Paiements de la Confédération en faveur de l'agriculture ­ une analyse des bénéficiaires des principaux types de paiement Rapport de la Commission de gestion du Conseil des Etats du 3 juillet 2001

Rapport 1

Introduction

1.1

Situation de départ

Les objectifs que poursuit la nouvelle politique agricole depuis 1993 sont multiples et servent les intérêts publics les plus divers. Ainsi, conformément à l'art. 104 de la Constitution fédérale, la Confédération veille à ce que l'agriculture, par une production répondant à la fois aux exigences du développement durable et à celles du marché, contribue substantiellement à la sécurité de l'approvisionnement de la population, à la conservation des ressources naturelles, à l'entretien du paysage rural et à l'occupation décentralisée du territoire.

Cependant, l'adaptation du secteur agricole aux exigences du marché ne semble pas avoir entraîné un allégement des paiements de l'Etat à ce secteur. Les dépenses de la Confédération pour l'agriculture et l'alimentation ont augmenté de 22,9 % entre 1993 et 1999 (année examinée par ce rapport) (1993: 3,416 milliards de francs et 1999: 4,197 milliards de francs). Parallèlement, la dernière décennie a montré une tendance à la baisse du revenu net provenant de l'activité agricole. Alors que les prix à la production baissent constamment depuis le début des années 90, l'indice des prix à la consommation des denrées alimentaires a, au cours de la période considérée, légèrement augmenté.

Le maintien du statut des paysans participe de l'intérêt public, en raison notamment des prestations fournies par ce secteur dans l'intérêt général. Ce maintien est cependant soumis à une condition, à savoir que les entreprises agricoles satisfaisant aux normes de durabilité et de rentabilité, puissent dégager un revenu comparable à celui du reste de la population active. Une partie du revenu agricole provient des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture. Mais l'effet de revenu de ces paiements n'est qu'un aspect. Les différents instruments mis en oeuvre visent primordialment d'autres objectifs. On parle de multifonctionnalité de l'agriculture.

Les mesures de politique agricole relèvent des trois domaines suivants: paiements directs, production et ventes, amélioration des bases. Les paiements directs visent à encourager les prestations fournies dans l'intérêt général, comme l'entretien du paysage rural, la conservation des ressources naturelles, l'occupation de parties décentralisées du territoire ou de parties de moindre intérêt au plan économique et les prestations écologiques particulières. Les mesures prises dans le domaine de la production et des ventes visent à créer de bonnes conditions-cadre pour la

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production et la vente de denrées alimentaires. Quant aux mesures concernant l'amélioration des bases, elles ont pour objectif une production efficiente, sûre et respectueuse de l'environnement des denrées alimentaires. Composante de toutes ces mesures agricoles1, les paiements de l'Etat jouent un rôle central dans la mise en oeuvre par la Confédération des conditions nécessaires pour atteindre ces objectifs.

Chaque domaine dispose d'instruments de paiement qui lui sont propres et qui, à leur tour, servent des sous-objectifs spécifiques. Le droit au paiement, légalement défini, varie aussi d'un instrument à l'autre. Ainsi, faut-il tenir compte du profil du bénéficiaire lors de l'examen de la conformité du versement avec le droit. Dès lors, le profil du bénéficiaire est extrêmement important, eu égard notamment aux fonctions d'incitation des divers instruments de paiement. Le paiement doit encourager un certain comportement du bénéficiaire qui, conjuguée aux autres mesures de politique agricole, doit contribuer à atteindre les objectifs mentionnés précédemment. Il est donc logique que la constatation et le suivi de l'effet d'un type de paiement passe par l'analyse de l'acteur, autrement dit du bénéficiaire.

Or, jusqu'à présent, l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG), dans son activité et ses rapports, n'a pas fait grand cas du point de vue axé sur les bénéficiaires des paiements étatiques en faveur de l'agriculture. Dans le cadre des mesures de politique agricole, l'accent a été mis surtout sur le point de vue axé sur les paiements, ou plus exactement sur les types de paiement, et sur leur efficacité à atteindre les objectifs fixés. En raison du fédéralisme, de nombreuses tâches d'exécution sont déléguées aux cantons de sorte que l'OFAG n'a qu'une vue générale.

La seule exception à cette situation est celle des exploitations-témoins, dont la station de recherches de Tänikon (FAT) de l'unité Recherche agronomique de l'Office fédéral de l'agriculture a évalué les résultats comptables sur la base du dépouillement centralisé. Cependant l'approche se concentre sur la situation de revenu de ces exploitations2. En outre, au moment où débutait la présente analyse, cette sélection d'exploitations ne permettait aucune extrapolation de la validité de ces observations3.

La Commission de gestion est
consciente que l'agriculture et la politique agricole sont en pleine mutation. La nouvelle loi sur l'agriculture (LAgr)4, en vigueur depuis le 1er janvier 1999, s'engage sur une nouvelle voie et comporte des dispositions transitoires qui déploient leurs effets au cours de l'examen décrit ci-après. La LAgr prévoit aussi l'évaluation des conséquences de certaines mesures sous cinq ans5.

1.2

Travaux antérieurs des Commissions de gestion

Dans les années 90, les Commissions de gestion ne se sont penchées que de façon ponctuelle sur la politique agricole. Ainsi, en 1996, la sous-commission commune «Placement du fromage» des Commissions des finances et des Commissions de gestion a publié un rapport relatif à la pratique de l'Union suisse du commerce de 1 2 3 4 5

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Les mesures agricoles comportent non seulement les paiements de l'Etat mais aussi d'autres mesures comme les réglementations douanières, etc.

Les chiffres actuels, limités à l'effet de revenu des paiements directs, se trouvent dans le Rapport agricole 2000, p. A40­A43.

Voir Rapport agricole 2000, p. 52. La sélections'est améliorée depuis.

Loi fédérale du 29 avril 1998 sur l'agriculture (Loi sur l'agriculture, LAgr; RS 910.1).

Voir art. 187, al. 13, LAgr.

fromage SA en matière de subventions (96.029). Les effets de la pratique en matière de subvention à l'exportation des fromages à pâte dure y sont développés mais cette problématique a, en raison des accords bilatéraux, perdu en importance, les subventions de l'exportation de fromages dans l'UE étant appelées à disparaître progressivement. Mais la demande d'une transparence accrue dans la formation des prix des fromages formulée à l'époque est à nouveau d'actualité, comme le montrent les explications qui vont suivre.

Par ailleurs, en 1993/1994, la Commission de gestion du Conseil national s'est occupée de certains paiements directs et des paiements laitiers dans le cadre d'une requête à l'autorité de surveillance déposée contre l'initiative des paysans et des consommateurs6. Il s'agissait notamment de la condition légale de l'exploitation des sols assortie aux paiements directs et de l'effet des paiements directs écologiques.

Sur ce dernier point, aucune conclusion n'a pu être tirée, mais, déjà à cette époque, le rapport reconnaissait l'importance de l'analyse des effets des paiements effectués dans le cadre de la politique agricole, importance qui va être à nouveau soulignée dans le présent rapport.

1.3

Mission et objectif de l'inspection

Au vu de la situation décrite ci-dessus et en raison des paiements annuels considérables de la Confédération relevant de la politique agricole, les Commissions de gestion ont décidé, lors du séminaire des 28 et 29 janvier 1999, de procéder à une évaluation sur le thème des «Flux financiers de la politique agricole». Pour ce faire, le groupe de travail «politique agricole» de la Commission de gestion du Conseil des Etats a été mis sur pied. La composition du groupe a subi diverses modifications, en raison surtout du changement de législature. A l'origine, il se composait des députés au Conseil des Etats Pierre Aeby (membre et président durant la législature 1995­ 1999), Rolf Büttiker (législature 1995­1999), Peter Bieri (président à partir de la législature 2000­2003), Hans Hess, Peter-Josef Schallberger (législature 1995­ 1999) et Bernhard Seiler (législature 1995­1999). Ensuite, à partir de la législature 2000­2003, le groupe a compté les nouveaux membres suivants: les députés au Conseil des Etats Hans Hofmann, Filippo Lombardi ­ relayé par Michel Béguelin ­ et Jean Studer.

L'inspection avait pour but de donner à la Commission de gestion du Conseil des Etats des réponses aux questions suivantes: ­

De quelle manière les paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture sont-ils versés aux bénéficiaires?

­

Qui reçoit les paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture?

­

Dans quelle proportion les différentes catégories de bénéficiaires reçoiventelles ces paiements?

L'examen des deux premières questions s'entend dans le sens d'un contrôle d'exécution. Ce n'est que lorsque le bénéficiaire présente certaines caractéristiques qu'il a droit au paiement. En plus de la légitimité, les réponses à ces trois questions permettent, dans le cadre de l'approche retenue, de savoir si les paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture profitent réellement aux groupes cibles visés par la politi6

Rapport du 28 mai 1994 de la Commission de gestion du Conseil national.

733

que agricole. Le cas échéant, cette politique devrait être examinée et adaptée sur la base des connaissances acquises.

Après l'identification des bénéficiaires des paiements, la question des effets des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture devait être traitée dans une deuxième partie de l'analyse. Dans un premier temps, il convenait d'analyser l'effet spécifique d'un type de paiement et, sur cette base, l'effet général des paiements de l'Etat sur les bénéficiaires compte tenu des objectifs fixés. Dans un second temps, une analyse des bénéficiaires et des effets indirects des paiements de l'Etat, tels que l'incidence des paiements directs liés aux surfaces sur les baux à ferme, était prévue. Car dans l'approche choisie ici, seules les analyses des effets sur les bénéficiaires individuels ou sur certaines catégories de bénéficiaires permettent de mener une évaluation complète des paiements de l'Etat dans la perspective des objectifs de la politique agricole.

Pour des raisons de faisabilité, le groupe de travail a décidé de se limiter, dans chacun des grands domaines de paiement, à l'analyse du type de paiement principal. Il s'agit donc, pour les paiements directs, des paiements directs généraux, dans le domaine de la production et des ventes de l'économie laitière et, dans le domaine de l'amélioration des bases, des contributions non remboursables pour les améliorations structurelles. Cette sélection recouvre quelque 75 % des paiements de l'Etat versés en faveur de l'agriculture pour l'année 1999, soit un montant de 2518 millions de francs7. Inclure les autres types de paiement aurait surpassé les ressources à disposition. Dans une seconde analyse, les paiements directs écologiques ont également été pris en compte8. En raison des données à disposition, l'examen a été limité à l'année 19999. Il s'agit donc d'un instantané de la situation qui, considéré en soi, ne permet d'entrevoir aucune évolution du secteur agricole ou des secteurs qui lui sont liés. Aussi, pour des raisons de capacités, l'analyse des effets n'est ici qu'à ses débuts. Comme dernier critère, la Commission de gestion s'est concentrée exclusivement sur les paiements de la Confédération et a donc exclu de l'examen les paiements des cantons en faveur de l'agriculture.

1.4

Déroulement

Début mai 1999, sur mandat de la Commission de gestion, l'Organe parlementaire de contrôle de l'administration (OPCA) a commencé à élaborer la partie scientifique de l'étude. Pour la partie financière, l'OPCA a choisi la méthode de l'analyse des flux financiers. Tout au long de l'étude, elle a eu des contacts avec l'OFAG, l'Office fédéral de la statistique (OFS), la FAT, l'Institut d'économie rurale (IAW) de l'EPFZ et divers autres services. Il s'est avéré que la structure des données existante ne permettait pas un examen axé sur les bénéficiaires. L'OPCA a donc été amené à élaborer sa propre base de données en recourant aux services d'une société privée.

Pour alimenter cette base de données, l'OFAG, l'OFS, la Fiduciaire de l'économie 7

8 9

734

Base de calcul: budget OFAG 1999 selon le message du 18 novembre 1998 concernant un arrêté fédéral sur les moyens financiers destinés à l'agriculture pour les années 2000 à 2003 (FF 1999 1477).

De la sorte, quelque 86 % des paiements de l'Etat ont été considérés. Mais, les résultats n'ont subi qu'une légère modification (voir Rapport final de l'OPCA p. 45, note 65).

Pour ce qui est des paiements laitiers (économie laitière), l'examen s'est référé à l'année laitière. Concrètement, il s'agit des paiements versés entre mai 1999 et avril 2000.

laitière et le service administratif chargé du contingentement laitier ont été sollicités.

La base de données contient 61 084 exploitations agricoles, soit près de 83 % du total. Vu la durée de ce travail, il a fallu adapter les objectifs visés par l'examen aux ressources à disposition. Résultat: le groupe de travail a pratiquement dû renoncer à analyser les effets des paiements de l'Etat. Dès lors que la première version du rapport final de l'OPCA reposait encore en partie sur des données datant de 1998, le groupe de travail a décidé de mettre ces données à jour, de sorte qu'à présent, le rapport se fonde sur la nouvelle législation agricole et sur les chiffres les plus récents10. L'OPCA a livré son rapport final actualisé le 26 février 2001.

Le groupe de travail «politique agricole» du Conseil des Etats s'est réuni à huit reprises entre le 4 mai 1999 et le 29 mai 2001. Une discussion avec Hans Burger (ancien directeur de l'OFAG) a aussi eu lieu à propos d'une version antérieure de l'étude de l'OPCA.

En raison surtout du rapport final de l'OPCA, mais aussi compte tenu du rapport agricole 2000 paru la même année et des conclusions tirées des entretiens avec Monsieur Burger, le groupe de travail a rédigé le présent rapport. Le 29 mai 2001, le chef du Département fédéral de l'économie et le directeur de l'OFAG ont eu l'occasion de se prononcer sur le projet du rapport. Le 3 juillet 2001, le rapport du groupe de travail a ensuite été traité par la CdG-E qui l'a approuvé à l'unanimité. A cette occasion, elle a également décidé de le publier conjointement avec le rapport de l'OPCA.

La Commission de gestion du Conseil des Etats souhaite remercier tous les participants pour leur apport et leur concours actif à ces travaux.

2

Résultats du rapport final de l'OPCA

Ce chapitre présente, de manière résumée, les principaux résultats du rapport final de l'OPCA.

2.1

Formes organisationnelles des versements

La procédure qui va de la demande au versement d'un paiement relevant de la politique agricole, varie d'un type de paiement à l'autre. Les procédures obéissent aux règles d'exécution d'une organisation décentralisée et sont souvent dues au fédéralisme. Au vu de la représentation détaillée de ces procédures dans le rapport final de l'OPCA et compte tenu de la problématique des données développée ci-après, les explications suivantes se concentrent avant tout sur la description des services impliqués et, succinctement, sur les données que ces dernières utilisent.

S'agissant des paiements directs généraux, en plus de l'organe communal chargé des relevés, l'autorité cantonale compétente et l'OFAG sont aussi impliqués dans la procédure. L'office cantonal détermine le droit au paiement du requérant. Les données relevées à cette occasion portant sur les structures de l'exploitation requérante sont transmises à l'OFAG sous forme de liste de paiements et de liste

10

La mise à jour n'a pas entraîné de grands écarts dans les résultats.

735

récapitulative. L'OFAG contrôle cette dernière au moyen de tests de plausibilité. Il effectue ensuite le paiement aux administrations financières cantonales qui, à leur tour, transfèrent les montants correspondants aux bénéficiaires.

Dans la procédure relative aux paiements laitiers, la Fiduciaire de l'économie laitière joue un rôle central. Elle est en contact avec le requérant et soumet la demande à un test de plausibilité avant que l'OFAG, sur la base de listes de paiements, ne décide du versement. Les suppléments sont reversés aux producteurs par les entreprises intermédiaires. Le service administratif chargé du contingentement laitier et douze commissions régionales de recours effectuent d'autres tâches exécutives et de contrôle. Ces institutions agissent et sont rémunérées sur la base de mandats de prestations de l'OFAG. Dans ce sens, elles représentent un groupe de bénéficiaires des mesures de politique agricole et peuvent être qualifiées d'organismes d'exécution privés.

Les contributions non remboursables en faveur de l'amélioration des structures sont versées en complément aux contributions cantonales. Par conséquent, la demande est adressée à l'autorité cantonale compétente qui, dans certains cas, doit solliciter l'avis de l'OFAG (pour les demandes dépassant 100 000 francs). Après publication et approbation du projet par le canton, l'autorité cantonale demande à l'OFAG le versement des contributions de la Confédération. Si le montant est inférieur, les cantons sont compétents pour l'examen.

2.2

Types de paiement et leurs bénéficiaires

2.2.1

Du point de vue du type de paiement

L'OPCA a examiné, dans un premier temps, qui sont les bénéficiaires des paiements directs généraux, des paiements laitiers et des contributions en faveur de l'amélioration des structures. Il a commencé par établir des catégories de bénéficiaires et par déterminer le montant des paiements reçu par chacune.

Les paiements directs généraux qui s'élèvent à 1776,5 millions de francs, ont été versés exclusivement aux entreprises paysannes exploitant le sol, ce qui correspond aux prescriptions de l'art. 70 LAgr.

Les paiements laitiers analysés, d'une valeur de 667,7 millions de francs, se répartissent en deux catégories. Dans la première, des suppléments sont versés aux producteurs de lait dont le lait est transformé en fromage. Ces suppléments représentent une contribution de l'Etat aux frais de production et diminuent ainsi ceux que le producteur doit couvrir lui-même. La deuxième catégorie se compose d'aides. Celles-ci ont pour but d'augmenter la demande de lait en diminuant le coût de la transformation du lait ou en rendant la vente de produits laitiers plus avantageuse. Pour l'année 1999, le montant des aides atteignait 433 millions de francs.

736

Bénéficiaire:

Fabrication / production de:

1999/montant total des aides

Entreprises de valorisa- Beurre de choix et des mélanges de beurre 30,38% tion du lait11 (fabrication et vente dans leur propre entreprise) Entreprises d'exportation11

Exportation de fromages dans les pays de l'UE

27,83%

Entreprises d'exportation11

Exportation de fromages dans des pays ne faisant pas partie de l'UE

10,65%

Entreprises d'exportation12

Exportation d'autres produits laitiers fabri- 7,95% qués en Suisse

Entreprises d'exportation11

Certaines fromageries

7,16%

Entreprises de valorisa- Protéines de lait industrielles et succédanés 5,92% tion du lait12 12 du lait Entreprises d'exportation11

Entreprises de perfectionnement (chocolat et des produits semblables)

5,3%

Entreprises de valorisa- Glaces et beurre déshydraté dans leur tion et de perfectionne- propre entreprise ment du lait12

3,14%

Exploitations d'engraissement12

1,04%

Affouragement de porcs ou de veaux

Fromageries, production durant le semestre d'été de fromage en zone d'ensilage11 Fromageries11

0,41%

regroupement de la production de fromage 0,22%

Ces paiements sont prévus jusqu'en 2002 (2004 pour les paiements en rapport avec la production et la vente de beurre).

En plus des organisations privées chargées de certaines tâches d'exécution déjà mentionnées, les bénéficiaires des paiements laitiers sont les exploitations agricoles qui produisent du lait ou utilisent du lait écrémé pour l'affouragement d'animaux à l'engrais, les entreprises de valorisation et de perfectionnement du lait ainsi que les entreprises d'exportation. En 1999, des 667,7 millions de francs que constituaient 11 12

Ordonnance du 7 décembre 1998 concernant la réorganisation du marché laitier (Ordonnance de transition dans le domaine du lait; RS 916.350.0).

Ordonnance du 7 décembre 1998 concernant le prix-cible, les suppléments et les aides dans le domaine du lait (Ordonnance sur le soutien du prix du lait, OSL; RS 916.350.2)

737

les paiements laitiers, les bénéficiaires agricoles ont reçu 35 % (233,7 millions de francs), les bénéficiaires non agricoles 64,2 % (428,5 millions de francs: entreprises d'exportation 201 millions; entreprises de valorisation 190,8 millions; entreprises de perfectionnement 36,5 millions) et les organisations privées 0,82 % (5,5 millions de francs).

Les contributions non remboursables en faveur de l'amélioration des structures, d'une valeur de 74 millions de francs, se répartissent entre les mesures individuelles et collectives d'une part et les contributions en faveur des bâtiments agricoles et des améliorations foncières de l'autre. Les bénéficiaires sont d'horizons divers: exploitations agricoles, communes municipales, communautés obligatoires13, corporations, sociétés simples, communes bourgeoises, institutions de recherche, pour ne citer qu'elles. En gros, les bénéficiaires et les flux financiers se divisent en bénéficiaires agricoles individuels (22 millions de francs, soit 30 %) ainsi que bénéficiaires non agricoles et bénéficiaires agricoles collectifs (52 millions de francs, soit 70 %). La part des bénéficiaires agricoles, dans la dernière catégorie, ne peut être déterminée avec précision en raison d'un manque de données expliqué plus bas.

Ainsi l'OPCA a constaté que 81 % des paiements examinés sont versés aux exploitations agricoles, 17 % à des bénéficiaires non agricoles et que les paiements aux organisations privées sont pratiquement inexistants. Les données dont disposait L'OPCA ne lui ont pas permis d'attribuer les 2% restants.

2.2.2

Profil des bénéficiaires agricoles et montants des paiements reçus

Rappelons que l'objectif essentiel de l'analyse était d'identifier les bénéficiaires avec plus de précision et de mesurer, du point de vue du bénéficiaire, le montant des paiements agricoles reçu. A cette fin les bénéficiaires agricoles ont été classés compte tenu des critères suivants: ­

Exploitation à titre principal ou accessoire

­

Superficie exploitable

­

Forme juridique de l'exploitation

­

Age de l'exploitant

­

Main d'oeuvre

­

Structure de production

­

Région de production

­

Mode de production

Les paiements de l'Etat ont ensuite été attribués à ces différentes catégories et saisis dans la base de données.

13

738

Les communautés obligatoires sont exclusivement composées de propriétaires fonciers.

Une telle communauté se constitue pratiquement toujours dans le cadre d'une réorganisation de la propriété foncière et des rapports d'affermage à l'occasion d'un projet d'amélioration intégrale ou d'un remaniement parcellaire.

L'OPCA a opéré un choix parmi les évaluations possibles grâce à la base de données. Dans le sens d'un contrôle d'exécution, la première série d'évaluations met relativement peu de cas flous en évidence. Il peut ainsi être constaté que la qualité d'exécution est bonne. Ces cas découverts peuvent être classés dans quatre catégories: 1.

Dans 138 cas, le bénéficiaire avait dépassé l'âge prescrit par la loi. Des paiements directs d'une valeur de 3,9 millions de francs sont concernés (2,2 des paiements directs examinés).

2.

Dans 189 cas, des paiements directs ont été versés à des exploitations présentant un besoin en travail inférieur au minimum légal de 0,3 unité de main d'oeuvre standard (UMOS). En l'espèce, les paiements s'élèvent à 388 813 francs (0,2 des paiements directs examinés).

3.

Dans 380 cas le montant maximal légal affecté à des paiements directs par UMOS a été dépassé 14.

4.

Dans 756 cas, la contribution à la surface a dépassé la valeur maximale fixée par la loi. 36 entreprises ont été trouvées sans surface. Selon l'ordonnance sur les paiements directs (OPD), ces entreprises n'ont pas droit à la contribution. Ces paiements s'élèvent à 2,5 millions de francs (1,4 des paiements directs examinés)

Ces résultats ne signifient pas que les contributions ont été versées de façon non conforme à la loi ou à l'ordonnance. Comme l'a expliqué l'OFAG, de tels cas peuvent survenir pour diverses raisons, sans que la loi soit enfreinte. Ainsi dans la première catégorie (problème de limite d'âge), il se peut qu'un changement d'exploitant soit intervenu. Il existe aussi des contributions versées après coup pour l'année précédente. Etant donné qu'au sein de l'OFAG, la tâche de recueil des données et l'examen de leurs plausibilité est séparée de celle du versement, l'office n'est pas capable de clarifier seul les cas inexplicables. Ces cas doivent être éclaircis par l'OFAG dans le cadre d'une procédure de correction des différences avec les cantons. En été 2000, alors que l'OPCA récoltait ces données, l'OFAG n'était pas encore en mesure de donner une explication concrète de ces cas. Toutefois, lors de la séance du 29 mai 2001, ce dernier a été en mesure confirmer que les cas en suspens concernant les exigences relatives à la limite d'âge et aux UMOS ont pu être réglés sans qu'aucune violation de la loi n'ait dû être constatée.

Dans un second temps, dans la perspective d'une identification plus précise des bénéficiaires des paiements de l'Etat, l'OPCA a cherché à savoir quelles exploitations agricoles recevaient quelles subventions de l'Etat au titre des types de paiement analysés. Le nombre d'exploitations a d'abord été divisé en trois tiers en fonction des montants de paiement reçus. Puis la fréquence des critères structurels dans chaque tiers a été définie. Ensuite une évaluation a été faite pour savoir comment les exploitations présentant un critère structurel précis se répartissent sur ces trois tiers15.

Dans un troisième temps, cette question a été examinée sous un autre angle. Le montant de paiement par exploitation a été divisé par le nombre d'hectares de l'exploitation. Ce montant des paiements de l'Etat par hectare a induit à son tour la 14 15

Pour des raisons techniques liées à la base de données, l'OPCA n'a pas pu déterminer le montant des paiements.

Les résultats figurent au chap. 6.2 du rapport final de l'OPCA.

739

répartition des exploitations en tiers, où elles ont été examinées selon les mêmes critères qu'à la deuxième étape16.

2.2.3

Identification des bénéficiaires non agricoles et montant des paiements reçus

Dans le domaine des paiements laitiers: Les bénéficiaires non agricoles des paiements laitiers sont souvent organisés de façon à pouvoir assumer des fonctions multiples et reçoivent dès lors des paiements laitiers de nature différente. Il en est ainsi d'une exploitation qui produit et exporte du fromage. La perspective du bénéficiaire a permis d'identifier dix grandes entreprises qui reçoivent 80 % de tous les paiements (343,9 millions de francs) octroyés au titre de la valorisation du lait, tandis que 409 entreprises se partagent les 20 % restant (84,5 millions de francs). On constate donc une concentration élevée dans cette branche. Sur la base de cette observation, l'OPCA a relevé que, parmi les 409 entreprises, de nombreux bénéficiaires reçoivent de petits, voire de très petits versements17.

Dans le domaine des contributions en faveur de l'amélioration des structures: La multiplicité des objectifs poursuivis par la politique agricole à travers ces contributions et la diversité des bénéficiaires confèrent à la perspective du bénéficiaire une importance variable. Sur la base des données à disposition, l'OPCA n'a pu procéder qu'à une répartition rudimentaire des bénéficiaires. L'établissement de catégories distinctes n'exclut pas qu'un bénéficiaire puisse figurer dans plusieurs catégories à la fois. En particulier, la catégorie des exploitations agricoles et celle des communautés obligatoires se recoupent. Les premiers bénéficiaires des aides non remboursables en faveur de l'amélioration des structures sont les communautés obligatoires avec 48,7 % du montant total des contributions (73,5 millions de francs), soit 35,8 millions de francs; suivie des exploitations agricoles avec 30,4 % (22,4 millions de francs) et des communes municipales avec 14,2 % (10,4 millions de francs). Les corporations, les sociétés simples, les communes bourgeoises et les autres bénéficiaires se partagent les 6,7 % restants (4,9 millions de francs).

2.3

Structures des données

Principalement axée sur les types de paiement, la perspective de l'OFAG se reflète dans son organisation. Les domaines de paiements sont administrés par divers services, ce qui entraîne une mise à disposition décentralisée des données au sein de l'OFAG. Comme le démontre le rapport de l'OPCA, l'organisation des flux financiers est complexe et implique des services fédéraux, cantonaux et communaux ainsi que des organismes d'exécution privés. De fait, la collecte d'informations détaillées sur un bénéficiaire est d'autant plus difficile.

16 17

740

Les résultats figurent au chap. 6.3 du rapport final de l'OPCA.

116 entreprises ont reçu entre 1000 et 10 000 francs. 72 entreprises touchent moins de 1000 francs.

L'OPCA a relevé que les données saisies lors du versement des paiements de l'Etat sont, en raison du nombre important de services impliqués, sauvegardées dans des systèmes informatiques différents et partiellement incompatibles. Rien qu'au niveau de la Confédération quatre systèmes spécifiques sont appliqués (SIPA pour les paiements directs, MAPIS pour les contributions en faveur de l'amélioration des structures et deux autres systèmes pour la gestion des contingents laitiers et les mesures de soutien du prix du lait).

Dans chaque système le bénéficiaire est saisi uniquement en fonction des caractéristiques spécifiques du paiement. Ces informations sont, dans la plupart des cas, insuffisantes pour une description globale des bénéficiaires dans tous les domaines.

De plus, comme mentionné précédemment, l'OFAG ne possède pas dans tous les cas, dans le domaine des paiements directs, toutes les données nécessaires à l'examen définitif de la légitimité des versements effectués dans les cas flous18. Les informations relatives aux exploitations à titre principal ou accessoire et à la structure de production d'une exploitation sont certes sans importance pour l'exécution, mais elles sont par contre importantes pour l'évaluation de la politique agricole.

Pourtant, ces dernières ne sont en partie accessibles qu'auprès de l'OFS et se fondent sur un relevé datant de 1996. Pour 3,6 % des exploitations, il n'a pas été possible, dans le cadre de l'analyse, de déterminer s'il s'agissait d'exploitations à titre principal ou accessoire. Pour 2,3 % des exploitations, la structure de production n'est pas connue.

Réunir les informations concernant un bénéficiaire déterminé à partir des différents systèmes nécessite un élément d'identification commun à tous les systèmes et propre à chaque entreprise. Cet élément existe sous la forme du numéro REE (numéro du registre des entreprises et des établissements). Lorsque l'OPCA a agrégé pour la première fois les informations décentralisées au moyen de ce numéro REE, force lui a été de constater que, dans la pratique, la numérotation n'est pas appliquée de manière uniforme et n'est utilisée que de manière lacunaire. Ainsi les cantons utilisent leur propre système d'identification. Dans le domaine des contributions en faveur de l'amélioration des structures, la numérotation
n'est pas du tout employée.

L'OPCA s'est donc vue obligée de baser son analyse dans ce domaine sur les codes de maître d'oeuvre appliqués par l'OFAG, qui ne permettent cependant aucune identification exacte des bénéficiaires19. S'agissant des suppléments versés pour le lait transformé en fromage et pour le non-ensilage, le bénéficiaire final ne peut être identifié lorsque les entreprises de valorisation se revendent le lait entre elles. Dans le domaine des paiements directs aux communautés d'exploitation, la situation s'est certes améliorée, mais certains cantons répartissent encore les paiements par exploitation membre de la communauté et non par communauté d'exploitation en tant qu'entité, comme prévu par l'OFAG.

Par conséquent, l'OPCA a dû établir sa propre base de données pour regrouper et analyser les informations. Sans celle-ci, l'analyse systématique des données dans la perspective du bénéficiaire n'aurait pas été possible.

18 19

Voir chap. 2.2.2.

Pour obtenir les données concernant les aides aux investissements, il a fallu que l'Office fédéral de l'informatique et de la télécommunication (OFIT) rende ces données techniquement accessibles.

741

3

Appréciation et conclusion de la Commission de gestion

3.1

Importance de la perspective du bénéficiaire

La Commission de gestion du Conseil des Etats a été confortée par l'analyse de l'OPCA dans sa vision initiale selon laquelle la perspective du bénéficiaire revêt une importance considérable dans l'évaluation des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture. Ces paiements remplissent des fonctions d'incitation spécifiques qui servent les objectifs multiples de la politique agricole et, en partie, également d'autres objectifs d'intérêt collectif. Par ailleurs, ils ont aussi un effet de revenu pour les agriculteurs exploitant le sol. De la même façon, les paiements versés aux bénéficiaires non agricoles et aux organismes d'exécution privés poursuivent des objectifs de politique agricole. Ce réseau où se mêlent objectifs, mesures et acteurs les plus divers dans un environnement dynamique est, dans la pratique, d'une complexité extrême. L'établissement d'un lien de causalité entre les paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture et les développements dans ce secteur est difficile. La Commission de gestion est cependant convaincue que l'analyse des effets des paiements de l'Etat dans la perspective du bénéficiaire peut apporter une contribution essentielle à l'éclaircissement de cette question, en complément aux critères d'analyse appliqués jusqu'à présent par l'OFAG20.

3.2

Appréciation matérielle

Il n'y a pas lieu, sur le plan juridique, de critiquer l'organisation des demandes et de leur examen ni celle du versement des paiements. Cependant dans la recherche de gains d'efficacité et de transparence, la question se pose de savoir si ces procédures ne pourraient pas être simplifiées dans le cadre des principes d'exécution propres au fédéralisme et du principe de subsidiarité.

Recommandation 1 La Commission de gestion invite le Conseil fédéral à analyser les procédures de demande, d'examen des demandes et de versement des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture dans la perspective de leur éventuelle simplification, concentration et optimisation.

La Commission de gestion relève que la majeure partie des paiements de l'Etat vont aux bénéficiaires prévus par la loi. 4/5 des paiements de l'Etat analysés sont versés aux exploitations agricoles. Les organismes d'exécution privés reçoivent moins de 1 % des versements de l'Etat.

Les résultats du rapport final de l'OPCA relatifs aux caractéristiques structurelles des exploitations agricoles subventionnées sont difficiles à interpréter en raison du manque d'autres prélèvements dans le temps. Il faudrait en effet mener cette analyse sur plusieurs années pour pouvoir se prononcer avec plus de certitude sur l'effet des paiements étatiques étudiés. Or les résultats en question ne portent que sur un an.

Par ailleurs, les questions à examiner devraient être affinées par des agronomes et 20

742

La Constitution fédérale et la LAgr ne prévoient pas explicitement ce critère d'évaluation.

les résultats approfondis à la lumière de ce cadre plus détaillé21. A partir de ces premières analyses ponctuelles des caractéristiques structurelles subventionnées, aucun indice n'a été trouvé qui entrerait en contradiction avec la politique agricole de la Confédération. En outre, en tant qu'hypothèse, ces résultats laissent à penser que les incitations financières exercées à travers les paiements de l'Etat pourraient, en raison de la multifonctionnalité de la politique agricole, être partiellement contradictoires. Cette question sera plus amplement développée au ch. 3.4.

3.3

Contrôle d'exécution

Même si l'administration des paiements de l'Etat est organisée de façon décentralisée, et bien que les cantons jouent un rôle important lors de l'évaluation des demandes, du versement et particulièrement lors du contrôle de la légitimité du versement, l'OFAG doit pouvoir à tout moment, en tant qu'instance responsable, surveiller efficacement l'exécution des mesures de politique agricole22. Dans le système actuel, les cas inexplicables de paiements directs sont traités dans le cadre d'une procédure de correction des différences avec les cantons. A l'été 2000, l'OFAG n'avait pas encore trouvé d'explication pour les cas flous de l'année 1999 relevés lors de l'analyse de l'OPCA. Il est certes possible de suivre un cas concret, mais cette démarche prend du temps. Le système actuel n'est donc pas satisfaisant. L'OFAG devrait disposer de toutes les données nécessaires pour la surveillance de l'exécution de la loi et être en mesure de les analyser systématiquement23. Les bénéficiaires de paiements directs qui ne satisfont pas aux conditions générales de la loi et qui, grâce à des réglementations d'exception et à des dispositions transitoires, ont droit à la contribution, doivent être saisis de telle façon que leur légitimité puisse être vérifiée à tout moment. Les deux étapes devraient se dérouler dans un délai raisonnable pour pouvoir, le cas échéant, prendre rapidement les mesures nécessaires afin de rétablir la situation. Pour ce faire, il faut que les organisations d'exécution transmettent ces données à l'OFAG dans leur intégralité, dans les délais impartis et de manière uniforme. D'autre part, les procédures de l'OFAG doivent davantage tenir compte de l'aspect du contrôle de gestion et permettre un accès centralisé à ces données.

Recommandation 2 Le Conseil fédéral est invité à coordonner les systèmes informatiques utilisés en vue de l'exécution efficace des mesures de politique agricole. Il faut, d'une part, harmoniser les systèmes informatiques de la Confédération (au sein de l'OFAG et entre l'OFAG et l'OFS) et, d'autre part, uniformiser les structures des données avec les organes d'exécution. A cette fin, il faut créer, en coordination avec les cantons, un système commun d'identification des exploitations agricoles, qui sera appliqué pour toutes les prestations des pouvoirs publics.

21

22 23

Il serait ainsi intéressant de voir quelles caractéristiques structurelles présentent les exploitations bio classées majoritairement dans le tiers supérieur (voir Rapport final de l'OPCA, p. 51) et comment se répartissent les paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture auprès de ces exploitations. C'est dans la réponse à de telles questions que réside tout le potentiel de la base de données établie dans la perspective du bénéficiaire.

Voir art. 179 LAgr.

La base légale qui s'y rapporte se trouve à l'art. 185 LAgr.

743

Postulat 1 Le Conseil fédéral est invité à créer un système de données permettant à la Confédération de contrôler à tout moment les conditions et la légitimité des bénéficiaires des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture.

3.4

Analyse des effets

3.4.1

Généralités

Comme nous l'avons déjà mentionné, l'objectif initial de la présente enquête était également de constater les répercussions directes sur les bénéficiaires de ces versements afin de pouvoir vérifier si les paiements agricoles en question étaient en adéquation avec les objectifs pour lesquels ils avaient été conçus. Bien que cet objectif n'ait pas été atteint, on peut se livrer à une série de premières constations quant à l'importance d'une analyse de ce genre et quant aux conditions de son déroulement.

3.4.2

Changements de structures dans l'agriculture

Les exploitations agricoles connaissent depuis longtemps des changements profonds. L'évolution récente ­ mondialisation de l'économie et plus particulièrement l'ouverture des marchés, durcissement de la concurrence, évolution des comportements des consommateurs, augmentation des salaires dans certains secteurs de l'économie, etc. ­ est la cause première de cette mutation en profondeur. Sans compter que l'agriculture doit en même temps répondre aux demandes les plus diverses de la société. Dans ce contexte d'opposition entre les exigences du marché et l'accomplissement de tâches publiques, la mutation des exploitations agricoles revêt une importance particulière. La politique agricole de l'Etat vise, dans ce contexte de polarité, à influer sur les structures de l'agriculture, de sorte que les exploitations agricoles soient gérées de la façon la plus conforme au marché et organisées de manière optimale pour remplir les objectifs d'intérêt public. Ces entreprises doivent également dégager un revenu comparable à celui du reste de la population.

Les paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture sont un instrument permettant d'atteindre un ou plusieurs de ces objectifs. Il y a lieu dès lors d'effectuer une analyse plus pointue des effets des paiements de l'Etat sur la structure d'une exploitation agricole et de mesurer cet effet par rapport à leurs objectifs spécifiques et aux autres objectifs de la politique agricole. La transparence ainsi instaurée permettra d'évaluer les instruments mis en oeuvre et, le cas échéant, de les adapter et de réorganiser les priorités entre les divers objectifs poursuivis, qui peuvent être partiellement contradictoires. En particulier, l'analyse des effets dans la perspective du bénéficiaire devrait faciliter l'évaluation de la compétitivité des exploitations agricoles et, de fait, permettre de se prononcer sur la durabilité économique des paiements de l'Etat.

744

Recommandation 3 Le Conseil fédéral est invité à examiner les effets des prestations de l'Etat sur le développement des structures agricoles dans la perspective présentée ici et à s'exprimer à leur sujet. A cet égard, il y a lieu de comparer les paiements de l'Etat et leurs effets en fonction des divers objectifs.

Pour pouvoir effectuer cette analyse, encore faut-il s'accorder sur les caractéristiques structurelles d'une exploitation agricole. L'OFAG en a relevé plusieurs pour ses évaluations. Pourtant, sur la base des données obtenues par l'office, il semble que la distinction entre une exploitation à titre principal ou accessoire n'ait pas assez de poids. Par exemple, l'OFS ne relève cette donnée que tous les quatre ans. Or selon la CdG, il s'agit d'une caractéristique essentielle, surtout dans l'optique du revenu comparable visé par la politique agricole et, à long terme, pour garantir le professionnalisme de ce secteur24.

Recommandation 4 Le Conseil fédéral est invité à donner une définition ­ uniforme et identique à tous les offices fédéraux ­ d'une exploitation à titre principal ou accessoire et d'intégrer cette caractéristique dans les statistiques de l'agriculture.

3.4.3

Secteur du lait

L'incidence des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture sur le prix du lait est très complexe et peu transparente. Cette situation s'explique surtout par le fait que, jusqu'à présent, le prix du lait ne s'est jamais formé librement et que, partant, on ignore quel serait son niveau s'il était fixé selon la loi du marché. Sur la base des suppléments versés aux producteurs de lait et des aides versées à l'industrie transformatrice ou au commerce (acheteur) il existe déjà trois prix du lait. Le producteur encaisse le prix négocié avec l'acheteur, qui est formé plus ou moins librement, ainsi que le supplément de l'Etat. L'acheteur encaisse le prix du lait négocié avec le producteur de lait ainsi que les aides de l'Etat. Le producteur de lait cherche, avec les montants versés par l'acheteur et par l'Etat, à couvrir ses coûts de production et à atteindre un certain rendement. En même temps, l'acheteur tient compte de la subvention reçue par le producteur sous forme de supplément pour couvrir ses frais, ce qui peut résulter en une pression vers le bas exercée lors de la négociation du prix du lait. Les aides versées à l'acheteur ont pour objectif de réduire les coûts de transformation du lait et les coûts de vente et par ce biais de permettre à l'industrie transformatrice et au commerce de rentabiliser les ventes et, partant, de renforcer indirectement la demande de lait. Savoir comment ces suppléments et aides versés par l'Etat agissent sur le prix du lait convenu entre acheteur et producteur et quel effet ils produisent sur la formation du revenu des bénéficiaires dépend, d'un côté, des coûts de production des producteurs ainsi que des coûts de transformation et de vente de l'acheteur et, de l'autre, du poids des acteurs sur le marché. Ce système 24

Voir le message du 26 juin 1996 sur la réforme de la politique agricole: deuxième étape (Politique agricole 2002 ; FF 1996 IV 61 ss).

745

n'entraîne pas forcément un revenu équitable pour les producteurs de lait et des prix bas à la consommation. Etant donné que les paiements laitiers ne produisent les effets souhaités que dans certaines conditions, il y a lieu d'analyser leurs effets sur la formation des prix. Cela est d'autant plus nécessaire que l'OPCA a observé une concentration très élevée de bénéficiaires d'aides dans l'industrie transformatrice et dans le commerce. Il ne faut pas oublier qu'en raison des effets d'échelle, les paiements laitiers sous forme d'aides ont un effet différent selon la taille du bénéficiaire.

La concentration élevée soulève également des questions quant à la concurrence dans ces secteurs. Ces considérations ont amené la Commission de gestion à formuler les recommandations suivantes25: Recommandation 5 Le Conseil fédéral est invité à exposer, dans son rapport sur la politique agricole, dans quelle mesure les subventions liées aux produits laitiers influencent les prix du marché pour les producteurs et les prix à la consommation, et par là à mesurer l'effet des paiements laitiers par rapport aux objectifs qu'ils doivent servir.

Recommandation 6 Le Conseil fédéral est invité à examiner en permanence l'influence des aides de la Confédération dans le domaine laitier sur la structure du marché de l'industrie transformatrice et du commerce.

3.4.4

Contributions non remboursables en faveur de l'amélioration des bases

Les paiements analysés dans ce domaine se concentrent fortement sur les mesures collectives mais portent également sur des mesures individuelles. Ces dernières, tout comme les aides visant à soutenir les projets communs à plusieurs exploitations et ceux des grandes exploitations d'estivage, visent à améliorer les conditions de production en réduisant les coûts. Ces paiements ont également pour but d'augmenter la compétitivité des exploitations agricoles. Pour pouvoir déterminer l'effet de ces paiements, il faut suivre la structure des coûts et des bénéfices du ou des bénéficiaires à long terme, en tenant compte notamment des autres paiements de l'Etat versés aux mêmes bénéficiaires.

Outre ces objectifs de politique agricole, l'OPCA a identifié, s'agissant des autres aides versées pour les mesures collectives, la poursuite d'une multitude d'objectifs d'intérêt public tels que les prestations d'entretien ou la protection du patrimoine et du paysage. Comme ces objectifs peuvent être partiellement contradictoires, mais que les bases légales applicables en l'espèce n'établissent pas de priorités claires entre eux, il conviendrait d'instaurer au moins une certaine transparence quant à l'engagement des moyens.

25

746

Il faut relever que l'OFAG à reconnu qu'il était nécessaire de disposer de plus d'informations dans ce domaine et qu'il a confié un mandat de recherche à l'IAW (Institut pour l'économie agricole de l'EPFZ), chargeant cet institut d'étudier les effets des paiements laitiers au cours du temps.

Recommandation 7 Le Conseil fédéral est invité à décrire, dans son rapport sur la politique agricole, les intérêts publics servis concrètement par les aides aux investissements consenties (comme p. ex. les intérêts de la politique agricole, l'aménagement du territoire, l'écologie, l'entretien du paysage rural, etc.).

3.4.5

Bilan

L'analyse des effets des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture est une suite logique de la mise en oeuvre de ces instruments. Il s'agit même d'une tâche contraignante. Il n'est pas possible de gérer la politique des paiements agricoles d'une manière précise sans en connaître les effets concrets. Il y a lieu également de situer les effets d'un paiement dans une dimension temporelle, car bon nombre d'entre eux ne se limitent pas à un horizon à court terme. Aussi, l'analyse des effets doit-elle être poursuivie à long terme. La perspective du bénéficiaire offre, dans ce contexte, un complément aux analyses menées jusqu'à présent par l'OFAG. Cette perspective permet de faire apparaître les effets des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture produits sur un bénéficiaire déterminé ou sur une catégorie de bénéficiaires d'une année à l'autre et, si nécessaire, d'optimiser l'instrument de paiement compte tenu des objectifs de la politique agricole. Les changements de comportement d'un acteur ayant bénéficié de paiements pendant des années peuvent ainsi être analysés avec plus de précision. Ce travail s'inscrit dans le droit fil des analyses évoquées précédemment.

L'analyse continue des effets des paiements de l'Etat dans la perspective du bénéficiaire requiert une structure de données spécifique. D'abord le bénéficiaire doit être identifié avec précision et les éventuels changements reportés dans la base de données dans un délai raisonnable. Par ailleurs, les données relatives à la politique agricole doivent pouvoir être attribuées de manière certaine aux bénéficiaires. Il est également très important que la qualité des données soit constante. Les mesures d'exécution, surtout de type organisationnel, doivent être examinées sous cet angle avant leur mise en oeuvre.

La perspective du bénéficiaire n'a été considérée dans le présent projet que pour les principaux paiements de la Confédération en faveur de l'agriculture. Elle est cependant aussi très importante pour les paiements de l'Etat qui n'ont pas été analysés et devrait, à ce titre également, être utilisée pour les autres paiements, à condition que le temps à y consacrer soit raisonnable. Toutefois, mis en balance avec le montant total des paiements de la Confédération en faveur de l'agriculture, les ressources nécessaires à l'analyse de
la perspective du bénéficiaire semble pleinement justifiées.

Postulat 2 Le Conseil fédéral est invité à poursuivre l'analyse des flux financiers de la politique agricole dans la perspective des bénéficiaires afin de déterminer les effets des paiements de l'Etat en faveur de l'agriculture sur plusieurs années et de garantir la transparence. A cet égard, il y a lieu de comparer constamment les résultats avec les objectifs de la politique agricole.

747

Limiter l'analyse des effets des mesures en faveur de l'agriculture aux effets directs aurait une portée trop courte. Les effets indirects des paiements de l'Etat liés aux surfaces, par exemple sur les baux à ferme, les prix fonciers et l'évolution structurelle du secteur, peuvent avoir un impact considérable sur le secteur agricole. Il faudrait aussi connaître les incidences sur d'autres domaines (p. ex. sur l'environnement). Même l'absence d'effet sur un domaine extérieur au secteur agricole ­ au sens strict du terme ­ peut être significatif (p. ex. l'influence des paiements sur les prix à la consommation). Ces considérations amènent la Commission de gestion à formuler le postulat suivant: Postulat 3 Le Conseil fédéral est invité à analyser de façon régulière les effets indirects des mesures de politique agricole et de les évaluer par rapport aux objectifs de la politique agricole. Cette évaluation devrait également tenir compte de ces effets sur d'autres objectifs d'intérêt public. Les résultats devraient figurer dans le rapport sur l'agriculture suisse.

4

Conclusion

La Commission de gestion demande au Conseil fédéral de l'informer, d'ici à fin 2001, des démarches qu'il compte entreprendre sur la base du présent rapport et des mesures qu'il propose.

3 juillet 2001

Au nom de la Commission de gestion du Conseil des Etats La présidente de la commission: Helen Leumann, députée au Conseil des Etats Le président du groupe de travail: Peter Bieri, député au Conseil des Etats Le secrétaire du groupe de travail: Christoph Albrecht

748

Liste des abréviations CdG

Commission de gestion

CdG-E Commission de gestion du Conseil des Etats DFE

Département fédéral de l'économie

FAT

Station fédérale de recherches en économie et technologie agricoles de Tänikon

FF

Feuille fédérale

IAW

Institut d'économie rurale de l'EPFZ

LAgr

Loi fédérale sur l'agriculture

MAPIS Meliorationsamt-Projekte-Informationssystem OFAG

Office fédéral de l'agriculture

OFIT

Office fédéral de l'informatique et de la télécommunication

OFS

Office fédéral de la statistique

OPCA

Organe de contrôle parlementaire de l'administration

OPD

Ordonnance sur les paiements directs versés dans l'agriculture

OSL

Ordonnance concernant le prix-cible, les suppléments et les aides dans le domaine du lait

RS

Recueil systématique du droit fédéral

SIPA

Système d'information pour la politique agricole

UE

Union européenne

UMOS Unité de main d'oeuvre standard

749