie doit présenter une utilité médicale maximale compte tenu de l'état de santé du patient. Si des reins, par exemple, n'étaient attribués qu'en fonction de la durée d'attente et sans que l'on applique le critère de la meilleure compatibilité HLA possible, cela reviendrait, dans nombre de cas, à s'accommoder d'un rejet du greffon.

Compatibilité des tissus (compatibilité HLA) En tenant compte, lors de l'attribution, de la compatibilité immunologique, on vise à prévenir le rejet par le receveur de l'organe transplanté. Il faut, en effet, que celui-ci fonctionne le plus longtemps possible dans le nouvel organisme. Dans l'état actuel des connaissances, on obtient un tel résultat avant tout lorsque l'on parvient à établir que les «antigènes lymphocytaires» du donneur et du receveur sont compatibles (compatibilité HLA). Une telle méthode est aujourd'hui surtout appliquée avant la transplantation de reins car, dans ce cas, il est possible de procéder à un examen précis de la compatibilité immunologique. Dans le cas de la transplantation d'autres organes, la question de la compatibilité HLA, bien souvent, ne se pose pas car, à la différence de la situation des patients souffrant d'une insuffisance rénale, la transplantation est la seule thérapie possible, à défaut de laquelle le patient risque de mourir. En attribuant les reins en fonction de la compatibilité HLA, on escompte que le receveur retire de la transplantation l'utilité la plus grande possible.

Priorités locales Lorsque le
prélèvement et la transplantation de l'organe ont lieu dans le même centre, cela permet d'assurer une qualité optimale de conservation. En effet, comme il n'y a pas de temps de transport, le temps d'ischémie froid s'en trouve raccourci.

Lorsqu'on sait qu'un organe bien conservé fonctionne plus longtemps, une fois transplanté, qu'un organe altéré, le fait de procéder au prélèvement et à la transplantation dans le même lieu respecte le principe selon lequel la thérapie appliquée doit être d'une utilité maximale pour le patient. En outre, cette procédure simplifie le travail et restreint les coûts de la transplantation. On relèvera cependant ­ et c'est là un aspect négatif ­ qu'elle avantage les personnes domiciliées près d'un centre qui prélève beaucoup d'organes par rapport à ceux qui vivent près d'un centre moins actif. A compatibilité identique des receveurs potentiels, il y a donc violation du principe de l'égalité.

105

Priorité aux enfants Si des enfants doivent attendre longtemps la transplantation d'un rein, ils peuvent subir des atteintes supplémentaires irréversibles: d'une part, un ralentissement de la croissance et, d'autre part, un développement psychosocial très difficile. Il est possible d'y obvier en procédant le plus tôt possible à la transplantation. Le fait de donner la priorité aux enfants est, d'une part, conforme au principe voulant que l'on empêche la survenance de dommages et, d'autre part, en contravention avec le principe selon lequel tous les patients doivent être traités sur un pied d'égalité.

Traitement préférentiel des patients présentant un haut degré d'immunisation Lors de l'attribution de reins, il arrive aussi que l'on donne la préférence à des patients qui ont développé des anticorps contre certains types de tissus. A compatibilités HLA identiques, priorité est accordée aux patients présentant cette caractéristique. L'expérience montre, en effet, que pour ces patients la durée d'attente d'une transplantation est sensiblement plus longue, car leurs anticorps sont censés rejeter nombre d'organes qui pourraient leur être greffés. En d'autres termes, plus le degré d'immunisation de ces personnes est élevé et moins il est probable qu'on puisse leur trouver un rein approprié. Accorder à ces patients un traitement préférentiel n'est qu'une simple application du principe de l'égalité des chances: puisque les patients présentant un haut degré d'immunisation ont moins de chance que les autres de trouver un organe approprié, il est normal que l'on compense ce désavantage en leur accordant la préférence.

1.3.5.4.3

Conclusions

Ainsi donc, plusieurs principes éthiques sous-tendent la procédure d'attribution d'organes: on s'efforce de concilier le principe de l'utilité médicale maximale avec le principe de l'égalité entre patients, celui de l'égalité des chances s'agissant de patients présentant un haut degré d'immunisation enfin le principe voulant que l'on prévienne les dommages. Il s'agit d'accroître l'efficacité du traitement au niveau individuel, d'empêcher la survenance de dommages, de traiter équitablement ceux qui ont besoin d'un organe et de combattre l'inégalité des chances. Les décisions qui sont prises, en l'occurrence, se fondent sur de purs jugements de valeur. Ainsi, la thèse selon laquelle l'attribution des organes est régie par des critères médicaux est fausse: l'attribution obéit en réalité à des principes éthiques.

Cela dit, les connaissances médicales ne sont pas superflues. Elles sont nécessaires pour assurer l'attribution des organes selon les critères choisis à la lumière de jugements de valeurs d'ordre éthique. A cette fin, il appartiendra à la médecine de répondre à des questions telles que: pour quel patient la transplantation est-elle censée présenter l'utilité médicale la plus grande; à partir de quel stage des lésions irréversibles se produiront-elles; quelle est l'espérance de vie probable du patient s'il ne bénéficie pas d'un transplantation? Ces questions sont l'affaire d'experts.

Toutefois, leurs réponses sont indispensables si l'on veut que l'attribution d'organes ait lieu selon les modalités voulues, modalités qui reposent toutefois sur des jugements de valeur.

106

Il ressort de ce qui précède qu'en matière d'attribution d'organes le critère équitable n'existe pas. Chaque critère présente des avantages et des inconvénients. Il s'agit donc de déterminer le critère ou, mieux, les critères qui, une fois pesés tous les avantages et tous les inconvénients, permettent d'assurer un maximum d'équité dans l'attribution des organes.

1.3.5.5

Exigences auxquelles doit satisfaire l'attribution d'organes

1.3.5.5.1

Mandat constitutionnel

L'art. 119a, al. 2 de la Constitution fédérale charge le législateur d'établir des critères propres à assurer une attribution équitable des organes et fait bien ressortir qu'il s'agit là d'un point central de la réglementation à établir. Dans ce contexte, les droits fondamentaux que sont l'égalité de traitement et l'interdiction de discrimination jouent eux aussi un rôle éminent.

De cette base constitutionnelle, on peut inférer que la réglementation de l'attribution d'organes doit répondre aux exigences définies ci-après:

1.3.5.5.2

Principe de l'attribution axée sur les besoins des patients

L'objectif de la réglementation sur l'attribution doit être d'assurer l'équité entre les patients et non entre les centres de transplantation. Il s'agit de pourvoir à ce que les receveurs potentiels puissent avoir accès à un organe selon des modalités aussi similaires que possible et non de garantir l'attribution des organes disponibles aux différents centres de transplantation pour leur permettre de respecter pleinement leurs programmes de greffes ou pour les récompenser d'avoir recruté des donneurs.

1.3.5.5.3

Uniformité des critères

En vertu du mandat constitutionnel, la Confédération est tenue d'arrêter dans la loi sur la transplantation des critères régissant l'attribution. Il en découle que ceux-ci doivent être uniformes dans l'ensemble de la Suisse. On ne saurait admettre qu'ils varient d'un centre de transplantation à l'autre ni que l'on ait de l'équité une conception différente selon que l'on se trouve en Suisse romande, en Suisse alémanique ou en Suisse italophone.

1.3.5.5.4

Fixation des critères par le législateur

Il appartient au législateur et non au corps médical de définir les critères et la procédure d'attribution. Ce constat découle, d'une part, directement de la constitution puisque la procédure d'attribution implique une décision touchant des droits fonda-

107

mentaux des patients et, d'autre part, de la nature même des décisions touchant les critères d'attribution: opter pour ou contre l'application de tel ou tel critère est une décision qui est toujours sous-tendue par un jugement de valeur d'ordre éthique. Il n'existe pas de critères purement «médicaux» et neutres sur le plan moral qui permettraient d'éviter de fixer les règles de l'attribution en l'absence de toute considération d'ordre éthique. Dans l'application du critère de l'urgence médicale, on est, par exemple, prêt à accorder à des patients très gravement atteints mais dont les chances de survie sont plus restreintes, la préséance sur des patients présentant un pronostic médical plus favorable et pour lesquels une transplantation n'est pas (encore) indispensable dans l'immédiat.

1.3.5.5.5

Définir les principes au niveau de la loi

Le législateur doit, pour le moins, définir les principes généraux auxquels devront obéir les critères d'attribution déterminants ainsi que la procédure d'attribution ellemême. Ces principes seront concrétisés au niveau de l'ordonnance. Compte tenu de la complexité de la matière à régler, on ne saurait envisager un autre mode de procéder. L'option prise confère également à la réglementation la souplesse qui permet de l'adapter facilement si le besoin s'en fait sentir, besoin qui peut être mis en évidence lors de l'indispensable réexamen auquel la réglementation devra périodiquement donner lieu sous l'angle de l'équité.

1.3.5.5.6

Critères d'attribution et pondération de ceux-ci

En vertu de la Constitution fédérale, nul ne doit être discriminé lors de l'attribution d'un organe. Au surplus, les critères déterminants seront fixés de telle sorte que le processus d'attribution soit équitable pour tous les patients (pour de plus amples détails sur les critères, cf. ch. 1.3.5.4).

En matière d'attribution d'organes, l'activité normative se heurte à une difficulté majeure: comment établir un juste milieu entre, d'une part, le respect de l'objectif voulant que l'on fasse un usage aussi efficace que possible des organes à disposition et, d'autre part, l'impératif ­ concurrent ­ d'assurer une répartition équitable de ces ressources.

Maximiser l'utilité médicale des transplantations Ce principe repose sur l'idée selon laquelle les organes disponibles sont trop peu nombreux pour qu'on les gaspille. Son application vise à assurer que dans chaque cas la transplantation ait une utilité maximale pour le patient. De prime abord, cet objectif paraît amplement justifié. Cependant, il laisse de côté la question de savoir comment rapporter le critère de l'utilité médicale au niveau de chaque patient. Il fait donc fi du fait que les êtres humains ne sont pas interchangeables. De plus, il ignore la réalité voulant que le refus de satisfaire les besoins d'un individu ne saurait tout bonnement être compensé par le fait que, dans d'autres cas, on a répondu au mieux aux besoins des personnes concernées. Appliqué au pied de la lettre, le critère de la

108

maximisation de l'utilité médicale aurait pour effet de faire des patients à risque ainsi que des patients sensibilisés et âgés, des laissés pour compte ou presque lors de l'attribution. Aussi ce critère d'attribution, s'il devait avoir la primauté, voire l'exclusivité, poserait-il des problèmes extrêmement épineux.

Equité Ce critère vise à assurer l'égalité de traitement entre les patients ainsi que les mêmes chances d'accès aux organes disponibles. Il s'agit de déterminer les différences présentées par les patients, qui doivent être prises en compte et qui justifient un traitement préférentiel à titre de compensation. Appliquer, par exemple, le critère de l'urgence médicale et celui de l'égalité des chances aux patients les plus gravement atteints est une attitude qui répond au principe de l'équité. Selon le critère de l'urgence médicale, il importe d'attribuer les organes disponibles, en priorité aux patients qui ont impérieusement besoin d'une transplantation pour survivre. Ce faisant, on s'accommode sciemment de ce que l'utilité médicale soit maximisée non pas au niveau de tous les patients mais d'une catégorie précise de ceux-ci. Quant au principe voulant que les personnes particulièrement handicapées bénéficient des mêmes chances d'accès aux organes que les autres, il commande que l'on prévoie des mesures compensatoires pour les catégories que les hasards de la génétique ont rendues très réfractaires aux greffons. Il y va là encore de l'équité.

Toute réglementation de l'attribution d'organes doit prendre en compte de manière adéquate à la fois les impératifs liés à la maximisation de l'utilité médicale et les aspects relevant de l'équité. Le principe de l'utilité maximale fait que l'on doit forcément prendre en considération, pour le moins, les différences les plus criantes que les candidats à la transplantation présentent quant aux pronostics de succès (prise en compte de la compatibilité des groupes sanguins et de l'existence d'une concordance immunologique totale, dans le cas du rein). Par principe, cependant, les critères relevant de l'équité méritent qu'on leur accorde la primauté sur l'utilité médicale. En d'autres termes, celle-ci ne doit être maximisée que dans la mesure où lesdits critères sont respectés.

En substance, il découle du cadre défini par la constitution que les considérations relevant de l'équité bénéficient d'une primauté ­ du moins relative ­ sur les impératifs liés au principe de la maximisation de l'utilité médicale.

1.3.5.5.7

Procédure d'attribution des organes

La décision d'attribuer un organe déterminé à tel ou tel patient peut être prise soit de manière centralisée, autrement dit par un organisme qui couvre l'ensemble du territoire de la Suisse, soit par les différents centres de transplantation s'agissant des patients inscrits sur la liste d'attente qu'ils gèrent. L'attribution centralisée est plus équitable que l'autre car elle est la seule qui permette d'assurer à tous les patients les mêmes chances d'accès aux organes disponibles. L'attribution décentralisée assure l'accès aux organes des seuls patients inscrits sur les listes d'attente des centres de transplantation. En outre, s'agissant du critère de la durée d'attente, par exemple, la décentralisation garantit uniquement que la personne qui justifie de la durée

109

d'attente la plus longue au niveau du centre de transplantation sera prise en compte la première lors de l'attribution. Toutefois, ce mode de procéder ne permet pas de prendre en considération les patients inscrits sur les listes d'attente des autres centres, dont certains accusent, parfois, des durées d'attente nettement plus longues que la personne dont il vient d'être question. Par ailleurs, sous l'angle du pronostic médical, la seule chose qui est garantie est que l'organe sera attribué au patient qui, au niveau du centre, présente la meilleure compatibilité tissulaire avec le donneur, peu importe que dans les autres centres on trouve d'autres patients présentant une compatibilité supérieure. Il n'est donc pas admissible qu'en fonction de priorités locales l'on freine ou, au contraire, accélère l'accès de patients déterminés au traitement auxquels ils ont droit. On ne saurait en effet faire supporter aux patients ou au contraire mettre à leur crédit les motifs qui ont présidé à la fixation de telles priorités, à savoir la volonté de récompenser une certaine région pour la propension au don d'organes manifestée par ses habitants ou encore la motivation dont on fait montre les centres dans le recrutement de donneurs. Cela étant, les organes disponibles doivent être répartis entre tous les receveurs potentiels que compte la Suisse.

Compte tenu des objectifs définis par la Constitution, force est de conclure, s'agissant de la procédure, que l'attribution doit être organisée de manière centralisée et axée sur les besoins spécifiques de chaque patient39.

1.3.5.5.8

Un processus d'attribution en trois phases

L'attribution obéit à un processus en trois phases: ­

premièrement, le médecin traitant détermine si dans le cas de son patient une transplantation est indiquée et, dans l'affirmative, il dirige celui-ci vers un centre de transplantation;

­

deuxièmement, le patient en question est enregistré dans la liste d'attente par les centres de transplantation;

­

enfin et troisièmement, il participe à la procédure d'attribution proprement dite.

Si, dès les deux premières phases, on fait valoir diverses considérations ou des considérations autres que médicales, le patient voit ses chances d'accéder à un organe fortement hypothéquées. Eu égard au fait que les patients ­ présentant pourtant un état approprié ­ qui sont annoncés en vue d'une transplantation, constituent une partie, force est de supposer que le «gros de la sélection» s'opère durant les deux premières phases ­ au détriment, notamment, des patients les plus âgés.

Aussi le législateur ne peut-il se désintéresser des deux phases qui précèdent l'attribution proprement dite. Il doit les réglementer de manière à garantir l'égalité des chances entre les patients. Il pourrait, par exemple, statuer l'obligation pour le médecin traitant d'annoncer dans les meilleurs délais le patient pour lequel une transplantation est indiquée à un centre de transplantation et fixer les critères auxquels doit obéir l'inscription dans la liste d'attente.

39

110

Cf. également à ce propos Markus Schott, Patientenauswahl und Organallokation, dissertation, Bâle, 2001.

1.3.5.6

Conclusions et principes de réglementation

1.3.5.6.1

Appréciation de la pratique actuelle en matière d'attribution d'organes

De l'avis des personnes concernées, la pratique actuelle en matière d'attribution d'organes telle qu'elle est dépeinte au ch. 1.3.5.2 donne toute satisfaction. Sous l'angle de l'équité entre les patients et de la transparence du processus d'attribution, il convient cependant de relever ce qui suit: De nos jours, les priorités locales au nom desquelles un organe est attribué à un receveur inscrit auprès du centre transplantation qui procédera au prélèvement ne se justifient plus. Les questions de coûts ou la simplification de la coordination sont des aspects qui ne doivent jouer aucun rôle lorsqu'il s'agit d'attribuer un organe. De même l'aspect «transport», c'est à dire la nécessité de limiter au maximum le temps d'ischémie n'a de nos jours plus aucune pertinence dans un petit pays comme la Suisse où les distances sont courtes, cela d'autant que l'on dispose de meilleurs moyens de conservation des organes que par le passé.

De même, l'option d'attribuer un organe à un centre de transplantation plutôt qu'à un patient déterminé apparaît douteuse sous l'aspect de l'équité. Une telle option, même si elle peut se justifier par le fait qu'elle garantit au moins une certaine utilisation des capacités de chaque centre, ne devrait cependant jouer aucun rôle sous l'angle de l'équité. On peut formuler la même remarque à propos du «retour sur investissement».

Il apparaît, en outre, que si les règles d'attribution élaborées par les groupes de travail de SwissTransplant prévoient concrètement la procédure d'organisation par la centrale nationale de coordination, en revanche on ne peut en dégager les critères selon lesquels les centres de transplantation doivent attribuer les organes. Ainsi donc, ces critères ne sont aujourd'hui fixés nulle part. Bien que l'on ne se fasse pas faute de réitérer que les décisions d'attribution sont uniquement prises en fonction de critères médicaux, on ne saurait ignorer que, dans la pratique, des critères d'une autre nature (p. ex. l'âge ou les obligations familiales du patient) sont également appliqués. On ne peut donc que regretter que les critères appliqués sur un point aussi important ne présentent actuellement pas plus de transparence.

1.3.5.6.2

Réglementation de l'avant-projet et résultats de la consultation; appréciation des arguments des opposants à une attribution centralisée

Par souci de garantir l'équité dans l'attribution d'organes, l'avant-projet statuait le principe de l'interdiction de discrimination et prévoyait que les seuls critères ayant une valeur déterminante en la matière étaient les suivants: urgence médicale de la transplantation, compatibilité physiologique optimale entre le donneur et le receveur, pronostic médical et durée d'attente. En outre, il était proposé que l'attribution soit toujours opérée par une instance nationale, de manière centralisée et en fonction de la situation spécifique des patients.

111

Or, au cours de la consultation, nombre d'arguments contre un système centralisé ont été invoqués.

Certains participants ont également relevé qu'une centralisation ne permettrait qu'insuffisamment de tenir compte d'aspects particuliers liés à l'attribution. Ainsi, estiment-ils, le service national des attributions n'aurait pas connaissance de l'état de santé exact des patients; en outre, il ne saurait pas, par exemple, que tel ou tel centre de transplantation souffre temporairement d'une insuffisance de ressources. A ces arguments on peut répliquer que la situation médicale du patient doit impérativement ressortir de la liste d'attente. En outre, s'il n'est parfaitement au fait de la situation médicale d'un patient, le service national des attributions a toujours la possibilité de se mettre en rapport avec le centre de transplantation concerné avant de prendre une décision. En outre, le fait qu'un centre manque temporairement des ressources nécessaires à la transplantation n'est pas une raison pour ne pas chercher à satisfaire les besoins du patient. En pareille occurrence, il y aura lieu d'examiner la possibilité que la transplantation ait lieu dans un autre centre.

Autre argument invoqué contre un système d'attribution centralisé: le fait que des organes émanant de donneurs d'une région déterminée ne profitent pas à des receveurs de la même région ne manquerait pas d'avoir une incidence négative sur la propension au don d'organes dans ladite région. Une telle affirmation est spécieuse.

Quoiqu'il en soit, dans un rapport de 1999 et consacré à la pratique suivie aux EtatsUnis en matière d'attribution d'organes, l'Institute of Medicine est parvenu à des conclusions opposées (cf. note 34). En tout état de cause, de tels arguments ne sauraient peser sur les patients pas plus qu'ils ne peuvent être pris en compte sous l'angle de l'équité. En outre, l'argument de la démotivation des donneurs potentiels ne tient plus puisque, selon la nouvelle réglementation prévue, le service national des attributions sera tenu de traiter les centres de transplantation sur le même pied quel que soit le nombre de donneurs qu'ils auront «recrutés».

1.3.5.6.3

Définition des principes au niveau de la loi et incidences sur la pratique actuelle

Critères d'attribution La loi doit définir les critères applicables en matière d'attribution. Ceux-ci seront sous-tendus par un principe: nul ne doit être discriminé lors de l'attribution d'organes. En particulier, des aspects tels que l'origine ethnique, le sexe, la situation financière, le statut ou le comportement social ne peuvent en aucun cas être déterminants pour l'attribution des organes. Seuls peuvent être pris en compte l'urgence médicale de la transplantation, l'utilité médicale de celle-ci, la durée d'attente à l'actif des candidats, enfin la nécessité de garantir l'égalité des chances aux patients particulièrement défavorisés.

Procédure d'attribution L'attribution d'organes doit, dans chaque cas, être opérée centralement et en fonction des besoins spécifiques des patients par le service national des attributions. S'il

112

advient que la situation médicale d'un patient présente brusquement des modifications dont il s'agit de tenir compte, le service national des attributions consulte le centre de transplantation concerné avant de prendre une décision.

Incidences sur la pratique en vigueur Sous l'empire de la nouvelle réglementation, il ne sera plus licite d'attribuer un organe à un centre de transplantation ni d'exiger une «retour sur investissement». Les centres ne seront plus habilités à fixer leurs propres critères d'attribution. Enfin, ils n'auront plus le pouvoir de statuer eux-mêmes sur l'attribution.

1.3.6

Centres de transplantation

1.3.6.1

Introduction

Les centres de transplantation sont des hôpitaux dans lesquels on pratique la transplantation d'organes. Par programmes de transplantation, on entend les types d'organes greffés dans un centre de transplantation. Un hôpital qui, par exemple, pratique la greffe de reins et de poumons exploite deux programmes de transplantation.

Les notions de centres de transplantation et de programmes de transplantation n'ont pas la même acception dans tous les pays du monde. Il est dès lors extrêmement difficile de collecter des chiffres qui soient comparables.

En Suisse, comme dans bien d'autres pays, instances ou organisations internationales, on se demande depuis longtemps s'il est judicieux de limiter le nombre de centres de transplantation pour des raisons de qualité et de coûts. On ne dispose pas, pour l'heure, des données qui seraient nécessaires pour déterminer comment et dans quelle mesure le nombre des centres de transplantation ou le nombre annuel des transplantations pratiquées par un centre influent sur les coûts.

1.3.6.2

Les centres de transplantation et programmes de transplantation en Suisse et au niveau international

La Suisse dispose de six centres de transplantation, ce qui correspond à une densité d'un centre pour 1,2 million d'habitants. En l'an 2000, les centres de transplantation ont mis en oeuvre 27 programmes de transplantation (6 pour le rein, 5 pour le coeur, 4 pour le foie, 3 pour l'ensemble foie/rein, 3 pour le poumon, 1 pour l'ensemble coeur/poumon, 1 pour le pancréas, 2 pour l'ensemble rein/pancréas, 2 pour l'ensemble rein/îlots de Langerhans), soit une densité d'en moyenne un programme de transplantation pour 0,27 million d'habitants (cf. annexe A7 tableau 4).

Une comparaison internationale du nombre de centres et de programmes de transplantation donne l'image suivante (cf. annexe A7 tableaux 1 et 2): la Finlande a la plus faible densité de centres de transplantation. Elle dispose d'une clinique de transplantation pour une population de 5 millions d'habitants. L'Espagne, avec 0,9 et les Etats-Unis avec 1,0 centre pour 1 million d'habitants présentent les densités les plus fortes. En matière de programmes de transplantation, c'est à nouveau la

113

Finlande qui est la moins bien dotée avec un programme pour 1 million d'habitants.

Les pays qui viennent en tête quant à la densité sont l'Italie (1 programme de transplantation pour 0,32 million d'habitants), les Etats-Unis (1 programme pour 0,35 million d'habitants) et la France (1 programme de transplantation pour 0,41 million d'habitants). Sur le plan international, les différences quant à la grandeur des zones de couverture des divers centres et programmes de transplantation sont donc importantes.

Le tableau 3 de l'annexe A7 indique la couverture moyenne de la population par les différents programmes en Suisse, en Allemagne et en Autriche. Pour les cinq programmes de transplantation retenus (rein, l'ensemble rein/pancréas, coeur, poumons, foie), la Suisse présente sans exception les plus petites zones de couverture, soit la plus forte densité.

En comparaison internationale, la Suisse dispose d'une forte densité tant en ce qui concerne les centres que les programmes de transplantation.

1.3.6.3

Limitation du nombre de centres de transplantation pour des raisons de qualité et de coûts

1.3.6.3.1

Qualité

Pour juger de la qualité des résultats d'une transplantation, il est tenu compte en priorité de la durée de survie du receveur et de l'organe transplanté. Plusieurs études ont été menées, en majorité dans le domaine de la transplantation rénale, pour déterminer les facteurs qui influencent la qualité des résultats de la transplantation.

On entendait avant tout établir si le nombre de transplantations (par organe) effectuées par année dans un centre exerce une influence sur la qualité des résultats et s'il existe un nombre optimal de centres de transplantation par pays.

Ces études permettent de faire les remarques suivantes: Il faut partir du principe qu'il y a, dans la médecine de transplantation aussi, un effet centre40: il n'est pratiquement pas possible de définir les paramètres qui influencent la qualité de la transplantation. En effet, les études qui leur ont été consacrées jusqu'ici sont trop peu détaillées et ce n'est que depuis les années 1990 qu'ils sont systématiquement examinés. Des efforts sont toutefois mis en oeuvre si bien que l'on disposera probablement ces prochaines années de données différenciées.

L'équipe de transplantation, c'est-à-dire l'expérience du personnel médical chargé de la transplantation, est un paramètre qui influence certainement la qualité.

L'UNOS (United Network for Organ Sharing), l'organisation nationale responsable de la certification des centres de transplantation aux Etats-Unis, a dès lors posé les exigences auxquelles doivent satisfaire, non pas les centres, mais les chirurgiens et les médecins41. L'expérience dans le traitement ultérieur des personnes transplantées 40 41

114

On désigne par effet centre, l'existence de différences en matière de qualité et de coûts, entre divers hôpitaux.

Evans R.W., Public and private insurer designation of transplantation programs, Transplantation, 1992, 53(5), p. 1041.

est également importante. Elle influence le succès à moyen et à long terme d'une transplantation.

Le nombre de transplantations effectuées chaque année a un impact sur la qualité: ­

Foie: il ressort d'une étude42 effectué entre 1988 et 1997 et portant sur les données de 22 089 patientes et patients issus de 102 centres et 18 pays que le taux de mortalité des receveurs, dans les centres de transplantation ayant pratiqué moins de 25 transplantations par année, était plus élevé que dans les centres avec plus de 25 transplantations. Une étude43 menée aux Etats-Unis de 1992 à 1994 a également révélé que le taux de mortalité des patients transplantés était plus élevé dans les centres de transplantation ayant effectué moins de 20 greffes hépatiques par année que dans ceux qui en avaient pratiqué plus de 20.

­

Une étude44 réalisée en France a permis d'établir une corrélation positive entre le nombre et la qualité des transplantations hépatiques et pulmonaires ­ mais pas cardiaques et rénales ­ pratiquées en France entre 1991 et 1996.

Les avis divergent quant au nombre de transplantations qui devraient être effectuées chaque année dans un centre pour garantir une qualité optimale: la British Transplant Society propose 50 à 75 transplantations rénales et 12 transplantations hépatiques par année. Le Royal College of Surgeons of England avance le chiffre de 50 à 75 greffes du rein et le Consiglio Superiore di Sanità d'Italie de 25 greffes du rein et de 15 transplantations de foie et de coeur.

1.3.6.3.2

Coûts

Les coûts d'une transplantation se composent, pour l'essentiel, des frais d'hospitalisation (avant, pendant et après la transplantation), des analyses nécessaires pour définir l'état de santé du patient et son aptitude à recevoir l'organe, des coûts du prélèvement et du contrôle de l'organe, des frais de transport de l'organe du lieu de prélèvement au centre de transplantation, des taxes d'utilisation de la salle d'opération ainsi que des coûts des différents médecins ainsi que de ceux du traitement après la transplantation, y compris l'immuno-suppression. Les dépenses liées à chacune de ces composantes varient fortement. L'état de santé du donneur et du receveur, les complications chirurgicales, l'emplacement ainsi que le standard d'équipement de l'hôpital où a lieu le prélèvement et du centre de transplantation ont, en particulier, une influence prépondérante sur le montant des coûts. Après la transplantation proprement dite, les infections, le rejet ainsi qu'une nouvelle hospitalisation peuvent tout particulièrement augmenter les coûts.

42

43

44

Adam R., Cailliez V, Majno P. et al., Normalised intrinsic mortality risk in liver transplantation: European Liver Transplant Registry study, The Lancet, 2000, 356, p.

621.

Edwards E.B., Roberts J.P., McBride M.A. et al., The effect of volume of procedure at transplantation centers on mortality after liver transplantation, The New England Journal of Medicine, 1999, 324 (27), p. 2049.

Golmard J.-L., Chalem Y., Dunbavand A. et al., Evaluation des résultats des greffes d'organes en France: existe-t-il un effect centre? Bulletin de l'Académie Nationale de Médecine, 183(2), 1999, p. 245.

115

Aucune étude n'a jusqu'ici été menée pour déterminer si le nombre de centres de transplantation et le nombre de transplantations effectuées par année dans un centre exercent une influence sur les coûts. Il existe toutefois une étude45 qui montre l'évolution des coûts d'une greffe du coeur lorsqu'un centre introduit cet organe comme nouveau programme. Selon cette étude, la première transplantation du coeur coûterait 81 297 US$ (100 %), la dixième reviendrait à 48 431 US$ (environ 60 %) alors que de la 25e à la 50e, les frais seraient de 35 352 US$ seulement (43 % des coûts d'origine). La réduction des coûts observée est imputable à l'effet expérience.

La question de savoir si, pour la population bâloise, l'utilité supplémentaire résultant de l'introduction d'un programme de transplantation cardiaque à l'hôpital cantonal de Bâle, serait supérieure aux coûts supplémentaires ainsi engendrés a été examinée dans le cadre d'un travail de licence46. Celui-ci est arrivé à la conclusion qu'un nouveau programme de transplantation du coeur en Suisse n'était, d'une manière générale, pas indiqué, car les programmes de transplantation cardiaque déjà existants (hors du canton) garantissaient des transplantations à des coûts plus bas et d'une qualité plus élevée que cela ne pourrait être le cas par la mise en place d'un propre programme à Bâle.

A l'heure actuelle, rien ne permet de dire avec certitude comment et dans quelle mesure le nombre de centres de transplantation et le nombre de transplantations pratiquées chaque année dans un centre influencent les coûts. Il paraît toutefois certain que les complications représentent une part essentielle des coûts totaux des transplantations.

1.3.6.3.3

Efforts au niveau international

La question de la réduction du nombre de centres de transplantation est également discutée dans d'autres pays. Jusqu'ici seuls l'Italie et les Pays-Bas disposent de réglementations. En Italie, il est prévu que les centres qui n'atteignent pas le nombre minimum requis de transplantations ne peuvent bénéficier d'une prolongation de l'autorisation d'effectuer des transplantations. Bien que les centres n'aient pas tous atteint le nombre prescrit, toutes les autorisations ont jusqu'ici été renouvelées.

Contrairement à l'Italie, les Pays-Bas ont légalement fixé à sept le nombre des centres de transplantation. Sur ces sept centres, quatre sont autorisés à procéder à des transplantations multi-organes. La limitation du nombre de centres a été décidée pour des considérations de qualité et d'efficience.

Le Danemark, l'Allemagne, la France, la Grande-Bretagne, la Norvège, l'Autriche, le Portugal, la Slovénie et l'Espagne ne connaissent aucune limitation légale du nombre de centres de transplantation. Quelques pays tentent d'en limiter indirectement le nombre par le biais des exigences à remplir pour obtenir l'autorisation.

En Grande-Bretagne, depuis le 1er avril 1997, les greffes du coeur, de l'ensemble coeur/poumon et des poumons peuvent être pratiquées uniquement dans les hôpitaux 45 46

116

Wood J.R. et al., The learing curve and the cost of heart transplantation, Health services research, juin 1992.

Schneider P., Herztransplantationen aus gesundheitsökonomischer und gesundheitspolitischer Sicht, Schriftreihe der SGGP, no 38, 1994.

désignés à cet effet par la National Specialist Commissioning Advisory Group (NSCAG). Le but de la NSCAG est de garantir le standard de soins le plus élevé possible avec les moyens à disposition. La British Transplantation Society (BTS) a publié, en novembre 1998, un document47 dans lequel elle exige notamment qu'un centre de transplantation rénale desserve au moins 2 millions d'habitants. En 1998, un centre couvrait entre moins d'un million (Londres) et plus de 5 millions d'habitants. Le Royal College of Surgeons a confirmé ces chiffres dans son rapport48 et estimé qu'un centre devrait effectuer 75 transplantations rénales par année.

En Allemagne, en France, en Italie et en Espagne, seuls les hôpitaux qui ont reçu une autorisation sont habilités à pratiquer des transplantations. La loi allemande sur la transplantation dispose que les critères à remplir pour obtenir l'autorisation de fonctionner comme centre de transplantation doivent s'aligner sur les prescriptions relatives à l'autorisation d'exploiter un hôpital. En outre, l'autorisation doit porter sur la greffe d'un ou de plusieurs des types d'organes désignés. Le respect des exigences à remplir en matière de personnel, d'équipement et de structure est contrôlé lors des procédures d'autorisation.

En Finlande, en Norvège et en Slovénie, toutes les transplantations d'organes sont pratiquées dans un centre, l'hôpital public, ce qui revient indirectement à limiter légalement les centres de transplantation. En vue de renforcer encore la collaboration entre les pays scandinaves, le Nordic Board of Health élabore, en coopération avec les spécialistes cliniques, des lignes directrices sur le nombre et l'emplacement des centres de transplantation.

1.3.6.3.4

Efforts en Suisse

La question de la réduction du nombre de centres de transplantation est également débattue depuis longtemps en Suisse.

Interventions parlementaires Le postulat (Günter-)Grendelmeier du 22 mars 1990 exigeait une coordination dans le domaine de la médecine de transplantation et la limitation du nombre de centres de transplantation. Il a été rejeté par 45 voix contre 70, avant tout en raison du fait que la médecine curative relève de la compétence des cantons.

Par une motion déposée en 1998, le conseiller national Gysin a invité le Conseil fédéral à considérer les planifications hospitalières cantonales et régionales dans le contexte global suisse et à établir une planification hospitalière pour la médecine de pointe. A la mi-1999, la motion a été transformée en postulat.

Par l'interpellation Rychen, du 8 octobre 1999, le Conseil fédéral a été prié de dire s'il était prêt à s'engager, en collaboration avec les cantons et les centres concernés,

47 48

British Transplantation Society, Towards standards for organ and tissue transplantation in the United Kingdom, 1998, p. 19.

The Royal College of Surgeons of England, The Report of the Working Party to Review Organ Transplantation, janvier 1999, p. 10.

117

en faveur d'une réduction du nombre des centres de transplantation et, partant, de la mise en place d'une solution nationale.

Le 14 février 2001, le Conseil fédéral s'est déclaré prêt à accepter le postulat Günter proposant d'examiner l'éventualité de la création d'un centre suisse pour la médecine de transplantation.

La position de SwissTransplant Le Conseil de fondation de SwissTransplant a fait observer qu'en Suisse, le nombre de centres de transplantation, comparé à celui des habitants, est nettement plus élevé que dans les pays voisins. Il a admis que les centres ne parviennent pas tous à pratiquer le nombre de transplantations nécessaire pour atteindre, conserver ou développer la qualité de la médecine de transplantation. Le Conseil de fondation préconise une coordination fédérale. Pour empêcher une extension sauvage des programmes de transplantation, le Conseil de fondation a décidé, le 13 janvier 2000, de ne plus développer ses services d'ici à l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation. La coordination nationale doit donc se faire, comme jusqu'ici, entre les six centres de transplantation. Aucun autre hôpital ne peut entrer en ligne de compte. Les centres de transplantation sont également soumis à un moratoire dans la mesure où le développement des activités à des organes jusqu'ici non transplantés ne sera pas soutenu.

Ce moratoire résulte de l'intention manifestée par le centre de Berne d'introduire un programme de transplantation pulmonaire. La SVK a indiqué à ce sujet que l'assurance maladie obligatoire n'est pas tenue à verser des prestations pour les greffes pulmonaires qui seraient pratiquées à Berne.

La réglementation prévue dans l'avant-projet et le résultat de la procédure de consultation L'avant-projet prévoyait de faire dépendre l'exploitation d'un centre de transplantation pour la greffe d'organes d'une autorisation délivrée par le Conseil fédéral et de limiter le nombre de centres de transplantation pour des raisons de qualité et de coûts. Dans la procédure de consultation, cette réglementation a été diversement appréciée (cf. ch. 1.2.3.2).

Efforts en cours La question de la planification de l'offre devrait être abordée dans un contexte global et non seulement pour la médecine de la transplantation. Le groupe de travail «médecine de pointe», institué par la
Conférence des directeurs des affaires sanitaires (CDS), examine actuellement la question. Les propositions du groupe de projet 4 pour la nouvelle péréquation financière entre la Confédération et les cantons servent de base à ses travaux. Le groupe de projet 4 s'est aussi occupé du problème de la planification et du financement des prestations médicales hautement spécialisées. Il a proposé de définir, pour toute la Suisse, des règles concernant la planification et l'attribution des capacités pour la médecine de pointe et les soins hautement spécialisés. Une liste suisse de prestations médicales de pointe et de domaines d'activités médicales hautement spécialisées devrait constituer le cadre impératif de la planification et de l'attribution des capacités. Cette liste devrait être établie par la Confé-

118

rence des directeurs cantonaux des affaires sanitaires, après audition de la Conférence universitaire suisse. Cette solution devrait trouver son assise juridique essentiellement dans les conventions intercantonales. Au niveau constitutionnel, il faut prévoir que la Confédération puisse donner force obligatoire à de telles conventions ou obliger les cantons à y participer. Le thème «critères de planification de l'offre/coordination et planification de la médecine de pointe» a également été déclaré prioritaire par les décideurs politiques lors de la Journée constitutive pour une Politique nationale de la santé qui a réuni, le 29 mai 2000, les responsables de la Confédération et des cantons. Un groupe de coordination, constituant une plate-forme, a été mis sur pied en octobre 2000 pour assurer l'échange d'informations et d'avis entre les cantons, les offices fédéraux, les universités et les assureurs-maladie. Le rapport final du groupe de travail «médecine de pointe» de la CDS doit être présenté en novembre 2001.

1.3.6.3.5

Conséquences pour la réglementation légale

La décision de renoncer à limiter le nombre des centres de transplantation au niveau de la loi a été prise pour deux raisons: d'abord parce qu'il n'y a pas unanimité au niveau international en ce qui concerne les facteurs influant sur les résultats des transplantations et en ce qui concerne le nombre minimum de transplantations qu'un centre doit pouvoir effectuer par année et par type d'organe; ensuite, parce qu'il paraît judicieux d'attendre les résultats des efforts en cours au niveau cantonal en vue d'obtenir une concentration de la médecine de pointe. Le Conseil fédéral a néanmoins la compétence de restreindre le nombre des centres de transplantation par voie d'ordonnance. Il aura vraisemblablement recours à cette possibilité uniquement si les efforts de coordination de la médecine de pointe ne permettent pas d'obtenir les résultats espérés. Compte tenu de la pénurie d'organes, une limitation du nombre des centres de transplantation pourrait être motivée par le souci d'accroître l'efficacité des transplantations d'organes afin d'obtenir une meilleure utilisation des ressources disponibles. Une limitation pourrait aussi être décidée pour des raisons de logistique49 ou pour permettre une formation et un perfectionnement adéquats dans le domaine de la médecine de transplantation. Avant de faire usage de cette compétence, le Conseil fédéral devra toutefois s'entendre avec les cantons. Cette clause implique un vrai dialogue, qui ne saurait être réduit à une simple participation des cantons à la procédure de consultation.

49

Les travaux administratifs, le temps et les moyens financiers nécessaires à une allocation équitable des organes disponibles augmentent avec le nombre des centres de transplantation. Le service national des attributions doit consulter chacun des centres et, en cas d'allocation, organiser le transport des organes attribués.

119

1.3.7

Transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine

1.3.7.1

Introduction

Par la transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine, les médecins espèrent pouvoir traiter plus efficacement certaines maladies graves. Comme les tissus foetaux sont encore indifférenciés et ne prennent leur forme définitive qu'au cours du développement embryonnaire, on leur attribue des avantages déterminants, en comparaison avec les tissus d'adultes: ils seraient plus faciles à cultiver, auraient un grand potentiel de croissance et ne devraient causer aucune réaction immunologique (p. ex. une réaction de rejet) ou qu'une réaction très faible.

Les tissus utilisés pour la transplantation sont obtenus lors d'avortements provoqués. En outre, on peut, en principe, également utiliser des tissus prélevés sur des foetus provenant de fausses couches. Cependant, d'une manière générale, la médecine tient ces derniers pour peu appropriés, car les fausses couches se produisent la plupart du temps spontanément et le foetus est souvent déjà mort dans le ventre de sa mère, de sorte que ses cellules sont aussi «mortes». De plus, les tissus sont souvent infectés par des virus ou des bactéries. Ce qui est déterminant en l'occurrence, c'est le facteur temps et la possibilité de planifier l'intervention, particulièrement lorsque des tissus doivent être «fraîchement» transplantés et que de ce fait le patient doit être préparé à l'intervention.

A vrai dire, les espoirs placés par la médecine dans cette technique ne se sont que partiellement réalisés. D'une part, les essais cliniques n'ont permis d'obtenir que très peu de données exploitables et la percée que l'on escomptait notamment en ce qui concerne la transplantation de tissus nerveux issus de foetus , n'a pas eu lieu.

D'autre part, on a constaté que pour produire un effet, certaines transplantations exigeaient une quantité de tissus foetaux relativement importante. Compte tenu de ces éléments, il semble que la transplantation directe de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus ne soit pas viable. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'attention de la recherche s'est reportée sur la multiplication (expansion) ou la culture (p. ex. de cellules souches tissulaires) de tissus ou de cellules.

1.3.7.2

Transplantation de tissus nerveux issus de foetus

La plupart des tentatives de greffe de tissus nerveux issus de foetus ont été effectuées sur des personnes souffrant de la maladie de Parkinson. La maladie de Parkinson est une affection neurologique dégénérative provoquée par la destruction accélérée de certaines cellules nerveuses, les neurones dopaminergiques50, dans certaines parties du cerveau. Les symptômes de la maladie de Parkinson sont l'altération de la mobilité pouvant aller jusqu'à l'immobilité, le ralentissement des mouvements, une rigidité et des tremblements. Ces symptômes peuvent être atténués par l'adminis-

50

120

Les neurones dopaminergiques sont les cellules nerveuses qui produisent un neurotransmetteur, la dopamine.

tration des neurotransmetteurs L-DOPA51, mais il y a des effets secondaires. Il faudrait donc développer des thérapies entraînant moins d'effets secondaires. La transplantation de cellules nerveuses dopaminergiques dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie de Parkinson en est une. Ces cellules sont prélevées sur les cerveaux de foetus provenant d'interruptions de grossesse.

On espérait que les cellules ainsi transplantées produisent, en lieu et place des cellules mortes, la dopamine nécessaire pour assurer une motricité normale à ces patients. Les chercheurs considèrent que la maladie de Parkinson est une pathologie qui se prête particulièrement bien à la transplantation de tissus nerveux puisque les lésions du cerveau qu'elle provoque sont limitées et clairement localisables.

C'est en Suède qu'eurent lieu, en automne 1987, les deux premières transplantations de tissus issus d'embryons provenant d'avortements. Le fait qu'en Suède la médecine pratique de manière très active ce type de transplantation s'est traduit dans la loi sur la transplantation de 1995, qui est l'une des rares à réglementer également la transplantation de tissus issus de foetus .

Au cours de la dernière décennie, 250 personnes ont été traitées par transplantation de cellules nerveuses provenant de foetus aux USA et en Europe dans le cadre de travaux de recherche. Il semble que ces transplantations aient entraîné une diminution des symptômes, mais les chercheurs ne s'accordent pas à reconnaître si l'amélioration est réellement due à la transplantation ou à d'autres effets (effet placebo, soins plus intensifs). Etant donné que l'on a besoin de six à dix foetus pour traiter un seul patient, il faut planifier plusieurs avortements et les coordonner avec elle. Selon la technique d'avortement utilisée, seuls les tissus nerveux d'un tiers ou de la moitié des embryons peuvent être prélevés. A cela s'ajoute le fait qu'il faut une longue expérience pour trouver un mésencéphale de quelques millimètres dans un embryon mesurant entre 1,5 et 3 cm. Si l'on se trompe et que l'on transplante ensuite le faux tissu, cela peut entraîner des affections très graves. Reste encore à savoir si de telles transplantations peuvent induire des réactions de rejet et, partant, s'il est nécessaire d'administrer aux patients un traitement aux
immunosuppresseurs.

D'autres recherches sont nécessaires pour déterminer si la transplantation de cellules nerveuses est une thérapie appropriée pour lutter contre la maladie de Parkinson et d'autres maladies et atteintes du système nerveux central telles la maladie de Alzheimer, la chorée de Huntington, les attaques d'apoplexie et l'épilepsie. En rapport avec la transplantation de tissus nerveux issus de foetus , on se demande parfois si cette technique est de nature à induire des changements de personnalité. Certains chercheurs, en effet, redoutent que les patients qui ont subi une telle transplantation ne présentent de graves perturbations de leur personnalité. Ils soutiennent l'hypothèse que la greffe de tissus nerveux «étrangers» n'a pas que des effets pharmacologiques mais encore, qu'une fois en réseau avec le cerveau du receveur, les cellules qui composent ces tissus pourraient provoquer des modifications tant de l'intellect que du psychisme. L'ASSM considère que cette hypothèse est irréaliste puisque la transplantation ne porte que sur d'infimes parcelles de tissus nerveux ou sur des cellules isolées, et non pas sur les liaisons entre cellules nerveuses et centres

51

La L-DOPA est le précurseur direct de la dopamine.

121

nerveux, qui contribuent dans une mesure notable à définir les traits de caractère (cf.

ch. 1.1.5.3.2).

1.3.7.3

Pratique suivie en Suisse

En Suisse, un essai clinique a été effectué, à la clinique neurochirurgicale de l'hôpital de l'Ile de Berne (en décembre 1995), sur une patiente atteinte de la maladie de Parkinson. Les tissus nerveux de cinq foetus ont été transplantés dans le cerveau de cette patiente. L'opération s'est déroulée sans complication et la patiente a pu rentrer chez elle dans un bon état général.

Bien que la Commission d'éthique ait donné son consentement au traitement d'autres patients, on a renoncé pour le moment à effectuer d'autres transplantations.

D'une part pour des raisons de logistique, mais surtout parce que les chercheurs sont parvenus à la conclusion qu'avant de poursuivre les essais, il fallait effectuer davantage de recherche fondamentale. Cette manière de procéder a fait l'objet de discussions avec d'autres membres de NECTAR (Network for European CNS Transplantation and Restoration). Le laboratoire de recherches de la clinique neurochirurgicale de l'hôpital de l'Île poursuit activement ses travaux dans ce domaine. On prévoit à l'avenir d'autres transplantations, une fois la base scientifique améliorée.

1.3.7.4

Inconvénients, problèmes et craintes

Ce domaine recèle un potentiel d'abus: ­

L'utilisation à des fins médicales de tissus issus de foetus pourrait mener à l'instrumentalisation de la grossesse.

­

Les techniques d'avortement les plus usitées aujourd'hui, techniques qui présentent relativement peu de risques, limitent étroitement les possibilités d'utiliser à des fins thérapeutiques des tissus prélevés sur des foetus . Il s'agit là d'un problème majeur. En effet le choix de la technique et du moment de l'avortement est en étroite corrélation avec les chances de succès du traitement auquel servira le foetus ou l'embryon, en particulier si ce traitement consiste à transplanter des tissus nerveux issus du foetus . Cette situation présente le risque que l'intérêt que la médecine de transplantation porte à l'utilisation de tissus foetaux n'influe sur la pratique en matière d'avortement, le moment et la technique de cette intervention étant alors choisis en fonction des contingences liées à l'obtention de ces tissus.

­

Il faut absolument empêcher que des femmes ne tombent enceintes puis avortent dans le seul but de permettre pour elles-mêmes ou pour des proches une utilisation à des fins thérapeutiques de tissus issus du foetus. Il faut également faire obstacle aux pressions qui pourraient être exercées sur les femmes enceintes ainsi qu'à la commercialisation desdits tissus.

122

1.3.7.5

Principes à respecter dans la réglementation

­

La transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine est soumise au régime de l'autorisation.

­

On ne doit pas pouvoir demander à une femme l'autorisation d'utiliser les tissus de son foetus à des fins de transplantation avant que celle-ci ait pris la ferme décision d'interrompre sa grossesse (décision qui ne doit pas être influencée). L'utilisation n'est permise que si la donneuse a donné son consentement après avoir reçu une information exhaustive.

­

Le don à une personne déterminée est illicite (il s'agit de prévenir les grossesses ayant pour seul but de permettre l'utilisation de tissus foetaux à des fins de transplantation).

­

Il faut exclure que la donneuse de même que le personnel médical concerné puisse retirer un quelconque avantage pécuniaire de la transplantation.

­

La date de l'interruption de grossesse de même que la technique utilisée seront choisis indépendamment de l'utilisation qui sera faite ultérieurement des tissus foetaux.

­

L'équipe qui effectue la transplantation ne doit ni influencer le personnel médical qui procède à l'interruption de grossesse ni participer à celle-ci.

1.3.8

Xénotransplantation

1.3.8.1

Introduction

L'avant-projet prévoyait de soumettre la xénotransplantation au régime de l'autorisation, appliquant ainsi la décision prise par le Parlement en 1999, dans la cadre de la révision de l'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants. Une majorité de participants à la procédure de consultation ont critiqué la réglementation proposée s'agissant de la xénotransplantation, certains allant même jusqu'à la rejeter. A l'appui de ces critiques ils ont notamment invoqué les risques d'infection, les aspects liés à la protection des animaux, le fait que l'utilité médicale et l'efficience de cette technique n'étaient pas encore établies, enfin des motifs d'ordre éthique. Le panel des citoyens de PubliForum pour la médecine de transplantation a lui même émis des réserves quant aux incidences médicales et psychiques de la xénotransplantation. Si la majorité de ses membres n'a pas exigé de moratoire, elle n'en a pas moins insisté sur l'importance que revêtent les autres solutions propres à atténuer la pénurie d'organes, telle la prévention des maladies entraînant la défaillance d'un organe.

Le Parlement ayant décidé, à l'automne 1999, de soumettre la xénotransplantation au régime de l'autorisation, force est de maintenir ce régime dans le projet de loi, en dépit des critiques ou de l'opposition manifestées par la majorité des milieux consultés.

123

1.3.8.2

Responsabilité

S'agissant de la xénotransplantation, l'avant-projet prévoyait d'instaurer une responsabilité spécifique pour le risque. Certains milieux consultés ont expressément salué la réglementation proposée, alors que d'autres ont préconisé qu'on l'harmonise avec la révision du droit général de la responsabilité civile et de la législation Gen-Lex. Une majorité des participants a cependant estimé que la responsabilité proposée allait trop loin et qu'en lieu et place d'une responsabilité pour risque il était préférable de prévoir une responsabilité pour faute.

Cela étant, l'OFSP a demandé sur ce sujet un avis de droit au Prof. dr en droit Walter Fellmann de Lucerne (cf. ch. 1.4). Dans son expertise, celui-ci parvient aux conclusions suivantes: Responsabilité au sens de l'art.41 CO En principe, la responsabilité définie à l'art. 41 du code des obligations (CO; RS 220) s'appliquerait également aux erreurs commises lors de xénotransplantations. Toutefois, comme dans ce domaine il est très mal aisé d'établir qu'il y a eu faute, cette disposition, à elle seule, ne permettrait pas d'assurer aux personnes lésées une protection suffisante au regard de la gravité des risques que comportent de telles interventions.

Responsabilité au sens de l'art. 55 CO L'art. 55 CO ne suffit pas à instaurer une responsabilité générale du producteur, puisqu'il permet à celui-ci de se dégager de sa responsabilité à certaines conditions (quand bien même l'usage de cette possibilité a été fortement restreint par la jurisprudence). Relevons également que cette disposition ne porte que sur la responsabilité de l'employeur pour les dommages causés par son personnel. Elle ne couvre donc ni la responsabilité de l'entreprise comprenant une seule personne, ni celle des organes d'une personne morale. Par ailleurs, comme l'art. 55 CO, s'agissant de la responsabilité du fait des produits, représente pour l'essentiel une disposition sujette à interprétation par les tribunaux, il est en définitive impossible d'estimer l'évolution que suivra le droit en la matière. Compte tenu des différentes incertitudes dont il est entaché, l'art. 55 CO, ne saurait représenter une base légale suffisante pour obliger les responsables de xénotransplantations.

Responsabilité au sens de la loi fédérale sur la responsabilité du fait des produits Les xénotransplants
génétiquement modifiés peuvent, sans aucun doute, être considérés comme des produits au sens de l'art. 3 de la loi sur la responsabilité du fait des produits (LRFP; SR 221.112.944). Si de tels transplants recèlent des agents pathogènes, ils n'offrent pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre compte tenu de toutes les circonstances et, partant, doivent être considérés comme défectueux au sens de l'art. 4 LRFP. En vertu de l'art. 2 LRFP, est responsable pour de tels défauts toute personne qui est associée à la fabrication du produit à titre d'indépendant. En cas d'importation de transplants en Suisse, l'importateur peut également être appelé à répondre des défectuosités constatées (art. 2, al. 1, let. c,

124

LRFP). Si le producteur ne peut pas être identifié, chaque fournisseur sera considéré comme responsable à moins qu'il n'indique à la victime l'identité du producteur ou de la personne qui lui a fourni le produit (art. 2, al. 2 LRFP). Ainsi donc, les dispositions de la LRFP assurent un degré de protection relativement élevé aux personnes exposées aux risques que présentent les xénotransplantations.

Les xénotransplants étant des produits de l'élevage, il importe qu'au titre de la responsabilité du fait des xénotransplants, le législateur statue que l'art. 3, al. 2, LRFP ne leur est pas applicable. On aurait ainsi la garantie que le producteur de la «matière première», à savoir la personne qui élève les animaux en prévision de leur utilisation à des fins de xénotransplantation, réponde des défauts éventuels du produit. La norme de protection des producteurs agricoles que constitue l'art. 3, al.

2, LRFP n'a pas sa place dès lors qu'il s'agit de xénotransplantations.

On sait aujourd'hui que dans le cadre d'une xénotransplantation des agents pathogènes risquent d'être transférés de l'animal à l'homme. Ce qu'on ne connaît pas ce sont uniquement les mesures qui permettraient de maîtriser ce risque. Ainsi donc le risque d'infection ne constitue-t-il pas un risque inhérent à l'évolution du produit mais bien une simple carence dans la production. Cela étant, le producteur ne saurait dégager sa responsabilité en apportant la preuve que l'état des connaissances scientifiques et techniques, lors de la mise en circulation du produit, ne permettait pas de déceler l'existence du défaut du xénotransplant (art. 5, al. 1, let. e, LRFP).

Toutefois, comme on ne saurait exclure qu'en sus du risque de transfert d'agents pathogènes de l'animal à l'homme, la xénotransplantation présente d'autres risques impossibles à déceler pour l'heure, le législateur devrait, dans le cas de l'application de la LRFP aux xénotransplants, exclure que le fabricant puisse dégager sa responsabilité en apportant la preuve que le défaut est lié au risque inhérent à l'évolution du produit.

Lacunes de protection présentées par la LRFP au niveau du processus de production Au stade de la production de xénotransplants, autrement dit avant leur mise en circulation, la responsabilité causale au sens de la LRFP ne s'applique que si le dommage est
imputable à un produit de base ou à un produit semi-fini qui a été diffusé dans le cadre d'un processus de production et, partant, mis en circulation (art. 5, al. 1, let. a, LRFP). Eu égard aux risques ­ impossibles à cerner précisément dans l'état actuel des connaissances ­ que présente l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés ou pathogènes, force est de considérer cette restriction comme une lacune. Il y a donc lieu d'examiner l'opportunité d'instaurer une responsabilité causale au stade du processus de production des xénotransplants, plus précisément pour les phases de développement, de test et de production du ressort du producteur.

Une telle responsabilité devrait également être prévue pour le cas où les xénotransplants viendraient à être diffusés avant l'étape de mise en circulation proprement dite.

125

Art. 55 de l'avant-projet L'art. 55 de l'avant-projet élargit dans une mesure extraordinaire le cercle des personnes qui peuvent être tenues pour responsables. Ainsi, selon la réglementation préconisée, même le médecin qui a procédé à la transplantation d'un organe, de tissus ou de cellules d'origine animale serait soumis à une responsabilité pour le risque. On aurait ainsi des régimes de responsabilité différents selon les thérapies appliquées, ce qui ne semble pas approprié à la matière à régler. La première personne qui doit être appelée à répondre du dommage causé par un défaut du transplant est le producteur et non le médecin. En définitive, la réglementation prévue par la loi sur la responsabilité du fait des produits semble plus convaincante que celle qui est préconisée dans l'avant-projet.

Responsabilité selon la loi sur la protection de l'environnement L'art. 59a, al. 1bis du projet de modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (Message du 1er mars 2000 relatif à une modification de la loi fédérale sur la protection de l'environnement; FF 2000 2283) s'appliquerait en principe à la greffe d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale sur l'homme ainsi qu'au développement de xénotransplants. Prise dans son ensemble, cette disposition ne constitue pas une norme traditionnelle sur la responsabilité. En effet, s'écartant totalement du principe voulant que seules doivent répondre d'un dommage les personnes qui en sont réellement responsables, elle prévoit que le responsable potentiel répond de tout dommage qui peut résulter de la mise en circulation du produit à quelque titre que ce soit. En d'autres termes, cette disposition rend cette personne également responsable des actes et événements qui échappent à son domaine de responsabilité et sur lesquels elle n'a aucune influence. Dans le cas de la xénotransplantation, une telle disposition aboutirait à des situations disproportionnées. En tout état de cause, l'application de la loi sur la responsabilité du fait des produits est plus appropriée à la matière à régler.

Conclusions Il y a lieu de se rallier au point de vue de l'expert s'agissant de l'application de la loi sur la responsabilité du fait des produits. Aussi faut-il prévoir une modification ad hoc de cette loi au chapitre «dispositions finales» de la
loi sur la transplantation (cf.

le commentaire de l'art. 69).

De même, force est de concéder à l'expert que la réglementation de la responsabilité pour le risque statuée par la loi sur la protection de l'environnement s'agissant de l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés ou pathogènes, responsabilité dont le Parlement débat actuellement dans le cadre de l'examen du projet Gen-Lex, s'applique également au secteur de la xénotransplantation. Aussi peut-on renoncer à prévoir une réglementation spécifique dans la loi sur la transplantation.

Selon la réglementation prévue par la loi sur la protection de l'environnement, le médecin qui pratique la xénotransplantation peut, en principe, être tenu pour responsable. Contrairement à l'avis de l'expert, nous estimons que cela est judicieux. Le médecin, en effet, tout autant que le producteur, est responsable de ce que les risques inhérents à toute xénotransplantation ne se concrétisent pas.

126

1.3.8.3

Protection des animaux

Le projet de loi réglemente la xénotransplantation essentiellement sous l'angle de la protection de l'être humain. Il s'agit, au premier chef, de prémunir le receveur, les personnes qui sont en contact avec lui de même que la population des risques d'infection. Dans le domaine de la xénotransplantation, il va de soi qu'il faut également prendre en compte les impératifs liés à la protection des animaux. Toutefois, cet aspect ne doit pas être réglé dans la loi sur la transplantation mais dans celle du 9 mars 1978 (RS 455) sur la protection des animaux.

Personne ne doit de façon injustifiée imposer aux animaux des douleurs, des maux ou des dommages ni les mettre en état d'anxiété. A cette interdiction générale statuée par la loi sur la protection des animaux il est question d'ajouter ­ à la faveur de la révision de cette loi dans le cadre du projet Gen-Lex ­ l'interdiction de ne pas respecter la dignité de l'animal. On soulignera ainsi que le principe fondamental du respect de l'intégrité des organismes vivants, tel qu'il est établi à l'art. 120, al. 2 de la Constitution, s'agissant du génie génétique dans le domaine non humain, vaut pour tous les secteurs de la législation.

Hormis en ce qui concerne l'expérimentation animale, il n'existe pas, pour l'instant, de normes de protection des animaux spécifiquement applicables à l'élevage selon des méthodes naturelles ni à la production impliquant le recours à des techniques de reproduction ou relevant du génie génétique. Dans le cadre de la révision de la loi sur la protection des animaux déjà évoquée, il s'agira de réglementer comme il se doit les aspects de la production animale qui relèvent de cette loi. Le projet de nouvelles dispositions prévoit que l'élevage ou la production d'animaux ne doit pas imposer aux parents ni à leur descendance des douleurs, des maux ou des dommages ni provoquer chez eux des troubles du comportement. Faculté est en outre donnée au Conseil fédéral d'interdire l'élevage, la production et la garde d'animaux présentant des caractéristiques déterminées. Le projet prévoit, en outre, de soumettre la production, l'élevage, la garde et l'utilisation d'animaux génétiquement modifiés au régime de l'autorisation. Le Conseil fédéral pourra enfin fixer des critères applicables à la pesée des intérêts et à la justification.

1.4

Classement d'interventions parlementaires

L'adoption de la loi sur la transplantation permet de classer les interventions parlementaires énumérées ci-après: Postulat Jelmini du 6 octobre 1989 (89.695; E 15.3.90): il invitait le Conseil fédéral à approfondir la question de la transplantation en vue de l'élaboration d'un texte législatif réglant les points essentiels. Cette réglementation est contenue dans la loi sur la transplantation.

Motion Onken du 7 décembre 1993 (93.3573; E 22.9.94, N 23.3.95): elle chargeait le Conseil fédéral de faire obstacle dans les meilleurs délais au marché (noir) des transplants qui n'allait pas manquer de se développer. Il fallait de plus élaborer des prescriptions légales permettant d'interdire le commerce d'organes d'origine humaine en Suisse et d'autres réglementant le prélèvement d'organes sur les mineurs 127

et les interdits de façon restrictive, liées à des exceptions strictes. La réglementation demandée est contenue dans la loi sur la transplantation.

Motion Huber du 28 février 1994 (94.3052; E 22.9.94, N 23.3.95): elle invitait le Conseil fédéral à élaborer le droit fédéral nécessaire, constitutionnel et législatif, afin de résoudre les problèmes juridiques et organisationnels variés posés par la médecine de transplantation. L'art. 119a de la Constitution fédérale et le projet de loi sur la transplantation satisfont pleinement aux exigences par cette motion.

Postulat de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national du 14 janvier 1999 (99.3000; N 4.3.99): il invitait le Conseil fédéral à faire élaborer un avis de droit dans le but de clarifier les différentes responsabilités lors de xénotransplantations. En exécution de ce postulat, l'OFSP a mandaté le Prof. dr en droit Walter Fellmann de Lucerne (cf. ch. 1.3.8.2).

2

Partie spéciale: Commentaire article par article

2.1

Systématique

Subdivisé en 7 chapitres, le projet de loi comprend 71 articles. Le chap. 1 est consacré aux dispositions générales: but et champ d'application de la loi ainsi que définition des principales notions qu'elle utilise. Le chap. 2 contient les normes relatives aux organes, tissus et cellules d'origine humaine. Il est subdivisé en 9 sections. La première statue la gratuité du don et l'interdiction de faire le commerce de transplants. La section 2 réglemente le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées et fixe, notamment, le critère du décès. La section 3 a trait au prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes vivantes. La section 4 règle l'attribution d'organes. Quant au prélèvement, au stockage, à l'importation, à l'exportation et à la préparation d'organes, de tissus ou de cellules ils font l'objet de la section 5. Les sections 6 et 7, règlent la transplantation et les devoirs de diligence. La section 8 contient les dispositions applicables aux essais cliniques de transplantation d'organes, de tissus ou de cellules. Enfin, la section 9 règle l'utilisation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de cellules d'origine humaine. Le chap. 3 a pour objet les organes, tissus et cellules d'origine animale alors que le chap. 4 porte sur les transplants standardisés. Subdivisé en sept sections, le chap. 5 regroupe les dispositions d'exécution. Enfin, on trouve les dispositions pénales au chap. 6 et les dispositions finales au chap. 7.

2.2

Préambule

La base constitutionnelle citée dans le préambule de la loi sur la transplantation est l'art. 119a, al. 1 et 2.

128

2.3

Chapitre 1

Dispositions générales

2.3.1

Art. 1

But

La loi sur la transplantation a pour but d'assurer la protection de la dignité humaine, de la personnalité et de la santé lors de l'application à l'être humain de la médecine de la transplantation. Dans le cadre de la médecine de la transplantation la dignité humaine est un point crucial. Il importe d'en assurer le respect plus particulièrement lors du prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées ainsi que dans le cadre de la définition du critère du décès. Enfin, elle implique le droit à une mort dans la dignité.

Le projet accorde également une importance particulière à la protection de la personnalité. La personnalité comprend l'ensemble des valeurs physiques, psychiques, morales et sociales, telles le corps et la vie, la liberté et la réputation, qui appartiennent à une personne en vertu de sa condition d'être humain, autrement dit toutes les manifestations élémentaires nécessaires à l'épanouissement de la personne. En relation avec la médecine de la transplantation, certaines des garanties découlant de la protection de la personnalité revêtent une importance particulière, notamment la protection de la vie, la garantie de l'intégrité physique et psychique (p. ex. lors du prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur une personne vivante), ainsi que de la liberté de décision (p. ex. de faire don d'organes, de tissus ou de cellules à des fins de transplantation). Dans ce cadre, il faut également assurer le respect du sentiment de piété manifesté par les proches.

La protection de la santé vise, au premier chef, à prémunir le receveur d'une infection par des agents pathogènes. En principe, on trouve, dans la médecine de transplantation, un risque d'infection similaire à celui qui existe en matière de transfusion sanguine et d'administration de produits sanguins. Mais c'est dans le cadre de la xénotransplantation que la protection de la santé joue un rôle éminent. En effet, on sait actuellement peu de choses sur les risques d'infection que présente cette technique; il existe cependant des indices selon lesquels la xénotransplantation peut favoriser le transfert d'agents pathogènes de l'animal vers l'être humain. En outre, on ne sait pas encore dans quelle mesure la population pourrait être mise en danger par un tel risque.

Outre la protection de la santé au sens
strict, il y a lieu de vouer de l'attention à la santé au sens large, par exemple, à l'aspect «qualité de vie». Ainsi, la transplantation devrait permettre à un patient préalablement dialysé 4 ou 5 fois par semaine de recouvrer une indépendance qui contribue à accroître notablement non seulement sa qualité de vie mais encore celle de ses proches.

Lorsque le prélèvement est effectué sur une personne vivante, il importe également de protéger la santé du donneur. Un don d'organes par une personne vivante ne peut se justifier que lorsque le risque pour sa vie ou sa santé est médicalement supportable.

Si la dignité, la personnalité ou la santé doivent en premier lieu être protégées chez le donneur et le receveur d'organes, de tissus ou de cellules, il n'en faut pas moins protéger, de façon générale, toutes les personnes dont ces valeurs peuvent être touchées par les activités de la médecine de transplantation, en particulier les proches

129

du donneur et le personnel médical. Tel a d'ailleurs été l'opinion émise par les citoyens qui ont participé au PubliForum et qui proposent que l'on fasse bénéficier diverses catégories de personnes (p. ex. les proches, le personnel hospitalier; cf.

également ch. 1.2.5) d'un encadrement psychologique.

La loi sur la transplantation vise également à empêcher toute utilisation abusive d'organes, de tissus et de cellules. Cet objectif est notamment précisé par les dispositions sur la gratuité du don et l'interdiction de faire le commerce ainsi que sur l'attribution des organes d'origine humaine disponibles à des fins de transplantation; il l'est également par la réglementation touchant la transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine, ainsi que la xénotransplantation.

A la différence de l'avant-projet, le texte qui fait l'objet du présent message ne prévoit plus de mesures visant à accroître la propension au don d'organes. En effet, s'agissant du don d'organes, l'Etat ne doit pas faire de prosélytisme. Il est tenu de respecter la liberté de tout un chacun. Dans ces conditions, il serait déplacé qu'il s'engage dans la promotion du don d'organes, car en agissant ainsi il poserait implicitement un jugement de valeur différent sur les citoyens selon qu'ils sont enclins ou non à faire un tel don. Le projet de loi sur la transplantation prévoit, cependant, qu'à intervalles réguliers la Confédération et les cantons informent, de manière objective et détaillés, le public sur les questions liées à la médecine de transplantation (cf.

également le commentaire de l'art. 59).

2.3.2

Art. 2

Champ d'application

La loi s'applique à toute utilisation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine ou animale ainsi que de produits issus de ceux-ci (transplants standardisés) destinés à être transplantés sur l'être humain (al. 1). Le terme «utilisation» englobe toutes les activités déployées depuis le prélèvement jusqu'à la transplantation. Dans le souci d'assurer une protection complète, le champ d'application de la loi s'étend tant aux organes, tissus et cellules d'origine humaine qu'à ceux d'origine animale.

Encore faut-il qu'ils se prêtent à une transplantation. Des organes, des tissus ou des cellules qui sont, par exemple, prélevés lors d'une autopsie, d'une biopsie ou lors de recherches en pathologie ne sont pas visés par la loi sur la transplantation.

Il résulte clairement de l'al. 2, let. a que la loi sur la transplantation ne s'applique pas à l'utilisation d'organes, de tissus et de cellules artificiels52 ou dévitalisés, par exemple des valves cardiaques, des tendons ou des os spongieux d'origine humaine ou animale. Ils sont intégrés dans le corps humain afin d'y remplir des fonctions de substitution déterminées, pour un temps limité ou durant une vie entière. Les organes, tissus ou cellules dévitalisés sont préparés de façon à ne plus contenir aucune matière vivante, ce qui augmente leur tolérance par l'organisme et exclut la transmission d'agents pathogènes. Ce sont donc des produits de la médecine, soumis à la législation sur les agents thérapeutiques.

52

130

On n'entend pas seulement par là les organes, tissus ou cellules qui ne contiennent pas de cellules vitales; les organes, tissus ou cellules bioartificiels sont considérés comme des transplants et sont inclus dans le champ d'application de la loi.

L'al. 2, let. b et c exclut également du champ d'application l'utilisation du sang et des produits sanguins puisqu'elle est régie par la législation sur les agents thérapeutiques. En revanche, la loi sur la transplantation s'applique à l'utilisation des cellules souches du sang. Ces dernières doivent être distinguées du sang en tant que tel, ainsi que des cellules sanguines matures. Le sang et les cellules sanguines matures se déplacent librement dans l'appareil circulatoire et ne survivent à une transfusion que durant une période limitée. Il en résulte qu'après un certain temps le corps s'affranchit de cellules d'origine étrangère. En revanche, les cellules souches du sang ne circulent généralement pas dans le sang; elles restent une vie entière dans l'organisme du receveur comme cellules d'origine étrangère et produisent des cellules sanguines. Pour cette raison, elles sont considérées comme des transplants.

Al. 2, let. d: Les techniques de procréation médicalement assistée chez l'être humain ne sont pas non plus comprises dans le champ d'application de la loi sur la transplantation. La manipulation de gamètes, d'ovules imprégnés et d'embryons est régie par la loi fédérale du 18 décembre 1998 sur la procréation médicalement assistée (LPMA; RS 814.90).

Al. 3: Lors d'une transplantation autogène, il y a identité entre le donneur et le receveur. En pareille occurrence, on transplante, en général, des tissus ou des cellules d'une partie du corps à une autre (p. ex. des portions de derme après des brûlures, des segments veineux lors d'une opération de pontage ou des cellules souches du sang à la suite d'une chimiothérapie). De telles interventions chirurgicales sont très courantes et ne posent généralement pas de problème. Aussi la transplantation autogène n'est-elle pas comprise dans le champ d'application de la loi sur la transplantation. En revanche les essais cliniques en la matière sont régis par ladite loi. En effet, afin de protéger la santé des personnes sur lesquelles ces essais sont effectués, il faut assurer que dans le cas de la transplantation autogène également les règles reconnues de Bonnes Pratiques des Essais Cliniques, soient respectées. Il faut, en outre, que le Conseil fédéral ait la faculté d'édicter des prescriptions quant à la qualité et à la sécurité des transplantations
autogènes. Cela peut se révéler, par exemple, nécessaire lorsque entre le prélèvement et la transplantation, le transplant doit passer par plusieurs phases de préparation. En outre, dans le cadre de tels processus, il peut arriver que des cellules du patient soient modifiées génétiquement avant d'être réimplantées dans son organisme (il s'agit là d'une forme de thérapie génique).

2.3.3

Art. 3

Définitions

La définition du terme «organes» tient compte de l'évolution permanente de la médecine de la transplantation (let. a). Par organes, on entend traditionnellement des parties entières du corps, composées de cellules et de tissus et toujours vascularisées afin de rendre possibles les échanges métaboliques. Ce sont en quelque sorte des unités (p. ex. le coeur, les poumons, le foie, les reins et le pancréas) remplissant une fonction déterminée dans le corps. Les organes uniques sont toujours d'importance vitale, alors que les organes existant par paire, comme les reins, peuvent continuer de remplir leur fonction même s'il n'en reste qu'un. Certains organes (p. ex. le foie)

131

disposent d'importantes réserves fonctionnelles leur permettant de continuer à jouer leur rôle alors même qu'ils sont frappés d'une défaillance partielle.

La loi assimile, en outre, aux organes les parties d'organes dont la fonction équivaut à celle d'un organe. C'est ainsi qu'un lobe de foie, par exemple, est traité comme le foie tout entier. C'est notamment important s'agissant de l'attribution des lobes de foie provenant d'une personne décédée.

Au sens de la loi, on entend également par organes les parties composées de différents tissus et remplissant une fonction particulière. La loi vise ainsi, par exemple, la greffe de la main telle qu'elle a été pratiquée en France pour la première fois en automne 1998.

Selon la let. b, il faut entendre par «tissus» des associations cellulaires structurées composées soit de cellules semblables, soit de cellules différentes ayant une fonction commune dans l'organisme. Les tissus présentant une forte capacité de régénération (p. ex. la peau) recouvrent rapidement, après la greffe, leur fonction habituelle. Des transplantations de tissus peuvent également être entreprises pour accélérer un processus de guérison (p. ex. les os). La cornée constitue un cas particulier du fait qu'elle peut être conservée plus longtemps que d'autres tissus.

Il y a lieu de distinguer des tissus les cellules individuelles, les agglomérations et suspensions de cellules non structurées composées uniquement de cellules semblables (let. c). Une cellule représente la plus petite unité du corps à disposer d'un métabolisme propre. Les cellules sont transplantées afin de remédier aux défauts tissulaires dans leur fonction spontanée (p. ex. cellules cutanées, cellules cartilagineuses), mais également pour fabriquer des produits métaboliques en cas de carence (p.

ex. l'insuline, la sérotonine). Ni les cellules ni les masses cellulaires ne sont vascularisées; toutefois, l'organisme du receveur en assure une vascularisation partielle après la transplantation. Quant aux suspensions de cellules, elles peuvent être soit injectées soit implantées dans les tissus ad hoc. Les récents acquis de la recherche montrent que des suspensions de cellules hépatiques injectées dans le foie déficient de certains patients sont de nature à rétablir le fonctionnement de cet organe.

Par transplants standardisés,
il faut entendre les produits fabriqués à partir d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine ou animale, qui peuvent être standardisés ou dont le processus de fabrication peut être standardisé (let. d). La différence entre un transplant originel et un produit vient du fait que le second a fait l'objet d'un processus de fabrication standardisé. Après leur prélèvement, les transplants originels sont préparés en quelques étapes en vue de la transplantation. Il est de plus en plus fréquent que des tissus ou des cellules soient transformés en un véritable produit au moyen d'un processus standardisé. Tel est le cas, par exemple, des tissus vitaux de la peau ­ à une couche ou multicouches, allogènes et autogènes ­ qui sont parfois produits en grande quantité selon des procédés industriels. De même, on pratique aujourd'hui l'expansion de cellules cartilagineuses autogènes pour soigner les lésions du cartilage et l'arthrose. Des processus standardisés devraient bientôt commencer à être appliqués à des organes entiers, par exemple dans le but d'éliminer par des modifications génétiques certains antigènes de surface ce qui permet de réduire les défenses immunitaires. Les transplants standardisés sont donc, d'une part, des produits qui peuvent être standardisés en tant que tels pour lesquels le fabricant doit obtenir le feu vert de l'autorité de contrôle des médica-

132

ments et que l'on trouve prêts à l'emploi sur le marché, et, d'autre part, des produits dont le processus de fabrication peut être standardisé (p. ex. fabrication de produits issus de cellules autogènes).

2.3.4

Art. 4

Devoir général de diligence

Le devoir général de diligence prévu par la loi vise à souligner l'importance que revêt en la matière la responsabilité individuelle. Toute personne qui utilise des organes, des tissus ou des cellules, par exemple en les prélevant, en les préparant, en les traitant, en les conservant ou en les transplantant, crée un risque potentiel et doit par conséquent prendre toutes les mesures propres à éviter la mise en danger de la santé de l'être humain ou de l'animal. Il en va de même pour les transplants standardisés.

Ces personnes sont souvent les plus aptes à minimiser les risques, car elles disposent d'un savoir particulier. Les exigences auxquelles est soumis le devoir de diligence résultent de l'état actuel de la technique et des connaissances scientifiques.

Le devoir général de diligence à observer lors de l'utilisation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine ou animale est concrétisé par des devoirs spécifiques comme le test obligatoire, l'étiquetage obligatoire, l'enregistrement obligatoire et l'obligation d'archiver (cf. art. 29­34 et 43).

2.3.5

Art. 5

Prélèvements à des fins autres que la transplantation

D'une manière générale, la loi s'applique au prélèvement d'organes, de tissus et de cellules à des fins de transplantation. Il existe toutefois des cas particuliers dans lesquels des organes, des tissus ou des cellules sont prélevés dans un autre but et dont il s'avère ensuite qu'ils conviennent à un don. C'est par exemple le cas lors d'une transplantation-domino. Dans cette hypothèse, on prélève sur une personne un organe défaillant (p. ex. le coeur, le foie) pour le remplacer par un organe émanant d'un donneur. Il est possible de réutiliser certaines parties de l'organe prélevé en les transférant sur une autre personne (p. ex. des valves cardiaques et même des lobes du foie). La littérature spécialisée décrit également des cas dans lesquels, lors d'une transplantation des poumons, on prélève et remplace également le coeur sain, pour des raisons de technique chirurgicale. Si l'organe sain ou une de ses parties conviennent à une transplantation sur une autre personne, on a alors affaire à un don effectué par une personne vivante. Le receveur d'un organe peut ainsi devenir lui-même donneur. Dans le cadre d'une transplantation-domino d'un coeur, il est possible d'utiliser les valves cardiaques de la deuxième personne pour une troisième.

Les organes, les tissus ou les cellules prélevés dans de tels cas ne peuvent être utilisés à des fins de transplantation que lorsque le donneur a été informé conformément aux dispositions de la loi et qu'il a consenti à une utilisation ultérieure. On entend ainsi éviter que des organes, des tissus ou des cellules prélevés sur des patients soient utilisés à leur insu. Le fait de consentir à subir une opération n'implique pas que l'on consente à une réutilisation des tissus prélevés au cours de cette opération.

133

2.4

Chapitre 2

Organes tissus et cellules d'origine humaine

2.4.1

Section 1

Gratuité et interdiction de faire le commerce

L'art. constitutionnel relatif à la médecine de transplantation dispose que le don d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine est gratuit et que le commerce d'organes d'origine humaine est interdit. Ces principes sont concrétisés et parfois développés au niveau de la loi.

2.4.1.1

Art. 6

Gratuité du don

Aux termes de l'al. 1, il est interdit d'octroyer ou de percevoir un quelconque avantage pécuniaire ou un autre avantage pour le don d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine. Il s'agit d'exclure la vente de ceux-ci, en tant que tels. D'une part, cette disposition vise à protéger les donneurs vivants. Ils ne doivent pas pouvoir compromettre leur santé en recherchant des avantages économiques. D'autre part, il ne faut pas non plus que les proches tirent profit du don d'organes, de tissus ou de cellules d'une personne décédée, comme c'est le cas aujourd'hui dans l'Etat américain de Pennsylvanie: les proches de personnes décédées ayant fait don de leurs organes touchent une certaine somme d'argent à titre de participation aux frais d'inhumation. Lors d'un don d'organes, de tissus ou de cellules, c'est le désir de venir en aide à autrui qui doit guider le comportement du donneur et non l'attrait financier.

En harmonie avec la teneur de l'art. 20 du projet de Protocole additionnel à la Convention de bioéthique (cf. ch. 5.1.1.2), l'interdiction de réaliser un profit ne vise pas seulement les avantages pécuniaires, mais s'étend également aux autres types d'avantages, comme les avantages en nature, les traitements de faveur ou les promotions. Cependant, le remboursement de certaines dépenses doit rester admissible sans que cela constitue une violation de l'interdiction de réaliser un profit. C'est pourquoi l'al. 2, définit ce qui ne doit pas être considéré comme un avantage pécuniaire ou un autre avantage. Il s'agit de: ­

l'indemnisation pour la perte de gain et les coûts directs occasionnés au donneur vivant par le prélèvement. Font par exemple partie de cette catégorie les coûts liés à l'opération, à l'hospitalisation et au suivi postopératoire, ainsi que la compensation de la perte de gain effectivement subie;

­

l'indemnisation du donneur pour le dommage subi du fait du prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules. Cette indemnité n'est pas la contrepartie financière du don en tant que tel, mais constitue une compensation pour un dommage qui ne serait pas survenu sans le don. Elle ne remet donc pas en cause le principe de la gratuité du don et ne tombe donc pas sous le coup de l'interdiction de réaliser un profit.

Une disposition pénale (art. 66, al. 1, let. a) vise à assurer le respect de l'interdiction de réaliser un profit.

134

2.4.1.2

Art. 7

Interdiction de faire le commerce

En Suisse, l'interdiction de faire le commerce de transplants figure déjà dans l'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants (RS 818.111). La loi sur la transplantation reprend, par analogie, la teneur de cette disposition. Selon cet alinéa, il est interdit de faire le commerce d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine en Suisse ou à l'étranger à partir de la Suisse (al. 1, let. a). Cette disposition vise donc à couvrir également les cas dans lesquels des personnes agissent depuis la Suisse, les organes ne passant cependant jamais la frontière et étant négociés à l'étranger. Par commerce il faut entendre tous les actes que l'usage courant de la langue permet de comprendre comme tels: ainsi le fait de se procurer ou de fournir la «marchandise», de la réceptionner, de la transporter, de la remettre à un tiers, etc., y compris toutes les négociations qui sont menées dans ce cadre. Fait commerce celui qui conclut ou envisage de conclure des affaires de ce type. Le fait de rechercher des avantages matériels (p. ex. un gain financier) est inhérent à la notion même de commerce. Aussi, l'échange d'organes entre le service national des attributions et les organismes étrangers d'attribution ne relève-t-il pas du commerce.

Il est, en outre, interdit de prélever ou de transplanter des organes, des tissus ou des cellules obtenus contre un avantage pécuniaire ou un autre avantage (al. 1, let. b).

Compte tenu de la pénurie d'organes disponibles, cette disposition vise précisément à éviter que la détresse de certains malades soit exploitée.

Cette interdiction ne s'applique cependant pas au remboursement des coûts liés à la transplantation. Il s'agit notamment des coûts afférents au prélèvement des organes, des tissus ou des cellules, aux tests, au traitement, à la conservation ou au transport, ainsi qu'à la transplantation elle-même (al. 2, let. a).

Cette interdiction ne doit pas non plus s'appliquer à la vente à profit de transplants standardisés, c'est-à-dire de tissus ou de cellules qui sont soumis à des procédés standardisés de traitement et de transformation (al. 2 let. b). Les transplants standardisés sont produits de la même manière que certaines produits thérapeutiques biologiques et, partant, soumis au même contrôle (cf. ch. 2.6). C'est pourquoi ils
doivent être traités comme ceux-ci. L'interdiction de vente à profit aurait pour conséquence que de tels produits ne seraient plus ni développés ni fabriqués, ce qui serait préjudiciable aux patients. Ce qu'il faut, cependant, prohiber dans ce cadre c'est la vente de tissus ou de cellules en tant que tels; en d'autres termes le prix de vente des transplants ne doit pas tenir compte de la valeur du matériel de départ.

Ici encore, une disposition pénale (art. 66, al.1, let. b) vise à assurer le respect de l'interdiction de faire le commerce.

135

2.4.2

Section 2

Prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées

2.4.2.1

Art. 8

Conditions du prélèvement

L'art. 8 consacre le modèle du consentement au sens large. Ainsi, le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur une personne décédée présuppose donc que cette dernière ait consenti à un tel prélèvement et que son décès ait été constaté (al. 1). Si la personne décédée n'a pas fait valoir son consentement ou son refus documenté, il faut demander aux proches s'ils ont connaissance d'une déclaration de don (al. 2). Si les proches n'ont pas connaissance d'une telle déclaration, un prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules peut être effectué s'ils y consentent (al. 3). Ils sont d'abord tenus de communiquer la volonté d'effectuer un don qui a été exprimée par la personne décédée sans toutefois avoir été «couchée sur papier».

C'est seulement dans un deuxième temps qu'ils peuvent accepter ou refuser un prélèvement en lieu et place de la personne décédée. Ce faisant, ils doivent respecter la volonté putative de la personne décédée. Si celle-ci n'a pas de proches ou s'il est impossible de les joindre, le prélèvement n'est pas admis (al. 4). Ce mode de faire est conforme au modèle du consentement au sens large, qui présuppose qu'un consentement au prélèvement soit, au moins, donné par les proches.

La loi n'accorde aux proches qu'un droit de décision subsidiaire. En d'autres termes, la volonté exprimée par la personne décédée prime celle des proches (al. 5).

C'est également ce qu'a constaté le Tribunal fédéral dans l'arrêt genevois qu'il a rendu en 1997 (ATF 123 I 112). S'il n'est pas facile pour le personnel médical concerné de respecter la déclaration de don qu'a faite une personne décédée lorsque les proches s'opposent à ce don, l'alinéa 5 leur donne au moins la base juridique leur permettant de respecter une telle volonté malgré l'opposition des proches.

Le donneur peut désigner une personne de confiance (al. 6). Celle-ci agit en lieu et place des proches et a le pouvoir d'autoriser ou de refuser le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules de la personne décédée. Elle doit, cependant, prouver que la personne décédée lui a confié cette compétence décisionnelle.

Quiconque a 16 ans est habilité à faire une déclaration de don (al. 7). La loi fixe ainsi, selon un critère clair, le moment à partir duquel une personne peut faire une telle déclaration. Par rapport au critère de la capacité
de discernement prévu dans l'avant-projet, la nouvelle réglementation proposée présente l'avantage de ne plus exiger dans chaque cas un examen visant à déterminer si la personne en question est douée de l'entendement et de la volonté nécessaires à lui permettre de faire une telle déclaration. On peut généralement admettre que des jeunes gens âgés de 16 ans sont à même de mesurer la portée d'une déclaration de don. A noter que l'âge retenu est identique à celui à partir duquel l'enfant à le droit de choisir lui-même sa confession (art. 303 CC).

Le Conseil fédéral concrétisera le modèle du consentement au sens large dans l'ordonnance (al. 8). Il devra notamment définir le cercle des proches. Dans un arrêt de 1975 (ATF 101 II 177), le Tribunal fédéral a retenu ce qui suit à ce sujet: «Lorsqu'un défunt laisse, comme en l'espèce, plusieurs proches parents, la question est de savoir lequel d'entre eux est appelé à décider du sort de son corps. (...) Or, le

136

pouvoir de décision des parents repose sur leurs relations sentimentales et spirituelles avec le défunt et leur sentiment de piété. Il ne serait pas compatible avec la nature éminemment personnelle de cette sphère juridique que de le régler uniquement d'après l'ordre successoral. C'est au contraire l'intensité du lien avec le défunt qui doit être décisive. (...) Si le droit de disposer du cadavre fait partie des droits de la personnalité des parents du défunt, il est juste de reconnaître ce pouvoir de décision en premier lieu à celui qui était le plus étroitement lié avec le défunt et qui a été, de ce chef, le plus durement touché par sa perte. (...) Jusqu'à preuve du contraire, l'on reconnaîtra donc en premier lieu au conjoint survivant le pouvoir de décider du sort du corps du défunt. (...) S'il apparaît en revanche, comme en l'espèce, que les époux ne s'entendaient plus et qu'il n'y avait depuis longtemps plus de communauté domestique entre eux et qu'en outre il n'y avait pas de descendants capables de discernement, l'on ne peut dénier aux demandeurs, en leur qualité de parents du défunt, le droit de disposer du corps du défunt».

2.4.2.2

Art. 9

Critère du décès et constatation du décès

L'al. 1 consacre le concept de «mort cérébrale» (cf. à ce propos les considérations générales exposées au ch. 1.3.3). Selon ce concept, une personne est décédée lorsque les fonctions de son cerveau, y compris du tronc cérébral, ont subi un arrêt irréversible.

Il est nécessaire, du point de vue législatif, de définir un critère du décès applicable à tous les être humains, indépendamment du contexte propre à la médecine de la transplantation. Il n'y a qu'une seule mort pour chaque être humain et celle-ci doit être la même pour tous au plan juridique, les seules différences pouvant éventuellement être marquées par les procédés permettant de la constater. C'est pourquoi, au fond, le critère du décès en tant que tel devrait être consacré par un texte législatif de portée générale, le Code civil par exemple. D'un autre côté, on ne peut pas ignorer que le besoin d'une réglementation législative se fait sentir particulièrement dans le contexte de la médecine de transplantation. C'est pourquoi le critère du décès doit figurer dans la loi sur la transplantation.

L'al. 2 confère au Conseil fédéral la compétence d'édicter des dispositions détaillées sur la constatation du décès. Il s'agira de normes identiques à celles que contiennent les directives de l'ASSM sur la définition et le diagnostic de la mort en vue d'une transplantation d'organes.

Le diagnostic du décès exige la constatation de symptômes cliniques déterminés ainsi que la preuve de l'irréversibilité de ces symptômes. Certaines conditions doivent, en outre, être remplies, par exemple l'existence d'une grave lésion cérébrale, primaire ou secondaire, ou encore le fait de pouvoir exclure avec certitude une intoxication.

137

Sont considérés comme symptômes cliniques de l'arrêt des fonctions cérébrales: ­

la perte de conscience (coma profond);

­

l'aréflexie au niveau du tronc cérébral, identifiable à l'absence de cinq réflexes: mydriase fixe des pupilles à la lumière53, l'absence du réflexe oculocéphalique54, du réflexe cornéen, du réflexe tussigène et oro-pharyngé, enfin absence de réaction aux stimulations douloureuses du visage;

­

l'arrêt de la respiration (spontanée).

L'irréversibilité de ces symptômes cliniques de défaillance doit être établie soit par des observations cliniques supplémentaires d'une durée appropriée, soit par des examens complémentaires. Il faut relever qu'au plan international, la durée de ces temps d'observation n'est pas unifiée. L'ASSM, par exemple, propose un temps d'observation de 6 heures pour les adultes et les enfants de plus de 5 ans, de 24 heures pour les enfants de moins de 5 ans et de 48 heures pour les adultes comme pour les enfants lorsque la cause du coma est inconnue et que des analyses métaboliques ou toxicologiques ne peuvent être effectuées. En Allemagne, la Bundesärztekammer prescrit dans ses directives un temps d'observation de 12 heures pour les adultes et les enfants de plus de 2 ans présentant une lésion cérébrale primaire, de 24 heures pour les enfants de moins de 2 ans et de 72 heures pour les adultes et les enfants de plus de 2 ans présentant une lésion cérébrale secondaire.

Les examens complémentaires suivants entrent en considération: ­

l'électroencéphalographie (EEG) qui sert à établir l'arrêt de toute activité électrique du cerveau;

­

les potentiels évoqués55 ci-dessus;

­

l'établissement de l'arrêt de la circulation sanguine à l'intérieur du cerveau par la méthode d'ultrasonographie Doppler, par une scintigraphie56 sous perfusion ou une angiographie cérébrale.

L'ordonnance devra également définir les qualifications exigées des médecins appelés à constater le décès (al. 2, let. b). Aux termes des directives de l'ASSM, l'évaluation clinique doit être effectuée par deux médecins spécialistes FMH en neurologie ou neurochirurgie, par des médecins disposant d'une formation postgrade de même niveau ou par des médecins FMH spécialisés en anesthésiologie, médecine interne, chirurgie, pédiatrie ou chefs d'une unité de soins intensifs. Le Conseil fédéral peut de la sorte aussi déterminer que le décès est constaté par des médecins qui ont examiné la personne décédée indépendamment les uns des autres.

53 54

55

56

138

Pupilles grandes ouvertes ne réagissant plus à la lumière.

Lorsque l'on bouge dans une direction donnée la tête d'une personne qui a perdu connaissance, ces yeux effectuent un lent mouvement dans la direction inverse. Chez une personne décédée, en revanche, les globes oculaires restent figés dans la position initiale quelque soit le mouvement imprimé à la tête.

Modifications des potentiels déclenchées dans le cerveau par la stimulation d'un organe sensoriel, par exemple par la stimulation sonore du conduit auditif. Ces modifications sont transmises par la zone superficielle du cerveau.

Il s'agit d'injecter dans une voie sanguine une particule radioactive identifiée afin de prouver l'arrêt de la circulation sanguine.

En ce qui concerne la détermination du moment exact de la survenance du décès, il est à noter que les procédures susmentionnées ne permettent pas de déterminer le moment où survient le décès, mais celui où il est déjà survenu. Le moment du décès doit être l'heure à laquelle celui-ci est définitivement diagnostiqué et établi puisque ce n'est qu'à partir de ce stade qu'on peut parler du caractère irréversible des symptômes cliniques de défaillance. Dans ce contexte, l'assertion contenue dans les directives de l'ASSM, selon laquelle le décès survient juridiquement au moment du premier diagnostic d'une défaillance irréversible des fonctions cardiaques et cérébrales, ne va pas sans poser certains problèmes.

2.4.2.3

Art. 10

Mesures médicales préparatoires

Avant tout prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules, on applique au donneur certaines mesures médicales visant à maintenir les transplants dans le meilleur état possible et à conserver leur capacité de fonctionnement jusqu'à la transplantation.

Parmi ces mesures, citons: ­

l'administration d'anticoagulants (héparine), substances qui en empêchant la coagulation du sang stimulent la circulation sanguine et permettent d'éviter la formation de caillots;

­

l'administration de vasodilatateurs (phentolamine), c'est à dire de médicaments qui dilatent les vaisseaux;

­

enfin, la perfusion en vue d'assurer le refroidissement et la conservation des organes avec insertion de canules artérielles.

Ces mesures sont parfois exécutées avant le décès du donneur. Dans ce cas, elles ne sont admissibles que si le donneur en a été informé de manière exhaustive et a donné son consentement librement (al. 1). Pour des personnes incapables de discernement, un consentement donné par les proches ou le représentant légal n'entre pas en ligne de compte dans de tels cas, puisque ces personnes ne peuvent consentir qu'à des mesures correspondant à l'intérêt objectif du patient. Il ressort d'un arrêt du Tribunal fédéral de 1988 que le droit de consentir à une intervention médicale constitue un droit strictement personnel relatif qui peut, en tant que tel, être exercé par représentation (ATF 114 Ia 350). Le Tribunal fédéral constate toutefois que: «S'agissant des interventions médicales, le consentement de la personne intéressée est requis comme du fait justificatif permettant de restreindre, in casu, la portée du principe de l'intangibilité du corps humain déduit de la liberté personnelle, et cela dans les limites de l'art. 27 al. 2 CC. Contrairement à l'opinion du recourant, la doctrine admet qu'on se trouve en présence d'un droit strictement personnel relatif et que, si le patient est incapable de discernement, le consentement libre et éclairé doit être recueilli auprès de son représentant légal s'il en existe un. Celui-ci doit se déterminer exclusivement en fonction de l'intérêt du patient, ce qui est une notion essentiellement objective. Il doit, dans sa décision, tenir compte des voeux qui peuvent avoir été émis par ce dernier avant qu'il ne soit privé de son discernement.

Il ne saurait de toute façon consentir à livrer son protégé à une expérimentation scientifique, voire à une intervention mutilante ou de nature à porter une atteinte grave à son intégrité physique».

139

Il résulte de cet arrêt que seule une mesure médicale poursuivant un but thérapeutique concret correspond à l'intérêt du patient. Or, des mesures médicales servant exclusivement à la conservation d'un organe en vue d'une transplantation ne peuvent en aucun cas être mises en relation avec l'intérêt du patient.

Lorsque les mesures médicales en question ne représentent que des interventions légères il n'y a aucun inconvénient à ce que le donneur y consente sur la base de l'information qu'il aura reçue. Il existe cependant des mesures médicales qui peuvent hâter la survenance du décès du patient. Tel est, par exemple, le cas de l'administration de médicaments qui ne servent qu'à la conservation des organes (p.

ex. des anticoagulants). A cela, il faut ajouter des mesures qui empêchent la survenance du décès attendu d'un malade en phase terminale et peuvent avoir pour effet de plonger cette personne dans un état végétatif persistant. Le recours à la technique dénommée «elective ventilation» présente précisément un tel risque. Cette technique consiste à mettre brièvement sous respiration artificielle des patients sur le point de succomber à une hémorragie cérébrale, avant qu'on ne leur prélève leurs organes.

On entame la respiration artificielle dès que la respiration spontanée cesse. Ladite technique a été utilisée à Exeter (Grande-Bretagne) au début des années 90 et a permis d'atteindre le taux de prélèvement de reins le plus élevé de tout le pays57. Elle n'a, apparemment, pas encore été appliquée en Suisse. Des doutes ont été exprimés au sujet du protocole d'Exeter, selon lesquels une méthode de ce type pourrait empêcher la survenance du décès du patient, ce qui pourrait avoir pour effet de plonger celui-ci dans un «état végétatif persistant». On peut, certes, limiter ce risque en ne commençant la respiration artificielle qu'après l'arrêt de la respiration spontanée; il est toutefois impossible de l'exclure complètement.

Au vu de la pénurie d'organes disponibles, il est, sans doute, compréhensible que l'on recherche de nouvelles méthodes. Dans ce cadre-là toutefois, les intérêts d'un receveur ne doivent jamais l'emporter sur le bien-être d'un patient vivant. En cas de doute, il faut s'abstenir. Les deux mesures qui viennent d'être décrites sont problématiques, même dans l'hypothèse où le donneur
y aurait consenti; c'est pourquoi elles doivent être interdites (al. 2).

Des mesures médicales sont, cependant, aussi appliquées après la survenance du décès du donneur, par exemple le maintien de la respiration artificielle ou la perfusion par un liquide de refroidissement. Si la personne décédée n'a pas fait de déclaration de don, ces mesures doivent pouvoir être prises jusqu'à ce que soit connue la décision des proches (al. 3). Un tel procédé apparaît justifié du fait que ces mesures sont prises après le décès dûment constaté du patient et qu'elles ne peuvent donc plus lui causer de préjudice. Eu égard à la dignité humaine et par respect pour la dépouille du défunt, le Conseil fédéral doit cependant fixer un délai absolu pour l'exécution de ces mesures.

57

140

Riad H., Nicholls A., Elective ventilation of potential organ donors, British Medical Journal, 310, 1995, p. 714.

2.4.2.4

Art. 11

Indépendance du personnel soignant

Un nombre important de personnes sont impliquées dans l'ensemble des mesures à prendre, de l'identification d'un donneur potentiel jusqu'au prélèvement d'organes et à la transplantation. Afin que ces personnes ne soient pas exposées à des conflits d'intérêts, il est fondamental de bien séparer les différentes démarches les unes des autres. Il est ainsi tout à fait évident que des médecins qui ont prélevé un organe ou qui le transplantent sur un receveur ne sauraient en même temps être autorisées à constater le décès du donneur (al. 1, let. a).

Comme ces différentes opérations se déroulent dans les centres de transplantation, autrement dit sous un même toit, il faut également s'assurer de l'indépendance réciproque des personnes concernées au sein de la hiérarchie de l'hôpital. C'est pourquoi, les médecins qui constatent le décès d'un donneur ne peuvent recevoir de directives d'un médecin spécialisé qui participe au prélèvement ou à la transplantation d'organes, de tissus ou de cellules (al. 1, let. b).

Enfin, l'al. 2 vise à garantir que les médecins qui prélèvent ou transplantent des organes, des tissus ou des cellules, pas plus que le personnel médical qui participe à de tels actes ne cherchent à influencer d'une quelconque façon les personnes qui soignent le patient en fin de vie ou qui constatent son décès.

2.4.3

Section 3

Prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes vivantes

2.4.3.1

Art. 12

Conditions du prélèvement

Des organes, des tissus ou des cellules peuvent être prélevés sur une personne vivante si elle est majeure et capable de discernement (let. a). Aux termes de l'art.

16 CC, toute personne qui n'est pas dépourvue de la faculté d'agir raisonnablement à cause de son jeune âge, ou qui n'en est pas privée par suite de maladie mentale, de faiblesse d'esprit, d'ivresse ou d'autres causes semblables, est capable de discernement. Cela revient à dire que quiconque dispose de ses facultés intellectuelles, à savoir de la capacité de reconnaître le sens et l'utilité ainsi que les conséquences d'un certain comportement et d'en peser la portée est capable de discernement.

D'autre part, il faut que cette personne en ait aussi la volonté, c'est-à-dire la capacité d'agir conformément à cette connaissance et en toute liberté. La capacité de discernement est une notion relative; elle ne peut jamais être définie de manière abstraite et ne l'est jamais une fois pour toutes. Elle doit l'être au cas par cas. Elle doit être considérée en relation avec un certain acte juridique et c'est en fonction de la nature de celui-ci et de sa portée que les exigences posées à la capacité de discernement peuvent varier. Le donneur doit donc pouvoir mesurer la portée de l'intervention ainsi que les conséquences et risques qui peuvent en résulter. Comme la décision de faire don d'un de ses organes présuppose une certaine maturité, la majorité du donneur est une des conditions requises pour le prélèvement. Les dons de reins sont souvent consentis en faveur de membres de la même famille. Cela étant, le membre qui pourrait entrer en considération à titre de donneur risque d'être soumis à des pressions psychiques telles qu'il aura bien du mal à refuser de faire le don. En règle

141

générale, une personne majeure est mieux armée pour affronter une telle situation qu'un personne mineure qui est encore dépendante de la famille dans une notable mesure.

Autre condition importante pour qu'il puisse y avoir prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur une personne vivante: il faut que la personne ait été informée et ait donné son consentement (let. b). Il est du droit du donneur d'être informé de manière exhaustive avant le prélèvement sur le but et la nature de celui-ci, les conséquences et les risques qui y sont liés, le degré d'urgence que présente l'intervention pour le receveur, enfin les chances de réussite de la transplantation.

L'information doit être aussi précise que possible et être dispensée dans un langage compréhensible pour le donneur. Ayant reçu cette information, le donneur doit pouvoir se décider librement et sans pression aucune. Un temps de réflexion approprié doit, en outre, lui être octroyé.

Le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules entraîne une atteinte à l'intégrité corporelle du donneur. Comme une telle intervention ne vise pas au maintien de sa vie ni au rétablissement de sa santé, elle ne constitue pas une intervention médicale à but thérapeutique, mais une intervention pratiquée dans l'intérêt d'une tierce personne, à savoir le receveur. Au sens du CP, une telle intervention doit être considérée comme une lésion corporelle. C'est pourquoi le consentement du donneur revêt une importance particulière en tant que motif justificatif. La garantie de la liberté personnelle et du droit à l'autodétermination exige que le donneur consente à l'intervention pour que cette dernière soit conforme au droit. De la déclaration de consentement doit ressortir clairement que le donneur autorise le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules pour le traitement d'une tierce personne. Au surplus, la déclaration doit être faite par écrit. La liberté de décision du donneur est soumise à des restrictions en ce sens que celui-ci ne pourrait pas consentir valablement à un don qui lui ferait courir un risque inadmissible du point du vue médical.

C'est précisément parce qu'il s'agit d'une intervention pratiquée dans l'intérêt d'une tierce personne que la protection de la dignité, de la personnalité et de la santé du donneur revêtent une grande importance. Dans
ce cadre, il s'agit, par exemple, de se demander en quoi le fait que le donneur mette sa vie et sa santé en danger dans l'intérêt d'un tierce personne peut se justifier lorsque l'on sait que, comme toute intervention chirurgicale, le prélèvement d'organes fait courir des risques. Aussi avant le prélèvement, le donneur doit-il subir des examens visant à établir que l'intervention ne présente pas de risque sérieux pour sa vie ou sa santé (let. c). Parmi les complications observées chez quelques donneurs et qui peuvent se produire comme après toute opération, figurent les infections, les inflammations et, rarement, les embolies ou les hémorragies. Quant au risque de létalité dans le cas du prélèvement d'un rein, il est inférieur à 1 %. A noter qu'en Suisse aucun donneur n'est encore décédé par suite d'un prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules.

Enfin, le don d'organe par une personne vivante n'est admissible que s'il n'existe pas pour le receveur d'autre méthode thérapeutique ayant une efficacité comparable (let. d). En d'autres termes, on ne peut raisonnablement exposer le donneur aux risques liées au prélèvement d'organes que s'il n'existe pas pour le receveur d'autres thérapies donnant des résultats comparables à ceux de la transplantation. Autrement dit, la transplantation doit être la seule thérapie ayant des chances réussir.

142

2.4.3.2

Art. 13

Protection des personnes mineures ou incapables de discernement

Les personnes mineures ou incapables de discernement doivent bénéficier d'une protection particulière. Chez ces personnes, le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules doit être soumis à un régime restrictif. C'est pourquoi l'al. 1 prévoit qu'il ne peut en principe pas être prélevé d'organes, de tissus ou de cellules sur de telles personnes. Dans des cas exceptionnels et à des conditions bien précises, des tissus ou des cellules régénérables58 (et non pas des organes) peuvent être prélevés sur des personnes mineures ou incapables de discernement (al. 2). La let. a dispose clairement que des tissus ou des cellules régénérables ne peuvent être prélevés sur des personnes mineures ou incapables de discernement que s'il n'en résulte pas de risque sérieux pour leur vie ou leur santé et qu'il n'existe pas pour le receveur d'autre méthode thérapeutique d'un effet comparable. En d'autres termes, il faut que les conditions prévues à l'art. 12, let. c et d soient remplies.

En outre, le prélèvement ne peut être entrepris que si aucun donneur majeur et capable de discernement n'est disponible (let. b) et si le receveur est un des deux parents, un enfant, un frère ou une soeur du donneur (let. c). Par rapport à l'avant-projet, le nouveau texte permet donc un prélèvement en faveur de l'un des deux parents ou d'un enfant du donneur.

Par ailleurs, il faut que le don soit propre à sauver la vie du receveur (let. d). En d'autres termes, en faisant courir un minimum de risque au donneur, il faut que le receveur retire du don un maximum d'utilité.

Le représentant légal doit avoir été informé de manière exhaustive et avoir donné librement et par écrit son consentement (let. e). En prenant sa décision, il doit essentiellement veiller à préserver les intérêts et le bien-être du donneur. Bien que le don effectué par une personne vivante soit en premier lieu une intervention servant les intérêts thérapeutiques d'une tierce personne, un tel don peut également avoir des répercussions positives sur le donneur et sa famille. L'acceptation d'un risque admissible du point de vue médical peut permettre de sauver la vie d'un des deux parents, d'un enfant, d'un frère ou d'une soeur dont la mort représenterait sinon une très lourde épreuve pour la famille. En outre, le prélèvement ne peut être entrepris que si la personne
capable de discernement mais encore mineure a été informée de manière exhaustive et a donné librement et par écrit son consentement (let. f) et que si aucun indice ne donne à penser que la personne incapable de discernement s'opposerait à un prélèvement (let. g). Un tel refus doit être respecté dans tous les cas59.

58 59

Des tissus ou des cellules régénérables peuvent retrouver leur volume et leur fonction après une ablation partielle.

Les directives médico-éthiques de l'ASSM sur les transplantations d'organes prévoient une réglementation analogue dans le cas des mineurs, selon laquelle des organes ne peuvent être prélevés sur de telles personnes à des fins de transplantation. «Une exception peut être admise pour les tissus régénérables dont le prélèvement comporte peu de risques, pour autant que celui-ci se limite à une transplantation aux parents de sang les plus proches et serve à prévenir un danger pour la vie ou une atteinte grave à la santé du receveur. On respectera l'opposition du donneur potentiel sans que celui-ci soit obligé de fournir des explications quant à son refus.»

143

Pour assurer que la décision sera prise en connaissance de cause, le prélèvement de tissus régénérables ou de cellules ne doit être possible que si une autorité indépendante y a consenti (let. h).

L'al. 3 prévoit que les donneurs incapables de discernement doivent être associés dans toute la mesure du possible au processus d'information et à la procédure visant à requérir leur consentement.

L'al. 4 charge les cantons de désigner une autorité indépendante au sens de l'art. 2, let. h et de régler la procédure applicable devant elle. Peuvent en particulier jouer le rôle d'autorité indépendante, un tribunal civil ou l'autorité de surveillance en matière de tutelle. L'autorité indépendante aura à examiner si les conditions du prélèvement susmentionnées sont remplies, si le représentant légal est confronté à un conflit d'intérêts et si la personne capable de discernement mais encore mineure a consenti librement et par écrit au prélèvement. L'avant-projet prévoyait la création d'une commission des dons par des personnes vivantes. Or la majorité des participants à la consultation ont refusé cette institution pour le motif qu'elle conduirait à un gonflement inutile de l'appareil de l'Etat qui ne ferait que compliquer la procédure applicable au don d'organes par des personnes vivantes. Il convient donc de renoncer à créer cette commission.

2.4.3.3

Art. 14

Prescriptions du Conseil fédéral

Dans le cas du don d'organe, de tissus ou de cellule par une personne vivante se pose la question de savoir qui assume les frais du prélèvement. Il existe déjà une réglementation pour la prise en charge des coûts de l'intervention chirurgicale et du traitement d'éventuelles complications dans le droit des assurances sociales (cf. ch.

1.1.5.4). L'al. 1 crée aussi une base légale pour l'indemnisation de la perte de gain du donneur. Il charge le Conseil fédéral de régler au niveau de l'ordonnance l'indemnité pour la perte de gain du donneur ayant subi un prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules par les assurances sociales. Le don doit permettre d'améliorer ou de rétablir la santé du receveur, ce qui contribue aussi à réduire directement les coûts dus à la maladie qui doivent être pris en charge par les assurances sociales. Il semble par conséquent qu'une indemnisation appropriée de la perte de gain du donneur par l'assurance maladie ou accidents du receveur est tout à fait appropriée.

L'al. 2 charge le Conseil fédéral de régler les modalités, en définissant notamment les exigences auxquelles doit satisfaire l'information au sens de l'art. 12, let. b et de l'art. 13, al. 2, let. e et f. Il devra, en particulier, déterminer comment et par qui cette information doit être dispensée. En règle générale, les patients souhaitent être renseignés par un médecin spécialiste disposant des connaissances et du savoir-faire appropriés qui puisse leur expliquer ­ de manière aussi précise que possible et dans un langage compréhensible ­ le déroulement de l'intervention, ses conséquences et les risques qu'elle présente, ainsi que ses avantages et ses inconvénients (cf. le commentaire de l'art. 12, let. b).

Le Conseil fédéral est, par ailleurs, habilité à déterminer quelles autres méthodes thérapeutiques n'ont pas une efficacité comparable pour le receveur (al. 3). Ainsi, par rapport à la transplantation du rein, des thérapies comme l'hémodialyse ou la

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dialyse péritonéale n'ont pas une efficacité comparable pour le receveur, car les nombreux séjours en clinique qu'elles impliquent, de même que l'obligation de restreindre l'activité professionnelle et de modifier radicalement ses loisirs qu'elle imposent, réduisent considérablement la qualité de vie du patient.

2.4.4

Section 4

Attribution d'organes

2.4.4.1

Art. 15

Champ d'application

Les prescriptions de cette section s'appliquent à l'attribution d'organes d'origine humaine. On doit encore attendre pour savoir si une telle réglementation sera un jour nécessaire en ce qui concerne les organes d'origine animale. Aussi longtemps que la méthode de la xénotransplantation ne se prête pas à une application au niveau clinique, il est peu judicieux d'anticiper sa réglementation. Afin de permettre de répondre à une éventuelle nécessité de légiférer, l'art. 46, al. 2, let. d donne toutefois au Conseil fédéral la compétence de déclarer les prescriptions de cette section applicables à l'attribution d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale.

Il n'est pas nécessaire d'établir des règles d'attribution pour tous les organes d'origine humaine. L'al. 1 dispose que la section 4 ne s'applique à l'attribution d'organes que pour autant que les donneurs n'aient pas désigné de receveur. Sont donc exclues du champ d'application de la section 4 les organes issus de dons effectués par des personnes vivantes, organes qui reviennent toujours à une personne désignée à l'avance, le plus souvent un proche. Dans ces cas, la volonté du donneur influe de manière déterminante sur la décision d'attribution.

Les mêmes principes doivent logiquement s'appliquer au don d'organes post mortem, c'est à dire à la transplantation d'un organe d'un donneur décédé sur une personne qu'il a désignée de son vivant. Tel serait, par exemple le cas, d'un homme gravement malade qui léguerait son coeur sain à son épouse souffrant d'insuffisances cardiaques. Il faut, toutefois, relever que de tels dons ne sauraient être pris en considération que s'ils sont faits en faveur de personnes déterminées. Si le donneur exclut que l'organe puisse être attribué à des personnes qui lui sont étrangères, par exemple à celles qui appartiennent à une race ou à une religion déterminée, la volonté qu'il a exprimée doit rester sans effet.

L'al. 2, let. a donne au Conseil fédéral la compétence de déterminer de manière détaillée les organes qui doivent être attribués conformément aux dispositions de ce chapitre. Il s'agit actuellement de tous les organes dont l'attribution est coordonnée par SwissTransplant, à savoir le coeur, le foie, les poumons, les reins et le pancréas.

Selon l'article constitutionnel sur la médecine de la transplantation,
seuls les organes doivent être l'objet de règles relativement à leur attribution. En ce qui concerne les tissus ou les cellules il n'existe pas de pénurie actuellement. En outre, les problèmes de compatibilité tissulaire font qu'un seul receveur, si tant est qu'il en existe un, peut entrer en considération (p. ex. lors d'un don de moelle osseuse). Toutefois, s'il devenait nécessaire de légiférer également dans un tel domaine, le Conseil fédéral doit avoir la compétence de déclarer les règles d'attribution de la section 4

145

applicables également à l'attribution de tissus et de cellules, ou encore d'édicter des dispositions particulières à leur sujet (al. 2, let. b).

2.4.4.2

Art. 16

Non discrimination

Aux termes de l'al. 1, nul ne doit subir de discrimination lors de l'attribution d'un organe.

Vu les interdictions de discrimination statuées à l'art. 8, al. 2, de la Constitution fédérale, l'origine, la race, le sexe, l'âge, la langue, la position sociale, les convictions philosophiques ou religieuses, une déficience corporelle, mentale ou psychique pas plus que l'âge ou la situation sociale ne sauraient être pris en considération lors de l'attribution lors de l'attribution d'organes. Cette énumération est faite à titre d'exemple et n'est pas exhaustive.

Par principe, l'interdiction de la discrimination vaut également à l'égard des personnes de nationalité étrangère. En règle générale, elle seront traitées sur un pied d'égalité avec les citoyens suisses. En période de pénurie d'organes, il paraît, toutefois, justifié de déroger à cette règle dans le cas de ressortissants étrangers non domiciliés en Suisse (p. ex. des touristes), lorsque la transplantation n'est pas absolument nécessaire pour sauver une vie (al. 2). Une admission sans aucune restriction de ressortissants étrangers pourrait avoir pour effet de créer un «tourisme» indésirable en matière de transplantation, qui serait l'apanage de personnes économiquement favorisées et qui se développerait à partir de pays connaissant une faible activité dans le domaine de la transplantation. De tels cas doivent être évités.

2.4.4.3

Art. 17

Critères déterminants

La fixation des critères déterminants pour l'attribution d'organes est un point capital de toute réglementation de la médecine de la transplantation (cf. ch. 1.3.5). Aussi, ces critères doivent-ils être établis dans la loi.

Selon l'al. 1, seuls les critères suivants peuvent être pris en considération pour l'attribution: ­

l'urgence médicale de la transplantation (al. 1, let. a);

­

l'efficacité de la transplantation du point de vue médical (al. 1, let. b);

­

le délai d'attente (al. 1, let. c).

Selon le critère de l'urgence médicale, les organes doivent être attribués en premier lieu aux patients dont la santé est la plus gravement atteinte. En l'occurrence, le seul élément déterminant est la situation médicale du patient. L'aspect d'une éventuelle urgence sociale, autrement dit une détresse sociale qui justifierait que l'on attribue prioritairement un organe à un patient dans cette situation, ne peut pas être pris en considération. En revanche, selon le critère de l'urgence médicale, il peut se justifier d'accorder la préséance aux enfants. On sait, par exemple, que chez les enfants atteints d'une déficience rénale, la dialyse provoque des troubles irréversibles de la

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croissance et du développement. Sous l'angle de l'équité, il importe de tenir compte de cette situation spécifique.

Selon le critère de l'efficacité médicale, il y a lieu d'attribuer les organes aux patients auxquels la transplantation sera la plus profitable. Là encore, seule l'utilité médicale entre en considération. Il ne saurait être question de prendre en compte l'aspect «utilité sociale», par exemple la «valeur» que revêt une personne pour la société ou encore, pour d'autres patients, l'ampleur et le niveau des responsabilités qu'ils exercent.

L'efficacité médicale peut être mesurée sous différents angles: La compatibilité des groupes sanguins: tout d'abord: en matière de transplantation d'organes cette compatibilité a une importance primordiale. Si l'on pratique une transplantation en dépit du fait que les groupes sanguins du donneur et du receveur ne sont pas compatibles, on risque de provoquer chez le receveur une violente réaction de rejet de l'organe transplanté avec de fortes chances pour que celui-ci soit rapidement perdu. C'est pourquoi, la compatibilité des groupes sanguins doit être considérée comme la première condition qui doit être réunie en vue d'une transplantation.

La compatibilité des groupes tissulaires: la compatibilité des caractéristiques tissulaires du donneur et du receveur joue-t-elle un rôle important pour la survie de l'organe? Sur ce point les avis des spécialistes continuent d'être partagés. Ils s'accordent, toutefois, à reconnaître que lors de la transplantation d'un rein d'un donneur à un receveur présentant une concordance tissulaire parfaite («full-house matching»), la durée de survie de l'organe transplanté est considérablement accrue, ainsi qu'en attestent d'ailleurs les statistiques. Aussi paraît-il évident que l'on tienne compte de l'aspect «concordance» lors de l'attribution. Toutefois, les cas de concordance tissulaire parfaite sont relativement rares60.

L'établissement de la compatibilité des groupes tissulaires exige des analyses minutieuses en laboratoire. Aussi n'y procède-t-on pratiquement que pour le rein. En ce qui concerne le coeur et le foie une telle vérification ne joue aucun rôle, cela pour plusieurs raisons. D'abord, compte tenu de la gravité de leur état, les patients ne peuvent attendre une transplantation jusqu'à ce que l'on ait trouvé
un organe particulièrement bien approprié. Longtemps, on a d'ailleurs cru que pour ces deux organes, la compatibilité tissulaire jouait un rôle moins important. Des informations récentes indiquent toutefois que les transplantations cardiaques réalisées dans les cas où il n'y avait aucun antigène ou un seul antigène incompatible avaient un meilleur taux de réussite que les cas où il y en avait plusieurs. Ensuite, l'établissement de la compatibilité tissulaire (à quoi, il faut ajouter un éventuel transport de l'organe) prendrait un temps supérieur à la période d'ischémie, qui est de quatre heures pour le coeur et de 18 heures pour le foie (par comparaison, la tolérance d'ischémie du rein oscille entre 24 et 48 heures).

60

En 1995, dans le secteur d'activité d'Eurotransplant, par exemple, on n'a constaté une concordance tissulaire parfaite que dans 23 % des cas de transplantation rénale, proportion qui n'était respectivement en moyenne que de 15 et 19 % les années précédentes (1990 à 1992, 1993).

147

La compatibilité anatomique: dans le cadre de la transplantation cardiaque, en particulier, il est essentiel que l'organe ait une taille appropriée aux caractéristiques anatomiques du receveur de manière à lui assurer un fonctionnement suffisant. En ce qui concerne le foie, cet aspect a perdu de son importance puisque cet organe peut, au besoin, être raccourci mais se régénérer après la transplantation au point de retrouver la taille qui convienne.

Le critère du délai d'attente prend, quant à lui, en compte depuis combien de temps un patient est dans l'attente d'une transplantation.

Assurer l'égalité des chances pour les patients présentant des caractéristiques physiologiques défavorables Il s'agit ici de compenser les caractéristiques physiologiques défavorables que présentent certains patients et qui font qu'ils doivent attendre longtemps un organe approprié.

Les patients du groupe sanguin 0 ne peuvent recevoir d'organes que de donneurs appartenant au même groupe. Si l'on ne tient pas compte de cette réalité, des organes provenant de donneurs appartenant au groupe sanguin 0 risquent souvent d'être attribués à des patients ayant un autre groupe, par exemple parce qu'ils présentent une meilleure compatibilité tissulaire. Cela ne ferait que réduire encore le nombre d'organes ­ au demeurant déjà fortement restreint ­ disponibles pour des patients du groupe 0, ce qui allongerait considérablement leur temps d'attente.

Les patients présentant un haut degré d'immunisation (c'est-à-dire, dotés d'une grande quantité d'anticorps préformés) sont sensibilisés contre la plupart des formes d'antigènes que l'on trouve dans la population. En d'autres termes ils sont immuns.

En transplantant sur eux un organe sans tenir compte de l'importante concentration d'anticorps que recèle leur organisme, on aboutit le plus souvent et très rapidement à une réaction de rejet. La constitution d'anticorps préformés peut être favorisée par des grossesses, des transfusions sanguines et des transplantations. Plus la quantité de ces anticorps est importante, moins il y a de probabilité de trouver un organe qui soit toléré par le système immunitaire du receveur. Si l'on ne tient pas compte de cette réalité, on impose aux patients «hautement immunisés» un délai d'attente plus long.

Lors de l'attribution selon le critère de la
compatibilité des groupes tissulaires, les patients présentant des caractéristiques tissulaires rares sont défavorisés par le fait que les antigènes HLA se trouvent dans la population à des fréquences très variables. Ainsi donc, les patients dont les antigènes sont rares n'ont que de minces chances de se voir attribuer un organe qui leur soit bien approprié, si l'on ne prend pas en compte leurs caractéristiques tissulaires particulières.

Le respect du principe d'équité exige que les patients qui sont défavorisés bénéficient de mesures compensatoires qui leur confèrent les mêmes chances d'accéder à un organe qu'aux autres patients (al. 2). Il peut s'agir, par exemple, de soumettre l'attribution à des restrictions en prévoyant que des organes prélevés sur des donneurs appartenant au groupe sanguin 0 ne peuvent être transplantés que sur des receveurs du même groupe ou encore en introduisant des «points bonus» dans les algorithmes d'attribution.

148

Le Conseil fédéral règle les rapports qui doivent exister entre les différents critères d'attribution (al. 3). A cette fin, il peut déterminer l'ordre dans lequel ces critères doivent être appliqués. On pourrait, par exemple, imaginer une réglementation selon laquelle le critère du délai d'attente ne serait pris en compte que si, une fois appliqués les critères de l'urgence médicale et de l'efficacité, il reste en lice plusieurs receveurs potentiels pour un organe déterminé. L'autre solution qui s'offre est d'établir une pondération des critères: en Allemagne, par exemple, les directives de la Bundesärztekammer prévoient la pondération suivante pour l'attribution du rein: degré de compatibilité des caractéristiques HLA: 40 %; probabilité d'une incompatibilité: 10 %; délai d'attente: 30 % et durée de conservation: 20 %. Enfin, il est possible de combiner les deux solutions.

2.4.4.4

Art. 18

Service national des attributions

L'al. 1 charge la Confédération de créer un service national des attributions. Celui-ci tient une liste d'attente pour l'ensemble de la Suisse (al. 2, let. a). Cette tâche est d'ores et déjà assumée par la Centrale de coordination nationale de SwissTransplant.

Ce faisant, le service national des attributions doit s'assurer qu'il n'y ait pas de patients bénéficiant de plusieurs inscriptions pour le même organe et cherchant ainsi à accroître leurs chances d'accéder à une transplantation.

Le service national attribue les organes disponibles aux receveurs après consultation des centres de transplantation (al. 2, let. b). La procédure d'attribution est jalonnée par les étapes suivantes: le service national choisit un receveur en se fondant sur les critères déterminants et informe les centres de transplantation du nom de la personne sélectionnée. Il effectue cette première sélection en se fondant sur les données relatives aux donneurs et aux receveurs qui sont enregistrées chez lui. Il peut cependant arriver que ces données ne soient pas le reflet de l'état de santé le plus récent du patient désigné ou encore que d'autres circonstances rendent la transplantation impossible. En pareille occurrence, il appartient aux centres de transplantation de signaler, dans un délai déterminé, au service national les nouvelles circonstances à prendre en compte. Il peut s'agir du fait que d'autres personnes que le receveur pressenti ont un besoin encore plus urgent d'une transplantation ou encore de l'apparition chez le patient sélectionné d'une maladie qui constitue une contre-indication à la transplantation, etc. Ce mode de faire permet de tenir compte de circonstances locales quand bien même l'attribution est fonction de la situation spécifique du patient.

Après avoir pris connaissance de la rétro-information émanant des centres de transplantation, le service national procède à l'attribution définitive de l'organe. A la différence de la pratique actuelle, ses décisions seront donc spécifiques à chaque patient.

Le service national des attributions a, en outre, pour tâche d'organiser et de coordonner au niveau national toutes les activités afférentes à l'attribution, par exemple le transport des organes (al. 2, let. c).

L'art. 52, habilite le Conseil fédéral à déléguer les tâches incombant au service national des attributions à une organisation ou à des personnes relevant du droit public ou du droit privé. Il est prévu de conférer cette tâche à la centrale de coordi-

149

nation nationale de SwissTransplant qui assure d'ores et déjà, de manière centralisée et selon des critère uniformes, la répartition d'organes pour l'ensemble de la Suisse.

Enfin, le Conseil fédéral réglera dans les détails la procédure d'attribution (al. 4).

2.4.4.5

Art. 19

Communication des patients en vue d'une transplantation

Le médecin traitant sera le premier à diagnostiquer que son patient souffre de la défaillance d'un organe, défaillance pour laquelle une transplantation est indiquée du point de vue médical. En pareille occurrence, le médecin doit, selon l'art. 19, inscrire le patient dans les meilleurs délais auprès d'un centre de transplantation.

Une telle inscription revêt une importance capitale pour que le patient ait les mêmes chances que les autres d'obtenir un organe dès qu'il s'en trouvera un de disponible.

Naturellement l'inscription ne peut avoir lieu qu'avec l'accord du patient, autrement dit avec son consentement écrit.

La communication doit également avoir lieu si le patient subit une thérapie de remplacement, par exemple une dialyse en cas d'insuffisance rénale.

2.4.4.6

Art. 20

Liste d'attente

C'est en premier lieu le médecin traitant qui est responsable si une transplantation est indiquée chez un patient. S'il parvient à cette conclusion, il doit, selon l'art. 19, inscrire le patient auprès d'un centre de transplantation. Une discussion avec le corps médical du centre permettra de décider de l'admission du patient sur la liste d'attente. La décision d'admettre un patient sur la liste d'attente ou de l'en radier ne peut être fondée que sur des raisons médicales (al. 1). A ce stade, il s'agit uniquement de déterminer si une transplantation est indiquée du point de vue médical et si, éventuellement, il existe des raisons d'ordre médical qui s'opposent à une telle intervention. Pour répondre à cette question, on doit forcément examiner si l'état de santé général du patient permet d'escompter le succès d'une transplantation à long terme. Comme dans le cas de l'attribution, nul ne peut être discriminé au stade de l'admission sur la liste d'attente. Aussi l'art. 16, al. 1, est-il applicable par analogie.

Pour pouvoir assurer une mise à jour continue de la liste d'attente, le service national des attributions a besoin des informations que lui communiquent les centres de transplantation. Aussi l'al. 2 dispose-t-il que ces centres sont tenus de communiquer audit service le nom de toute personne qui a été admise sur la liste d'attente ou qui en été radiée, cette communication étant assortie des données nécessaires.

Si l'admission des patients sur la liste d'attente n'a pas lieu selon des critères uniformes, cela peut avoir des effets discriminatoires. Tel peut être le cas lorsque le patient a été inscrit trop tôt sur la liste parce que le délai d'attente est aussi un critère d'attribution. Dans le cas du rein, c'est l'effet inverse qui peut se produire parce que le patient, tout d'abord traité uniquement par dialyse, n'est admis que relativement tard dans la liste d'attente. Les principes fixés à l'al. 1 ne suffisent pas à garantir que de telles décisions soient arrêtées selon des pratiques uniformes. Aussi, le Conseil

150

fédéral doit-il préciser les raisons médicales mentionnées à l'al. 1 (al. 3, let. a). Il définira notamment les états pathologiques justifiant l'admission sur la liste d'attente. Les patients dont la maladie correspond à l'un ou l'autre de ces états pourront donc prétendre leur admission dans ladite liste.

Par ailleurs, il convient de se demander s'il ne serait pas judicieux de prescrire dans l'ordonnance que la décision d'admettre un patient sur la liste d'attente doit émaner collectivement d'une équipe médicale et non d'un seul médecin. C'est là, en effet, la meilleure façon de garantir qu'une telle décision aura été mûrement pesée.

Enfin, le Conseil fédéral devra également prévoir que les centres de transplantation sont tenus d'indiquer au service national des attributions si l'organe qui leur a été attribué a pu être transplanté et, dans l'affirmative, avec quel résultat.

Les données personnelles particulièrement dignes de protections devront figurer dans la liste d'attente. Il appartiendra donc au Conseil fédéral de les préciser (al. 3, let. b).

2.4.4.7

Art. 21

Communication des donneurs

L'attribution d'un organe ne peut avoir lieu qu'à partir du moment où le service national des attributions a connaissance de l'existence de donneurs potentiels.

L'art. 21 instaure donc l'obligation d'annoncer les donneurs audit service. Ne doivent, toutefois, lui être communiqués que les personnes qui se prêtent à un prélèvement d'organe, en d'autres termes chez lesquelles un tel prélèvement est possible du point de vue médical et licite au regard de la loi (al. 1). Il s'agira également ici de données personnelles particulièrement dignes de protection. Le Conseil fédéral devra donc les préciser.

L'obligation d'annoncer s'adresse aux hôpitaux périphériques ­ c'est à dire ceux qui ne pratiquent pas eux-mêmes de transplantations ­ ainsi qu'aux centres de transplantation. La même obligation incombe également au médecin traitant lorsque le donneur vivant n'a pas nommément désigné de receveur (al. 2).

2.4.4.8

Art. 22

Echange d'organes avec l'étranger

La pénurie d'organes constitue un problème dans presque tous les pays. C'est pourquoi la loi prévoit, dans un esprit de solidarité internationale, qu'un organe pour lequel aucun receveur approprié n'a pu être trouvé en Suisse doit être offert à un organisme d'attribution étranger, comme Eurotransplant ou l'Etablissement français des greffes (al. 1).

Lorsqu'un organe est offert à la Suisse par un organisme d'attribution étranger, seul le service national des attributions est habilité à accepter une telle offre (al. 2). Cette disposition vise à assurer qu'aucun organe d'origine inconnue ou douteuse ne soit importé en Suisse. Il y va de la protection de la santé du receveur.

Il doit être possible de déroger à ce principe dans le cadre de programmes internationaux d'échange, de déroger à ces dispositions en faveur de patients particulière-

151

ment défavorisés par leurs caractéristiques physiologiques. Le centre de transplantation de Bâle participe à un programme européen qui vise à trouver rapidement des reins pour les patients présentant un haut degré d'immunisation. Lorsque, dans un pays participant à ce programme un rein approprié est disponible pour un patient en attente d'une transplantation en Suisse, cet organe doit pouvoir être offert directement au centre de transplantation suisse concerné. Par réciprocité, la Suisse doit pouvoir offrir un rein à un patient immun à l'étranger, quand bien même il existait un receveur approprié dans un de ses centres de transplantation. Dans le cadre de tels programmes, le principe selon lequel les organes disponibles doivent en premier lieu être attribués en Suisse ne doit être appliqué que si les receveurs suisses potentiels présentent un plus haut degré d'urgence.

L'al. 3 habilite le service national des attributions à conclure avec des organismes d'attribution étrangers des conventions sur la réciprocité des échanges d'organes. En 1997, SwissTransplant a conclu avec l'Etablissement français des greffes une convention portant sur la réciprocité des échanges de foies destinés à des patients inscrits sur la liste des cas «super urgents». De telles conventions ne peuvent toutefois être conclues que dans les limites posées à l'al. 1. La convention susmentionnée contient d'ailleurs une clause libellée en conséquence.

2.4.5

Section 5

Prélèvement, stockage, importation, exportation et préparation

2.4.5.1

Art. 23

Obligation d'annoncer les prélèvements

Afin de garantir un contrôle efficace et de protéger la population contre les abus, l'al. 1 instaure une obligation générale d'annoncer les prélèvements d'organes, de tissus ou de cellules. Cette obligation ne s'applique pas qu'aux prélèvements pratiqués en vue d'une transplantation immédiate mais elle vise aussi par exemple, les cas où les transplants prélevés sont stockés dans un premier temps. Afin de garantir la protection recherchée, le Conseil fédéral fixe le contenu de l'avis et les devoirs des personnes soumises à l'obligation d'annoncer (al. 2).

2.4.5.2

Art. 24

Régime de l'autorisation pour le stockage, l'importation et l'exportation

Comme la qualité des tissus ou des cellules peut être altérée par un stockage qui n'est pas pratiqué dans les règles de l'art, cette activité doit être soumise au régime de l'autorisation (al. 1, let. a). La délivrance de l'autorisation est précédée d'un contrôle par le service fédéral compétent, qui vise à empêcher que la santé d'un receveur ne soit mise en danger par un transplant qui n'aurait pas été conservé de manière idoine. Est également soumise au régime de l'autorisation l'importation ou l'exportation de tissus ou de cellules ainsi que des organes qui ne sont pas attribués selon la section 4 (al. 1, let. b). L'obligation de requérir un autorisation permet au service fédéral compétent de vérifier préalablement que l'entreprise respecte les

152

devoirs généraux de diligence imposés par la loi, en particulier l'obligation d'effectuer des tests statuée à l'art. 30. Afin d'empêcher que l'on applique ou se prépare à appliquer aux transplants un traitement illégal dans les entrepôts des douanes, le stockage dans un tel entrepôt est assimilé à une exportation et, partant, soumis au régime de l'autorisation (al. 2).

L'autorisation est délivrée s'il existe un système approprié d'assurance-qualité (al. 3, let. b), qui exclue toute confusion et garantisse en tout temps la traçabilité du donneur. Outre l'existence du système d'assurance-qualité, la délivrance de l'autorisation est subordonnée aux conditions relatives aux qualifications professionnelles et à l'exploitation, afin de garantir la qualité des tissus et des cellules stockés (al. 3, let. a). Par exemple, s'agissant du stockage, la chaîne du froid doit être ininterrompue et les éventuelles manipulations nécessaires doivent avoir été effectuées dans les règles de l'art. Les principes généraux en vigueur, notamment les Bonnes Pratiques de Laboratoire, doivent être respectés.

Al. 4: Le Conseil fédéral règle les conditions d'octroi de l'autorisation ainsi que la procédure et fixe les obligations des personnes soumises à autorisation. Les conditions peuvent varier en fonction du type de transplant (organes, tissus ou cellules) ou du mode de stockage.

2.4.5.3

Art. 25

Préparation

Une fois prélevés, les organes, tissus et cellules sont traités par des procédés plus ou moins longs. Après le prélèvement, les organes sont, par exemple, nettoyés au moyen de certains liquides, conditionnés et réfrigérés. Les cornées sont mesurées, leur surface est partiellement polie, puis le tissu est conservé dans un récipient contenant une solution nutritive. Si les procédés appliqués lors de la préparation ne sont pas appropriés, il peut en résulter des confusions ou des problèmes de qualité au détriment du receveur, sans parler des risque de contamination des transplants par des agents pathogènes. Dans l'un ou l'autre de ces processus, il importe de respecter les principes en matière de management de la qualité afin de garantir la meilleure qualité possible. Or, pour certains organes, tissus ou cellules, les principes généraux en cette matière sont insuffisants, ou encore des directives nationales ou internationales spécifiques en régissent la préparation. C'est pourquoi le Conseil fédéral doit pouvoir édicter des règles spécifiques. Ce faisant, il tiendra compte des directives et des normes internationales reconnues. (p. ex. relatives aux cellules souches hématopoïetiques).

2.4.6

Section 6

Transplantation

2.4.6.1

Art. 26

Régime de l'autorisation

Les transplantations d'organes ne peuvent avoir lieu que dans les centres de transplantation disposant d'une autorisation délivrée par l'autorité fédérale compétente (al. 1).

153

Cette autorisation ne doit être accordée qu'à des hôpitaux disposant d'un système d'assurance de la qualité approprié (al. 2, let. b) qui permette à tout moment de remonter jusqu'au donneur et qui consigne tous les membres de l'équipe médicale responsable des transplantations, ce, aux fins de garantir la meilleure qualité possible et, par là même, une protection optimale du receveur. L'autorisation ne peut par ailleurs être délivrée qu'aux hôpitaux remplissant les exigences relatives aux qualifications professionnelles et à l'exploitation et pouvant ainsi garantir le niveau élevé requis en matière de chirurgie de transplantation et de soins postopératoires (al. 2, let. a). Le personnel soignant à disposition et les ressources d'exploitation doivent garantir des soins optimaux aux patients. Le service de soins intensifs et le laboratoire, par exemple, doivent disposer des équipements nécessaires pour répondre aux besoins de ce groupe spécifique de patients. La mise en place et la gestion d'un système de garantie de la qualité contribuent à assurer la meilleure organisation possible des processus internes à l'hôpital. Cela dit, la qualité des transplantations dépend aussi d'autres critères, tel le nombre d'organes disponibles qui détermine le nombre de transplantations pouvant être réalisées par le centre chaque année. Il faut donc exiger que la qualité des transplantations ne soit pas menacée par ces facteurs (al. 2, let. c).

Les centres de transplantation doivent consigner, évaluer et publier régulièrement les résultats des transplantations, selon des critères uniformes (al. 3). Les mesures de la qualité doivent indiquer ce qu'il est possible d'améliorer et induire systématiquement un processus d'amélioration pouvant être évalué.

Le Conseil fédéral aura la compétence de soumettre également la greffe des tissus ou des cellules au régime de l'autorisation s'il s'avérait que, dans ce domaine aussi, la protection de la santé des patients exige un contrôle préalable de l'autorité (al. 4).

2.4.6.2

Art. 27

Limitation du nombre des centres de transplantation

Le Conseil fédéral obtient la compétence de restreindre le nombre des centres de transplantation par voie d'ordonnance. Il aura vraisemblablement recours à cette possibilité uniquement si les efforts de coordination de la médecine de pointe (cf.

ch. 1.3.6.3.4) ne permettent pas d'obtenir les résultats espérés. Compte tenu de la pénurie d'organes, une limitation du nombre des centres de transplantation pourrait être motivée par le souci d'accroître l'efficacité des transplantations d'organes afin d'obtenir une meilleure utilisation des ressources disponibles. Une limitation pourrait aussi être décidée pour des raisons de logistique (p. ex. en ce qui concerne l'allocation; cf. note de bas de page 49) ou pour permettre une formation et un perfectionnement adéquats dans le domaine de la médecine de transplantation. Avant de faire usage de cette compétence, le Conseil fédéral devra toutefois s'entendre avec les cantons. Cette clause implique un vrai dialogue, qui ne saurait être réduit à une simple participation des cantons à la procédure de consultation.

154

2.4.6.3

Art. 28

Obligation d'annoncer

Afin d'assurer un contrôle efficace et de protéger la population contre les abus, l'al. 1 instaure une obligation générale d'annoncer les transplantations de tissus ou de cellules. Afin de garantir la protection recherchée, le Conseil fédéral fixe le contenu de l'avis et les devoirs des personnes soumises à cette obligation (al. 2).

2.4.7

Section 7

Devoirs de diligence

2.4.7.1

Art. 29

Donneurs exclus

En greffant sur l'homme des xénotransplants on peut, sans le vouloir, lui transmettre des agents pathogènes ou encore provoquer l'apparition de nouveaux agents pathogènes. Comme ces risques d'infection ne sauraient être totalement exclus au moyen des tests disponibles actuellement (risque résiduel), les personnes qui ont subi une xénotransplantation ainsi que les personnes de contact61 sont exclues des donneurs de transplants humains.

2.4.7.2

Art. 30

Obligation d'effectuer des tests

En principe, tous les agents pathogènes dont l'introduction dans le corps humain intervient par la circulation sanguine (virémie, bactériémie, etc.), peuvent aussi être transmis par les organes, les tissus ou les cellules (p. ex. le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et les virus à l'origine des hépatites). Des tests fiables ­ pour autant qu'ils existent ­ doivent donc être exécutés dans le but de déceler la présence d'agents pathogènes ou des indices d'une telle présence (al. 1).

Al. 2: Le Conseil fédéral détermine quels agents pathogènes ou indices de leur présence doivent faire l'objet de tests de détection (let. a). Il exigera d'effectuer les tests de dépistage des principaux agents qui sont à l'origine de maladies contagieuses comme le VIH de types 1 et 2 et l'hépatite B et l'hépatite C. En cas de nécessité et selon l'état de la science et de la technique, le Conseil fédéral peut introduire un test obligatoire pour d'autres agents qui constituent un risque pour la santé du receveur ou de la population. Le Conseil fédéral détermine, en outre, les tests qui peuvent être utilisés aux fins prévues à la let. a (let. b). Il pourra, par exemple, n'autoriser que le recours à des tests qui répondent aux exigences auxquelles doivent satisfaire les dispositifs médicaux en vertu de l'art. 45 et suivants de la loi du 15 décembre 2000 (RS 812.21; RO 2001 2790) sur les produits thérapeutiques. Il s'agit là de garantir que les résultats des tests soient fiables. Dans certains cas, il peut être indiqué de prévoir la transplantation d'organes, de tissus ou de cellules nonobstant le fait qu'ils ont été réactifs62. Tel peut être le cas lorsqu'il n'y a pas d'autre moyen de sauver la 61 62

Font partie des personnes de contact les partenaires intimes du receveur et toutes les personnes qui vivent dans le même ménage.

Selon l'interprétation que l'on peut donner à un test, le résultat peut être ou positif ou négatif selon que l'agent pathogène que l'on cherche à dépister se trouve ou non dans le matériau qui fait l'objet du test. C'est pourquoi le terme «réactif» est utilisé.

155

vie du receveur et que l'on peut exclure tout risque pour la population. Donc le Conseil fédéral doit pouvoir prévoir pour les cas dans lesquels des organes, des tissus ou des cellules, bien qu'ayant été réactifs au test, peuvent être transplantés.

Al. 3: Le Conseil fédéral détermine dans quels cas il peut être dérogé à l'obligation d'effectuer des tests. On peut par exemple l'envisager s'agissant de lignées cellulaires bien délimitées issues du génie génétique, ou dont la procédure de préparation permet d'exclure la transmission d'une infection (cf. art. 31).

2.4.7.3

Art. 31

Elimination et inactivation des agents pathogènes

Il est de plus en fréquent que l'on mette au point des procédés qui permettent de rendre inoffensifs (inactivation), voire d'éliminer complètement, les agents pathogènes éventuellement présents dans les organes, les tissus et les cellules, sans endommager ceux-ci. De tels procédés existent déjà pour le sang et les produits sanguins. Afin de garantir la sécurité du receveur, le Conseil fédéral peut prévoir que l'application de tels procédés est subordonnée à une autorisation du service fédéral compétent.

2.4.7.4

Art. 32

Etiquetage obligatoire

Les organes, tissus ou cellules, de même que des échantillons qui en sont extraits doivent être étiquetés de manière à être parfaitement et rapidement identifiables en tout temps, à exclure toute confusion et à permettre des manipulations idoines (p. ex.

archivage). Ainsi donc, l'étiquetage contribue notablement à garantir la sécurité des organes, des tissus ou des cellules ainsi qu'à assurer une traçabilité sans faille.

2.4.7.5

Art. 33

Obligation d'enregistrer et traçabilité

Al. 1: Au cas où se déclareraient chez le receveur des maladies infectieuses ou d'autres problèmes de santé dus, même éventuellement, à la transplantation d'organes, de tissus ou de cellules, il doit être possible de consulter les données et échantillons du donneur afin d'en élucider les causes. En principe, toutes les opérations qui revêtent de l'importance pour la protection de la santé doivent être enregistrées (let. a). Dans le cas d'un donneur vivant, il est possible que des problèmes de santé rendent nécessaire le suivi du receveur. De même, en cas de don multiple, il se peut que des problèmes de santé que connaît un receveur exigent que l'on procède à des examens chez un autre receveur. C'est pourquoi la let. b impose l'obligation de garantir la traçabilité jusqu'au donneur ou jusqu'au receveur.

Afin d'assurer la traçabilité, il importe d'enregistrer le nom, le prénom, la date de naissance du donneur ou du receveur (al. 2). Comme il s'agit de données éminemment confidentielles, la loi détermine lesquelles peuvent faire l'objet d'un traitement.

156

2.4.7.6

Art. 34

Obligation de conserver les enregistrements et les documents

Les enregistrements au sens de l'art. 33 et tous les documents importants doivent être conservés pendant 20 ans (al. 1). Un archivage aussi long est nécessaire, car certaines maladies transmises par les organes, les tissus et les cellules ont une période d'incubation très longue (p. ex. les maladies à prions, le sida). Pour que la traçabilité puisse être garantie, il faut donc prévoir un délai d'archivage relativement long.

L'al. 2 règle les situations dans lesquelles l'utilisation d'organes, de tissus ou de cellules cesse avant l'expiration du délai légal d'archivage, par exemple lorsque le centre de transplantation cesse ses activités ou qu'une autorisation n'est pas renouvelée. En pareil occurrence, l'archivage doit continuer à être assuré. Si ce n'est pas possible (p. ex. en cas de faillite), l'ensemble des enregistrements et documents doit être remis au service fédéral compétent, afin qu'il puisse assurer la traçabilité dans l'intérêt de la santé publique.

2.4.8

Section 8

2.4.8.1

Art. 35

Essais cliniques

En règle générale, les essais cliniques de transplantation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine doivent être annoncés au service fédéral compétent avant leur exécution. Cette obligation ne s'applique pas aux essais cliniques portant sur la transplantation de tissus ou de cellules issus de foetus ou d'embryons d'origine humaine, qui sont soumis au régime de l'autorisation selon l'art. 37, al. 2 (al. 1).

Afin de protéger la santé de l'être humain, le service fédéral compétent doit pouvoir interdire un essai clinique ou subordonner son exécution à des conditions et charges, si toutes les conditions imparties par la loi ne sont pas remplies (al. 2). Le service fédéral compétent doit pouvoir procéder à des inspections afin de vérifier que l'essai clinique se déroule selon la procédure prévue et que toutes les prescriptions sont respectées. Les inspections doivent être possibles en tout temps. Elles doivent pouvoir s'étendre à tous les aspects des essais cliniques.

Afin d'assurer la protection de la santé de l'être humain, le Conseil fédéral doit avoir la compétence de soumettre au régime de l'autorisation, en lieu et place de l'obligation d'annoncer, des essais cliniques déterminés, par exemple, ceux qui portent sur la transplantation d'organes, de tissus ou de cellules obtenus selon les techniques du génie génétique (al. 3).

Afin que le service fédéral compétent soit toujours au fait des essais cliniques en cours, il y a lieu de l'aviser de la clôture ou de l'interruption des essais cliniques (al. 4).

Les art. 53 à 57 de la loi du 15 décembre 2000 (RS 812.21; RO 2001 2790) sur les produits thérapeutiques réglementent de manière détaillée les essais cliniques de tels produits sur l'être humain. Ces dispositions exigent en particulier que tout essai clinique se déroule conformément aux règles reconnues des Bonnes pratiques des 157

essais cliniques. Il faut en outre que les sujets de recherche aient donné librement leur consentement exprès, par écrit ou attesté par écrit, après avoir reçu une information exhaustive. Par ailleurs, une compensation pleine et entière des dommages qui pourraient être subis dans le cadre de l'essai doit être garantie aux sujets de recherche. Enfin, il faut que la commission d'éthique compétente ait donné un avis favorable. La loi sur les produits thérapeutiques contient également des dispositions réglant les essais cliniques sur des personnes mineures, interdites ou incapables de discernement ainsi que les essais cliniques en situation d'urgence médicale. Si ces prescriptions ont été conçues spécialement pour les essais cliniques de produits thérapeutiques, elles n'en peuvent pas moins être appliquées à d'autres domaines de l'expérimentation sur l'homme. Aussi doivent-elles être déclarées applicables par analogie aux essais cliniques de transplantation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine (al. 5).

Les essais cliniques seront régis dans le contexte d'une loi consacrée à la recherche sur l'être humain actuellement en préparation.

2.4.9

Section 9

Utilisation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine

2.4.9.1

Art. 36

Principe et interdictions

Les tissus embryonnaires ou foetaux d'origine humaine destinés à la transplantation proviennent en général d'interruptions de grossesse. L'al. 1 vise à garantir que le médecin se préoccupe uniquement du bien de la femme lors de la fixation de la date de l'interruption de grossesse et du choix de la méthode qui sera utilisée. Ces options doivent être prises de telle façon que les risques pour la santé de la femme soient les plus faibles possible. A l'heure actuelle, les méthodes qui comportent de faibles risques sont, par exemple, l'aspiration ou l'interruption de grossesse par hormones (progestérone ou prostaglandine). L'intérêt de la médecine de la transplantation à disposer de tissu embryonnaire ou foetal approprié peut coïncider avec l'intérêt susmentionné de la femme à courir le moins de risque possible. Cependant, les médecins qui pratiquent les interruptions de grossesse pourraient être amenés à modifier considérablement la date de l'intervention et le choix de la méthode afin d'obtenir des tissus en plus grande quantité ou de meilleure qualité.

Certaines pratiques doivent être prohibées. Il est ainsi interdit de maintenir artificiellement en vie des embryons ou des foetus entiers d'origine humaine, afin d'en prélever des tissus ou des cellules destinés à être transplantés (al. 2, let. a). Il s'agit de prévenir les abus et d'empêcher toute instrumentalisation de la vie humaine. Il est, par contre, permis de conserver des cellules isolées ou parties de tissus et, au besoin, d'en assurer la multiplication.

La transplantation de tissus ou de cellules d'embryons ou de foetus d'origine humaine sur une personne prédésignée par la donneuse est interdite (al. 2, let. b). Il s'agit, en effet, d'éviter qu'une femme ne prévoie une grossesse et son interruption

158

dans le seul but de produire des tissus thérapeutiques utilisables pour elle-même ou par l'un de ses proches 63.

Enfin, il est également interdit d'utiliser à des fins de transplantation des tissus et des cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine provenant de l'interruption de grossesse de femmes incapables de discernement (al. 2, let. c).

Cette réglementation vise à assurer une protection maximale de ces personnes.

2.4.9.2

Art. 37

Régime de l'autorisation

Quiconque entend transplanter sur l'être humain des tissus ou des cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine doit préalablement obtenir une autorisation délivrée par le service fédéral compétent (al. 1). Le régime de l'autorisation vaut pour les transplantations pratiquées dans le cadre d'essais cliniques (al. 2) comme pour celles qui sont réalisées à titre de traitement standard (al. 3).

La première condition à laquelle est subordonné l'octroi de l'autorisation de procéder à un essai clinique est que l'on puisse escompter qu'il aura une utilité thérapeutique pour la personne sur laquelle il sera pratiqué (al. 2, let. a). Or, il n'est pas possible d'apporter la preuve directe de l'utilité thérapeutique, étant donné qu'elle ne pourra être établie que par des essais cliniques. Il devrait néanmoins être possible, sur la base de données précliniques, de justifier que les essais cliniques auront une utilité thérapeutique. Ceux-ci doivent donc permettre d'assurer la guérison du patient, d'atténuer dans une notable mesure sa maladie ou bien encore d'améliorer considérablement sa qualité de vie. Ce ne sont donc pas les essais thérapeutiques qui sont prohibés. Compte tenu du fait que l'on utilise des foetus ou des embryons humains, il faut empêcher les essais et les recherches pratiqués dans le seul intérêt de la science.

L'autorisation d'administrer un traitement standard n'est délivrée que si des essais cliniques prouvent de manière concluante qu'il existe une utilité thérapeutique pour la personne à qui il est administré (al. 3, let. a). En revanche, elle ne doit pas être octroyée lorsque cette utilité est minime ou qu'elle est annulée par les dangers que le traitement fait courir au patient. De plus, l'autorisation ne doit être accordée que si le receveur ne peut être traité par une autre méthode thérapeutique moins problématique ayant une efficacité comparable (al. 3, let. b).

Aucune autorisation ne doit être octroyée pour des applications à but cosmétique ou ayant pour objectif la revitalisation ou le rajeunissement de personnes en bonne santé.

Comme aux art. 24 et 26, l'autorisation n'est délivrée que si les exigences relatives aux qualifications professionnelles et à l'exploitation sont remplies (al. 2, let. b et c, al. 3, let. c).

63

La littérature spécialisée mentionne le cas d'une femme qui, dans le but de sauver son père atteint de la maladie d'Alzheimer, voulait se faire inséminer par son sperme afin de lui procurer des tissus foetaux en vue d'une transplantation.

159

2.4.9.3

Art. 38

Information et consentement de la donneuse

Comme déjà mentionné, lors de la transplantation de tissus issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine, l'intérêt de la médecine de la transplantation et celui de la femme à interrompre sa grossesse peuvent coïncider. Cependant, tout doit être entrepris pour que ces intérêts restent bien séparés. C'est pourquoi, il importe de veiller à ce que la perspective d'une utilisation thérapeutique de tissus foetaux ne puisse en aucun cas influer sur la décision d'une femme en matière d'interruption de grossesse. Si tel n'était pas le cas, celle-ci serait exposée à des incitations ou à des pressions. Il importe également d'éviter que l'on cherche à influencer la femme à interrompre sa grossesse, en lui suggérant que par le «don» de son foetus elle pourrait aider d'autres personnes. Des arguments de ce type ne doivent avoir aucune pertinence lorsqu'il s'agit d'opter pour ou contre une interruption de grossesse.

Aussi l'al. 1 dispose-t-il que le consentement d'une femme enceinte pour l'utilisation à des fins de transplantation de tissus ou de cellules issus de l'embryon ou du foetus, ne peut être sollicité qu'une fois sa décision prise d'interrompre sa grossesse.

Dès que la femme a pris cette décision, il est possible de lui poser la question d'un «don»; il importe, cependant, de veiller à ce qu'elle reçoive une information exhaustive sur tous les aspects importants, notamment sur le but et le mode de l'utilisation des tissus ou cellules issus de son embryon ou de son foetus, ainsi que sur les examens diagnostiques qu'elle devra subir, comme les tests de dépistage de maladies infectieuses, dans le but de protéger avant tout la santé du receveur. Ce n'est qu'une fois que cette information aura été dispensée à la femme concernée et qu'elle aura donné son consentement à l'expiration d'un délai de réflexion suffisant, que l'on pourra utiliser à des fins de transplantation les tissus ou les cellules issus de son embryon ou de son foetus (al. 2).

2.4.9.4

Art. 39

Indépendance du personnel soignant

Afin de parer autant que possible à d'éventuels conflits d'intérêts, il importe que le processus d'interruption de grossesse et celui de transplantation soient strictement séparés. Aussi les personnes qui participent à la transplantation ne doivent-elles influencer en aucune manière le personnel médical qui procède à l'interruption de grossesse. Par analogie avec l'art. 11, al. 1, elles ne doivent en aucun cas participer à cette dernière ni donner des directives au personnel qui s'en occupe.

2.4.9.5

Art. 40

Prescriptions du Conseil fédéral

Le Conseil fédéral concrétisera ultérieurement les dispositions de cette section.

Aux termes de la let. a, le Conseil fédéral fixe les exigences auxquelles doit satisfaire l'information de la donneuse, au sens de l'art. 38. Afin de parer à d'éventuels conflits d'intérêts, il peut, par exemple, prescrire que l'information de la donneuse soit dispensée et son consentement demandé par un médecin spécialiste qui ne parti-

160

cipe ni à l'interruption de grossesse ni à la transplantation et ne soit en aucune façon impliqué dans les activités en rapport avec l'une ou l'autre de ces interventions.

2.5

Chapitre 3

Organes, tissus et cellules d'origine animale

2.5.1

Art. 41

Régime de l'autorisation

La transplantation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale sur homme doit être soumise au régime de l'autorisation si l'on veut prémunir dans toute la mesure du possible la population des risques d'infection (al. 1).

L'autorisation de procéder à des essais cliniques de xénotransplantation est délivrée si le requérant prouve que tout risque d'infection de la population peut être exclu avec une forte probabilité (al. 2, let. a). La preuve doit être apportée au moyen des acquis scientifiques les plus récents.

L'autorisation n'est, en outre, délivrée par le service fédéral compétent que si l'utilité thérapeutique de la transplantation est établie (al. 2, let. b). Comme on ne saurait exclure tout risque de contamination par des agents pathogènes ou risque d'infection, les essais cliniques de transplantation chez l'homme d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale ne peuvent être autorisés qu'à condition que l'on puisse escompter que la transplantation ait une utilité thérapeutique. On ne saurait admettre que l'on fasse courir un risque d'infection à la population en procédant à des essais de xénotransplantation à des fins purement cosmétiques.

Pour démontrer l'utilité thérapeutique, on peut, par exemple mettre en évidence les résultats obtenus chez une espèce animale donnée grâce à la transplantation (p. ex.

chez les primates non humains au moyen de transplants de porc), par exemple la durée de survie du receveur ou le bon fonctionnement du xénotransplant.

Pour obtenir l'autorisation de procéder à une xénotransplantation dans le cadre d'un traitement standard, le requérant doit démontrer que tout risque d'infection de la population peut être exclu (al. 3, let. a). A l'instar de ce qui vaut pour les essais cliniques, cette preuve doit être apportée aux moyens des acquis scientifiques les plus récents. L'actualité des raisonnements présentés doit être vérifiée régulièrement. Dans l'état actuel des connaissances, un risque d'infection de la population peut être exclu éventuellement auprès des cellules et des tissus déterminés, lorsque, par exemple, ils sont conditionnés dans une membrane étanche ou ont été rendus «exempts de tout virus» par des techniques relevant du génie génétique. Lors de l'application de la technique «de la membrane», sur le plan technologique et du point
de vue thérapeutique, il y aura lieu de soumettre celle-ci aux exigences les plus strictes quant à l'étanchéité et à l'assurance-qualité, de manière à exclure pratiquement toute pénétration de virus dans l'organisme même après une longue période d'implantation.

Autre condition dont dépend l'octroi de l'autorisation: l'utilité thérapeutique de la transplantation doit être établie (al. 3, let. b). En effet, ce n'est qu'à cette condition que l'on peut s'accommoder du risque résiduel d'infection qui résulte de la xénotransplantation. Il serait injustifié d'exposer le receveur et, éventuellement, la

161

population à un risque d'infection pour appliquer un traitement dont l'utilité thérapeutique n'est pas démontrée.

A l'instar de ce qui vaut pour les activités au sens des art. 24, 26 et 37, il y a lieu ici également de faire dépendre l'octroi de l'autorisation de ce que les conditions relatives aux qualifications professionnelles et à l'exploitation soient remplies et qu'il existe un système d'assurance-qualité approprié (al. 2, let. c et d, al. 3, let. c).

2.5.2

Art. 42

Devoirs du titulaire de l'autorisation

L'art. 42 définit les obligations qui incombent au titulaire d'une autorisation de xénotransplantation. En raison de l'insécurité régnant quant aux risques d'infection, il importe qu'il soit contraint de prendre des dispositions permettant de déceler immédiatement les infections potentiellement dangereuses et, partant, de les combattre par les mesures qui s'imposent. Ainsi, le titulaire de l'autorisation est tenu d'examiner à intervalles réguliers et sur une longue période les receveurs (let. a).

Ces examens ­ pratiqués selon l'état le plus récent des connaissances scientifiques et techniques ­ viseront à déceler chez le receveur des agents pathogènes qui pourraient lui avoir été transmis par le transplant. De plus, ces examens doivent être effectués aussi longtemps qu'il n'existe pas d'indices permettant d'exclure tout risque d'infection de la population par le transplant. Il est donc imaginable que le receveur doive se soumettre à ces examens sa vie durant.

En cas de décès du receveur, le titulaire de l'autorisation doit détecter une éventuelle infection (let. b). Cette mesure vise également à la protection contre les infections. Il est possible, par exemple, que le xénotransplant transmette des agents dont les effets pathogènes sur l'être humain ne sont pas encore connus.

Afin de permettre une analyse exacte des indices de risque d'infection qui pourraient apparaître ultérieurement, il est essentiel que le titulaire de l'autorisation enregistre toutes les données et opérations importantes pour la protection de la santé de la population. Tant l'enregistrement lui-même que la teneur des données qu'il comprend doivent correspondre à l'état le plus récent des connaissances scientifiques. Les enregistrements porteront notamment sur les informations relatives au receveur, l'origine et l'identification de l'animal ressource, les résultats des tests et leur interprétation, enfin les résultats des examens médicaux auxquels le receveur est soumis périodiquement (let. c).

En outre, le titulaire de l'autorisation a l'obligation de tenir les enregistrements de telle sorte que les données permettent de remonter à l'animal sur lequel le prélèvement a été effectué ainsi qu'au receveur. Il doit également assurer la traçabilité des échantillons biologiques prélevés (let. d).

Le titulaire de l'autorisation
est également tenu de conserver et, à la demande de l'autorité, de produire les enregistrements et les échantillons biologiques prélevés (let. e). L'autorité doit pouvoir en tout temps consulter tous les enregistrements et en contrôler l'exactitude, en procédant par exemple à une contre-analyse des échantillons biologiques prélevés.

162

Il est important que les autorités compétentes soient immédiatement informées de la survenance de faits qui sortent de l'ordinaire, afin qu'elles puissent, au besoin, arrêter toutes les mesures nécessaires à la protection de la santé. La let. f impose donc au titulaire de l'autorisation un tel devoir d'information. Outre le devoir d'aviser les autorités compétentes, le titulaire de l'autorisation doit prendre, dans les plus brefs délais, toutes les mesures qui s'imposent pour protéger la santé de la population. Les autorités compétentes sont, d'une part, l'OFSP et, de l'autre, les autorités cantonales compétentes en vertu de la loi sur les épidémies (RS 818.101); il s'agit, en général, du médecin cantonal.

2.5.3

Art. 43

Tests obligatoires

La greffe d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale induit en principe un risque de zoonoses. Les mécanismes connus lors d'allotransplantations, qui favorisent les infections (p. ex. l'immunosuppression), se retrouvent également lors des xénotransplantations. Toutefois, celles-ci s'accompagnent d'autres spectres pathogènes. La plupart des agents pathogènes peuvent être aujourd'hui détectés. Ils sont soignés efficacement soit sur l'animal ressource, soit sur le receveur, en cas d'infection. Il subsiste toutefois des agents pathogènes responsables de maladies humaines, dont la présence dans le xénotransplant ne peut être exclue avec certitude.

En outre, il y a le risque que par la xénotransplantation des organismes pathogènes nouveaux, inconnus jusqu'alors, infectent soit l'animal ressource soit l'être humain.

On décèle régulièrement des cas de nouvelles pathologies humaines pouvant être imputées à des agents pathogènes qui agissaient jusque-là sur certaines populations animales déterminées, mais qui ont franchi la barrière des espèces pour se transmettre à l'être humain (p. ex. le VIH, le virus Ebola, le virus de Marburg, la maladie de Creutzfeldt-Jakob)64.

64

Un exemple en est l'épidémie qui s'est déclarée en Malaisie et à Singapour en 1998 et au début 1999 et a fait environ 100 victimes à ce jour. 1,3 million de porcs ont été abattus, car un agent pathogène inconnu (le virus Nipah) a été transmis à l'homme par le porc.

Au printemps 1999, l'Institut Robert Koch en Allemagne a découvert deux nouveaux virus (herpèsvirus) chez le porc. Bien qu'il n'existait jusqu'alors aucun indice que ces virus pouvaient infecter l'homme, des recherches ont été menées dans l'objectif de la xénotransplantation, car, selon le directeur de cet Institut, on ne peut actuellement pas accepter le risque de transmission de virus de l'animal à l'homme par la xénotransplantation.

A fin août 1999, 2 travailleurs d'une ferme d'élevage porcin ont été contaminés par un paramyxovirus (virus menangle), qui avait été découvert pour la première fois près de Sydney, Australie, en 1997, et qui présentait des symptômes d'allure grippale. Le programme de xénotransplantation a alors été abandonné; bien que de grande envergure, l'étude n'a apporté aucun élément suggérant une contamination par d'autres porcs. On ne sait rien du virus menangle dans le reste du monde.

Après le déclenchement de l'épidémie d'ESB en 1986 on n'a cessé de se demander si cette maladie qui frappe le bétail bovin ne pouvait pas se transmettre à l'homme. Peu à peu, se sont multipliés des indices qui donnent à penser que les maladies à prions peuvent franchir la barrière des espèces par le biais de la chaîne alimentaire et qu'il existe donc bel et bien un rapport entre la consommation d'aliments contaminés par l'ESB et l'apparition d'une nouvelle forme de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (vCJD).

163

Les agents pathogènes peuvent être des parasites, des bactéries, des virus, des mycoses ou des prions. Les familles d'agents pathogènes constituées des herpèsvirus et des rétrovirus sont particulièrement problématiques car ils s'agit des transmetteurs typiques d'agents latents et asymptomatiques qui se développent naturellement dans un milieu animal mais peuvent devenir pathogènes dès lors qu'ils sont transmis à une autre espèce. On sait, en outre, que le génome de la majorité des êtres vivants contient les informations génétiques de virus (les rétrovirus endogènes) qui pourraient, le cas échéant, être à l'origine de nouvelles infections. Outre la sélection minutieuse de l'animal ressource, les tests constituent une mesure importante de protection du receveur. C'est pourquoi lors du prélèvement ou de la transplantation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale, la personne responsable doit s'assurer que l'animal ressource a subi les tests visant à détecter des agents pathogènes ou des indices de la présence de ceux-ci.

2.5.4

Art. 44

Sûretés

Cette disposition réglemente la garantie de la responsabilité civile dans le but de protéger les personnes lésées. Le Conseil fédéral peut prévoir que les personnes qui mettent dans le commerce ou transplantent des organes, des tissus ou des cellules d'origine animale doivent s'assurer pour les frais résultant de leur responsabilité civile ou contracter une autre forme de garantie (let. a). Une garantie peut donc être demandée sous forme d'une assurance ou sous une autre forme. Par autre forme, on entend uniquement les instruments qui offrent la même garantie ou une garantie similaire à celle offerte par une assurance responsabilité civile, par exemple des garanties bancaires, des cautions ou le dépôt de valeurs réelles liquides. Le Conseil fédéral peut soit exercer le droit d'option soit déléguer la décision en la matière aux personnes tenues à garantie. Selon la lettre b, le Conseil fédéral peut fixer l'étendue et la durée de la garantie. Le Conseil fédéral n'a pas l'obligation de limiter le montant de la couverture, mais il semble indispensable de fixer une somme minimale d'assurance (cf. art. 493 al. 1 CO). Le Conseil fédéral peut en outre obliger les personnes tenues à garantie à informer le service fédéral compétent de l'existence, de la suspension ou de la cessation de la garantie (let. c). Il peut pour cela prévoir une obligation générale d'annoncer ou l'obligation de le faire à la demande du service fédéral compétent.

2.5.5

Art. 45

Coûts des mesures administratives

En règle générale, celui qui porte atteinte à l'ordre et la sécurité publics est tenu, en vertu d'une ordonnance de l'autorité, de rétablir une situation conforme aux règles de police. Lorsqu'il y a péril en la demeure, l'autorité peut prendre immédiatement ­ c'est à dire sans ordonnance préalable ni sans entendre la personne responsable ­ les mesures conservatoires qui s'imposent. L'autorité est fondée à mettre à exécution immédiatement les mesures qui s'imposent, non seulement lorsqu'il y a urgence, mais encore dans les cas où elle est la seule à disposer des moyens techniques, économiques ou juridiques nécessaires à rétablir une situation normale. L'art. 45 règle

164

la prise en charge des coûts engendrés par de telles mesures. Il prévoit que l'auteur assume le coûts des mesures prises par les autorités compétentes pour protéger la population d'un risque d'infection ou pour l'atténuer ou encore pour établir les dommages causés par des infections ou pour y remédier. La règle voulant que l'auteur supporte les coûts qu'il engendre respecte le principe de l'équité en matière de répartition des coûts. Lorsqu'il est établi qu'une personne est impliquée de près dans la survenance d'un risque concret ou d'un événement dommageable pour la santé, cette personne doit supporter les coûts des mesures prises pour protéger la population, atténuer le risque, établir l'ampleur du dommage et y remédier.

On notera, en outre, que l'on trouve une disposition similaire à l'art. 59 de la loi sur la protection de l'environnement (RS 814.01).

2.5.6

Art. 46

Prescriptions du Conseil fédéral

L'al. 1 charge le Conseil fédéral d'édicter des prescriptions régissant l'utilisation des organes, des tissus ou des cellules d'origine animale. De manière à garantir une protection optimale de la population contre les risques d'infection, il fixera les exigences auxquelles doivent satisfaire l'utilisation des animaux ressource (let. a), la qualité des organes, des tissus ou des cellules d'origine animal (let. b) et les tests visant à contrôler l'état de santé des receveurs et des animaux ressource (let. c).

Il s'agira également de définir les conditions relatives à l'autorisation et à la procédure d'autorisation (l'al. 1, let. d). Il conviendra, en particulier, de préciser les exigences auxquelles doivent répondre les locaux et installations ainsi que les personnes qui participent à la xénotransplantation.

Selon l'al. 1, let. e, le Conseil fédéral fixe la durée et le mode de conservation des données et opérations enregistrées ainsi que des échantillons biologiques prélevés.

Ceux-ci doivent être conservés aussi longtemps que l'exige la protection contre les infections. Compte tenu du temps d'incubation assez long de certaines maladies, on estime que la période de conservation doit être de 20 ans à compter du décès du receveur. Les échantillons doivent être conservés de manière à permettre, même après un temps de stockage assez long, d'établir les faits de manière probante et les données doivent l'être de manière à garantir une traçabilité sans faille. Cette disposition vise à empêcher la perte d'échantillons ou de données qui pourraient fournir des indices éventuels sur les risques d'infection.

Afin de permettre de déceler et d'évaluer les risques de zoonose, les organes, tissus et cellules d'origine animale doivent faire l'objet d'un test visant à détecter les agents pathogènes ou les indices de la présence de tels agents. Le Conseil fédéral définit les agents pathogènes et indices auxquels s'applique le test (al. 1, let. f).

En principe, aucun organe, tissu ou cellule ayant été réactif au test ne devrait être transplanté. Sachant qu'une transplantation peut permettre de sauver une vie, une infection contrôlable chez un être humain peut cependant être acceptée dans certains cas, par exemple s'il est prouvé que les agents pathogènes d'origine animale mis en évidence par les tests ne sont pas dangereux pour la population. C'est pourquoi, le Conseil fédéral doit déterminer par voie d'ordonnance les cas dans lesquels des

165

organes, des tissus ou des cellules peuvent être transplantés quand bien même ils ont été réactifs aux tests (al. 1, let. g).

En conformité avec la motion Gen-Lex, les organes, tissus et cellules d'origine animale provenant d'animaux génétiquement modifiés doivent être étiquetés comme tels (al. 1, let. h).

Le risque le plus grave que fasse courir une xénotransplantation est de provoquer une infection xénogène. Ce risque concerne non seulement le receveur mais encore les personnes de son entourage. Le risque que l'infection se transmette du receveur à d'autres personnes dépend de la nature et de la fréquence des contacts qu'ils entretiennent. Compte tenu des précautions particulières qui doivent entourer le patient qui a subi une xénotransplantation, les personnes de contact de même que le personnel médical sont considérés comme constituant un groupe à risque accru. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral définira également les exigences auxquelles doit satisfaire l'information et le consentement du receveur et du personnel médical ainsi que l'information des personnes de contact (al. 1, let. i).

Al. 2: En principe, les espèces proches de l'être humain, comme les primates non humains, se prêtent bien à la xénotransplantation en raison de leurs caractéristiques immunologiques et fonctionnelles. Leur élevage est cependant difficile et ceux qui sont en liberté sont menacés de disparition. A cela s'ajoute un risque important de transmission de maladies jusqu'ici non identifiées. C'est pourquoi, en vertu de la let. a, le Conseil fédéral peut limiter ou interdire l'utilisation de certains animaux (p. ex. les primates) à des fins de xénotransplantation.

Selon la let. b, le Conseil fédéral peut prévoir des dérogations à l'obligation d'effectuer un test au sens de l'art. 43, lorsque des mesures prises, par ailleurs, permettent de garantir que tout risque d'infection par des agents pathogènes est exclu. Il s'agit, en particulier, de cas dans lesquels les tissus ou les cellules d'origine animale répondent à un niveau de sécurité suffisamment élevé quant à la transmission d'une infection. Par exemple, la sécurité virale recherchée sera admise si l'on peut apporter la preuve que la membrane qui entoure les cellules ou les éléments de tissus d'origine animale, reste étanche même si elle demeure
longtemps dans le corps du receveur et que la probabilité que cette membrane présente des défauts mécaniques est pratiquement nulle. Il est également imaginable que des lignées cellulaires puissent être rendues «exemptes de virus» au moyen de techniques issues du génie génétique.

La let. c habilite le Conseil fédéral à imposer des obligations supplémentaires au titulaire de l'autorisation et à fixer les obligations du receveur. On peut, par exemple, concevoir que le receveur soit tenu de se soumettre, tout au long de sa vie, à des examens visant à déceler la présence d'agents pathogènes ainsi que d'informer toute nouvelle personne de contact de la xénotransplantation qu'il a subie.

La let. d, enfin, permet au Conseil fédéral de déclarer les dispositions de la loi applicables à l'utilisation d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale. On pense, en premier lieu, aux dispositions relatives à l'attribution des organes disponibles.

166

2.6

Chapitre 4

2.6.1

Art. 47

Transplants standardisés

La fabrication de transplants standardisés est comparable à celle de certains produits thérapeutiques biologiques, notamment le sang et les produits sanguins. Leur manipulation nécessite par conséquent les mêmes mécanismes de contrôle. Par ailleurs, les organes, les tissus et les cellules d'origine humaine qui servent de matière première pour la fabrication des transplants standardisés doivent être traités de la même manière, par exemple en ce qui concerne les conditions de prélèvement, que les organes, tissus ou cellules originels. S'il s'agit d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale, les transplants standardisés qui en sont issus doivent en outre répondre aux exigences formulées au chapitre 3.

Al. 1: L'art. 3 de la loi du 15 décembre 2000 (RS 812.21; RO 2001 2790) sur les produits thérapeutiques impose un devoir général de diligence. Les art. 5 à 33 soumettent la fabrication de ces produits au régime de l'autorisation, règlent la procédure d'autorisation de mise sur le marché des médicaments prêts à l'emploi, ainsi que la procédure d'autorisation pour l'importation, l'exportation, le commerce à l'étranger, la distribution, la prescription et la remise. Les art. 58 à 67 régissent quant à eux la surveillance du marché et les inspections ainsi que les émoluments.

Les art. 84 et 85 règlent la procédure administrative et les voies de droit. Enfin les art. 86 à 90 contiennent les dispositions pénales. Ces dispositions sont déclarées applicables par analogie à l'utilisation de transplants standardisés, en sus des dispositions de la loi sur la transplantation proprement dites.

Al. 2: L'Institut suisse des produits thérapeutiques doit également avoir la compétence de mener, en matière de transplants standardisés, des inspections au sens de l'art. 60, al. 2, de la loi sur les produits thérapeutiques.

Al. 3: L'utilisation de transplants standardisés issus d'organes, de tissus ou de cellules d'origine humaine présente des parallèles avec l'utilisation du sang et des produits sanguins. En conséquence, les règles valables pour cette dernière catégorie de produits doivent être applicables par analogie aux transplants standardisés. Il en va ainsi, par exemple, de l'obligation d'assurer la traçabilité, des règles des Bonnes pratiques de fabrication et de l'obligation d'effectuer des tests (art. 36
à 41 de la loi sur les produits thérapeutiques). De même, les essais cliniques de transplants doivent satisfaire aux mêmes exigences que celles qui sont applicables aux essais cliniques de médicaments (art. 53 à 57 de la loi sur les produits thérapeutiques).

Al. 4: La vérification de l'aptitude du donneur au sens de l'art. 36 de la loi sur les produits thérapeutiques incombe à la personne qui prélève des organes, des tissus ou des cellules en vue de la fabrication de transplants standardisés.

Al. 5: La disposition pénale réprimant les contraventions commises dans le cadre de l'utilisation du sang et des produits sanguins (art. 86, al. 1, let. d, de la loi sur les produits thérapeutiques), doit également s'appliquer aux contraventions constatées dans le cadre de l'utilisation de transplants standardisés d'origine humaine.

167

2.7

Chapitre 5

Exécution

2.7.1

Section 1

Confédération

2.7.1.1

Art. 48

Principe

Aux termes de l'al. 1, l'exécution de la loi incombe à la Confédération dans la mesure où elle n'est pas expressément réservée aux cantons. Cet alinéa constitue une norme générale qui soumet la médecine de la transplantation au pouvoir de la Confédération. Toutefois, les cantons participent à l'exécution, et ce, lorsque la loi les y habilite expressément. Ils sont, notamment, chargés des tâches suivantes: coordination et organisation des activités de transplantation dans les hôpitaux et les centres de transplantation (art. 54), information (art. 59), poursuite et jugement des infractions (art. 68).

L'al. 2 statue que le Conseil fédéral édicte les dispositions d'exécution nécessaires à l'application de la loi. Cette disposition générale est concrétisée par les nombreuses normes de délégation qui figurent dans la loi. Le Conseil fédéral peut aussi déléguer aux départements la compétence d'édicter des dispositions d'application. Ce pouvoir de délégation résulte de l'art. 48, al. 1, de la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA; RS 172.010). Lors de l'élaboration des dispositions d'exécution, le Conseil fédéral ou les départements doivent tenir compte des principes régissant la procédure de consultation (ordonnance du 17 juin 1991 sur la procédure de consultation; RS 172.062).

2.7.1.2

Art. 49

Surveillance

Aux termes de cet article, la Confédération est chargée de surveiller l'exécution de la loi par les cantons (al. 1) et de coordonner les mesures d'exécution des cantons, dans la mesure où une exécution uniforme de la loi dans l'ensemble de la Suisse présente un intérêt (al. 2). Pour pouvoir assurer cette coordination, la Confédération est tributaire de l'information sur les mesures d'exécution prises par les cantons.

Aussi doit-elle pouvoir obliger ceux-ci à la lui fournir (al. 2, let. a). La Confédération doit pouvoir, en outre, imposer aux cantons certaines mesures dans le but d'assurer une exécution uniforme de la loi (al. 2, let. b).

2.7.1.3

Art. 50

Coopération internationale

Dans le domaine de la médecine de la transplantation, la collaboration internationale revêt une importance éminente et peut prendre plusieurs formes. La première est l'échange d'organes, de tissus ou de cellules entre plusieurs pays. Une telle coopération joue un rôle très important et peut, dans nombre de cas, sauver la vie de patients, notamment de ceux qui n'ont d'espoir de survivre que si un organe leur est greffé dans un bref délai. La collaboration peut aussi revêtir la forme d'un échange d'informations ou de la participation à des organismes internationaux oeuvrant dans le domaine de la médecine de la transplantation. La Confédération est, d'ores et

168

déjà, représentée au sein d'organismes tels que le «Comité directeur pour la bioéthique» ou le «Comité directeur pour la santé» du Conseil de l'Europe à Strasbourg.

L'échange d'organes, de tissus ou de cellules au niveau international représente d'ores et déjà un enjeu important pour la Suisse. En 2000, 59 organes disponibles auprès de SwissTransplant ont été proposés à l'étranger, dont 27 ont été transplantés. Durant la même année, 176 organes de l'étranger ont été offerts à SwissTransplant, dont 24 ont été transplantés. Parmi les partenaires de SwissTransplant à l'étranger, citons notamment Eurotransplant, l'Etablissement français des greffes et les organisations homologues d'Italie, d'Espagne et de Grande-Bretagne.

La coopération internationale joue aussi un rôle important en ce qui concerne la transplantation de moelle osseuse car, pour avoir des chances de porter leurs fruits, la recherche de donneurs compatibles et la mise en rapport avec ceux-ci doivent se faire à l'échelon mondial. En 2000, 24 donneurs étrangers de moelle osseuse ont fait un don à des patients suisses et 19 ressortissants suisses ont fait un don de moelle osseuse à des patients étrangers.

2.7.1.4

Art. 51

Perfectionnement professionnel et formation continue du personnel médical

La planification et la coordination au sein des hôpitaux incombent aux cantons. En font partie le perfectionnement professionnel et la formation continue du personnel médical. Dans le domaine de la médecine de la transplantation, la Confédération doit aussi pouvoir organiser elle-même ou soutenir des programmes de perfectionnement professionnel et de formation continue visant à préparer le personnel médical à prendre en charge de manière appropriée les donneurs ainsi que leurs proches.

Deux programmes du type susmentionné ont été développés au niveau international et sont partiellement proposés en Suisse: Donor Action En 1994, trois organisations actives dans le domaine de la médecine de la transplantation (Eurotransplant, Organización Nacional de Trasplantes (Espagne) et Partnership for Organ Donation in the US) se sont associées et ont développé pour les hôpitaux un programme qui a pour but d'augmenter le nombre de don d'organes.

Des études ont montré que les facteurs qui peuvent influencer le don d'organes sont en premier lieu la connaissance rapide d'un donneur potentiel et le contact avec les proches. Donor Action s'est concentré sur ces deux aspects et a mis au point des stratégies qui visent à améliorer l'efficacité de cette approche.

Les représentants de SwissTransplant, de la Société Suisse pour la médecine intensive et des hôpitaux se sont constitués en un groupe national (National Donor Action Team) en vue de l'introduction de ce programme international en Suisse.

Après une phase pilote qui s'est déroulée dans le canton du Tessin et qui a débuté en janvier 1998, on a commencé dans différents hôpitaux de Suisse à analyser les données concernant des donneurs potentiels dans les services de soins intensifs. Ces

169

études ont constitué la première étape vers l'introduction du programme. A suivi, en février 2000, la création de la Fondation pour l'encouragement du don d'organes (Foundation to Support Organ Donation ­ FSOD) dont le siège est à Zurich. L'un des objectifs essentiels que poursuit cette fondation est d'instaurer le Donor Action au sein des hôpitaux suisses. A fin 2000, ce programme avait été mis en place dans 4 des grands hôpitaux (l'hôpital cantonal de Saint-Gall, les hôpitaux universitaires de Zurich et de Lausanne, enfin l'hôpital cantonal de Lugano [auquel s'étaient joints trois hôpitaux périphériques]). En 2001, il est prévu d'associer d'autres grands hôpitaux. Toutefois, la fondation a également l'intention de mettre en place le Donor Action sous une forme légèrement modifiée dans les hôpitaux de dimensions plus modestes qui disposent d'une station de soins intensifs.

European Donor Hospital Education Programme (EDHEP) Ce programme a été développé par la fondation Eurotransplant et introduit en Suisse par un groupe de travail de SwissTransplant. Il se déroule sous la forme d'ateliers qui s'adressent à des médecins ainsi qu'à des infirmiers et des infirmières travaillant en médecine intensive. Sous la direction d'un professionnel de la médecine, les participants apprennent à prendre en charge de manière professionnelle les proches des patients décédés, qui sont dans la peine, le but étant de permettre à ces participants d'acquérir plus de sûreté tant dans l'action qu'ils mènent pour aider ces personnes à surmonter cette situation difficile que lorsqu'ils seront amenés à poser la question du don d'organes. En 2000, cinq ateliers ont été organisés en Suisse.

2.7.1.5

Art. 52

Délégation de tâches d'exécution

En tant qu'exception dans l'organisation ordinaire des autorités, la délégation de tâches d'exécution exige une base légale expresse. Elle est constituée par l'art. 52 qui habilite le Conseil fédéral à déléguer des tâches d'exécution à des organisations et à des personnes régies par le droit public ou le droit privé. Cette faculté de déléguer vaut en particulier pour les attributions d'organes selon l'art. 18, la tenue du registre des cellules souches selon l'art. 60 et le contrôle selon l'art. 61. Les organisations qui pourraient entrer en ligne de compte sont le futur Institut suisse des produits thérapeutiques, s'agissant des contrôles, ou encore des organisations de droit privé tels que SwissTransplant ou encore le Registre suisse des donneurs de moelle osseuse.

Les tâches incombant aux autorité d'exécution englobent un certain nombre de domaines très techniques dans lesquels des organisations ou des personnes externes à l'administration fédérale jouissent d'un savoir-faire de haut niveau. Il peut donc se révéler judicieux et économique de faire appel à ce savoir faire externe en confiant aux organisations et personnes concernées l'exécution de tâches déterminées.

L'art. 52 constitue la base légale permettant ­ en conformité avec la loi du 21 mars 1997 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (LOGA; RS 172.010) ­ l'externalisation de tâches d'exécution.

170

2.7.1.6

Art. 53

Evaluations

L'al. 1 s'appuie sur l'art. 170 de la Constitution fédérale. Celui-ci exige que les mesures prises par la Confédération soient évaluées quant à leur efficacité. Cette évaluation sert de base au développement ultérieur. Il y a lieu de procéder à des évaluations scientifiques pour déterminer si certaines mesures répondent effectivement aux attentes et atteignent les objectifs visés. Il s'agit en l'occurrence de décrire les forces et les faiblesses constatées dans l'exécution et la mise en oeuvre de certaines parties de la loi sur la transplantation, de juger leurs conséquences et de formuler des recommandations pour les optimiser. Ces évaluations comprennent une auto-évaluation, celle faite par un service spécialisé interne à l'office ou des mandats d'évaluation confiées à des tierces personnes.

Al. 2: l'autorité fédérale compétente doit étudier l'impact de la loi sur la situation, l'opinion et l'attitude de la population et du personnel médical (let. a) ainsi que la pratique en matière d'attribution d'organes, la qualité des transplantations et la disponibilité d'organes, de tissus et de cellules pour les transplantations (let. b) quant à son effet, son efficacité et aux conséquences qu'elle pourrait entraîner.

Al. 3: l'obligation faite au département en charge du dossier de faire rapport au Conseil fédéral découle de ce que la coordination doit être assurée au niveau du Conseil fédéral, pour que ce dernier puisse ainsi assumer sa mission à l'égard du législatif en matière d'examen de l'impact de la loi et que les organes législatifs aient une base matérielle quant à leurs éventuels travaux d'évaluation.

2.7.2

Section 2

Cantons

2.7.2.1

Art. 54

Organisation et coordination

La planification hospitalière est de la compétence des cantons. C'est pourquoi il s'impose de les charger de l'organisation et de la coordination des activités afférentes aux transplantations dans les hôpitaux où les donneurs sont pris en charge ainsi que dans les centres de transplantation (al. 1). Par activités afférentes aux transplantations il faut entendre non pas tout l'éventail des activités possibles en la matière, mais uniquement celles qui visent à rechercher rapidement les donneurs potentiels, à s'informer auprès de leurs proches et à prendre ceux-ci en charge de manière appropriée. Elles englobent donc toutes les mesures qui visent à identifier et à traiter de manière adéquate les donneurs potentiels, par exemple le prélèvement, le maintien en vie et le stockage d'organes, de tissus ou de cellules. Ces activités ne peuvent être correctement exercées que si les hôpitaux et les centres de transplantation disposent des moyens nécessaires. L'al. 2 oblige donc les cantons à leur fournir ces moyens. L'al. 3 prévoit deux mesures concrètes qui revêtent une importance primordiale dans ce contexte: la nomination d'une personne pour la coordination locale (let. a) et l'organisation de programmes de perfectionnement professionnel et de formation continue pour le personnel médical (let. b).

L'organisation de ces programmes peut être soutenue par la Confédération (cf.

commentaire de l'art. 51).

171

Les processus de transplantation qui se déroulent dans les hôpitaux et les centres de transplantation sont très complexes. Ils comprennent une multitude d'étapes importantes qui ne peuvent être laissées au hasard. Ces étapes doivent, au contraire, être franchies selon des procédures claires et déterminées à l'avance. A cet égard, il est de première importance que, dans chaque hôpital ou centre de transplantation, soit désignée une personne responsable qui ait pour mission de diriger et superviser ces processus et soit habilitée à décider des mesures et moyens à mettre en oeuvre. Il est essentiel que cette personne soit indépendante de l'équipe de transplantation. La loi confie cette mission au coordinateur local. Aujourd'hui, chacun des six centres de transplantation suisses emploie une coordinatrice65. En revanche, les hôpitaux périphériques ne disposent pas encore d'une personne chargée de la coordination. Il n'est absolument pas nécessaire que chaque hôpital crée un nouveau poste à cet effet. La fonction de coordinateur peut par exemple être confiée à un collaborateur de l'hôpital, qui l'exercerait à temps partiel, ou encore à une personne qui l'exercerait à plein temps, mais pour plusieurs hôpitaux à la fois.

Aux termes de l'al. 4, la personne pour la coordination locale doit notamment pourvoir à ce que les donneurs et leurs proches soient pris en charge de manière appropriée (let. a). Elle a, en outre, pour tâche d'assurer la collaboration avec le service national des attributions et de veiller à ce que les donneurs lui soient communiqués (let. b).

2.7.3

Section 3

Obligation de garder le secret et communication des données

2.7.3.1

Art. 55

Obligation de garder le secret

Toutes les personnes chargées de l'exécution de la loi ont connaissance de faits, que les personnes concernées peuvent avoir un intérêt légitime à ce qu'ils soient gardés secrets. L'art. 55 instaure donc une obligation particulière de garder le secret qui est imposée à toutes les personnes qui peuvent avoir connaissance d'informations confidentielles dans le cadre de l'exécution de la présente loi. Cette disposition ne s'applique pas seulement aux personnes dont les rapports de service sont régis par le droit public, mais également à celles qui assument une fonction d'exécution, par exemple en vertu d'un mandat. En outre, l'obligation de garder le secret vaut aussi pour les membres des commissions et les experts. Elle concerne les organes d'exécution tant fédéraux que cantonaux. Aux agents de la Confédération s'appliquent, pour le surplus, l'art. 27 de la loi fédérale du 30 juin 1927 sur le statut des fonctionnaires (RS 172.221.10)66 ainsi que l'art. 28 du règlement des employés du 10 novembre 1959 (RS 172.221.104)67.

65 66 67

172

En 1994, les coordinatrices ont décidé de s'unir au sein du groupe de travail «Coordination de la transplantation» de SwissTransplant (STATKO).

Le statut des fonctionnaires sera remplacé le 1er janvier 2002 par la loi du 24 mars 2000 sur le personnel de la Confédération (LPers; RS 172.230) Le règlement des employés sera remplacé par l'ordonnance sur le personnel de la Confédération.

En vertu de l'art. 67, al. 1, let. g toute violation de l'obligation de garder le secret est passible des arrêts ou de l'amende jusqu'à 50 000 francs, à moins que l'art. 320 CP (violation du secret de fonction) ou 321 CP (violation du secret professionnel) ne soient applicables. On a ainsi la garantie que les catégories de personnes soumises à une obligation spécifique de garder le secret en vertu du Code pénal (p. ex. les médecins) se voient appliquer les normes plus sévères dudit code en cas de violation de cette obligation. Quant aux collaborateurs de la Confédération, ils s'exposent, en sus, aux mesures disciplinaires prévues par la loi sur le statut des fonctionnaires ou le règlement des employés68. Les agents cantonaux doivent, quant à eux, observer les règles de droit cantonales homologues.

2.7.3.2

Art. 56

Confidentialité des données

Dans le domaine de la transplantation, on traite des données dont la divulgation risque de porter atteinte à un intérêt digne de protection. C'est pourquoi, ces données ne doivent, par principe, pas être accessibles au public. Elles doivent, au contraire, être traitées de manière confidentielle par les organes d'exécution, donc rester limitées à un cercle de personnes déterminées. On entend par là une équipe ou un groupe de personnes qui doivent se communiquer mutuellement des données en vue de l'accomplissement d'une tâche commune.

Afin de déterminer si l'on a affaire à un intérêt digne de protection, l'autorité compétente doit procéder dans chaque cas à la pesée des intérêts en présence.

L'intérêt digne de protection peut prendre des formes différentes selon les personnes qui s'en prévalent et les informations en jeu (p. ex. données sur l'état de santé, intérêts de police sanitaire, secret commercial ou secret de fabrication).

2.7.3.3

Art. 57

Communication des données

La communication de données personnelles s'appuie sur les modifications intervenues dans le domaine des assurances sociales (RO 2000 2744) et entrées en vigueur le 1er janvier 2001. L'al. 1 règle les cas où les données peuvent être communiquées à certaines conditions si le receveur a déposé une demande écrite et fondée. Sont régis par l'al. 2 les cas dans lesquels des données peuvent, sauf exceptions, être communiquées sans que la présentation d'une demande ne soit nécessaire. Il est en effet indispensable que les personnes et autorités chargées de l'exécution de la loi en Suisse puissent se communiquer des données (al. 2, let. a) si l'on veut que la loi sur la transplantation soit exécutée de manière coordonnée. Le terme d'autorités chargées de l'exécution recouvre non seulement l'autorité fédérale compétente, mais aussi le service national des attributions ainsi que les personnes responsables de la coordination locale, qui exercent leur activité au niveau cantonal. Dans certains cas, des données peuvent aussi être communiquées aux autorités d'instruction pénale (al.

2, let. b). Selon l'al. 3, les données d'intérêt général qui ont un rapport avec 68

Ou, plus précisément, après le 1er janvier 2002, aux dispositions de la LPers et à celles de l'ordonnance s'y rapportant.

173

l'application de la présente loi peuvent être publiées à condition que les personnes concernées ne soient pas identifiables. L'al. 4 régit tous les autres cas dans lesquels des données peuvent être communiquées à des tiers: la communication de données ne se rapportant pas à des personnes est ainsi autorisée si elle répond à un intérêt prépondérant (al. 4, let. a); des données personnelles peuvent aussi être communiquées à condition que la personne concernée ait donné dans chaque cas son consentement écrit (al. 4, let. b). La disposition de l'al. 5 est destinée à garantir que seul les données nécessaires à l'usage prévu seront communiquées. Le Conseil fédéral est chargé de régler les modalités de la communication des données ainsi que l'information des personnes intéressées (al. 6).

2.7.3.4

Art. 58

Echange de données avec les autorités étrangères et les organisations internationales

La collaboration entre la Suisse et les pays étrangers dans le domaine de la médecine de la transplantation nécessitera un échange de données avec des autorités et institutions étrangères ainsi qu'avec des organisations internationales. Dans ce cadre, des données confidentielles ne peuvent être communiquées que si des instruments internationaux (traités bilatéraux, conventions, décisions) l'exigent (al. 2, let. a). De telles données doivent également pouvoir être communiquées si cela est indispensable pour obvier à des risques imminents pour la vie ou la santé (al. 2, let. b) ou si cela permet de mettre au jour un trafic illégal ou d'autres infractions graves à la loi sur la transplantation (al. 2, let. c). Le Conseil fédéral réglera les compétences et la procédure s'agissant de l'échange de données avec des autorités et institutions étrangères ainsi qu'avec des organisations internationales (al. 1). Il consultera au préalable les milieux intéressés.

2.7.4 2.7.4.1

Section 4

Information du public Art. 59

Al. 1: Dans le domaine de la médecine de la transplantation, l'information du public revêt une importance certaine. Elle vise à créer la transparence en la matière, à favoriser la compréhension du public pour cette médecine et à lui donner confiance dans ses pratiques, enfin à empêcher que la population ne soit désécurisée. Si elle s'adresse en premier lieu à la population, l'information est également destinée au corps médical ainsi qu'au personnel infirmier.

Aujourd'hui, cette information est essentiellement assurée par SwissTransplant. La fondation entend informer la population, le corps médical et le personnel infirmier et les sensibiliser à la problématique de la transplantation. Elle publie des brochure à cet effet et se charge de la diffusion des cartes de donneurs. Selon la nouvelle loi fédérale, la responsabilité de l'information incombera désormais avant tout à la Confédération et aux cantons. Toutefois, leurs actions en la matière viendront s'ajouter à celles de SwissTransplant et non se substituer à elles. Il importe que la

174

Confédération et les cantons aient la possibilité de collaborer avec des personnes de droit public ou de droit privé dans les domaines de l'information et de l'organisation, y compris d'apporter une participation financière appropriée. La coopération ne doit cependant pas aller au-delà de l'organisation et de l'information: Une contribution de la Confédération à une campagne visant à promouvoir la propension au don d'organe irait par exemple à l'encontre de la neutralité de l'Etat sur cette question.

L'information doit être dispensée non seulement occasionnellement, mais encore à intervalles réguliers. Au surplus, elle doit être complète, ce qu'exprime bien l'expression «questions liées à la médecine de transplantation». Enfin, l'information assurée par les pouvoirs publics doit être aussi objective et neutre que possible.

Aux termes de l'al. 2, let. a, l'information doit viser notamment à donner au public la possibilité de s'exprimer sur le don d'organes, de tissus ou de cellules ainsi que sur les conséquences qui en résultent. Si l'information doit amener le public à s'exprimer sur le don d'organes, elle ne doit pas l'inciter à porter un jugement de valeur. Ainsi, chaque personne peut déclarer sa volonté par un oui ou par un non, restreindre son don à certains organes, tissus ou cellules, déclarer que c'est à dessein qu'elle ne veut pas prendre d'option ou encore déléguer à une personne de confiance le soin de prendre une décision le moment venu. Est-il besoin de dire que le don d'organes, de tissus ou de cellules ne saurait être érigé en devoir et que toute décision prise en la matière doit être respectée. Il est, toutefois, souhaitable que l'information diffusée incite le plus grand nombre possible de personnes a se poser la question du don d'organes, à prendre une option sur cette question et à faire documenter l'option prise. Le fait de documenter son choix par rapport au don d'organes est aussi ­ et surtout ­ souhaitable parce que les proches sont ainsi libérés de la pénible obligation de prendre la décision à la place de la personne décédée.

L'information ne saurait donc pas viser à accroître la propension au don d'organes.

Ce constat découle, d'une part, de l'obligation qu'a l'Etat de rester neutre en la matière et de respecter également les décisions de refus du don d'organes. Il est
induit, d'autre part, par le fait que, jusqu'ici, il n'a pas pu être démontré que les campagnes d'information menées par les pouvoirs publics ou les organisations privés avaient des incidences bénéfiques sur la propension au don d'organe.

Le second objectif de l'information, à savoir faire connaître la réglementation et la pratique de la médecine de transplantation en Suisse (al. 2, let. b), a tout autant d'importance que le premier. S'agissant de la réglementation légale, il y aura notamment lieu de rappeler les conditions qui doivent être réunies en vue d'un prélèvement d'organes sur une personne décédée, les critères déterminants pour l'attribution et la procédure qui doit être respectée en la matière. L'information sur la pratique de la médecine de transplantation ne devra pas négliger des aspects importants ou controversés, tels que les nouvelles techniques ou la problématique de la xénotransplantation.

L'information peut être diffusée sous de multiples formes: communiqués et conférences de presse, journées nationales d'information ou encore campagnes d'information ciblées. On peut également songer à un site Internet et à une hot line où les personnes intéressées pourront s'informer des différents aspects de la médecine de

175

transplantation. L'information comprendra également la préparation et la diffusion de matériel de vulgarisation. Le Conseil fédéral réglera les modalités au niveau de l'ordonnance.

2.7.5 2.7.5.1

Section 5

Registre des cellules souches Art. 60

Aux termes de l'al. 1, l'autorité fédérale compétente tient un registre des cellules souches. Dans la conception actuelle, il s'agit d'un registre des cellules souches hématopoïétiques. Toutefois, c'est à dessein que cela n'a pas été précisé dans l'appellation. Il s'agit en effet de tenir compte des progrès scientifiques et techniques qui feront, sans doute, un jour que le registre porte également sur des cellules souches d'autres tissus ou des cellules souches embryonnaires.

Les cellules souches hématopoïétiques sont issues de la moelle osseuse de donneurs vivants ou de plus en plus ­ après un traitement préalable ­ du sang périphérique, c'est-à-dire du sang qui circule. Le don de cellules souches hématopoïétiques extraites du sang ombilical des nouveau-nés constitue un cas particulier.

De plus en plus souvent, les cellules souches hématopoïétiques sont aussi stockées et, à cet effet, congelées après un traitement préalable («cryoconservation»). Parmi celles-ci, ce sont surtout les cellules souches hématopoïétiques extraites du sang ombilical qui sont stockées («cord blood banking»). Les possibilités de stockage de longue durée permettent d'envisager l'utilisation de cellules souches hématopoïétiques de la moelle osseuse de personnes décédées.

Pour la transplantation de cellules souches, il est primordial que les types de tissus du donneur et du receveur présentent un degré de compatibilité élevé. Cela permet d'éviter, d'une part, que l'organisme du receveur rejette les cellules transplantées et, d'autre part, que le greffon se «retourne» contre son hôte («graft versus host reaction»). C'est pour assurer cette compatibilité que sont consignées dans le registre des cellules souches les données nécessaires à la typisation des tissus.

L'utilité du registre des cellules souches est de permettre de trouver rapidement et sûrement des cellules souches appropriées pour un receveur déterminé (al. 2). A cette fin, il faut y consigner également des données personnelles. Comme il s'agit de données particulièrement dignes de protection, la loi prescrit que ces données ne peuvent être utilisées que dans le but défini à l'al. 2. Toute personne qui change d'avis quant au don peut en tout temps demander que les données consignées soient radiées du registre (al. 4).

En vertu de l'art. 52, le Conseil fédéral
peut confier des tâches d'exécution à des tiers pour autant qu'ils soient à même de respecter les exigences légales (p. ex. en matière de protection des données personnelles). Etant donné qu'elle dispose d'une infrastructure bien rodée, il serait judicieux de charger la Fondation Registre suisse des donneurs de moelle osseuse de tenir le registre des cellules souches. Une délégation de cette tâche est donc prévue.

176

2.7.6

Section 6

Contrôle et mesures

2.7.6.1

Art. 61

Contrôle

L'autorité fédérale compétente contrôle que les dispositions de la loi sont respectées.

A cet effet, il effectue notamment des inspections périodiques (al. 1).

L'autorité fédérale compétente peut prélever gratuitement des échantillons pour les inspections en cours. Les échantillons rendus inutilisables lors de l'examen, ne donnent droit à aucun dédommagement. Ce principe se justifie car ils n'ont généralement pas grande valeur et ne sont prélevés qu'en cas de soupçons, donc très rarement. L'autorité de contrôle peut, en outre, exiger qu'on lui fournisse les informations et les documents et solliciter toute autre assistance requise par les circonstances (al. 2). L'importation et l'exportation d'organes qui ne sont pas attribués selon la section 4 ainsi que de tissus ou de cellules sont soumis au régime de l'autorisation en vertu de l'art. 24, al. 1, let. b. Au cours de la procédure d'autorisation, les organes, les tissus et les cellules importés ou exportés ne sont pas contrôlés physiquement dans chaque cas d'espèce. L'al. 2 prévoit, toutefois, que l'autorité fédérale compétente peut charger les services douaniers de prélever des échantillons. Il peut également les prélever lui-même, ce qui pourrait arriver lors d'une inspection dans un entrepôt des douanes.

En vertu de l'al. 3, l'autorité fédérale compétente a accès, pour l'accomplissement de ses tâches, aux immeubles, aux entreprises, aux locaux et aux véhicules. Il n'a pas besoin d'une autorisation spéciale, pas plus d'ailleurs que d'un mandat de perquisition. Les inspections peuvent également avoir lieu de manière inopinée. Elles se déroulent, en règle générale, en la présence d'un responsable de l'entreprise.

2.7.6.2

Art. 62

Obligation de collaborer

Un contrôle efficace n'est possible que si les personnes qui utilisent des organes, des tissus ou des cellules ont une obligation de prêter leur concours à l'autorité fédérale compétente. Les personnes contrôlées doivent lui permettre de prélever des échantillons ou mettre gratuitement des échantillons à sa disposition, lui donner les informations nécessaires et lui permettre de consulter les dossiers. Le droit de consulter les dossiers ne peut être exercé que dans la mesure où les données recherchées sont importantes pour le contrôle.

2.7.6.3

Art. 63

Mesures

L'al. 1 habilite l'autorité fédérale compétente à prendre toutes mesures nécessaires à l'exécution de cette loi. La loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative est applicable (PA; RS 172.021).

Les mesures possibles sont énumérées d'une manière non exhaustive à l'al. 2.

L'autorité fédérale compétente peut contester un état de fait et impartir un délai approprié pour rétablir une situation conforme au droit (let. a). Une intervention de ce type n'est pas de nature à modifier la situation juridique des personnes touchées.

177

De ce fait, elle ne constitue pas une décision au sens du droit administratif. Elle ne peut, dès lors, pas être attaquée par des moyens de droit. Elle constitue, toutefois, le point de départ de décisions ordonnant des mesures telles que celles qui sont énumérées aux let. b à d. L'intensité des mesures doit être proportionnée à l'importance du danger pour la santé. L'autorité de contrôle doit choisir le moyen le plus adéquat pour atteindre le but visé. La mesure doit être nécessaire et il doit exister un rapport raisonnable entre l'ampleur de l'intervention et le but à atteindre. La mesure doit, en particulier, être justifiée par un intérêt public prépondérant par rapport à l'intérêt privé. En vertu de la let. b, l'autorité fédérale compétente peut mettre sous séquestre ou éliminer des organes, des tissus ou des cellules ou encore des transplants standardisés susceptibles de menacer la santé ou non conformes aux dispositions de cette loi. L'interdiction d'utiliser les locaux et les installations est prononcée lorsque l'exploitation est à l'origine d'un danger pour la santé et que seul un assainissement complet est de nature à permettre une amélioration (let. c). L'ensemble de l'exploitation peut être fermé s'il est à l'origine d'une mise en danger directe et grave de la santé publique. L'autorité fédérale compétente peut suspendre ou révoquer les autorisations si les conditions auxquelles était subordonné leur octroi ne sont plus remplies (let. d).

En vertu de l'al. 3, l'autorité fédérale compétente prend les mesures provisionnelles qui s'imposent. Celles-ci peuvent également être ordonnées en cas de suspicion, lorsque des investigations sont encore nécessaires avant qu'une décision définitive puisse être rendue.

En vertu de l'art. 59 de la loi fédérale du 1er octobre 1925 sur les douanes (LD; RS 631.0), les agents de la douane peuvent être tenus de prêter leur concours à l'exécution de prescriptions fiscales ou de police ou d'autres prescriptions fédérales étrangères aux douanes. En pareil cas, ils procèdent conformément aux dispositions en vigueur, pour le compte et aux frais de l'administration intéressée. Les organes douaniers n'ont pas suffisamment de personnel ni de temps pour pouvoir procéder à des contrôles systématiques. Aussi les contrôles à la frontière n'ont-ils lieu que par sondage
ou qu'en cas de soupçons. L'al. 4 habilite les services douaniers, lorsqu'ils suspectent une infraction aux dispositions de la loi sur la transplantation, à saisir à la frontière ou dans les entrepôts des douanes les envois d'organes, de tissus, de cellules ou de transplants standardisés concernés et à demander le concours de l'autorité fédérale compétente. Celle-ci procède aux investigations ultérieures nécessaires et prend les mesures qui s'imposent (fixation de charges, refoulement de la marchandise, mise sous séquestre, élimination, etc.).

2.7.7

Section 7

Financement

2.7.7.1

Art. 64

Répartition des tâches

Cet article dispose que la Confédération et les cantons supportent, chacun dans leur domaine de compétence, les coûts liés à l'exécution de cette loi, pour autant qu'ils ne soient pas couverts par des émoluments (cf. art. 65).

178

2.7.7.2

Art. 65

Emoluments

L'art. 65 est la base légale permettant la perception d'émoluments. Ceux-ci seront perçus pour l'octroi, la suspension et la révocation des autorisations, l'exécution de contrôles, ainsi que pour l'adoption de mesures et leur exécution (al. 1).

Le Conseil fédéral fixera le barème des émoluments applicable à l'exécution par les autorités fédérales (al. 2). Ce faisant, il respectera les principes de la couverture des coûts et de l'équivalence.

2.8

Chapitre 6

Dispositions pénales

2.8.1

Art. 66

Délits

Au chapitre des dispositions pénales, la loi distingue les délits (art. 66) et les contraventions (art. 67) en fonction de la gravité de l'infraction: les atteintes graves qui sont portées à des biens juridiques de grande valeur sont sanctionnées comme des délits, les atteintes moins graves, comme des contraventions.

Les délits sont constitués d'infractions qui soit mettent en danger la santé de l'être humain, soit sont considérés du point de vue de l'éthique sociale comme particulièrement répréhensibles (p. ex. le trafic d'organes, la discrimination lors de l'attribution des organes), soit encore violent les droits fondamentaux comme la liberté personnelle (par exemple, le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sans l'accord des personnes touchées). Constituent aussi des délits les violations des principes et des interdictions statuées à l'art. 36. L'immense potentiel d'abus dans le domaine de l'utilisation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine justifie que de tels abus soient considérés comme des délits. Les éléments constitutifs des différents délits sont énumérés exhaustivement à l'al. 1, let.

a à n. Les infractions visées aux let. h et i doivent être qualifiées de délits de mise en danger concrète. Il suffit pour que ces derniers soient réalisés que le bien juridique protégé ait été mis en danger (en d'autres termes, que le délit fonde ou accroisse la probabilité d'une violation), à la différence des violations proprement dites pour la réalisation desquelles il faut une atteinte à un bien juridique. Si les éléments constitutifs d'une des infractions énumérées sont réunis, sans toutefois que la santé de l'être humain soit mise en danger, l'art. 67, al. 1, let. i, est applicable.

Si une atteinte a été portée à la santé de personnes, les dispositions du CP relatives aux infractions contre la vie et l'intégrité corporelles sont applicables, notamment celles qui sanctionnent l'homicide intentionnel ou par négligence (art. 111 et 117 CP) ainsi que les lésions corporelles (art. 122 s. CP).

Le montant maximum de l'amende est fixé à 200 000 francs en cas d'infraction simple (al. 1). Si l'auteur a agi par métier, il pourra se voir infliger une amende allant jusqu'à 500 000 francs (al. 2) et, s'il a agi par négligence, jusqu'à 100 000 francs (al. 3). Le
maximum de l'amende (40 000 francs) fixé à l'art. 48 CP est aujourd'hui considéré comme nettement insuffisant. Les lois spéciales (p. ex. loi fédérale sur la radioprotection, loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux) sont de plus en plus nombreuses à prévoir des montants oscillant entre 100 000 francs et 200 000 francs. L'arrêté fédéral sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des 179

transplants allait déjà dans ce sens en prévoyant une amende de 200 000 francs en cas de trafic d'organes et de mise en danger de la santé lors de l'utilisation de transplants. La loi sur la transplantation reprend le même montant en cas d'infraction simple. En revanche, en cas de délit commis par métier, elle va plus loin que l'arrêté fédéral (500 000 francs). Le fait de sanctionner plus sévèrement l'auteur d'une infraction par métier qualifiée est conforme à la réglementation que l'on trouve dans diverses dispositions du CP. Même la peine d'emprisonnement est aggravée, puisqu'elle passe de 3 ans à 5 ans en cas d'infraction commise par métier.

2.8.2

Art. 67

Contraventions

Les éléments constitutifs des différentes contraventions sont énumérés à l'al. 1, let. a à j. Celui qui, intentionnellement ou par négligence commet l'une de ces infractions est passible des arrêts ou de l'amende jusqu'à 50 000 francs. Comme dans le cas des délits, les éléments constitutifs sont énumérés de manière exhaustive.

En vertu de la let. g, est punissable celui qui contrevient à l'obligation de garder le secret au sens de l'art. 55, à condition que les art. 320 et 321 CP ne soient pas applicables. L'art. 67, al. 1, let. g, est donc subsidiaire par rapport aux dispositions du CP susmentionnées et ne s'applique que si les art. 320 et 321 CP n'ont pas été violés (cf. le commentaire relatif à l'art. 55). Les contraventions aux dispositions d'exécution sont punissables dans la mesure où une prescription de l'ordonnance le prévoit expressément. Est, en outre, punissable celui qui ne se conforme pas à une décision qui lui a été signifiée sous commination de la peine prévue à l'art. 67 (al. 1, let. j).

L'al. 2 prévoit que la tentative et la complicité sont aussi punissables dans les cas de contravention, alors que l'al. 3 fixe, en dérogation à l'art. 109 CP, le délai de prescription de la poursuite comme de la peine à cinq ans. Cet allongement de délai est impératif parce que les investigations nécessaires à l'établissement des faits prennent souvent beaucoup de temps. A défaut d'un tel allongement, on risquerait fort de ne pas parvenir à établir les faits avant l'expiration du délai de prescription de la poursuite, ce qui obligerait à abandonner la procédure. Enfin, l'al. 4 permet aux autorités de renoncer à la plainte pénale, à la poursuite pénale et à la sanction, dans les cas de peu de gravité (principe d'opportunité).

2.8.3

Art. 68

Compétence et droit pénal administratif

L'al. 1 prévoit expressément que la poursuite pénale des infractions à la loi sur la transplantation et à ses dispositions d'exécution incombe aux cantons.

En vertu de l'art. 1 de la loi sur le droit pénal administratif (DPA; RS 310.0) cette loi n'est applicable que lorsque la poursuite et le jugement des infractions sont assurés par une autorité administrative fédérale. L'al. 2 déclare les art. 6, 7 et 15 DPA également applicables aux autorités cantonales de poursuite pénale. En dérogation à la partie générale du Code pénal, les art. 6 et 7 DPA statuent une réglementation

180

spéciale pour les infractions commises dans les entreprises et par un mandataire.

L'art. 6 DPA permet de sanctionner la direction de l'entreprise puisqu'il prévoit qu'en cas d'infraction commise dans l'entreprise, le chef d'entreprise, l'employeur, le mandant ou le représenté sont punissables à certaines conditions, en sus de la personne physique qui a commis l'infraction. L'un ou l'autre de ces responsables est souvent impliqué dans l'infraction, mais pas forcément à titre de co-auteur, d'instigateur ou de complice au sens pénal de ces termes. La disposition spéciale de l'art. 7 DPA permet de renoncer à la poursuite des personnes punissables en vertu de l'art. 6, lorsque l'amende entrant en ligne de compte ne dépasse pas 5 000 francs et que l'enquête rendrait nécessaire à l'égard des personnes punissables des mesures d'instruction hors de proportion avec la peine encourue. En pareille occurrence, l'autorité peut condamner l'entreprise à la place de ces personnes.

Les éléments constitutifs définis à l'art. 15 DPA (faux dans les titres, obtention frauduleuse d'une constatation fausse) se rapportent spécifiquement aux relations avec l'administration fédérale. Il présentent donc des différences par rapport aux éléments constitutifs de l'infraction de faux dans les titres visée à l'art. 251 CP. La peine est plus légère que celle qui est prévue par ce dernier article, mais les éléments constitutifs sont plus étendus, car ils englobent aussi, en particulier, la tromperie de l'administration.

2.9

Chapitre 7

Dispositions finales

2.9.1

Art. 69

Abrogation et modification du droit en vigueur

L'utilisation des transplants est actuellement réglementée ­ s'agissant de la protection contre les infections et du commerce ­ par l'arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants (RS 818.111). Celles des dispositions de cet arrêté qui concernent l'utilisation du sang et des produits sanguins ont été intégrées dans la loi fédérale du 15 décembre 2000 (FF 2000 5689) sur les produits thérapeutiques, de sorte que l'arrêté ne règle plus désormais que l'utilisation de transplants. L'arrêté ainsi modifié doit rester valable jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation, mais au plus tard jusqu'au 31 décembre 2005 (cf. art. 37, al. 3, de l'arrêté fédéral). Cet arrêté pourra donc être abrogé dès l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation (al. 1).

L'al. 2 prévoit une modification de la loi fédérale du 18 juin 1993 sur la responsabilité du fait des produits (LRFP; RS 221.112.944.). Il en résulte que les produits du sol, de l'élevage, de la pêche et de la chasse sont considérés comme produits dès le moment où ils sont mis en circulation, s'il s'agit d'organes, de tissus ou de cellules d'origine animale destinés à être transplantés sur des êtres humains (art. 3, al. 2, let.

b, LRFP). Le législateur entend ainsi garantir qu'en cas de défaut le producteur de la matière de base, autrement dit la personne qui élève des animaux aux fins de la fabrication de xénotransplants, soit lui aussi appelé à répondre de ses actes. La «norme de protection de l'agriculture» contenue à l'art. 3, al. 2, let. a, LRFP, selon laquelle les produits susmentionnés sont considérés comme produits dès le moment où ils ont subi une première transformation, ne doit pas s'appliquer aux xénotrans-

181

plants. Une modification de l'art. 3, al. 2, LRFP a également été proposée dans le cadre des délibérations sur le projet Gen-Lex. Si cette modification était adoptée, il y aurait lieu d'adapter le projet de loi sur la transplantation en conséquence.

Aux termes de l'art. 5, al. 1, let. c, LRFP, le producteur n'est pas responsable s'il prouve que l'état des connaissances scientifiques et techniques, lors de la mise en circulation du produit, ne permettait pas de déceler l'existence du défaut. Ainsi donc, en cas de risque lié à l'évolution du produit, le producteur n'est pas responsable des propriétés nuisibles du produit, alors même qu'elles existaient objectivement au moment de la mise en circulation du produit, parce que l'état des connaissances scientifiques et techniques ne permettait pas de les déceler. Toutefois, lorsque l'on connaît les risques que présentent les xénotransplantations (transmission de zoonoses à l'homme), sans parler des autres dangers que l'on n'a pas encore cernés, il est impérieux que l'exception à la responsabilité statuée à l'art. 5, al. 1, let. e, LRPF ne soit pas applicable dans le domaine de la xénotransplantation (Art. 5, al. 1bis, LRFP).

2.9.2

Art. 70

Disposition transitoire

Diverses activités en rapport avec l'utilisation d'organes, de tissus ou de cellules sont, en vertu de la présente loi, soumises à l'obligation d'annoncer ou au régime de l'autorisation, ainsi les prélèvements (obligation d'annoncer statuée à l'art. 23) ou l'exploitation d'un centre de transplantation (régime de l'autorisation selon l'art.

26). Afin d'assurer aussi rapidement que possible une exécution efficace et uniforme de la loi, les personnes qui auront commencé une des activités soumises à l'obligation susmentionnée ou à autorisation, devront en aviser l'autorité fédérale compétente ou requérir auprès d'elle l'autorisation nécessaire, cela dans les six mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi (al. 1 et 2).

Les autorisations délivrées par l'OFSP, en vertu des art. 18 et 18a de l'arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle des transplants resteront valables jusqu'à leur date d'expiration. En l'occurrence, il s'agit des autorisations de procéder à des xénotransplantations ainsi que des autorisations d'importer et d'exporter des transplants d'origine humaine.

Aucun régime transitoire n'est prévu pour les autorisations de transplanter sur l'homme des tissus ou des cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine.

En d'autres termes, une telle activité ne pourra être exercée qu'à partir du moment où elle aura été autorisée en bonne et due forme.

Pour des motifs relevant de la police sanitaire, il peut se révéler indispensable de révoquer ou de modifier une autorisation valable au regard des dispositions transitoires. En pareille occurrence, la protection de la santé prime le respect des relations de confiance. C'est pourquoi, l'al. 4 réserve expressément le droit du service fédéral compétent de prendre les mesures qui s'imposent au sens de l'art. 63.

182

2.9.3

Art. 71

Référendum et entrée en vigueur

Al. 1: La loi sur la transplantation est un acte législatif sujet au référendum facultatif au sens de l'art. 141, al. 1, let. a, de la Constitution fédérale.

L'al. 2 habilite le Conseil fédéral à fixer la date de l'entrée en vigueur. On peut prévoir que la loi sur la transplantation entre en vigueur dans le courant de 2004.

3

Conséquences

3.1

Conséquences financières et effets sur l'état du personnel

3.1.1

Pour la Confédération

Pour la Confédération, de tâches nouvelles résultent de la loi sur la transplantation.

Les besoins en personnel et en matériel se répartissent de la manière suivante: ­

Contrôle des activités de transplantation: ­ Octroi d'autorisations, prescription de mesures: 3 postes (2 spécialistes, 1 secrétaire).

­ Inspections: 2,5 postes. Il est prévu que les frais résultant de cette activité soient entièrement couverts par les émoluments perçus.

­

Etablissement et gestion d'un registre des cellules souches: 4 postes (3 spécialistes, 1 secrétaire) plus 700 000 francs pour la typisation des tissus et pour l'infrastructure.

­

Création et gestion d'un service national des attributions: 6 postes (4 spécialistes, 2 secrétaires) plus 150 000 francs pour couvrir les frais de logistique.

­

Contrôle des transplants standardisés (autorisation des produits et des processus de fabrication): 2 postes (1,5 spécialiste, 0,5 secrétaire). Il est prévu que le coût de ces activités soit lui aussi couvert par les émoluments perçus.

­

Information de la population et du personnel médical: 2 postes (1 spécialiste, 1 secrétaire) plus un montant maximum estimé de 3 000 000 francs pour le financement de campagnes d'information.

­

Evaluation de l'exécution et des effets de la loi: frais de matériel 200 000 francs.

­

Contributions au perfectionnement professionnel et à la formation continue: frais de matériel 200 000 francs.

Les moyens nécessaires sont prévus ni au budget 2002 ni dans la planification financière pour les années 2003­2005.

Le besoin en personnel pour le contrôle des activités de transplantation se rapporte uniquement au domaine de l'allotransplantation. Depuis l'entrée en vigueur de la modification de l'arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants (RS 818.111) ainsi que de la modification de

183

l'ordonnance du 26 juin 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants (RS 818.111.3) au 1er juillet 2001, les tâches relevant du domaine de la xénotransplantation incombent à l'OFSP. Les moyens nécessaires à cet effet ont déjà été l'objet d'une demande au Conseil fédéral (1,5 postes pour l'exécution dès 2001, auxquels viendront encore s'ajouter 2,5 postes d'ici 2005). Les crédits demandés pour les experts, le perfectionnement professionnel et le formation continue ainsi que les notes de frais du personnel sont les suivants: 2001: 66 000 francs, 2002: 130 500 francs, 2003/2004: 177 500 francs et dès 2005: 188 000 francs. L'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation n'entraînera donc pas de besoins supplémentaires dans le domaine de la xénotransplantation.

184

Coût annuel de l'exécution dès l'entrée en vigueur de la loi (en millions de francs) Activités

Frais de personnel69 OFSP

Frais de matériel OFSP

Couverture par les émoluments

Contrôle des activités de transplantation (Octroi d'autorisations, prescription de mesures; 3 postes)

0,5

0

0

Contrôle des activités de transplantation (Inspections; 2,5 postes)

0,4

0

0,4

Registre des cellules souches (4 postes)

0,7

0,770

0

Service national des attributions (6 postes)

1,0

0,271

0

Contrôle des transplants standardisés (2 postes)

0,3

0

0,3

Information (2 postes)

0,3

3,072

0

Evaluation

0

0,2

0

Perfectionnement professionnel et forma- 0 tion continue

0,2

0

Total

4,3

0,7

3,2

Dépenses totales (nettes)

6,8

Une partie des nouvelles tâches seront assumées par l'administration centrale. Elles seront confiées à l'OFSP: ­

Information de la population et du personnel médical.

­

Contrôle des activités de transplantation: octroi d'autorisations et prescription de mesures.

L'externalisation (outsourcing) est une solution à laquelle il est prévu de recourir pour les tâches suivantes: ­

69

70 71 72

Création et gestion d'un registre des cellules souches: il est prévu que cette tâche soit confiée au Registre suisse des donneurs de moelle osseuse, qui est Coût total du personnel et des places de travail à la charge de la Confédération (niveau 2001) sur la base de coûts moyens (1 poste = 167 500 francs en moyenne, frais d'infrastructure et perfectionnement professionnel compris).

Coût de la logistique et de la classification typologique des tissus.

Coût de la logistique.

Montant maximum estimé. Les coûts annuels effectifs dépendront dans une très large mesure des moyens d'information utilisés. Les véritables campagnes d'information ­ l'exemple de la campagne STOP SIDA en est la preuve ­ coûtent en effet très cher.

185

aujourd'hui géré par 4 personnes (3 postes à plein temps). Son budget d'exploitation (y compris les salaires) est de 500 000 francs, auxquels viennent s'ajouter 500 000 francs supplémentaires pour la typisation des tissus (pour quelque 1 500 à 2 000 nouveaux donneurs par année). La possibilité du don de sang ombilical ainsi que la possibilité de stocker des cellules souches hématopoïétiques appelleront une augmentation des effectifs et des crédits à disposition (1 poste entier supplémentaire).

­

Création et gestion d'un service national des attributions: il est prévu que cette tâche soit confiée à la centrale nationale de coordination de SwissTransplant. La centrale de coordination dispose aujourd'hui de 4,5 postes (3 coordinatrices et un poste et demi pour le secrétariat) pour un budget d'environ 840 000 francs (y compris les campagnes en faveur du don d'organes). Les besoins en personnel augmenteront avec l'entrée en vigueur de la loi, car les structures d'attribution actuelles, décentralisées, devront faire place à une organisation centralisée. Il faut donc compter devoir engager encore une personne capable d'assumer la direction du service des attributions ainsi qu'une personne à mi-temps pour renforcer le secrétariat.

­

Contrôle des activités de transplantation (inspections): dans ce domaine, on entend, dans toute la mesure du possible, tirer parti des effets de synergie.

Les inspections relèveront donc en grande partie du futur Institut suisse des produits thérapeutiques. Comme il est prévu que le coût de ces activités soit entièrement couvert par les émoluments perçus, la Confédération pourra confier cette tâche à l'Institut suisse des produits thérapeutiques sans que cela n'entraîne pas de coûts, pour autant que le mandat et la convention de prestations soient respectés.

­

Contrôle des transplants standardisés (autorisation des produits et des processus de fabrication): cette tâche est déléguée à l'Institut suisse des produits thérapeutiques en vertu de la loi.

186

Coût annuel de l'exécution compte tenu de la délégation (externalisation) de tâches à des tiers (en millions de francs) Activités

Matériel OFSP

Contributions de l'OFSP aux dépenses courantes (indemnisation)

Contrôle des activités de transplantation (Oc- 0,5 troi d'autorisations, prescription de mesures; 3 postes)

0

0

Contrôle des activités de transplantation (Ins- 0 pections; 2,5 postes)

0

0

Registre des cellules souches (4 postes)

0

0

1,4

Service national des attributions (6 postes)

0

0

1,2

Contrôle des transplants standardisés (2 postes)

0

0

0

Information (2 postes)

0,3

3,0

0

Evaluation

0

0,2

0

Perfectionnement professionnel et formation continue

0

0,2

0

Total

0,8

3,4

2,6

Dépenses totales (nettes)

Personnel OFSP

6,8

Exécution de la loi: les coûts annuels détaillés dans les tableaux devront être supportés à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi, aujourd'hui prévue dans le courant de l'année 2004. On fera donc figurer ces coûts dans la planification financière 2004 à 2006.

Préparation de l'exécution: si l'on veut que l'exécution soit assurée à l'entrée en vigueur de la loi, des moyens devront être mis à disposition à cet effet dès 2003. Il faudra par exemple négocier avec SwissTransplant et les responsables du Registre des donneurs de moelle osseuse, puis préparer les contrats nécessaires. Le coût pour des travaux préalables est estimé à 200 000 francs. Il faut aussi pourvoir le poste de responsable de l'information avant l'entrée en vigueur de la loi et préparer le matériel d'information afin de pouvoir répondre aux questions de la population une fois que la loi aura été promulguée (env. la moitié des ressources annuelles, soit un poste [167 500 francs] et frais de matériel [1,5 million de francs] pour le financement de la campagne initiale). Les montants nécessaires devront figurer au budget 2003. Le contrôle des activités de transplantation devra lui aussi être préparé. Il faudra notamment songer à la formation des collaborateurs. Là aussi, les fonds nécessaires équivaudront à peu près à la moitié d'un budget annuel (1,5 postes [251 250 francs] et 20 000 francs au titre de frais de formation extraordinaires).

187

Les frais supplémentaires détaillés dans le graphique ne peuvent pas être compensés à l'intérieur de l'OFSP ou du département. L'exécution de la loi sur la transplantation exige donc la mise à disposition de moyens additionnels.

3.1.2

Pour les cantons et les communes

Les cantons seront déchargés des tâches d'exécution dans toute la mesure du possible. Il leur incombera néanmoins d'organiser les activités de transplantation dans les hôpitaux et les centres de transplantation, par exemple en désignant des coordinateurs locaux ou encore en se chargeant d'assurer le perfectionnement professionnel et la formation continue du personnel soignant. Certaines structures existent d'ores et déjà. Les cantons devront en outre désigner un organisme indépendant chargé d'autoriser le prélèvement de tissus ou de cellules sur des personnes incapables de discernement (cf. art. 13). On pourra là aussi avoir recours à des organismes existants, par exemple à un tribunal civil ou à l'autorité de surveillance des affaires tutélaires. En vertu de l'art. 64, les cantons supportent les coûts liés à l'exécution de la loi dans leur domaine de compétence. Les moyens nécessaires en personnel et en matériel dépendront de l'engagement des cantons et sont donc difficiles à évaluer.

Le projet de loi n'a aucune répercussion au niveau communal.

3.2

Conséquences dans le domaine de l'informatique

L'infrastructure informatique dont l'OFSP dispose déjà est suffisante pour assurer l'exécution de la loi. Il est prévu de confier la gestion de la centrale de coordination et du registre des cellules sources à des organismes existants. Or, ceux-ci disposent eux aussi de solutions informatiques adéquates. Au cas où ces tâches d'exécution ne pourraient pas être déléguées, l'OFSP serait contraint de se procurer le matériel et le logiciel nécessaires. Il est difficile de faire une estimation du montant que pourrait représenter une telle acquisition. Les frais d'entretien de l'équipement informatique sont inclus dans le budget établi pour la centrale de coordination et le registre des cellules sources.

3.3

Conséquences sur l'économie

Pour les titulaires d'autorisations, de contraintes supplémentaires résulteront des nouvelles dispositions. Comme la plupart satisfont cependant aujourd'hui déjà à la majeure partie des exigences posées dans le projet de loi, la charge additionnelle représentée par le nouveau régime sera en général aisément supportable.

Les dossiers devant être joints aux demandes d'autorisation de xénotransplantations sont volumineux et doivent satisfaire à des exigences très strictes. Ces dernières sont toutefois comparables à celles qui sont posées dans d'autres pays. Comme la plupart du temps les projets de xénotransplantation sont d'envergure internationale, les nouvelles dispositions ne représenteront donc pas une charge supplémentaire pour le

188

titulaire de l'autorisation. Ce n'est d'ailleurs qu'en exigeant le respect de normes comparables à celles qui sont appliquées dans les autres pays que l'on obtiendra la reconnaissance internationale des activités menées en Suisse (et notamment des résultats de recherches). Vue sous cet angle, les ajustements proposés peuvent donc se révéler payants.

Les entreprises assurant la distribution des transplants standardisés devront elles aussi entreprendre des démarches plus compliquées qu'à l'heure actuelle pour obtenir l'autorisation de l'Institut suisse des produits thérapeutiques. Contrairement aux réglementations en vigueur dans le domaine de la xénotransplantation, les dispositions régissant l'autorisation et le contrôle des transplants standardisés n'ont pas encore été harmonisées au niveau international. Les exigences prévues dans le projet de loi ne sont toutefois ni plus strictes ni plus astreignantes que les normes en vigueur dans les pays voisins de la Suisse. Dans de très nombreux Etats, cette nouvelle catégorie de transplants est en effet assujettie à des contrôles spéciaux ou à une procédure d'autorisation. Ces mesures administratives se justifient notamment parce que l'autorisation d'un transplant standardisé permet à son distributeur d'en faire le commerce.

3.4

Autres conséquences

3.4.1

Conséquences pour la population

La nouvelle loi sur la transplantation vient réglementer le sujet au niveau fédéral et remplacer ainsi les dispositions peu satisfaisantes qui régissent aujourd'hui les activités de transplantation. En assujettissant cette branche de la médecine à une réglementation uniforme, on assure enfin la sécurité juridique qui faisait défaut dans ce domaine.

Il est prévu que la population soit informée régulièrement de l'évolution de la médecine dans le domaine de la transplantation et des problèmes qu'elle rencontre. On expliquera aussi aux gens comment manifester leur volonté de faire don de leurs organes, tissus ou cellules et on les rendra attentifs aux conséquences d'un tel choix.

Cet effort au niveau de l'information a pour but de faire connaître aux gens à la fois la législation qui régit ce domaine de la médecine et la pratique à laquelle elle s'applique afin d'accroître la confiance de la population dans cette discipline médicale.

3.4.2

Conséquences pour les donneurs et les receveurs

La nouvelle loi sur la transplantation protège tant les donneurs que les receveurs. Si elle ne donne à personne le droit de recevoir un organe, elle n'oblige non plus personne au don d'organe par solidarité. Avec la codification du modèle du consentement au sens large, les donneurs potentiels peuvent être sûrs qu'il n'y aura pas prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules en cas de décès s'ils n'y ont pas donné leur accord ou, dans la négative, si l'accord n'a pas été donné par leurs proches. Les patients qui attendent une transplantation, quant à eux, peuvent avoir la

189

certitude que les organes disponibles sont attribués selon des critères équitables et uniformes. Ils peuvent en outre être certains que l'accès aux organes, tissus ou cellules de personnes vivantes leur sera assuré dans toute la mesure du possible. Cet accès est notamment facilité par la disposition selon laquelle le don par une personne vivante ne présuppose pas l'existence d'un lien de parenté ou d'une relation sentimentale particulièrement étroite entre le donneur et le receveur.

3.4.3

Conséquences pour les personnes pratiquant des transplantations

Pour les médecins et le personnel soignant qui pratiquent des transplantations dans les hôpitaux et les centres de transplantation, la nouvelle loi vient définir clairement le cadre légal dans lequel doivent s'inscrire leurs activités en imposant des règles claires et valables pour tous.

La loi sur la transplantation tient aussi compte de la situation souvent difficile dans laquelle se trouvent ces personnes en accordant une attention particulière au perfectionnement professionnel et à la formation continue. La tâche du personnel médical peut se révéler particulièrement pénible, par exemple lorsqu'il doit continuer de s'occuper d'une personne décédée jusqu'au prélèvement d'organes ou lorsqu'il est appelé à aborder le sujet délicat du don d'organes dans ses contacts avec les proches. Conscient de ces difficultés, on a donc prévu dans la nouvelle loi que soit désigné un coordinateur local chargé d'accompagner les proches dans ces moments difficiles et que soient mis sur pied des programmes de perfectionnement professionnel et de formation continue destinés au personnel médical.

3.5

Conséquences pour la Principauté du Liechtenstein

L'extension du champ d'application de la loi sur la transplantation au territoire de la Principauté du Liechtenstein est régie par les principes du traité douanier du 29 mars 1923 entre la Suisse et la Principauté du Liechtenstein (RS 0.631.112.514). En vertu de ces dispositions, la loi sur la transplantation s'applique sur le territoire de la Principauté du Liechtenstein tout comme elle s'applique en Suisse, dans la mesure où les dispositions sur la réunion de la Principauté du Liechtenstein au territoire douanier suisse l'exigent.

La plupart des dispositions de la loi sur la transplantation ne tombent cependant pas sous le coup de ce traité douanier. Les aspects suivants, notamment, y échappent: ­

le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées: le fait que la Principauté du Liechtenstein applique le modèle du consentement ou le modèle de l'opposition, le fait que le critère de décès y soit la mort cérébrale ou non ne sont pas pertinents du point de vue du traité douanier;

­

le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes vivantes;

190

­

l'attribution d'organes;

­

la transplantation de cellules ou de tissus issus d'embryons ou de foetus humains;

­

la xénotransplantation.

Les éléments suivants sont en revanche pertinents du point de vue du traité douanier: ­

l'autorisation requise pour l'importation ou l'exportation d'organes, de tissus ou de cellules en vertu de l'art. 24 du projet de loi;

­

la réglementation des transplants standardisés au sens de l'art. 47 du projet de loi.

Quiconque aurait l'intention, depuis le Liechtenstein, de mettre en circulation des transplants standardisés en Suisse ou d'importer des organes, des tissus ou des cellules au sens de l'art. 24 du projet de loi doit être titulaire d'une autorisation.

Conformément à l'accord du 2 novembre 1994 (RS 0.631.112.514.6), la Principauté du Liechtenstein a mis en place un dispositif de contrôle et de surveillance du marché destiné à empêcher que des marchandises en provenance de la CE n'entrent en Suisse par la frontière ouverte entre la Suisse et le Liechtenstein lorsque cette entrée enfreint le droit suisse. A l'avenir, il faudra donc que ce dispositif de contrôle soit étendu à l'importation d'organes, de tissus et de cellules au sens de l'art. 24 du projet de loi ainsi qu'aux transplants standardisés.

4

Programme de la législature

Dans le rapport du 1er mars 2000 sur le Programme de la législature 1999­2003 (FF 2000 2168, 2229, annexe 2), le projet est annoncé au chapitre «Sécurité sociale; santé publique» sous «Autres objets».

5

Rapport avec le droit européen

5.1

Conseil de l'Europe

5.1.1

Transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine

5.1.1.1

Décisions et recommandations

Dans sa résolution du 11 mai 197873, le Comité des ministres a recommandé aux Etats membres de conformer leur législation dans le domaine de la transplantation de substances d'origine humaine aux règles suivantes: dans le cas du prélèvement d'organes sur des personnes vivantes, l'anonymat du donneur et du receveur doit être garanti, à moins qu'il n'existe entre eux des liens familiaux ou personnels 73

Résolution (78) 29 sur l'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux prélèvements, greffes et transplantations de substances d'origine humaine.

191

étroits. Le prélèvement d'un organe ne peut pas avoir lieu sans le consentement du donneur et sans qu'il ait été préalablement informé. Selon ces règles, le prélèvement d'organes sur des personnes décédées et possible si celles-ci ne s'y sont pas opposées de leur vivant. Le décès doit être constaté par un médecin qui n'appartient pas à l'équipe qui procédera au prélèvement. L'identité du donneur ne doit pas être révélée au receveur ni celle du receveur à la famille du donneur. Finalement ­ c'est là un principe essentiel ­ tant le don d'organe par une personne vivante que le prélèvement d'organes sur une personne décédée doivent être gratuits.

Le 14 mars 1979, le Comité des Ministres a adopté une recommandation74 invitant les Etats membres à prendre des mesures permettant de faciliter l'échange international et le transport de substances d'origine humaine ainsi que de garantir l'acheminement sûr et rapide de ces substances.

Le 30 septembre 199775, le Comité des Ministres a adopté une recommandation sur la transplantation du foie prélevé sur des donneurs vivants apparentés. Les Etats membres y sont invités à veiller que ce type de transplantation n'ait lieu qu'en cas de pénurie d'organes prélevés sur des personnes décédées. Compte tenu de l'état actuel des connaissances médicales, ce type de transplantation du foie ne devrait donc ­ selon ces recommandations ­ être envisagé uniquement s'il y a urgence absolue (p. ex. défaillance hépatique fulgurante) ou si le receveur est un enfant. Tant le donneur que le receveur doivent par ailleurs être informés des risques qu'ils courent ainsi que des avantages et des inconvénients de cette méthode de transplantation. Avant que le donneur soit invité à donner son accord, il faut qu'un spécialiste neutre, indépendant de l'équipe de transplantation, se soit assuré qu'il y a bien compatibilité. N'entrent pas en ligne de compte comme donneurs les personnes mineures ainsi que les personnes majeures incapables de discernement. Les transplantations de foies prélevés sur des donneurs vivants apparentés doivent avoir lieu dans des centres médicaux ayant une longue expérience de la chirurgie du foie sous toutes ses formes, y compris les opérations de transplantation et uniquement dans le cadre d'un plan de garantie de la qualité. Contrairement au projet de loi sur la
transplantation, cette recommandation est donc fondée sur le principe de la subsidiarité du don d'organe par une personne vivante (cf. ch. 5.1.1.2). En outre, elle n'autorise aucune dérogation dans le cas de personnes mineures ou majeures n'ayant pas une capacité de discernement suffisante.

Le 7 mars 2001, le Comité des Ministres a adopté une recommandation sur la gestion des listes d'attente et des délais d'attente en matière de transplantation d'organe76. Il y invite les Etats membres à mettre en place un système assurant à tous les patients un accès équitable aux opérations de transplantation. Les Etats devront ainsi désigner une organisation reconnue au niveau national, qui sera chargé de gérer une liste d'attente officielle, que ce soit au niveau régional, national ou international, et d'assurer une attribution équitable des organes. Seuls les centres de transplantation officiels sont autorisés à faire inscrire un patient sur la liste d'attente.

74 75 76

192

Recommandation No (79) 5 du Comité des Ministres aux Etats membres concernant le transport et l'échange internationaux de substances d'origine humaine.

Recommandation No R (97) 16 du Comité des Ministres aux Etats membres sur la transplantation du foie prélevé sur des donneurs vivants apparentés.

Recommandation Rec (2001) 5 du Comité des Ministres aux Etats membres sur la gestion des listes d'attente et des délais d'attente en matière de transplantation d'organe.

Le patient doit en être informé, de même qu'il devra, le cas échéant, être averti de sa radiation de la liste. Seul la liste d'attente officielle est admise pour l'inscription du nom des patients qui espèrent recevoir une greffe. Les conditions que les patients doivent remplir pour être admis sur la liste d'attente doivent être fondées sur des critères d'ordre médical et satisfaire au principe de la non-discrimination. L'attribution d'organes et de tissus doit se faire de manière transparente et être dûment motivée en fonction de critères médicaux. Seul les personnes figurant sur la liste d'attente officielle peuvent se voir attribuer un organe. Afin d'assurer qu'il n'y ait pas un groupe de patients qui doive attendre plus longtemps qu'un autre pour recevoir un type d'organe déterminé et soit donc défavorisé, les temps d'attente doivent être analysés à intervalles réguliers. Les règles d'attribution doivent ensuite être ajustées en fonction des résultats obtenus si cela paraît nécessaire. Il serait souhaitable que l'organisme chargé de la gestion de la liste informe au moins une fois par année le personnel médical et le public des critères d'admission, des règles d'attribution ainsi que, le cas échéant, des modifications qui y ont été apporté. Cette information doit aussi porter sur le nombre des patients enregistrés ainsi que sur les fluctuations constatées, de même que sur les temps d'attente pour les divers types d'organes. Quant au fond, le projet de loi correspond à cette recommandation.

5.1.1.2

Convention du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme et la biomédecine (Convention sur la bioéthique) et Protocole additionnel relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine

La Convention du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme et la biomédecine (Convention sur la bioéthique)77 a été adoptée par l'Assemblée parlementaire le 26 septembre 1996 et par le Comité des Ministres le 19 novembre 1996. Elle est entrée en vigueur le 1er décembre 1999, après avoir été ratifiée par cinq Etats78. La Suisse a signé la Convention le 7 mai 1999. Le texte sera soumis à l'approbation des Chambres fédérales avec le présent message (Message du 12 septembre 2001 relatif à la Convention européenne du 4 avril 1997 pour la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine [Convention sur les droits de l'Homme et la biomédecine] et au Protocole additionnel du 12 janvier 1998 portant interdiction du clonage d'êtres humains; FF 2002 271).

La Convention sur la bioéthique est le premier instrument international qui prévoit des règles contraignantes dans le domaine de la médecine et de la recherche médicale. On trouve dans ce texte une série de principes régissant le prélèvement 77

78

Convention pour la protection des droits de l'Homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la biomédecine: La Convention des droits de l'Homme et la biomédecine du 4 avril 1997 (Convention sur la bioéthique).

Danemark, Grèce, Saint-Marin, Slovénie, Slovaquie. En Espagne, la convention est entrée en vigueur le 1er janvier 2000, en Géorgie le 1er mars 2001 et en Roumanie le 1er août 2001. Pour la République tchèque, elle devrait être contraignante à partir du 1er octobre 2001.

193

d'organe sur des personnes vivantes. Le prélèvement sur une personne vivante d'un organe destiné à être transplanté ne peut ainsi être effectué que dans l'intérêt thérapeutique du receveur et lorsque l'on ne dispose pas d'un organe approprié prélevé sur une personne décédée ni d'une autre méthode thérapeutique d'une efficacité comparable (art. 19). Le consentement du donneur doit avoir été exprimé par écrit ou devant une autorité. Par principe, aucun prélèvement d'organe ou de tissus ne peut être effectué sur une personne n'ayant pas la capacité de donner son consentement (art. 20). La seule exception prévue par la convention (art. 20, al. 2) se rapporte au prélèvement de tissus régénérables. En vertu des ces dispositions, il est en effet autorisé si le receveur est un frère ou une soeur du donneur, si le don peut permettre de sauver la vie du receveur et si l'on ne dispose pas d'un autre donneur compatible. Un refus du donneur potentiel doit néanmoins toujours être respecté.

Il est en outre dit clairement dans la Convention sur la bioéthique (art. 21) que le corps humain et ses parties ne doivent pas être utilisés à des fins de profit. Les parties du corps humain qui ont été prélevées peuvent par ailleurs être stockées et utilisées uniquement aux fins qui ont justifié leur prélèvement. Toute autre utilisation doit faire l'objet d'une procédure d'information et d'autorisation (art. 22).

Il est prévu que des protocoles additionnels viennent compléter les dispositions de la convention dans certains domaines. En juin 2000, le Comité directeur pour la Bioéthique (CDBI, organisme responsable des activités du Conseil de l'Europe dans le domaine de la bioéthique) a adopté un tel protocole additionnel79, consacré à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine. La Suisse a pris part à la préparation de ce texte. Le projet de protocole additionnel attend maintenant son passage en deuxième lecture devant l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Le Comité des Ministres n'a donc pas encore pris sa décision finale à ce sujet.

Les dispositions de ce protocole additionnel régissent tant le prélèvement d'organes et de tissus sur des personnes décédées que le don d'organe par des personnes vivantes. Le but du Protocole est de préserver la dignité, l'identité et l'intégrité des êtres humains
dans le contexte de la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine (art. 1 et 2, al. 2). Bien qu'il ne soit souvent question que d'organes et de tissus dans les dispositions du Protocole, celui-ci s'applique aussi aux cellules et notamment aux cellules souches (art. 2, al. 2). Son champ d'application quant au fond n'englobe cependant ni les tissus et organes reproducteurs, ni les tissus et organes prélevés sur des embryons ou des foetus, ni le sang et les produits sanguins (art. 2, al. 3). L'attribution des organes et des tissus doit être opérée selon des critères transparents et équitables. Ce sont les critères d'ordre médical qui doivent primer (art. 3). Chaque intervention dans le domaine de la transplantation doit être strictement conforme aux dispositions légales pertinentes ainsi qu'au code de déontologie médicale (art. 4). Les médecins doivent notamment s'efforcer de réduire autant que possible le risque de transmission de maladies au receveur (art. 6). Tant le donneur que le receveur devront être informés du but et de la nature de l'intervention ainsi que des conséquences et des risques qu'elle comporte (art. 5 et art. 11). En plus des 79

194

CDBI, Projet de Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l'Homme et la biomédecine relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine, Strasbourg, le 25 juillet 2000.

situations décrites dans la Convention sur la bioéthique, le don d'organe par une personne vivante est possible s'il existe entre le donneur et le receveur une relation personnelle étroite ou si une autorité indépendante y a donné son accord (art. 9). La définition de la «relation sentimentale étroite» est laissée à l'appréciation des législateurs nationaux. Contrairement à la Convention, la protocole additionnel régit aussi le prélèvement d'organes et de tissus sur des personnes décédées (art. 15 à 18).

Pour qu'un organe ou des tissus puissent être prélevés, il faut que le décès ait été constaté par un médecin indépendant, c'est à dire par un médecin qui ne prend part en aucune façon à la transplantation. C'est aux droits nationaux qu'il appartiendra de définir le critère déterminant pour la constatation du décès (art. 15).

Si une personne décédée avait, de son vivant, manifesté son intention de ne pas faire don de ses organes ou de ses tissus, cette décision doit être respectée sans aucune réserve (art. 16). Pour le reste, les Etats membres sont libres de définir dans leur droit national les conditions auxquelles des organes et des tissus peuvent être prélevés sur une personne décédée. Le Protocole vise en outre à empêcher le commerce d'organes (art. 21) et à encourager le don d'organes et de tissus d'origine humaine (art. 18).

L'avant-projet de la loi fédérale sur la transplantation était conforme tant à la Convention qu'au Protocole additionnel. Dans le cadre de la procédure de consultation, le principe selon lequel le prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur une personne vivante est autorisé uniquement s'il n'est pas possible d'avoir recours à des organes, tissus ou cellules provenant d'une personne décédée (subsidiarité du don d'organes par des personnes vivantes) avait été jugé trop restrictif par une majorité des organismes consultés. La plupart étaient en effet d'avis que la transplantation d'organes prélevés sur des personnes vivantes devait pouvoir constituer une option thérapeutique prioritaire étant donné que cette solution permet d'obtenir de meilleures résultats que le prélèvement d'organes sur une personne décédée. La disposition selon laquelle le prélèvement de cellules ou de tissus régénérables sur des personnes incapables de discernement n'est possible qu'à titre
exceptionnel a été jugée trop stricte par certains et trop libérale par d'autres. Alors que certains proposaient d'interdire de manière absolue tout prélèvement sur des personnes incapables de discernement, d'autres ont estimé qu'il n'était pas logique de limiter le cercle des receveurs potentiels aux frères et soeurs du donneur, alors que d'autres proches parents pouvaient eux aussi avoir besoin d'un tel don.

Les critiques formulées dans le cadre de la procédure de consultation ne sont pas dénuées de tout fondement. Il ne faut pas oublier que le don d'un organe par une personne vivante présente toujours un risque, tout comme n'importe quelle autre intervention chirurgicale. Dans le cas du don d'un rein, par exemple, le risque de létalité encouru par le donneur est inférieur à 1 %. Aucun décès n'a encore jamais été enregistré en Suisse à la suite d'un don d'organe par une personne vivante. Le risque couru par le donneur ­ il existe ­ a néanmoins incité le Conseil de l'Europe à introduire le principe de la subsidiarité du prélèvement d'organe sur une personne vivante à l'art. 19 de la Convention sur la bioéthique. Il ne faut pourtant pas oublier non plus que les organes prélevés sur des personnes vivantes présentent l'avantage de donner de meilleurs résultats de transplantation que les organes provenant de personnes décédées. Ils permettent aussi une meilleure planification de l'intervention et évitent au receveur la tourmente d'une attente interminable. Une étude comparative 195

des transplantations rénales réalisée aux Etats-Unis révèle ainsi une différence de 6,7 % dans le taux de survie des transplantés après une année en faveur des personnes ayant reçu un rein prélevé sur une personne vivante. Après cinq ans, l'avantage par rapport aux patients ayant obtenu un rein prélevé sur une personne décédée est même de 15,5 %.

Il est bien évident que le risque médical existant pour le donneur doit être soigneusement évalué avant l'intervention. Si toutefois l'examen révèle que le donneur potentiel ne présente aucun facteur de risque particulier, on ne voit pas pourquoi le donneur n'aurait pas le droit de prendre sa décision en toute liberté. Du point de vue du receveur, il n'est pas non plus compréhensible qu'il soit obligé de se faire implanter un organe prélevé sur une personne décédée alors qu'une personne vivante serait disposée à lui en donner un et qu'il aurait ainsi une chance de survie plus grande. Le principe précité paraît donc effectivement être trop restrictif. Il suffit d'exiger que le donneur ait été informé des risques et des conséquences de l'intervention et qu'il ait, en toute liberté, donné son accord écrit au prélèvement.

En vertu de l'art. 20 de la Convention sur la bioéthique, le prélèvement de tissus régénérables sur des personnes incapables de discernement est autorisé uniquement si le don est destiné à un frère ou à une soeur du donneur. Cette limitation paraît aussi trop restrictive. Il n'est en effet pas compréhensible que les autres proches parents soient exclus du cercle des receveurs potentiels. Pourquoi un enfant n'auraitil pas le droit de faire un don en faveur de ses parents ou, inversement, un père ou une mère incapable de discernement en faveur de son enfant? Cela ne change en effet rien au risque encouru par le donneur (p. ex. en vue d'un don de moelle osseuse). A ce jour, les Etats ayant ratifié la Convention sur la bioéthique sont au nombre de sept. La seule réserve qui ait été formulée jusqu'à présent se rapporte précisément au prélèvement de tissus sur des personnes incapables de discernement: le Danemark s'est réservé le droit d'autoriser le don de tissus entre parents et enfants.

En résumé, on peut affirmer qu'il ne paraît pas approprié de reprendre telles quelles les dispositions de la Convention sur la bioéthique dans le projet de
loi sur la transplantation. Ce dernier ne contient donc pas le principe de subsidiarité du don d'organe par une personne vivante et prévoit d'étendre aux parents et aux enfants du donneur le cercle des receveurs potentiels de tissus ou de cellules régénérables prélevés sur une personne incapable de discernement. En prévision de la ratification de la Convention sur la bioéthique, cela signifie qu'elle devra être reportée jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation. Les réserves formulées ne peuvent en effet se rapporter qu'à des dispositions légales applicables et ne peuvent plus en aucun cas être apportées après la ratification de la Convention. Dans le message relatif à l'approbation de la Convention sur la bioéthique, des réserves ont donc été formulées en ce qui concerne les art. 19 et 20.

196

5.1.2

Xénotransplantation

Le 30 septembre 1997, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté une recommandation80 sur la xénotransplantation. Considérant que la xénotransplantation peut devenir une méthode thérapeutique praticable dans un proche avenir, mais qu'elle comporte un risque de transmission de maladies infectieuses, il recommande aux Etats membres de minimiser les risques de transmission de maladies connues ou inconnues à la population en prenant les mesures nécessaires à la réglementation des aspects suivants de la xénotransplantation: ­

la recherche fondamentale et les études cliniques;

­

la provenance et la détention des animaux utilisés;

­

les programmes de xénotransplantation;

­

la surveillance à long terme des receveurs xénogreffés.

Le 29 janvier 1999, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a adopté à l'unanimité une recommandation81 au Comité des Ministres et s'est prononcée pour un moratoire dans le domaine de la xénotransplantation. D'une manière générale, elle a considéré que les risques liés à cette technique étaient encore trop importants et que l'on n'en savait pas encore suffisamment dans ce domaine pour pouvoir prendre la responsabilité d'autoriser les premiers essais cliniques. On craint notamment que des maladies se transmettent de l'animal à l'homme par l'intermédiaire de virus pathogènes. On a cependant aussi estimé que les aspects éthiques, juridiques et sociaux de la xénotransplantation n'avaient pas encore été suffisamment analysés.

Le Comité des Ministres ne s'est pas encore prononcé sur cette recommandation. En mars 1999, il avait toutefois désigné un groupe de travail chargé d'élaborer des recommandations dans le domaine de la xénotransplantation. Ce groupe de travail est placé sous la responsabilité du Comité directeur pour la bioéthique (CDBI) et du Comité européen de la santé (CDSP). La Suisse y est représentée par un collaborateur de l'OFSP. La réglementation suisse de la xénotransplantation est pour l'instant conforme aux recommandations de ce groupe de travail, qui n'en sont toutefois encore qu'au stade de projet.

5.2

Union européenne

5.2.1

Transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine

L'art. 152 du Traité instituant les Communautés européennes (TCE) du 25 mars 1957, tel que modifié par le Traité d'Amsterdam du 2 octobre 1997, vise un niveau élevé de protection de la santé. L'art. 152, al. 4, let. a du TCE traite spécifiquement des mesures à prendre en ce qui concerne les normes de qualité et de sécurité des organes et substances d'origine humaine. Ces dispositions n'empêchent cependant 80 81

Recommandation No R (97)15 du Comité des Ministres aux Etats membres sur la xénotransplantation.

Recommandation 1399 (1999) de l'Assemblée parlementaire concernant la xénotransplantation.

197

pas les Etats membres de conserver ou d'édicter des règles plus restrictives. Au stade actuel, les institutions de l'UE n'ont pas encore fait usage de cette compétence au niveau législatif. Ainsi, les seuls textes communautaires en la matière sont, pour le moment, les résolutions du Parlement européen.

En 1979, le Parlement européen a adopté une résolution sur les banques d'organes82. Il y constate qu'en raison de la pénurie de donneurs et de banques d'organes, les besoins en transplants ne peuvent pas être couverts de manière satisfaisante dans l'Union européenne. Il relève aussi que l'efficience des banques d'organes dépend en grande partie de leurs capacités et de leurs infrastructures, de leur accessibilité et de la possibilité de détecter à temps la volonté des donneurs potentiels. En 1983, il a adopté une résolution invitant la Commission européenne à élaborer, dans le délai d'une année, des règles permettant d'améliorer la coordination et la coopération entre les banques d'organes européennes83.

Le 14 septembre 1993, le Parlement européen, considérant que le don d'organe doit toujours être un acte volontaire, que le remplacement d'un organe malade par un organe sain ne relève en aucun cas des droits de l'homme et que le déficit chronique de transplants pourrait entraîner le développement d'un trafic d'organes incompatible avec le respect de la dignité humaine, a adopté une résolution84 invitant le Conseil à prendre les mesures nécessaires pour interdire sur le territoire de toute l'Union européenne le commerce à but lucratif d'organes à transplanter. Il doit également être interdit d'importer, d'utiliser ou de transférer des organes ou des tissus dont on ne connaît pas très exactement la provenance et dont la qualité est incertaine. La Commission a été chargée d'élaborer un code de conduite portant essentiellement sur les principes suivants: la gratuité du don et l'anonymat du donneur, l'interdiction du prélèvement d'organes sur des mineurs, des adultes incapables d'exercer leurs droits civils et des enfants souffrant de traumatismes cérébraux, la définition des critères médicaux déterminants pour l'inscription sur la liste d'attente ainsi que le droit des patients à être informés des possibillités de transplantation adaptées à leur état de santé. Afin que le nombre des personnes pouvant
recevoir l'organe dont elles ont besoin augmente enfin, le Parlement européen requiert en outre un renforcement de la collaboration en Europe, par exemple au moyen d'une informatisation des données relatives aux organes disponibles, aux patients dont les noms figurent sur les listes d'attente et aux critères de compatibilité histologique.

Les dispositions du projet de loi qui est l'objet du présent message sont conformes aux résolutions sus-mentionnées.

5.2.2

Xénotransplantation

Il n'existe aucune norme juridique communautaire régissant le domaine de la xénotransplantation.

82 83 84

198

Résolution du 27 avril 1979 sur les banques d'organes.

Résolution du 15 avril 1983 sur la transplantation d'organes.

Résolution du 14 septembre 1993 sur l'interdiction du commerce de transplants.

6

Bases légales

6.1

Constitutionnalité

La loi sur la transplantation est fondée sur l'art. 119a de la Constitution, en vertu duquel la Confédération dispose d'une compétence globale pour édicter des normes régissant la médecine de la transplantation. Il s'agit plus précisément d'une compétence fédérale ayant force dérogatoire subséquente. Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi sur la transplantation, la situation actuelle reste donc inchangée.

6.2

Délégation de compétences législatives

A l'art. 48, al. 2, du projet de loi, le Conseil fédéral est désigné d'une manière générale comme l'autorité compétente pour édicter les dispositions d'exécution de la loi sur la transplantation.

La compétence du Conseil fédéral pour édicter les dispositions d'exécution de la loi figure dans plusieurs dispositions du projet de loi. Cette délégation de compétences est justifiée dans la mesure où la plupart des principes sont régis dans le projet de loi, qui fixe donc clairement les limites dans lesquelles la réglementation par le Conseil fédéral doit venir s'inscrire. De plus, il est judicieux de déléguer au Conseil fédéral la compétence d'édicter les dispositions d'exécution dans tous les domaines dans lesquels une adaptation rapide à l'évolution technique et une harmonisation au niveau international peuvent se révéler nécessaires. Il est par ailleurs préférable que les sujets impliquant un effort de concrétisation important soient régis par voie d'ordonnance.

Pour plus de détails concernant les différentes dispositions de délégation, on peut renvoyer à la partie spéciale du présent message.

199

Annexes A1

Glossaire

Albuminurie (ou Protéinurie) Excrétion augmentée (plus de 2 g/l) de protéines à faibles poids moléculaire dans les urines. Une excrétion augmentée de protéines dans les urines peut être le signe d'une atteinte rénale.

Anticorps Les anticorps forment une partie du système immunitaire et servent à la reconnaissance spécifique de substances étrangères à l'organisme ainsi qu'à les rendre inoffensives.

Antigènes Substances qui peuvent avoir pour effet la production par l'organisme d'anticorps faisant partie du système immunitaire. Les anticorps ainsi produits présentent une structure exactement complémentaire à l'antigène, c'est-à-dire que ces anticorps peuvent réagir tout à fait spécifiquement avec des antigènes et rendre ainsi ces derniers inoffensifs pour l'organisme.

Blastocyste Vésicule germinale; stade embryonnaire très précoce chez les mammifères et les humains. Se différencie du stade précédent, la morula, par la formation d'une cavité interne liquidienne.

Diabète mellitus Maladie du métabolisme caractérisée par le fait que les cellules des îlots de Langerhans du pancréas ne produisent plus du tout ou pas suffisamment d'insuline, l'insuline étant une hormone qui régule le taux de glycémie.

Dialyse Filtration du sang en cas de réduction ou de défaillance des fonctions rénales.

Electrocardiographie Enregistrement de l'activité électrique du coeur. Les potentiels d'action cardiaques, généralement mesurés à la surface corporelle, sont retracés sur papier (électrocardiogramme, ECG).

Electroencéphalographie Enregistrement de l'activité électrique cérébrale au moyen d'électrodes placées sur le cuir chevelu (Electroencéphalogramme, EEG).

Embryon Le fruit de la fusion des noyaux jusqu'à la fin de l'organogenèse.

200

Espèce Notion de genre. Etres vivants qui se ressemblent dans des caractéristiques essentielles et qui se reproduisent entre eux.

Ex vivo Hors d'un organisme vivant.

Foetus Le fruit de la conception après l'organogenèse et jusqu'à la naissance.

Génie génétique Méthodes et procédures utilisées pour modifier de façon ciblée le patrimoine génétique et partant certaines propriétés précises d'un organisme. Les organismes dont le patrimoine génétique a été modifié par de telles méthodes sont appelés organismes génétiquement modifiés (OGM) ou organismes transgéniques.

Histocompatibilité Compatibilité des tissus dans les situations de transplantation; concordance complète ou étendue des antigènes HLA, ce qui a pour conséquence que la réaction immunitaire est complètement ou largement supprimée.

Homéostasie Ensemble des systèmes de régulation maintenant à des valeurs normales les différentes constantes physiologiques du corps humain (régulation de la circulation, de la température corporelle, du pH, de la balance hydro-électrolytique, du système hormonal, etc.)

Immuno-isolement Méthode ayant pour but d'empêcher le rejet de transplants, et consistant à séparer par une «barrière» le transplant du système immunitaire du receveur afin que des composants de ce dernier ne puissent pas détruire le transplant. La barrière, membrane semi-perméable, doit cependant être formée de manière que le transplant puisse être approvisionné en substances nutritives et qu'il puisse fournir des substances vitales Immuno-suppression Médicaments qui sont administrés afin de réduire la fonction du système immunitaire. Les receveurs de transplants doivent prendre des immunosuppresseurs toute leur vie pour empêcher que le transplant ne subisse une réaction de rejet provoquée par le système immunitaire.

Indication Indication thérapeutique; raison pour laquelle une procédure diagnostique ou thérapeutique déterminée est ordonnée dans un cas de maladie défini, ce dernier justifiant suffisamment l'application de ladite procédure.

201

Insuffisance Rendement faible et insuffisant d'un organe ou d'un système d'organes.

Insuline Hormone produite par les cellules des îlots de Langerhans du pancréas, qui régule principalement le taux de glucose dans le sang.

Lignées cellulaires Cellules cultivées de façon continue et selon des conditions définies dans des cultures cellulaires.

Monitoring Surveillance et observation à long terme de patients ainsi que l'examen de ceux-ci pour détecter la présence d'agents pathogènes ou l'apparition des symptômes d'une maladie.

Naissance provoquée Naissance provoquée artificiellement par l'administration d'hormones.

Organes bio-artificiels Appareils ou machines qui remplissent les fonctions particulières de certains organes et qui contiennent des composantes biologiques, par exemple des cellules.

Perfusion extracorporelle Il s'agit de l'irrigation d'organes isolés (p. ex. par du sang) hors de l'organisme.

Cette technique est utilisée dans la recherche sur la xénotransplantation afin, par exemple, de pouvoir examiner de façon ciblée les réactions de rejet en dehors du corps.

Primates non humains Lémuriens et singes.

Prions Agents pathogènes différents des virus qui sont probablement des protéines infectieuses. Ils sont mis en cause dans l'encéphalite spongiforme.

Réaction immunitaire Réaction de l'organisme contre la présence de substances qui lui sont étrangères.

Rejet Réaction du système immunitaire contre des organes, des tissus ou des cellules implantés, qui peut conduire à la perte du transplant dans les cas graves.

202

Système HLA / antigènes HLA Abréviation pour antigène leucocytaire humain (en anglais: human leucocyte antigen, HLA). Système héréditaire complexe d'antigènes tissulaires humains que l'on retrouve à la surface des cellules de presque tous les tissus, en quantité variable, et qui sont particulièrement bien en évidence sur les globules blancs. Les antigènes HLA jouent un rôle important dans les mécanismes immunologiques de rejet.

Système immunitaire Ensemble des fonctions de l'organisme qui servent à distinguer les substances «propres» des substances «étrangères» et à combattre les secondes.

Temps de latence Intervalle de temps entre l'infection par un agent pathogène et la déclaration de la maladie. Pour certaines maladies, cet intervalle peut aller jusqu'à plusieurs années.

Temps d'ischémie Période durant lequel le greffon n'est plus approvisionné en sang, et par conséquent en oxygène. Les organes ou les tissus n'ont pas tous la même tolérance à l'ischémie, période durant laquelle un organe ou un tissu privé d'apport en oxygène ne présentera pas d'altérations (lésions anoxiques irréversibles). On différencie le temps d'ischémie chaude (= période sans apport sanguin à la température corporelle) et le temps d'ischémie froid (= période sans apport sanguin après le refroidissement du greffon).

Tissue Engineering Culture de tissus biologiques en laboratoire. Une fine couche de tissu est habituellement déposée sur un support plastique reproduisant la forme de l'organe. Les cellules préconditionnées sont étalées sur ce support et stimulées par des facteurs de croissance. Le support plastique sera soit dissous soit séparé du tissu artificiel ainsi produit.

Transplantation allogène Transplantation d'organes, de tissus ou de cellules où le donneur et le receveur sont des individus génétiquement différents mais de la même espèce.

Transplantation autogène Transplantation d'organes, de tissus ou de cellules où le donneur et le receveur sont un seul et même individu.

Transplantation multi-organe Transplantation au cours de laquelle plusieurs organes sont transplantés simultanément à un receveur, idéalement depuis un seul et même donneur (p. ex.

transplantation de l'ensemble coeur/poumon).

203

Xénotransplantation Transplantation d'organes, de tissus ou de cellules au delà de la limite des espèces (p. ex. du porc vers l'être humain). Les organes, les tissus et les cellules ainsi transplantés sont dénommés xénotransplants.

Vascularisation Présence, abondance, disposition et développement des vaisseaux dans un tissu ou une région de l'organisme.

Virus Petits agents pathogènes sans structure cellulaire propre, qui ne peuvent se reproduire qu'avec l'aide d'une cellule hôte. Le virus, après sa pénétration dans la cellule hôte, utilise la machinerie cellulaire pour traduire son matériel génétique, forçant ainsi la cellule à produire de nouvelles particules virales.

Les rétrovirus constituent un groupe particulier, car ils incorporent leur matériel génétique dans celui de la cellule hôte. Les rétrovirus parvenus à ce stade (rétrovirus endogènes) peuvent être transmis aux cellules filles comme des gènes normaux. Les rétrovirus endogènes ne causant aucun symptôme de maladie et passant souvent inaperçus, leur présence doit donc être recherchée par des méthodes d'analyse très spécifiques et sensibles.

Zoonose Maladie infectieuse transmise naturellement entre les vertébrés et l'être humain.

204

Activités de transplantation internationales

12 221 1 895 2 006 1 760 1 432 1 276 434 382 589 346 358 299 196 188 95 122 126 215 159 69 77 54 45 37 30

Europe au total Allemagne Espagne France U.K, Irlande du Nord et Irlande Italie Belgique/Luxembourg Autriche Pologne Pays-Bas Portugal République tchèque Suède Suisse Turquie Norvège Danemark Hongrie Finlande Grèce Slovaquie Bulgarie Croatie Slovénie Lituanie

205

Rein (donneurs décédés)

Pays

14

1 785 380 17 77 269 81 25 35 12 132 9 17 105 63 273 82 42 9 4 85 2 16 6

Rein (donneurs vivants)

2 429 500 336 349 289 335 91 95 119 45 12 64 37 47 1 32 26 5 15 7 8 6 7 3

9 9

Coeur

4 790 757 960 699 703 680 169 140 35 95 159 67 93 77 14 29 31 22 30 12

Foie1

Aperçu des transplantations d'organes effectuées en 1999 (chiffres absolus)

A2

507 218 25 50 40 35 37 32 3 19 24 7 4 11 0 2 0

19 14 26 32 11 46 0

2 3

0 2

Pancréas

834 146 135 99 110 98 28 70

Poumon unilatéral/bilatéral

118 20 4 28 50 3 5 1

Coeur+ poumon

0

0 0

0 1

0

1 0 3

13 0 1 7

Intestin grêle

22 697 3 916 3 484 3 069 2 893 2 509 789 758 758 658 538 485 467 412 383 287 271 253 210 173 87 70 66 53 47

Total

A2, Tableau 1

Inclus les donneurs vivants

21 251

12 19 8 097 647 286

Rein (donneurs décédés)

6 762

29 1 4 432 378 167

Rein (donneurs vivants)

9 997

4 700 383 124

Foie1

4 854

2 185 172 68

Coeur

173

48 5 2

Coeur+ poumon

1 895

901 91 69

Poumon unilatéral/bilatéral

963

368 71 17

Pancréas

206

Sources: ­ Données pour l'Europe, le Canada et l'Australie: http://www.msc.es/ont/ing/f_data.htm (MSC = Ministerio del Sanidad y Consumo ­ Spanien) ­ Données pour les USA: Transplant Patient DataSource (2000, February 16). Richmond, VA: United Network for Organ Sharing.

Etat Janvier 2001 de: http://www.patients.unos.org/data.htm

1

Total

Chypre Estonie USA Canada Australie

Pays

84

0

71

Intestin grêle

45 979

41 20 20 802 1 747 733

Total

22,7 23,1 50,6 29,4 22,8 22,1 41,3 47,3 15,3 21,6 35,9 29,1 22,0 26,9 1,5 27,5 23,5 20,9 30,8 6,9 14,4 6,6 9,6 18,5 8,1 20,0 12,7

Europe au total Allemagne Espagne France UK, Irlande du Nord et Irlande Italie Belgique/Luxembourg Autriche Pologne Pays-Bas Portugal République tchèque Suède Suisse Turquie Norvège Danemark Hongrie Finlande Grèce Slovaquie Bulgarie Croatie Slovénie Lituanie Chypre Estonie

207

Rein (Donneurs décédes)

Pays

3,3 4,6 0,4 1,3 4,3 1,4 2,4 4,3 0,3 8,3 0,9 1,7 11,8 9,0 4,2 18,5 7,8 0,9 0,8 8,5 0,4 2,0 1,3 0,0 3,8 48,3 0,7

Rein (Donneurs vivants)

1,9 4,5

8,9 9,2 24,2 11,7 11,2 11,8 16,1 17,3 0,9 5,9 16,0 6,5 10,4 11,0 0,2 6,5 5,8 2,1 5,8 1,2

Foie1

1,3 3,5 0,8

7,2 4,9 0,5 2,9 0,7 1,5

4,5 6,1 8,5 5,8 4,6 5,8 8,7 11,8 3,1 2,8 1,2 6,2 4,2 6,7

Coeur

0,0

0,4

2,5 0,0 0,2 0,0

1,4 5,8 4,6

0,3

2,5 8,6

2,3 0,8 0,6

1,2

0,1

0,0

0,9 2,7 0,6 0,8 0,6 0,6 3,5 4,0 0,1 1,2

Pancréas

1,6 1,8 3,4 1,7 1,7 1,7 2,7 8,7

Poumon unilatéral/bilatéral

0,2 0,2 0,1 0,5 0,8 0,1 0,5 0,1

Coeur+ Poumon

Aperçu des transplantations d'organes effectuées en 1999 (par millions d'habitants)

0,0 0,0

0,0 0,1

0,0

0,0 0,0

0,0

Intestin grêle

42,2 47,7 87,8 51,2 46,0 43,6 75,1 93,8 19,7 41,1 54,0 47,1 52,4 58,9 5,9 64,6 50,6 24,6 40,7 17,3 16,2 8,6 14,1 26,5 12,7 68,3 13,4

Total

A2, Tableau 2

17,4 12,4 8,8

Rein (Donneurs vivants)

18,4 12,6 6,5

Foie1

8,6 5,6 3,6

Coeur

0,2 0,2 0,1

Coeur+ Poumon

3,5 3,0 3,6

Poumon unilatéral/bilatéral

1,4 2,3 0,9

Pancréas

208

Sources: ­ Données pour l'Europe, le Canada l'Australie: http://www.msc.es/ont/ing/f_data.htm (MSC = Ministerio del Sanidad y Consumo ­ Spanien) ­ Données pour les USA: Transplant Patient DataSource (2000, February 16). Richmond, VA: United Network for Organ Sharing.

Etat Janvier 2001 de: http://www.patients.unos.org/data.htm

Inclus les donneurs vivants

31,8 21,2 15,1

USA Canada Australie

1

Rein (Donneurs décédes)

Pays

0,3

Intestin grêle

81,6 57,3 38,6

Total

A2, Tableau 3 Nombre de donneurs vivants d'organes en Europe et outre-mer en 1999 Pays

Donneurs vivants

Europe au total Espagne Autriche Belgique/Luxembourg Portugal Finlande France République tchèque Norvège Suisse Danemark Italie Slovaquie UK, Irlande du Nord et Irlande Allemagne Suède Hongrie Pays-Bas Chypre Pologne Slovénie Lituanie Estonie Croatie Grèce Bulgarie Turquie Outre-mer USA Canada Nouvelle-Zélande Australie 1

Nombre

par million d'habitants

7 043 1 334 202 241 190 85 970 164 69 101 76 788 26 816 1 039 108 119 165 6 314 43 24 8 23 45 27 60

13,1 33,6 25,0 23,0 19,1 16,5 16,2 15,9 15,5 14,4 14,2 13,7 13,0 13,0 12,7 12,1 11,6 10,3 10,0 8,1 8,0 6,5 5,3 4,9 4,5 3,3 0,9

5 849 430 39 164

22,9 14,1 10,0 8,6

Pourcentage de donneurs multi-organes

85,30 79,20 77,90 53,00 77,40 62,20 77,30 87,10 65,80 81,90 77,00 83,80 73,60 78,70 18,50 83,30 44,20 39,50 16,60 47,80 80,00 41,60 1

77,00 79,00 83,00

En 1999, 3,6 organes en moyenne sont prélevés par donneurs aux USA.

Sources: ­ Données pour l'Europe, le Canada, l'Australien et la Nouvelle-Zélande: http://www.msc.es/ont/ing/f_data.htm (MSC = Ministerio del Sanidad y Consumo ­ Spanien) ­ Données pour les USA: UNOS Annual Report 2000: http://www.unos.org/Data/anrpt00/ar00_datahigh_01.htm

209

A2, Tableau 4 Taux de survie des allotransplants un et cinq ans après transplantation aux USA Organes transplantés

Reins (donneurs vivants) Reins (donneurs décédés) Coeur Poumons Coeur+poumon Foie Pancréas Intestin grêle Rein d'une transplantation rein+pancréas Pancréas d'une transplantation rein+pancréas 1 2

Taux de survie des organes transplantés.

Après une année1 (en %)

Après cinq ans2 (en %)

94,5 89,4 85,1 76,3 58,2 81,4 76,2 63,8 91,8

78,4 64,7 68,5 42,0 40,5 66,1 41,6 37,4 70,7

83,7

67,4

Base de donnée: survie des organes dans la cohorte des receveurs transplantés en 1997 ou 1998 aux USA.

Base de donnée: survie des organes dans la cohorte des receveurs transplantés entre janvier 1990 et décembre 1998 aux USA.

Source: UNOS Annual Report 2000; http://www.unos.org/Data/anrpt00/ar00_datahigh_03.htm

210

A3

Activités de transplantation en Suisse A3, Tableau 1

Activités de transplantation dans les six centres de transplantation de Suisse en 2000 Centre

Bâle Berne Genève Lausanne St. Gall Zurich Total 1

2 3 4

Rein1

Rein+îlots de Langerhans

Rein+ Pancréas Pancréas

Coeur

Foie

Poumon

39 33 29 24 12 56

34 8 3 7 9 11

­ 0 6 ­ ­ 2

­ 0 1 ­ ­ 2

­ 0 0 ­ ­ 1

4 13 7 7 ­ 7

­ 15 34 15 ­ 13

­ 0 4 5 ­ 15

1934

72

82

3

1

383

774

243

Rein

Donneurs vivants Quatre transplantations d'îlots de Langerhans seulement (3 Genève, 1 Zurich) Une transplantation coeur et poumon Quatre transplantations foie et rein (1 Genève, 2 Lausanne, 1 Zurich) Cinq donneurs vivants de foie (3 Genève, 1 Zurich, 1 Lausanne) Un foie gauche et foie droit provenant d'une division d'un foie domino (Genève) Un foie domino (Berne)

Source: SwissTransplant 2000

211

426

Total

191

1 15 24 18 31 16 30 32 24

Poumon

212

Source: SwissTransplant 2000

Donneurs vivants p.d.: pas de données

39 37 47 49 43 41 35 44 47 38

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

1 2

Coeur

Année

584

28 45 51 60 47 67 55 77 77 77

Foie

1931

201 190 208 209 166 175 190 201 198 193

Rein

461

13 26 44 38 41 43 53 68 63 72

Rein1

75

2 13 16 15 8 6 5 3 4 3

Rein+pancréas

Evolution des transplantations d'organes et de moelle osseuse en Suisse (Données des diagrammes suivants)

7

2 0 1 1 1 0 1 0 1

Pancréas

27

1 0 4 2 4 8 8

Ilots de Langerhans

1636

p.d.

69 83 101 154 174 273 269 249 264

p.d.2 51 51 53 54 69 76 74 87 110 625

autogène

allogène

Moelle osseuse

A3, Tableau 2

51 (5)

Total

51 (6)

18 (1) 18 (5) 15

1993

213

Source: SwissTransplant 2000

( ) donneurs non parents 1 Hôpital universitaire 2 Hôpital pour les enfants

23 (3) 13 (1) 15 (1)

1992

53 (12)

24 (6) 13 (5) 16 (1)

1994

54 (12)

23 (4) 15 (6) 16 (2)

1995

Transplantations de moelle osseuse allogène effectuées

Bâle Genève Zurich1 Zurich2

Ville

69 (7)

20 (1) 20 (2) 29 (4)

1996

Evolution des transplantations de moelle osseuse allogène en Suisse

76 (22)

30 (9) 23 (5) 23 (8)

1997

74 (12)

34 (7) 19 (3) 21 (2)

1998

87 (17)

40 (10) 24 (4) 23 (3)

1999

110 (26)

50 (8) 23 (9) 27 (6) 10 (3)

2000

A3, Tableau 3

214

101

7 37

0 6 3 17 12 19

1994

Hôpital universitaire et hôpital pour les enfants Hirslanden

83

7 32

4 19

69

0 5 7 9 8 15

1993

0 2 2 15 13 14

1992

154

13 13

0 13 32 32 12 39

1995

Transplantations de moelle osseuse autogène effectuées

Source: SwissTransplant 2000

1 2

Total

Aarau Bâle Bellinzone Berne Genève Lausanne Meyrin Neuchâtel Pully St. Gall Zurich1 Zurich2

Ville

174

13 36

13 13 14 28 5 52

1996

Evolution des transplantations de moelle osseuse autogène en Suisse

273

23 45 2

18 37 20 30 5 85 6 2

1997

269

22 33 11 31 4 72 9 2 5 10 60 10

1998

249

18 25 10 41 4 67 11 2 1 11 51 8

1999

264

11 30 12 31 4 65 0 0 0 8 85 18

2000

A3, Tableau 4

215

Transplantations

0

10

20

30

40

50

60

1991

39

1992

37

1993

47

1994

49

1995

43

Année

1996

41

1997

35

Evolution des transplantations cardiaques en Suisse

1998

44

1999

47

2000

38

216

Transplantations

0

5

10

15

20

25

30

35

1991

1992

1

1993

15

1994

24

1995

18

Année

1996

31

1997

16

Evolution des transplantations pulmonaires en Suisse

1998

30

1999

32

2000

24

217

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

1991

28

1992

45

1993

51

1994

60

1995

47

Année

1996

67

1997

55

Evolution des transplantations hépatique en Suisse

1998

77

1999

77

2000

77

218

0

50

100

150

200

250

1991

201

1992

190

1993

208

1994

209

1995

166

A n née

19 96

175

1997

190

E vo lution des tran splan ta tio ns rén ales en Su isse

1998

201

1999

198

2000

19 3

219

0

10

20

30

40

50

60

70

80

1991

13

1992

26

1993

44

1994

38

1995

41

A nnée

1996

43

1997

53

E volution des transplantations rénales (donneurs vivants) en Suisse

1998

68

1999

63

2000

72

220

0

2

4

6

8

10

12

14

16

18

1991

2

1992

13

1993

16

1994

15

1995

8

Année

1996

6

1997

5

3

1998

Evolution des transplantations de l'ensemble rein/pancréas en Suisse

1999

4

2000

3

221

Transplantations

0

1

2

1991

1992

2

0 1993

1994

1

1995

1

Année

1996

1

1997

0

Evolution des transplantations du pancréas en Suisse

1998

1

0 1999

2000

1

222

Transplantations

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

1991

1992

1993

1994

1

1995

0

Année

1996

4

1997

2

E volution des transplantations d'îlots de L angerhans en Suisse

1998

4

1999

8

2000

8

223

Transplantations

0

20

40

60

80

100

120

1992

51

1993

51

1994

53

1995

54

A n n ée

1996

69

1997

76

1998

74

E v o lu tio n d es tra n sp lan ta tio n s d e m o elle o sseu se a llo g èn e en S u isse

1999

87

2000

110

224

Transplantations

0

50

100

150

200

250

300

1992

69

1993

83

1994

101

1995

154

A nnée

1996

174

1997

273

1998

269

E volution des transplantations de m oelle osseuse autogène en Suisse

1999

249

2000

264

A3, Tableau 5 Nombre de donneurs d'organes en Suisse entre 1990 et 2000 Année

Donneurs

Donneurs par million d'habitants

Pourcentage de donneurs multiples

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

109 106 101 113 111 91 88 100 108 101 98

16,10 15,70 14,80 16,50 15,90 13,00 12,57 14,28 15,43 14,42 14,00

52,3 59,4 67,3 69,0 78,3 73,6 81,8 75,0 76,8 87,1 76,5

Source: SwissTransplant 2000

A3, Tableau 6 Origine des donneurs d'organes Population

Suisse allemande 5 millions

Donneurs

absolu

pmi1

absolu

pmi

absolu

pmi

1996 1997 1998 1999 2000

63 62 70 55 55

13 12 14 11 11

20 30 27 33 32

12 17 16 19 19

5 8 11 13 11

17 26 37 43 37

1

Suisse romande 1,7 million

Suisse italienne 0,3 million

pmi: personne par million d'habitants

Source: SwissTransplant

225

A3, Tableau 7 Patients en liste d'attente pour une transplantation d'organe en Suisse en 2000 Organe

Nombre de patients en liste d'attente 1. Janvier 2000

Coeur 23 Coeur+poumon 0 Poumon 10 Foie 49 Foie+rein 2 Poumon+foie 1 Coeur+rein 0 Rein+îlots de Langerhans 4 Rein+pancréas 10 Pancréas p.d.1 Ilots de Langerhans 1 Rein 381 Total 1 2 3 4

4814

Nombre de transplantations d'organes en 2000

Nombre de patients en liste d'attente décédés en 2000

1. Janvier 2001

19 1 10 45 0 1 1

37 1 23 73 4 0 0

7

11 13 p.d.

5 362

4 3 1 4 252

16

4682

402

503

3 23

1

p.d.: pas de données Dont 3 enfants Dont 1 enfant Dont 5 enfants

Source: SwissTransplant 2000

A3, Tableau 8 Donneurs de moelle osseuse enregistrés en Suisse Année

Nombre de donneurs de moelle osseuse enregistrés

1988­1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

3 189 4 301 7 105 10 013 12 060 13 370 14 512 16 304 17 440

Source: Registre suisse des donneurs de moelle osseuse 2000

226

A3, Tableau 9 Donneurs de moelle osseuse enregistrés en Suisse selon les centres de don du sang (2000) Centre de don du sang

Nombre de donneurs de moelle osseuse enregistrés

Fribourg La Chaux-de-Fonds Coire Sion Lucerne Lugano Lausanne Genève Aarau Bâle1 St. Gall Berne (y.c. le laboratoire central) Zurich

279 370 518 844 975 1 116 1 147 1 302 1 404 1 512 1 692 2 775

1

3 506

Sang de cordon ombilical exclu (159 donneurs en 2000)

Source: Registre suisse des donneurs de moelle osseuse 2000

227

228

*

USA, CH, PL, CZ USA

USA

0/6

6/12 et */5

RUS, Chine CH

USA

NZ

S

Pays

Plus de 100/*

Douleurs chroniques Cellules chromaffines bovines ~100/~150 (macrocapsules) Parkinson Neurones foetaux de porc 30/30 0/36 Parkinson Cotransplantation de neurones 0/* foetaux de porc et d'une lignée cellulaire de souris (modifiées génétiquement, macrocapsules)

Cellules d'îlots foetales de lapin Sclérose latérale Lignée cellulaire Babyamyotrophique Hamster-Kidney (modifiée génétiquement, macrocapsules) Douleurs chroniques Neurones foetaux de porc

Diabète mellitus

20 */24

Cellules d'îlots de porc (microcapsules)

Diabète mellitus

Diabète mellitus

Cellules d'îlots foetales de 10/10 porc Cellules d'îlots néonatales de 6/* porc (microcapsules)

Diabète mellitus

Nombre de patients traités /planifiés

Type de cellules

Poursuite de l'étude

Bonne tolérance, amélioration des symptômes Oui cliniques Non disponibles

Phase 2/3 Phase 3 En projet

Non

*

Pas d'amélioration clinique significative

Non disponibles

Bonne tolérance, pas d'amélioration clinique significative

A court terme, réduction de l'apport exogène Non en insuline Jusqu'à 2 ans de réduction de l'apport exogène * en insuline (Résultat non publié dans une revue scientifique reconnue) Normoglycémie sans apport exogène en insu- Oui line chez 1 patient pendant 1 mois (Résultat non publié dans une revue scientifique reconnue) * *

Résultats

Phase 1 autorisée Phase 1/2

Phase 1

Phase 1/2

Phase 1

Phase 1

Phase 1/2

Phase d'étude

Etudes cliniques sur les xénotransplantations cellulaires

Maladie

A4

229

«Immunothérapie»

Insuffisance hépatique HIV

Insuffisance hépatique

Insuffisance hépatique

Insuffisance hépatique

Epilepsie Lésions de la moelle épinière Attaque cérébrale Insuffisance hépatique

Cotransplantation de neurones 0/* foetaux de porc et d'une lignée cellulaire de souris (modifiées génétiquement, macrocapsules) Neurones foetaux de porc 3/6 Cellules foetales de moelle épi- 0/6 nière de porc Neurones foetaux de porc 5/6 Cultures primaires 0/6 d'hépatocytes de porc (perfusion extracorporelle) Cultures primaires 39/39 d'hépatocytes de porc (perfu- */140 sion extracorporelle) BAL Lignée cellulaire 23/* d'hépatoblastome (perfusion extracorporelle) ELAD Cultures primaires 8/* d'hépatocytes de porc (perfusion extracorporelle) BELS Foie de porc transgénique 2/* (perfusion extracorporelle) Moelle osseuse de babouin 1/*

Chorée de Huntington

Rate de porc (perfusion extra- 100/* corporelle)

12/12

Neurones foetaux de porc

Chorée de Huntington

Nombre de patients traités /planifiés

Type de cellules

Maladie

*

Phase 1/2

USA RUS

*

Phase 1

Phase 1

Phase 1/2 Phase 2/3

Poursuite de l'étude

Traitement de soutient efficace jusqu'à la transplantation Amélioration à court terme (quelques jours) des symptômes clinique *

Traitement de soutient efficace jusqu'à la transplantation

Bonne tolérance

*

Non

*

Non

Oui

*

*

Oui

Amélioration des symptômes chez 3 patients, Non aggravation chez 7 patients, 2 patients décédés de chorée de Huntington Non disponible

Résultats

Phase 1 Non disponible Requête autori- Non disponible sée Phase 1 2 épisodes non désirés, étude interrompue Phase 1 apNon disponible prouvée

En projet

Phase 1

Phase d'étude

USA

D

USA, B, D, I, NL, ES UK

USA USA

USA USA

*

USA

Pays

Type de cellules

Nombre de patients traités /planifiés

Données non confirmées ou non disponibles

* Phase 1

Phase d'étude

CH & inter- Phase 2 national

D CH

Pays

*

* Bonne tolérance

Résultats

230

Source: Hüsing, B.; Engels, E.-M.; Gaisser, S.; Zimmer, R. (2001): Technologiefolgen-Abschätzung Zelluläre Xenotransplantation.

Bericht Nr. 39/01. Bern: Schweizerischer Wissenschafts- und Technologierat, Zentrum für Technologiefolgen-Abschätzung

*

Brûlures Peau de porc 15/* Tumeur solide méta- Vero-IL2 (lignée cellulaire de 11/10 (*) statique singe génétiquement modifiée) Mélanome malin Vero-IL2 (lignée cellulaire de */30 singe génétiquement modifiée)

Maladie

*

* *

Poursuite de l'étude

A5

Coûts des transplantations effectuées en 1999

(en millions de francs) Organe

Transplantation Assurance-maladie

Rein

9,7

Traitement postopératoire Canton

Total

8,1

17,8

35,4

Total

53,2

Rein+pancréas

0,2

0,3

0,5

0,6

1,1

Coeur

2,1

2,0

4,1

8,5

12,6

Poumon

2,4

2,4

4,8

2,3

7,1

Foie

4,8

4,8

9,6

6,0

15,6

12,9

13,8

26,7

5,2

31,9

7,9

8,0

15,9

­­

40,0

39,4

79,4

58,0

Cellules souches allogènes Cellules souches autogènes Total

15,9 137,4

Source: Rapport d'activité SVK 1999

231

A6

Dispositions concernant les prélèvements d'organes sur les personnes décédées A6, Tableau 1

Modèles de consentement selon les pays Modèle de l'opposition

Modèle de l'opposition selon la loi, en pratique modèle du consentement

Modèle du consentement

Autriche Finlande Hongrie Italie Norvège Pologne Portugal République tchèque Slovaquie Suède2

Belgique Espagne France Grèce Luxembourg

Allemagne Amérique latine Australie Canada Danemark Irlande Japon1 Nouvelle-Zélande Pays-Bas UK et Irlande du Nord USA

1

2

Le Japon est le seul pays à avoir inscrit dans la loi le modèle du consentement au sens strict: le prélèvement d'organe n'est autorisé qu'en cas d'autorisation écrite préalable de la personne décédée.

La Suède pratique le modèle de l'information.

A6, Tabelle 2 Modèles de consentement en Suisse Modèle de l'opposition

Modèle de l'information

Modèle du consentement au sens large

Appenzell R.I.

Appenzell R.E.

Fribourg Grisons Lucerne Nidwald St. Gall Thurgovie Vaud Valais Zurich1

Argovie Berne Bâle-campagne Bâle-ville Genève Neuchâtel

Jura Obwald Soleure Tessin Uri

1

232

Conformément au projet de loi sur le droit des patients du 5.12.2000, le canton de Zurich doit inscrire le modèle du consentement au sens large dans la loi.

A7

Centres et programmes de transplantation A7, Tableau 1

Centres de transplantation (CT), état 1999 Pays

Nombres de CT

Population couverte par CT en millions d'habitants

Allemagne Autriche Belgique Danemark Espagne Finlande France Italie Suède Suisse UK et Irlande du Nord USA

48 5 3 4 43 1 29 39 4 6 54 275

1,7 1,6 3,3 1,3 0,9 5 2 1,5 2,2 1,2 1,2 1,0

A7, Tableau 2 Programmes de transplantation (PT), état 1999 Pays

Nombre de PT

Population couverte par PT en millions d'habitants

Allemagne Danemark Espagne Finlande France Italie Pays-Bas Suède Suisse UK et Irlande du Nord USA

144 9 91 5 143 81 18 14 27 74 771

0,57 0,59 0,44 1,00 0,41 0,32 0,88 0,62 0,26 0,84 0,35

233

A7, Tableau 3 Couverture moyenne de la population (en millions d'habitants) Organe

Suisse

Allemagne

Autriche

Rein Rein+pancréas Coeur Poumon Foie

1,2 3,6 1,4 2,4 1,8

2,0 3,7 2,6 5,7 3,2

2,0 4,0 2,7 4,0 2,7

Source: Rapport d'activité SVK 1999

A7, Tableau 4 Programmes de transplantation en Suisse Bâle

Berne

Rein Rein+îlots de Langerhans Rein+pancréas Pancréas Coeur Coeur+poumon Foie Foie+rein Poumon Programme actifs en 2000 Source: SwissTransplant 2000

234

Genève

Lausanne

St. Gall

Zurich

A8

Rétrospective historique

Historique de la transplantation en Suisse85 1964

Première greffe rénale à partir d'un donneur décédé à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1966

Première greffe rénale à partir d'un donneur vivant à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1968

Première greffe rénale chez un patient souffrant d'un diabète mellitus à l'Hôpital cantonal de Bâle

1969

Première greffe cardiaque à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1970

Première greffe rénale pédiatrique à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1972

Découverte de la Ciclosporine A (Sandimmun), immunosuppresseur, par le Dr J.F. Borel, Sandoz, Bâle

1973

Première greffe rein-pancréas à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1973

Première greffe de moelle osseuse allogène à l'Hôpital cantonal de Bâle

1978

Première greffe rein-îlots de Langerhans à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1983

Première greffe hépatique à l'Hôpital de l'Ile à Berne

1984

Première greffe pancréatique à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1985

Première greffe rénale à partir d'un donneur non apparenté (conjoint) à l'Hôpital Universitaire de Genève

1986

Première transplantation de moelle osseuse autogène à l'Hôpital cantonal de Bâle

1987

Première greffe cardio-pulmonaire à l'Hôpital Universitaire de Genève

1989

Première greffe de foie pédiatrique avec un foie réduit à l'Hôpital Universitaire de Genève

1992

Première greffe pulmonaire à l'Hôpital Universitaire de Zurich

1992

Première greffe de foie partagé (split-liver) à l'Hôpital Universitaire de Genève

1994

Première greffe d'îlots de Langerhans associés à des poumons à l'Hôpital Universitaire de Genève

1994

Première greffe de foie auxiliaire à l'Hôpital Universitaire de Genève

1998

Première greffe d'intestin grêle de donneur vivant à l'Hôpital Universitaire de Genève

1999

Première greffe en Europe de reins «cross over» (entre 2 couples), à l'Hôpital cantonal de Bâle

1999

Première greffe multi organe (foie, pancréas, rein, intestin grêle) à l'Hôpital Universitaire de Genève

1999

Première greffe d'un lobe de foie de donneur vivant (conjoint), à l'Hôpital Universitaire de Genève

85

Source: SwissTransplant 2000.

235

1999

Première implantation d'un coeur artificiel, «micro med De Bakey LVAD» à l'Hôpital Universitaire Zurich

2000

Première greffe combinée Split-Domino-Split à l'Hôpital cantonal de Genève (1 donneur / 4 receveurs).

Historique de la transplantation dans le monde86 1933

Première greffe rénale à partir d'un donneur décédé par le Dr Voronoy, Khersov, URSS

1952

Première greffe rénale à partir d'un donneur vivant par le Prof. J. Hamburger, Paris, France

1958

Découverte du système HLA par le Prof. Dausset, Paris, France

1962

Première typisation tissulaire entre donneur et receveur par le Prof. J. Hamburger, Paris, France

1963

Première greffe hépatique par le Prof. T. Starzl, Denver, USA

1963

Première greffe pulmonaire par le Prof. J. Hardy, Mississippi, USA

1963

Première xéno-greffe d'un rein de chimpanzé sur l'homme par le Prof. K.

Reemtsma, USA

1964

Première xéno-greffe de foie d'un chimpanzé sur l'homme par le Prof. T.

Starzl, Denver, USA

1964

Première xéno-greffe de coeur d'un chimpanzé sur l'homme par le Prof. J.

Hardy, Mississippi, USA

1966

Première greffe pancréatique par le Prof. R. Lillehei, Minnesota, USA

1967

Première greffe cardiaque par le Prof. Ch. Barnard, Cape Town, Afrique du Sud

1968

Première greffe cardio-pulmonaire par le Prof. D. Cooley, Houston, USA

1978

Première greffe rein-îlots de Langerhans par le Prof F. Largiadèr, Zurich, Suisse

1984

Premier traitement clinique du rejet par Sandimmun

1984

Découverte du FK 506, immunosuppresseur, Japon

1984

Première xéno-greffe de coeur d'un babouin sur une fillette «Baby Fae» par le Prof. L. Bailey, Californie, USA

1984

Première greffe de split-liver par le Prof. H. Bismuth, Villejuif, France

1985

Première greffe d'intestin grêle par le Prof. Z. Cohen, Toronto, Canada

1987

Première greffe coeur domino à Baltimore, USA

1988

Première greffe hépato-intestinale par le Prof. D. Grandt, Toronto, Canada

1989

Premier test clinique du FK 506 chez l'homme pour la transplantation hépatique

86

236

Source: SwissTransplant 2000.

1989

Première greffe multi organe par le Prof. R. Margreiter, Innsbruck, Autriche

1998

Première allogreffe de la main et avant-bras par les Prof. J-M. Dubernard et E. Owen, Lyon, France

1999

Première implantation d'un coeur artificiel avec batterie incorporée par les Prof. R. Korfer et W. Pae, Bad Oeynhausen, Allemagne

1999

Première greffe de foies «en cascade» 1 donneur, 3 receveurs par le Prof. H.

Bismuth, Villejuif, France.

237

Table des matières Condensé

20

1 Partie générale 1.1 Situation initiale 1.1.1 La transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine 1.1.1.1 Introduction 1.1.1.2 Transplantation d'organes d'origine humaine 1.1.1.2.1 Reins 1.1.1.2.2 Coeur 1.1.1.2.3 Foie 1.1.1.2.4 Poumons 1.1.1.2.5 Pancréas 1.1.1.2.6 Intestin grêle 1.1.1.2.7 Transplantation multiple 1.1.1.2.8 Transplantation d'extrémités de membres 1.1.1.3 Transplantation de tissus d'origine humaine 1.1.1.3.1 Cornée 1.1.1.3.2 Peau 1.1.1.3.3 Cartilages et tissus osseux 1.1.1.4 Transplantation de cellules d'origine humaine 1.1.1.4.1 Cellules souches du sang 1.1.1.4.2 Cellules des îlots du pancréas 1.1.1.4.3 Cellules souches 1.1.2 Transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine animale (xénotransplantation) 1.1.2.1 Introduction 1.1.2.2 Xénotransplantation d'organes 1.1.2.3 Xénotransplantation de cellules et de tissus 1.1.2.4 La xénotransplantation en Suisse et au niveau international 1.1.3 La médecine de transplantation en Suisse 1.1.3.1 Transplantation d'organes d'origine humaine 1.1.3.2 Transplantation de tissus et de cellules d'origine humaine 1.1.3.3 Liste d'attente 1.1.3.4 Nombre de donneurs 1.1.3.5 Organisation 1.1.3.5.1 SwissTransplant 1.1.3.5.2 Registre suisse de donneurs de moelle osseuse 1.1.3.5.3 Registre de donneurs vivants 1.1.3.6 Coût des transplantations 1.1.4 Thérapies alternatives 1.1.4.1 Prévention 1.1.4.2 Traitement pharmacologique 1.1.4.3 Intervention chirurgicale 1.1.4.4 Organes artificiels 1.1.5 Situation juridique actuelle

24 24

238

24 24 25 26 27 28 29 30 31 31 32 32 32 33 33 34 34 36 36 38 38 38 41 42 43 43 44 45 45 46 46 47 48 49 50 50 51 51 51 53

1.1.5.1 Aperçu 1.1.5.2 Législations cantonales 1.1.5.3 Directives de l'Académie suisse des sciences médicales (ASSM) 1.1.5.3.1 Directives médico-éthiques pour les transplantations d'organes 1.1.5.3.2 Directives médico-éthiques concernant la transplantation de tissus foetaux humains 1.1.5.3.3 Directives sur la définition et le diagnostic de la mort en vue d'une transplantation d'organes 1.1.5.3.4 Directives concernant les problèmes éthiques aux soins intensifs 1.1.5.3.5 Principes médico-éthiques concernant les xénotransplantations 1.1.5.3.6 Importance des directives de l'ASSM 1.1.5.4 Législation en matière d'assurance-maladie 1.1.5.5 Art. 119a de la Constitution fédérale 1.1.5.6 Arrêté fédéral du 22 mars 1996 sur le contrôle du sang, des produits sanguins et des transplants 1.2 Résultats de la procédure préliminaire 1.2.1 Elaboration de l'avant-projet 1.2.2 Grandes lignes de l'avant-projet 1.2.3 Résultats de la procédure de consultation 1.2.3.1 Généralités 1.2.3.2 Résultats sur les points les plus importants 1.2.4 Remaniement de l'avant-projet par le DFI/ énumération des modifications les plus importantes 1.2.5 PubliForum sur la médecine de transplantation 1.3 Grandes lignes du projet de loi sur la transplantation 1.3.1 Prélèvement sur des personnes décédées; les modèles de consentement 1.3.1.1 Introduction 1.3.1.2 Modèle de l'opposition 1.3.1.3 Modèle du consentement 1.3.1.4 Aperçu de la réglementation appliquée dans les autres pays et situation en Suisse 1.3.1.5 Modèle de la motivation, modèle du club et système du délai d'attente qualifié 1.3.1.6 Modèle à adopter dans la loi sur la transplantation 1.3.2 Enregistrement et documentation de l'attestation du don d'organes de tissus ou de cellules 1.3.2.1 Registre des transplantations 1.3.2.1.1 Situation initiale 1.3.2.1.2 Avantages d'un registre des transplantations 1.3.2.1.3 Inconvénients d'un registre des transplantations 1.3.2.1.4 Renonciation à instaurer un registre suisse des transplantations

53 54 55 55 55 56 57 57 58 58 59 59 60 60 61 62 62 62 65 66 68 68 68 69 70 71 71 73 74 74 74 75 76 76 239

1.3.2.2 Autres possibilités de l'enregistrement et de la documentation 1.3.3 Définition de la mort, critère et constatation du décès 1.3.3.1 Introduction 1.3.3.2 Le concept de «mort cérébrale»et son évolution 1.3.3.3 Contenu du concept de «mort cérébrale» 1.3.3.3.1 Définition 1.3.3.3.2 Critère de la mort 1.3.3.3.3 Tests 1.3.3.4 Critique et problèmes concernant le concept de «mort cérébrale» 1.3.3.5 Concept de «mort cérébrale» au niveau international 1.3.3.6 Constatation du décès chez les personnes ayant subi un arrêt cardiaque irréversible 1.3.3.6.1 Situation initiale et définitions 1.3.3.6.2 Constatation du décès 1.3.3.7 Incidences sur la réglementation à adopter 1.3.3.7.1 Situation initiale 1.3.3.7.2 Avis de droit du Professeur Guillod 1.3.3.7.3 Principes à la base de la réglementation légale 1.3.3.7.4 Contenu de la réglementation légale 1.3.4 Don d'organes par des personnes vivantes 1.3.4.1 Introduction 1.3.4.2 Avantages du don d'organes par des personnes vivantes 1.3.4.3 Inconvénients du don d'organes par des personnes vivantes 1.3.4.4 Relations entre donneurs et receveurs 1.3.5 Attribution d'organes 1.3.5.1 Introduction 1.3.5.2 Attribution d'organes aujourd'hui en Suisse 1.3.5.2.1 Inscription dans la liste d'attente 1.3.5.2.2 Attribution par la centrale de coordination nationale 1.3.5.2.3 Attribution par les centres de transplantation 1.3.5.2.4 Echanges internationaux d'organes 1.3.5.2.5 Directives de l'ASSM 1.3.5.3 Réglementation appliquée par d'autres pays 1.3.5.3.1 Introduction 1.3.5.3.2 Etats-Unis 1.3.5.3.3 France 1.3.5.3.4 Allemagne 1.3.5.3.5 Pays-Bas 1.3.5.3.6 Eurotransplant 1.3.5.4 Critères de l'attribution 1.3.5.4.1 Critères médicaux 1.3.5.4.2 Critères sociaux et critères tenant aux situations individuelles 1.3.5.4.3 Conclusions 1.3.5.5 Exigences auxquelles doit satisfaire l'attribution d'organes 240

77 79 79 80 81 82 82 82 83 84 85 85 86 87 87 88 89 89 90 90 91 92 92 93 93 94 94 94 96 97 98 98 98 98 100 100 101 101 103 103 104 106 107

1.3.5.5.1 Mandat constitutionnel 1.3.5.5.2 Principe de l'attribution axée sur les besoins des patients 1.3.5.5.3 Uniformité des critères 1.3.5.5.4 Fixation des critères par le législateur 1.3.5.5.5 Définir les principes au niveau de la loi 1.3.5.5.6 Critères d'attribution et pondération de ceux-ci 1.3.5.5.7 Procédure d'attribution des organes 1.3.5.5.8 Un processus d'attribution en trois phases 1.3.5.6 Conclusions et principes de réglementation 1.3.5.6.1 Appréciation de la pratique actuelle en matière d'attribution d'organes 1.3.5.6.2 Réglementation de l'avant-projet et résultats de la consultation; appréciation des arguments des opposants à une attribution centralisée 1.3.5.6.3 Définition des principes au niveau de la loi et incidences sur la pratique actuelle 1.3.6 Centres de transplantation 1.3.6.1 Introduction 1.3.6.2 Les centres de transplantation et programmes de transplantation en Suisse et au niveau international 1.3.6.3 Limitation du nombre de centres de transplantation pour des raisons de qualité et de coûts 1.3.6.3.1 Qualité 1.3.6.3.2 Coûts 1.3.6.3.3 Efforts au niveau international 1.3.6.3.4 Efforts en Suisse 1.3.6.3.5 Conséquences pour la réglementation légale 1.3.7 Transplantation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine 1.3.7.1 Introduction 1.3.7.2 Transplantation de tissus nerveux issus de foetus 1.3.7.3 Pratique suivie en Suisse 1.3.7.4 Inconvénients, problèmes et craintes 1.3.7.5 Principes à respecter dans la réglementation 1.3.8 Xénotransplantation 1.3.8.1 Introduction 1.3.8.2 Responsabilité 1.3.8.3 Protection des animaux 1.4 Classement d'interventions parlementaires 2 Partie spéciale Commentaire article par article 2.1 Systématique 2.2 Préambule 2.3 Chapitre 1 Dispositions générales 2.3.1 Art. 1 But 2.3.2 Art. 2 Champ d'application

107 107 107 107 108 108 109 110 111 111

111 112 113 113 113 114 114 115 116 117 119 120 120 120 122 122 123 123 123 124 127 127 128 128 128 129 129 130

241

2.3.3 Art. 3 Définitions 2.3.4 Art. 4 Devoir général de diligence 2.3.5 Art. 5 Prélèvements à des fins autres que la transplantation 2.4 Chapitre 2 Organes tissus et cellules d'origine humaine 2.4.1 Section 1 Gratuité et interdiction de faire le commerce 2.4.1.1 Art. 6 Gratuité du don 2.4.1.2 Art. 7 Interdiction de faire le commerce 2.4.2 Section 2 Prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes décédées 2.4.2.1 Art. 8 Conditions du prélèvement 2.4.2.2 Art. 9 Critère du décès et constatation du décès 2.4.2.3 Art. 10 Mesures médicales préparatoires 2.4.2.4 Art. 11 Indépendance du personnel soignant 2.4.3 Section 3 Prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules sur des personnes vivantes 2.4.3.1 Art. 12 Conditions du prélèvement 2.4.3.2 Art. 13 Protection des personnes mineures ou incapables de discernement 2.4.3.3 Art. 14 Prescriptions du Conseil fédéral 2.4.4 Section 4 Attribution d'organes 2.4.4.1 Art. 15 Champ d'application 2.4.4.2 Art. 16 Non discrimination 2.4.4.3 Art. 17 Critères déterminants 2.4.4.4 Art. 18 Service national des attributions 2.4.4.5 Art. 19 Communication des patients en vue d'une transplantation 2.4.4.6 Art. 20 Liste d'attente 2.4.4.7 Art. 21 Communication des donneurs 2.4.4.8 Art. 22 Echange d'organes avec l'étranger 2.4.5 Section 5 Prélèvement, stockage, importation, exportation et préparation 2.4.5.1 Art. 23 Obligation d'annoncer les prélèvements 2.4.5.2 Art. 24 Régime de l'autorisation pour le stockage, l'importation et l'exportation 2.4.5.3 Art. 25 Préparation 2.4.6 Section 6 Transplantation 2.4.6.1 Art. 26 Régime de l'autorisation 2.4.6.2 Art. 27 Limitation du nombre des centres de transplantation 2.4.6.3 Art. 28 Obligation d'annoncer 2.4.7 Section 7 Devoirs de diligence 2.4.7.1 Art. 29 Donneurs exclus 2.4.7.2 Art. 30 Obligation d'effectuer des tests 2.4.7.3 Art. 31 Elimination et inactivation des agents pathogènes 2.4.7.4 Art. 32 Etiquetage obligatoire 2.4.7.5 Art. 33 Obligation d'enregistrer et traçabilité 2.4.7.6 Art. 34 Obligation de conserver les enregistrements et les documents

242

131 133 133 134 134 134 135 136 136 137 139 141 141 141 143 144 145 145 146 146 149 150 150 151 151 152 152 152 153 153 153 154 155 155 155 155 156 156 156 157

2.4.8 Section 8 Essais cliniques 2.4.8.1 Art. 35 2.4.9 Section 9 Utilisation de tissus ou de cellules issus d'embryons ou de foetus d'origine humaine 2.4.9.1 Art. 36 Principe et interdictions 2.4.9.2 Art. 37 Régime de l'autorisation 2.4.9.3 Art. 38 Information et consentement de la donneuse 2.4.9.4 Art. 39 Indépendance du personnel soignant 2.4.9.5 Art. 40 Prescriptions du Conseil fédéral 2.5 Chapitre 3 Organes, tissus et cellules d'origine animale 2.5.1 Art. 41 Régime de l'autorisation 2.5.2 Art. 42 Devoirs du titulaire de l'autorisation 2.5.3 Art. 43 Tests obligatoires 2.5.4 Art. 44 Sûretés 2.5.5 Art. 45 Coûts des mesures administratives 2.5.6 Art. 46 Prescriptions du Conseil fédéral 2.6 Chapitre 4 Transplants standardisés 2.6.1 Art. 47 2.7 Chapitre 5 Exécution 2.7.1 Section 1 Confédération 2.7.1.1 Art. 48 Principe 2.7.1.2 Art. 49 Surveillance 2.7.1.3 Art. 50 Coopération internationale 2.7.1.4 Art. 51 Perfectionnement professionnel et formation continue du personnel médical 2.7.1.5 Art. 52 Délégation de tâches d'exécution 2.7.1.6 Art. 53 Evaluations 2.7.2 Section 2 Cantons 2.7.2.1 Art. 54 Organisation et coordination 2.7.3 Section 3 Obligation de garder le secret et communication des données 2.7.3.1 Art. 55 Obligation de garder le secret 2.7.3.2 Art. 56 Confidentialité des données 2.7.3.3 Art. 57 Communication des données 2.7.3.4 Art. 58 Echange de données avec les autorités étrangères et les organisations internationales 2.7.4 Section 4 Information du public 2.7.4.1 Art. 59 2.7.5 Section 5 Registre des cellules souches 2.7.5.1 Art. 60 2.7.6 Section 6 Contrôle et mesures 2.7.6.1 Art. 61 Contrôle 2.7.6.2 Art. 62 Obligation de collaborer 2.7.6.3 Art. 63 Mesures 2.7.7 Section 7 Financement 2.7.7.1 Art. 64 Répartition des tâches 2.7.7.2 Art. 65 Emoluments

157 157 158 158 159 160 160 160 161 161 162 163 164 164 165 167 167 168 168 168 168 168 169 170 171 171 171 172 172 173 173 174 174 174 176 176 177 177 177 177 178 178 179 243

2.8 Chapitre 6 Dispositions pénales 2.8.1 Art. 66 Délits 2.8.2 Art. 67 Contraventions 2.8.3 Art. 68 Compétence et droit pénal administratif 2.9 Chapitre 7 Dispositions finales 2.9.1 Art. 69 Abrogation et modification du droit en vigueur 2.9.2 Art. 70 Disposition transitoire 2.9.3 Art. 71 Référendum et entrée en vigueur

179 179 180 180 181 181 182 183

3 Conséquences 3.1 Conséquences financières et effets sur l'état du personnel 3.1.1 Pour la Confédération 3.1.2 Pour les cantons et les communes 3.2 Conséquences dans le domaine de l'informatique 3.3 Conséquences sur l'économie 3.4 Autres conséquences 3.4.1 Conséquences pour la population 3.4.2 Conséquences pour les donneurs et les receveurs 3.4.3 Conséquences pour les personnes pratiquant des transplantations 3.5 Conséquences pour la Principauté du Liechtenstein

183 183 183 188 188 188 189 189 189 190 190

4 Programme de la législature

191

5 Rapport avec le droit européen 191 5.1 Conseil de l'Europe 191 5.1.1 Transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine 191 5.1.1.1 Décisions et recommandations 191 5.1.1.2 Convention du Conseil de l'Europe sur les droits de l'homme et la biomédecine (Convention sur la bioéthique) et Protocole additionnel relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine 193 5.1.2 Xénotransplantation 197 5.2 Union européenne 197 5.2.1 Transplantation d'organes, de tissus et de cellules d'origine humaine 197 5.2.2 Xénotransplantation 198 6 Bases légales 6.1 Constitutionnalité 6.2 Délégation de compétences législatives

199 199 199

Loi sur la transplantation (projet)

227

244

Annexes A1

Glossaire

200

A2

Activités de transplantation internationales

205

Tableau 1

Aperçu des transplantations d'organes effectuées en 1999 (chiffres absolus)

Tableau 2

Aperçu des transplantations d'organes effectuées en 1999 par millions d'habitants

Tableau 3

Nombre de donneurs vivants d'organes en Europe et outre-mer en 1999

Tableau 4

Taux de survie des allotransplants un et cinq ans après la transplantation aux USA

A3

Activités de transplantation en Suisse

Tableau 1

Activités de transplantation dans les six centres de transplantation de Suisse en 2000

Tableau 2

Evolution des transplantations d'organe et de moelle osseuse en Suisse (données des diagrammes suivants)

Tableau 3

Evolution des transplantations de moelle osseuse allogène en Suisse

211

Tableau 4

Evolution des transplantations de moelle osseuse autogène en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations cardiaques en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations pulmonaires en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations hépatiques en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations rénales en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations rénales (donneurs vivants) en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations de l'ensemble rein/pancréas en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations du pancréas en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations des îlots de Langerhans

Diagramme

Evolution des transplantations de moelle osseuse allogène en Suisse

Diagramme

Evolution des transplantations de moelle osseuse autogène en Suisse

Tableau 5

Nombre de donneurs d'organes en Suisse 1990­2000

Tableau 6

Origine des donneurs d'organes

Tableau 7

Patients en liste d'attente pour une transplantation d'organe en Suisse 2000

Tableau 8

Donneurs de moelle osseuse enregistrés en Suisse

Tableau 9

Donneurs de moelle osseuse enregistrés en Suisse d'après les centres de don du sang (2000)

245

A4

Etudes cliniques sur les xénotransplantations cellulaires

228

A5

Coûts des transplantations effectuées en 1999

231

A6

Dispositions concernant les prélèvements d'organes sur des personnes décédées

232

Tableau 1

Modèles de consentement au niveau international

Tableau 2

Modèles de consentement en Suisse

A7

Centres et programmes de transplantation

Tableau 1

Centres de transplantation (CT), état 1999

Tableau 2

Programmes de transplantation (PT), état 1999

Tableau 3

Couverture moyenne de la population

Tableau 4

Programme de transplantation en Suisse

A8

Rétrospective historique

246

233

235